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04/09/2024 | FRANCE | N°23/00618

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre commerciale, 04 septembre 2024, 23/00618


COUR D'APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale















ARRET N°



DU : 04 Septembre 2024



N° RG 23/00618 - N° Portalis DBVU-V-B7H-F7PM

VTD

Arrêt rendu le quatre Septembre deux mille vingt quatre



Sur APPEL d'une décision rendue le 09 mars 2023 par le Juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de RIOM (RG n° 11-22-233)



COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de ch

ambre

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

Madame Anne Céline BERGER, Conseiller



En présence de : Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, lors de l'appel des causes et Mme Christine VI...

COUR D'APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 04 Septembre 2024

N° RG 23/00618 - N° Portalis DBVU-V-B7H-F7PM

VTD

Arrêt rendu le quatre Septembre deux mille vingt quatre

Sur APPEL d'une décision rendue le 09 mars 2023 par le Juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de RIOM (RG n° 11-22-233)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

Madame Anne Céline BERGER, Conseiller

En présence de : Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, lors de l'appel des causes et Mme Christine VIAL, Greffier, lors du prononcé

ENTRE :

M. [N] [S]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentant : Me Christine BAUDON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANT

ET :

La SOCIETE GENERALE

SA immatriculée au RCS de Paris sous le n° 552 120 222

[Adresse 2]

[Localité 5]

Non représentée, assignée à personne morale (personne habilitée) en son établissement secondaire sis agence Galaxie, [Adresse 4]

INTIMÉE

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, à l'audience publique du 23 Mai 2024, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame THEUIL-DIF, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 04 Septembre 2024 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. [N] [S] était titulaire d'un compte de dépôt ouvert à la Société Générale.

Par courriers des 2 août 2017, 2 février 2018 et 27 juillet 2018, la banque a alerté M. [S] de la position débitrice de son compte et l'a enjoint de régulariser la situation.

Par courrier du 9 octobre 2018, la Société Générale a indiqué à M. [S] qu'au 9 décembre 2018, le compte serait clôturé.

Le 17 décembre 2018, elle a informé l'intéressé de la clôture effective du compte et a précisé qu'un solde débiteur avant clôture de 1 226,21 euros serait recouvré par sa filiale Franfinance.

Par courrier du 17 décembre 2018, la banque a informé M. [S] qu'à défaut de règlement du solde débiteur dans le délai de 30 jours, son inscription au Fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) serait réalisée.

Par courrier du 22 janvier 2019, elle a informé M. [S] de son inscription effective.

Par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) du 7 septembre 2022, M. [S] par l'intermédiaire de son conseil, a mis en demeure la Société Générale de faire procéder à sa radiation du FICP.

Par LRAR du 7 octobre 2022, M. [S] a transmis à la banque un chèque de 1 226,21 euros et a sollicité à nouveau la radiation de son inscription au FICP.

Par acte du 7 décembre 2022, M. [S] a fait assigner la Société Générale devant le juge des contentieux de la protection (JCP) du tribunal de proximité de Riom, aux fins de voir constater la prescription de la dette et condamner la banque à :

- procéder à sa radiation du FICP sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision ;

- lui payer les sommes de 1 226,21 euros en remboursement de la somme réglée indûment et de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

A l'audience du 5 janvier 2023, M. [S] s'est désisté de sa demande aux fins de radiation du FICP, produisant un document à l'entête de la Banque de France daté du 3 janvier 2023, indiquant qu'il n'était plus répertorié dans le FCC et le FICP. Il a maintenu ses autres demandes.

Par jugement du 9 mars 2023, le JCP a débouté M. [S] de l'intégralité de ses demandes, et l'a condamné aux dépens.

Le juge a énoncé que s'il était admis que le débiteur qui avait payé une dette prescrite parce qu'il ignorait que la prescription était acquise, ne pouvait pas exercer l'action en répétition de l'indu, il était constant qu'une dette prescrite laissait subsister une obligation naturelle à la charge du débiteur ; que le paiement volontaire d'une dette prescrite ne pouvait être répété.

Il a considéré que M. [S] avait volontairement réglé une dette qu'il savait prescrite et qu'il ne pouvait être fondé à en réclamer le remboursement.

M. [N] [S] a relevé appel de ce jugement le 11 avril 2023.

Aux termes de ses conclusions déposées le 16 juin 2023, l' appelant demande à la cour, au visa des articles L.218-2 du code de la consommation et 1302 du code civil, de :

- infirmer le jugement ;

- statuant à nouveau :

- condamner la Société Générale à lui payer et porter les sommes suivantes :

1 226,21 euros en remboursement de la somme réglée indûment ;

5 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice ;

3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens, dont distraction au profit de Me Christine Baudon.

Il fait valoir en premier lieu que la créance réclamée par la Société Générale au titre du découvert en compte bancaire est prescrite depuis 2020, aucun acte n'étant venu interrompre la prescription de l'article L.218-2 du code de la consommation ; qu'en revanche, le JCP a procédé à une analyse erronée sur les conséquences de cette prescription quant à la répétition de l'indu qu'il sollicitait, en se fondant sur l'obligation naturelle lui incombant.

Il rappelle qu'il a écrit à la Société Générale pour lui demander de stopper les prélèvements effectués sur son compte et surtout, le courrier de son conseil du 7 octobre 2022 était dépourvu d'ambiguïté sur le fait qu'il contestait la créance, mais que devant l'inertie de cette dernière, il était contraint de régler cette somme afin d'obtenir la mainlevée du fichage FICP. Il n'a pas eu la volonté d'accomplir un devoir moral.

Il ajoute qu'après avoir réglé le solde débiteur du compte, le chèque ayant été encaissé le 14 octobre 2022, la radiation de l'inscription sur le FICP n'a eu lieu qu'en janvier 2023, en cours d'instance ; que son projet immobilier s'est trouvé naturellement reporté, ce qui lui a causé un préjudice réel lié à l'augmentation des taux d'intérêts.

La SA Société Générale à qui la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées le 19 juin 2023 (à étude), n'a pas constitué avocat.

Il sera renvoyé pour l'exposé complet des demandes et moyens de l'appelant, à ses dernières conclusions.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 avril 2024.

MOTIFS

- Aux termes de l'article 1302 du code civil, tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution.

La restitution n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées.

Si la prescription a pour effet soit d'éteindre une dette, soit de procurer au débiteur la preuve de sa libération, elle ne saurait cependant anéantir le paiement régulièrement effectué, notamment avant toute poursuite du créancier, d'une dette existante, rendre celle-ci rétroactivement sans cause, et ouvrir l'action en répétition de l'indu.

Toutefois, la répétition du paiement d'une dette prescrite est ouverte à celui qui justifie avoir payé sous l'emprise d'une pression exercée par le créancier Cass. Com. 22 novembre 1991, pourvoi n°89-20.328).

En l'espèce, M. [N] [S] était détenteur au sein de la Société Générale d'un compte n°[XXXXXXXXXX01] dont le solde était débiteur au 2 août 2017 à hauteur de - 628,43 euros, tel que cela résulte d'un courrier de la Société Générale adressé à l'intéressé versé en pièce n°1.

Dans un courrier en date du 2 février 2018, la Société Générale a rappelé à M. [S] que son compte fonctionnait en position débitrice depuis le 17 mars 2017 et qu'il présentait au jour du courrier un solde de - 875,39 euros. Il lui était demandé de régulariser la situation.

Un nouveau rappel était effectué le 27 juillet 2018, le solde était alors de - 1 028,21 euros.

Le 9 octobre 2018, la banque a indiqué à M. [S] qu'elle entendait mettre fin à la relation de compte, que celle-ci prendrait fin dans un délai de soixante jours, soit le 9 décembre 2018, date à laquelle le compte serait clôturé.

Le compte était en effet clôturé à cette date, et M. [S] était mis en demeure de régler une somme de 1 226,21 euros par courrier du 17 décembre 2018. A cette même date, il était informé qu'à défaut de régularisation de sa situation dans un délai de 30 jours, il serait inscrit au FICP pour une durée de cinq ans ; qu'il aurait néanmoins la possibilité de régulariser sa situation à tout moment en procédant au remboursement des sommes dues. Il était effectivement fiché à partir du 22 janvier 2019.

Le conseil de M. [S] a écrit à la Société Générale le 7 septembre 2022 afin de la mettre en demeure de procéder à la radiation de l'incident sous un délai de 15 jours, faisant valoir que la créance réclamée au titre du découvert en compte bancaire était prescrite. Il ajoutait que la somme correspondant au solde débiteur était constituée de frais divers bénéficiant exclusivement à la banque, que la créance était formellement contestée, M. [S] ayant demandé en 2017 d'arrêter tout prélèvement sur le compte bancaire.

Puis, le 7 octobre 2022, le conseil de M. [S] a de nouveau écrit à la Société Générale afin de constater qu'aucune réponse n'avait été donnée à son courrier, outre que la mainlevée de l'inscription n'avait pas été donnée. Il était ensuite exposé que 'afin d'en terminer avec vos atermoiements et obtenir rapidement la mainlevée du fichage, je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint un chèque de 1 226,21 euros correspondant aux sommes réclamées. Bien évidemment, M. [N] [S] se réserve la possibilité de saisir la juridiction compétente de cette difficulté puisqu'il est contraint de régler une somme qui n'est pas due afin que vous fassiez diligence dans les plus brefs délais. Par suite, vous voudrez bien procéder à la radiation de l'incident, sous un délai de quinze jours.'.

Il est établi que le chèque de 1 226,21 euros a été encaissé le 14 octobre 2022.

Au surplus, M. [S] rappelle que lors de l'audience de plaidoiries devant le JCP, il s'est désisté de sa demande de mainlevée du fichage, celle-ci étant intervenue quelques jours avant l'audience.

Ainsi que l'a relevé le JCP, la créance de la Société Générale à l'encontre de M. [N] [S] résultant du solde débiteur du compte bancaire était prescrite au moment où ce dernier a procédé au paiement en octobre 2022. Toutefois, ce paiement a été réalisé dans le seul but d'obtenir la mainlevée de son inscription au FICP, M. [S] contestant formellement devoir la somme de 1 226,21 euros au titre du solde débiteur en raison de la prescription, mais également sur le fond (dette composée uniquement de frais et demande d'arrêt des prélèvements en 2017).

Il ne peut donc être considéré que M. [S] a exécuté une obligation naturelle, il n'a procédé au règlement que dans le but d'obtenir la mainlevée du fichage, n'ayant pas réussi à avoir gain de cause autrement que par ce paiement 'forcé'.

Dans ces circonstances, il sera fait droit à sa demande de restitution de la somme de 1 226,21 euros en remboursement de la somme réglée indûment.

- Il sera toutefois débouté de sa demande de dommages et intérêts visant à indemniser le préjudice résultant de la perte de chance de voir réaliser son projet immobilier entre le 9 novembre 2022 et le 5 janvier 2023, les taux d'intérêts ayant selon lui augmenté à plus de 3 % au cours de cette période.

Il n'est en effet versé aucune pièce à l'appui de ses allégations quant au projet de prêt immobilier.

- Succombant principalement à l'instance, la Société Générale sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à verser à M. [S] une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La distraction des dépens sera ordonnée au profit de Me Christine Baudon, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt réputé contradictoire, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction,

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par M. [N] [S] ;

Infirme le surplus des dispositions du jugement ;

Statuant à nouveau :

Condamne la Société Générale à payer à M. [N] [S] la somme de 1 226,21 euros en remboursement de la somme réglée indûment ;

Condamne la Société Générale à payer à M. [N] [S] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la Société Générale aux dépens de première instance et d'appel ;

Ordonne la distraction des dépens au profit de Me Christine Baudon.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 23/00618
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;23.00618 ?
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