COUR D'APPEL
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET N°163
DU : 27 Mars 2024
N° RG 23/00010 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F53E
FK
Arrêt rendu le vingt sept Mars deux mille vingt quatre
décision dont appel : Jugement Au fond, origine tribunal de Commerce de CLERMONT-FD, décision attaquée en date du 10 Novembre 2022, enregistrée sous le n°2018 006192 et 2019 000905
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre
Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller
M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire
En présence de : Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, lors de l'appel des causes et du prononcé
ENTRE :
S.A. GENERALI IARD
inscrite au RCS de Paris sous le numéro 552 062 663
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représentants : Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND et Me Jean-marc ZANATI de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
APPELANT
ET :
M. [C] [R]
venant aux droits de M. [A] [R]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
et
Melle [O] [R]
venant aux droits de M. [A] [R]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
et
Mme [W] [R]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
et
S.A.R.L. VBP ET FILS ENERGIE
immatriculée au RCS d'Aurillac sous le numéro 532 108 149
[Adresse 3]
[Adresse 3]
et
GROUPAMA D'OC
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentants : Me Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND et Me Jean antoine MOINS de la SCP MOINS, avocat au barreau d'AURILLAC
Me Van Oeijen RAML (Ordonnance de désistement à son égard en date du 25 mai 2023)
ès-qualités de liquidateur de la société ALRACK BV ayant son siège [Adresse 15] PAYS-BAS
[Adresse 12]
[Adresse 12] PAYS-BAS
Me [L] [Y] (Ordonnance de désistement à son égard en date du 25 mai 2023)
ès-qualités de curator des sociétés SCHEUTEN SOLAR HOLDINGS BV et sa filiale SCHEUTEN SOLAR SYSTEMS BV
[Adresse 10]
[Adresse 10] PAYS-BAS
S.E.L.A.F.A. MJA (Ordonnance de désistement à son égard en date du 25 mai 2023)
prise en la personne de Me [E] [V], ès-qualités de mandataire liquidateur de la SAS SCHEUTEN SOLAR FRANCE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
S.A. AIG EUROPE
venant aux droits de la société AIG EUROPE LIMITED venant elle-même dans les droits de la société AIG EUROPE (NETHERLANDS) NV, société de droit étranger
prise en sa succursale néerlandaise sise à [Adresse 13] PAYS BAS
[Adresse 7]
[Adresse 7]
Représentants: Me Sophie GIRAUD de la SCP GIRAUD-NURY, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND et Me Florent SCHAPIRA de la SELARL ADRIEN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
Société ALLIANZ BENELUX NV (anciennement la société de droit néerlandais ALLIANZ NEDERLAND CORPORATE N.V)
prise en sa succursale néerlandaise située
[Adresse 9]
[Adresse 9] PAYS-BAS
Représentants : Me Barbara GUTTON PERRIN de la SELARL LX RIOM-CLERMONT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND et Me Marinka SCHILLINGS de la SELARL AMSTEL & SEINE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
S.A.R.L. FREE POWER
immatriculée sous le numéro 509 378 519 du registre du commerce et des sociétés de Clermont-ferrand,
[Adresse 5]
[Adresse 5]
et
S.E.L.A.R.L. [I],
ès-qualités d'ancien d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la Société FREE POWER,
[Adresse 8]
[Adresse 8]
et
Maître [P] [G], ès-qualités d'ancien mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la Société FREE POWER
[Adresse 6]
[Adresse 6]
Représentant : Me Jérôme LANGLAIS de la SCP LANGLAIS BRUSTEL LEDOUX & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMÉS
DEBATS : A l'audience publique du 07 Février 2024 Monsieur KHEITMI a fait le rapport oral de l'affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 785 du CPC. La Cour a mis l'affaire en délibéré au 27 Mars 2024.
ARRET :
Prononcé publiquement le 27 Mars 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé des faits et de la procédure :
Suivant un acte sous seing privé du 18 mai 2011, la SARL VBP & Fils (ci-après : la SARL VBP) a confié à la SARL Free Power la réalisation et l'installation d'une centrale de production d'électricité photovoltaïque sur un bâtiment agricole situé à [Localité 11], commune de [Localité 14], pour un coût de 862 257,36 euros.
Les travaux ont été réalisés, avec la pose de panneaux ou modules photovoltaïques de marque Scheuten, et ils ont fait l'objet d'un procès-verbal de réception sans réserve, le 10 avril 2012.
Au cours du mois de mai 2013, la SARL VBP a constaté des pannes des modules par échauffement et destruction des boîtes de jonction, et même un départ de feu le 26 mai 2013, avec des flammes et un dégagement de fumée.
La SARL VBP a obtenu, du juge des référés du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, le prononcé d'une mesure d'expertise suivant ordonnance du 23 août 2013, prononcée au contradictoire de la SARL Free Power et de son assureur la SA Generali IARD (la SA Generali).
À la demande de la SA Generali, les opérations d'expertise ont été étendues aux sociétés Scheuten Solar fabricantes des modules, à leur assureur AIG Europe Limited, à la société Alrack BV (fabricante des boîtiers de connexion), et à l'assureur de celle-ci la société Allianz Nederland Corporate (ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, 18 juin 2014).
Le 12 décembre 2013, la société Free Power avait été placée sous sauvegarde de justice ; la procédure d'expertise a été étendue aux organes de la procédure de sauvegarde, suivant une nouvelle ordonnance du 23 septembre 2014.
Faute pour la SARL VBP d'avoir versé un complément de consignation mis à sa charge, l'expert judiciaire, M. [F] [N], a déposé en l'état son rapport (intitulé « note de clôture »), en date du 21 novembre 2014.
Suivant actes d'huissier des 1er et 2 décembre 2015, la SARL VBP, ses co-gérants M. [A] [R] et Mme [W] [Z] épouse [R], et l'assureur de la SARL VBP la société Groupama d'Oc, ont fait assigner devant le tribunal de commerce d'Aurillac la SARL Free Power, Me [P] [G], la SELARL [I] ainsi que la SA Generali, pour obtenir réparation de leurs préjudices.
Le tribunal de commerce d'Aurillac s'est déclaré incompétent le 13 février 2018, et a renvoyé l'affaire et les parties devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand.
Suivant d'autres actes introductifs d'instance délivrés les 7 et 8 novembre 2018, la SA Generali a fait assigner en garantie, devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, les sociétés Scheuten Solar Holding BV, Scheuten Solar Systems BV, Scheuten Solar France prise en la personne de son mandataire liquidateur Me [V], AIG Europe Limited, Alrack BV, le liquidateur de celle-ci M. [H] [U], M. [L] [Y] ès qualité de curator de Scheuten Solar Holding BV, et la société Allianz Benelux assureur de la société Alrack BV.
M. [A] [R] est décédé le 24 février 2019, l'instance qu'il avait engagée a été reprise par son épouse et par ses enfants, M. [C] [R] et Mme [O] [R].
Le tribunal de commerce a prononcé le 21 octobre 2021 la jonction de l'instance initiale, ouverte par l'action de la SARL VBP, des consorts [R] et de la société Groupama d'Oc, à l'instance en garantie engagée par la SA Generali.
Suivant jugement réputé contradictoire du 10 novembre 2022, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a statué dans les termes suivants :
- dit la SARL VBP, Mme [W] [R], M. [C] [R] et Mme [O] [R] venant aux droits de M. [A] [R], et la société Groupama d'Oc recevables en leur action ;
- dit que la SARL Free Power a engagé sa responsabilité de plein droit sur le fondement de la garantie décennale ;
- fixe au passif de la SARL Free Power, à titre chirographaire, les créances de la SARL VBP à la somme totale de 281 444,76 euros à titre principal, et à la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne la SA Generali à garantir la SARL Free Power, et à payer à la SARL VBP la somme de 281 444,76 euros, et à la société Groupama d'Oc celle de 8 380,17 euros, l'ensemble avec intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2015, et avec capitalisation à compter de cette date ; condamné la SA Generali à payer à la SARL VBP une somme de 3 000 euros, par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- enjoint à la SARL Free Power de reprendre ou de faire reprendre à ses frais avancés les panneaux photovoltaïques défectueux, dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement, à peine d'astreinte de 50 euros par jour de retard dans la limite de 60 jours ;
- condamne la SA Generali à prendre à sa charge les coûts de reprise et de recyclage ou de destruction des panneaux ;
- déboute les consorts [R] de leurs demandes de dommages et intérêts pour préjudice moral et perte de temps ;
- reçoit la société AIG Europe en son intervention volontaire, en lieu et place de la société AIG Europe Limited prise en sa succursale néerlandaise ;
- dit la SA Generali irrecevable en son action, prescrite, à l'encontre des sociétés AIG Europe et Allianz Benelux NV ;
- déboute les parties du surplus des demandes ;
- condamne solidairement la SA Generali aux dépens.
Par déclaration reçue le 30 décembre 2022, la SA Generali a interjeté appel des dispositions du jugement lui faisant grief, appel formé à l'égard des parties représentées ou assignées devant le tribunal, sauf les sociétés Scheuten et Alrack BV. Elle a ensuite fait assigner devant la cour, le 24 février 2023, la SELAFA MJA, en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Scheuten Solar France. La SA Generali s'est finalement désistée de son recours contre le SELAFA MJA, et contre MM. [H] [U] et [L] [Y] ès-qualités, désistement constaté par une ordonnance du magistrat chargé de la mise en état, le 25 mai 2023.
Moyens et prétentions des parties :
La SA Generali demande à la cour d'infirmer le jugement, en ce qu'il l'a déclarée tenue de garantir les préjudices immatériels en cause, au titre de la garantie immatérielle de la responsabilité civile après livraison, figurant dans le contrat d'assurance souscrit par la SARL Free Power. Elle fait valoir que cette garantie ne couvre que les préjudices immatériels relevant de la responsabilité de droit commun, alors que la responsabilité de son assurée n'est engagée qu'au titre de la garantie décennale, et des dommages immatériels consécutifs à des désordres relevant de cette garantie.
Elle conteste les demandes de la SARL VBP et des consorts [R], en invoquant une clause du contrat d'assurance qui prévoit un plafond de garantie de 100 000 euros par sinistre, pour les dommages immatériels relevant de la responsabilité décennale : elle précise que, selon une autre stipulation du contrat, les réclamations qui concernent des dommages provenant d'une même cause technique initiale, même s'ils surviennent sur des édifices distincts, constituent un seul sinistre (litige sériel), et que le plafond de garantie est déjà épuisé dans le cas des panneaux de marque Scheuten, à la suite de condamnations prononcées contre elle dans des litiges similaires. La SA Generali invoque en outre une franchise insérée dans le contrat, fixée à 20 % des dommages, dans la limite d'un minimum de 750 euros et d'un maximum de 12 000 euros.
À titre subsidiaire, pour le cas où la cour considérerait que sa garantie relève non pas de la responsabilité décennale mais de la responsabilité civile après livraison, la SA Generali se prévaut d'une clause similaire applicable à cette garantie, instituant un plafond d'indemnisation pour les litiges sériels, épuisé lui aussi dans le cas particulier. Plus subsidiairement, elle conteste le montant des sommes allouées par le tribunal à la SARL VBP au titre du préjudice d'exploitation et des frais financiers, et critique les demandes faites par les consorts [R] au titre du préjudice moral. Elle conteste encore la condamnation à garantir le coût de reprise et de recyclage ou de destruction des panneaux, exposant qu'en sa qualité d'assureur elle ne peut être tenue que de verser une indemnité, et non d'exécuter une obligation de faire, et que les frais d'enlèvement des panneaux ne relèvent pas des garanties prévues au contrat, la SARL VBP restant d'ailleurs propriétaire des panneaux défectueux. Elle conteste d'autre part l'action de la société Groupama d'Oc, au motif que celle-ci ne justifie pas d'une subrogation régulière donnée par la SARL VBP.
La SA Generali demande aussi la réformation du jugement, en ce qu'il a rejeté ses recours contre les sociétés AIG Europe et Allianz Benelux NV, au motif de la prescription : elle fait valoir que le délai de prescription applicable est soit celui de trois ans prévu à l'article 1245-16 du code civil, relatif à l'action en garantie pour produits défectueux, soit celui de deux ans de l'article 1648 du même code (garantie des vices cachés), ou soit le délai de droit commun de cinq ans de l'article 2224 du code civil, et qu'elle a interrompu la prescription en faisant assigner les sociétés Scheuten et Alrack le 6 mai 2014. Elle expose sur le fond que la responsabilité de ces deux sociétés est engagée solidairement, en premier chef au titre de la garantie des produits défectueux qu'elles ont livrés : les sinistres proviennent d'un échauffement anormal des boîtiers de jonctions de marque Solexus, fabriqués par la société Alrack et installés sur les panneaux par la société Scheuten fabricante des panneaux.
La SA Generali conteste d'autre part l'application des conditions et limitations de garantie opposées par les assureurs des sociétés responsables. Elle invoque l'article L. 112-2 du code des assurances par l'effet duquel, pour être opposables à l'assuré ou aux tiers, les conditions de la garantie souscrite doivent avoir été portées à la connaissance de l'assuré au moment de l'adhésion ou antérieurement au sinistre, et elle expose que les sociétés AIG Europe et Allianz Benelux ne rapportent pas la preuve d'une telle information, donnée en temps voulu à leur assuré respectif. Elle soulève à titre subsidiaire l'inopposabilité de ces mêmes conditions et limitations, au motif de leur absence de caractère apparent, formel et limité. Plus subsidiairement, si la cour devait appliquer le plafond de garantie figurant dans la police AIG Europe, la SA Generali demande que ce plafond de 25 000 000 euros s'applique pour chaque événement comme prévu au contrat.
La SARL VBP, Mme [W] [R], M. [C] [R], Mme [O] [R] et la société Groupama d'Oc concluent à la confirmation du jugement, sauf en ce qu'il a rejeté ou limité certaines de leurs demandes indemnitaires, demandes qu'ils reprennent devant la cour. Ils soutiennent que les désordres relèvent de la garantie décennale comme l'a prononcé le tribunal, que la SA Generali n'a d'ailleurs pas contesté cette garantie incombant à son assurée la SARL Free Power, et que leurs préjudices comprennent des frais de remplacement ponctuels de certains panneaux tombés en panne (21 229,81 euros), des frais financiers résultant d'un emprunt qu'ils ont dû souscrire pour faire remplacer l'ensemble des panneaux (48 199,64 euros), une perte de production (32 000 euros), et un préjudice moral pour les consorts [R] (20 000 euros). Formant appel incident, ils demandent à la cour de condamner la SA Generali à leur payer ces sommes.
Ils soulignent que la SA Generali est tenue, selon le contrat conclu entre elle et la SARL Free Power, de prendre en charge les dommages immatériels consécutifs à des dommages matériels garantis ; et ils contestent le plafond de garantie que la SA Generali prétend voir appliquer de manière globale à l'ensemble des sinistres causés par les panneaux de marque Scheuten.
La SARL Free Power conclut à la réformation du jugement, en ce qu'il a fixé au passif de sa procédure de sauvegarde la somme principale de 281 444,76 euros et la somme accessoire de 3 000 euros, et en ce qu'il lui a enjoint de reprendre ou de faire reprendre les panneaux défectueux : elle expose que la SARL VBP et les consorts [R] ont renoncé en novembre 2022 à faire inscrire leurs créances, vu l'obligation de garantie retenue par le tribunal à l'encontre de la SA Generali, et que le juge commissaire leur a donné acte de cette renonciation, dans une ordonnance du 13 décembre 2022. Elle conclut encore à la réformation du jugement en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes formées contre les sociétés AIG Europe et Allianz Benelux NV, et à sa confirmation pour ses autres dispositions.
Me [J] [I] et [P] [G] déclarent qu'ils n'exercent plus les fonctions d'administrateur de la SARL Free Power, de commissaire à l'exécution du plan de cette société, et mandataire judiciaire à l'exécution du plan : leurs missions respectives ont pris fin.
La société AIG Europe conclut en premier chef à la confirmation du jugement, en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de la SA Generali. À titre subsidiaire, elle conclut au débouté de cette société, aux motifs que la responsabilité de son assurée la société Scheuten n'est encourue ni sur le fondement de la garantie des vices cachés (article 1641 du code civil), faute de contrat de vente entre cette société et la société VBP, ni sur celui des articles 1245 et suivants du même code (responsabilité des produits défectueux), en l'absence de dommage causé à d'autres biens que le produit défectueux lui-même. La société AIG soutient d'ailleurs que le litige, en ce qui concerne la police d'assurance, est soumis à la loi néerlandaise, loi du pays de la résidence ou du siège du vendeur, la société Scheuten Solar BV Holding. Et elle invoque les limitations et conditions prévues dans le contrat d'assurance, qui d'une part excluent de la garantie les frais de montage et d'installation de panneaux photovoltaïques, et qui d'autre part limitent la garantie aux frais exposés dans les deux années de livraison des biens, limite dépassée dans le cas particulier. À titre plus subsidiaire, elle se prévaut du plafond de garantie prévu au contrat.
La société Allianz Benelux NV demande elle aussi en premier chef la confirmation intégrale du jugement. A titre subsidiaire, la société Allianz Benelux conclut au rejet sur le fond des demandes de la SA Generali, en faisant valoir, entre autres, que l'implication dans le sinistre des boîtiers Solexus fabriqués par son assurée la société Alrack n'est pas établie, que l'action de la SA Generali est irrecevable sur le fondement de la garantie des vices cachés, et sur celui de la responsabilité extra-contractuelle. Elle expose, plus subsidiairement sur le fond, que la société Alrack n'a agi que pour le compte de la société Scheuten Solar, et sous l'étroit contrôle de celle-ci, en fabriquant des boîtiers qui devaient être intégrés aux installations, et dont la société Scheuten Solar lui avait donné les plans, de sorte qu'elle n'avait aucune autonomie dans la réalisation de ses travaux, et que seule la société donneuse d'ordre encourt la responsabilité résultant d'une erreur de conception. La société Allianz Benelux conteste d'autre part sa garantie, au motif que le sinistre en cause, qui implique le remplacement de l'installation, ne relève pas du champ d'application du contrat d'assurance conclu entre elle-même et la société Alrack.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 18 janvier 2024.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des demandes et observations des parties représentées, à leurs dernières conclusions déposées les 17 août et 20 décembre 2023, et les 10, 12 et 15 janvier 2024.
Motifs de la décision :
I - Sur l'action de la SARL VBP, des consorts [R] et de Groupama d'Oc :
A ' A l'encontre de la SARL Free Power :
Ainsi que l'a énoncé le tribunal, dont la cour adopte la motivation sur ce point, les modules ou panneaux solaires installés sur le bâtiment de la SARL VBP remplissent la double fonction de production d'électricité et de couverture du bâti ; participant au clos, au couvert et à la protection contre les intempéries, ils constituent ensemble un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil ; cet ouvrage s'est révélé défectueux pendant le mois de mai 2013, lorsque les boîtiers de jonction de marque Solexus intégrés dans les modules se sont échauffés, provoquant le 26 mai 2013 un départ de feu avec flammes et fort dégagement de fumée ; l'intervention de M. [A] [R], qui est monté aussitôt sur la toiture et a réussi à circonscrire l'incendie au moyen d'un extincteur, a vraisemblablement préservé l'installation et le bâtiment d'un incendie d'une plus grande ampleur ; à la suite de cette incendie, les panneaux endommagés ont été rapidement déposés et conservés sur le site (note aux parties n°1 de M. [N] du 3 novembre 2013, pièce n°30 de la SA Generali).
En l'état de ce sinistre, qui a révélé, dans les dix ans de la réception intervenue le 10 avril 2012, que l'ouvrage était impropre à sa destination, c'est à bon droit que le tribunal a prononcé que la SARL Free Power engageait sa responsabilité pour ce désordre, en application de l'article 1792 du code civil ; le jugement sera confirmé sur ce point, qui n'est d'ailleurs contesté par aucune des parties.
La SARL VBP et les consorts [R] demandent la confirmation du jugement, qui a notamment fixé au passif de la SARL Free Power une créance principale de 281 444,76 euros, et une créance accessoire de 3 000 euros, par application de l'article 700 du code de procédure civile ; cependant et comme le fait valoir la SARL Free Power, le juge commissaire à la procédure de sauvegarde de cette société, suivant une ordonnance du 13 décembre 2022, a pris acte que la SARL VBP, après avoir obtenu suivant jugement du 10 novembre 2022 la fixation de ses créances au passif de ladite société, a renoncé à cette inscription, compte tenu de l'obligation de garantie que le tribunal avait retenue par ailleurs à l'encontre de la SA Generali. Au vu de cette renonciation, il convient d'infirmer le jugement, en ce qu'il a fixé les créances de la SARL VBP au passif de la SARL Free Power, et de déclarer irrecevables les demandes formées en ce sens par la SRL VBP.
Ni les consorts [R] ni Groupama d'Oc ne demandent d'ailleurs à voir fixer de créance au passif de la SARL Free Power.
La SARL VBP demande la confirmation du jugement, en ce qu'il a enjoint à la SARL Free Power de reprendre ou de faire reprendre les panneaux photovoltaïques défectueux ; la SARL Free Power conteste l'injonction qui lui a été faite, mais ne présente aucun moyen ou observation sur ce point ; selon l'avis de l'expert, contenu dans sa note n° 1 déjà citée, le bon sens économique, allié au principe de précaution vu le risque avéré d'incendie que présentent les panneaux, conduit naturellement à envisager sans délai leur remplacement intégral. L'enlèvement des panneaux défectueux est une conséquence logique de ce remplacement, et de la nécessaire réparation des désordres, il convient par suite de confirmer la disposition du jugement ayant enjoint à la SARL Free Power d'y procéder.
B ' A l'encontre de la SA Generali :
Le tribunal a condamné la SA Generali à payer à la SARL VBP une somme principale de 281.444,76 euros, comprenant les coûts de remplacement des panneaux défectueux à hauteur de 216.845,12 euros (préjudice matériel), le coût financier des emprunts contractés par la SARL maître de l'ouvrage pour financer ce remplacement, soit 48.199,64 euros, et la perte d'exploitation que le tribunal a chiffrée à 16.400 euros, ces deux derniers postes de dommage constituant le préjudice immatériel de cette société (page 19 du jugement). Le tribunal a rejeté les moyens de défense de la SA Generali tirés des franchises et du plafond de garantie.
La SARL VBP et les consorts [R], qui réclament réparation pour des montants plus importants que ceux retenus par le tribunal, demandent confirmation du jugement, en ce qu'il a retenu l'entière garantie de la SA Generali, y compris sur les dommages immatériels, en écartant les franchises et le plafond de garantie.
Le contrat d'assurance souscrit par la SARL Free Power, identifié par le n° AL 98457, comprend la garantie de la responsabilité civile générale, incluant les dommages immatériels, et aussi la responsabilité civile décennale, garantie obligatoire portant sur les dommages matériels ; il comprend encore, au titre de garanties complémentaires à cette garantie décennale obligatoire, la garantie entre autre des dommages immatériels survenus après réception, cette garantie étant limitée à 200.000 euros par sinistre avec une franchise de 20 % (pièce n°3 de la SARL Free Power).
Ainsi que le fait valoir la SA Generali, les dommages en cause, dès lors qu'ils résultent de désordres de nature décennale, relèvent des seules garanties obligatoires ou complémentaires facultatives relevant de la responsabilité décennale, et non pas de la garantie de la responsabilité civile générale de droit commun.
La SA Generali soutient que le plafond et la franchise doivent s'appliquer globalement pour les dommages sériels, c'est-à-dire pour l'ensemble des sinistres ayant comporté l'échauffement de panneaux de marque Scheuten, équipés de boîtiers de marque Solexus fabriqués par la société Alrack BV ; elle invoque ses Dispositions générales, qui définissent comme suit le sinistre : « En ce qui concerne la garantie responsabilité civile et les garanties complémentaires à la garantie obligatoire de responsabilité décennale : tout dommage ou ensemble de dommages causés à des tiers, engageant la responsabilité de l'assuré, résultant d'un fait dommageable et ayant donné lieu à une ou plusieurs réclamations. / Le fait dommageable est celui qui constitue la cause génératrice du dommage. / Un ensemble de faits dommageables ayant la même cause technique est assimilable à un fait dommageable unique. » (Dispositions générales identifiées par la référence GA421C, à laquelle renvoie le contrat n° AL 98457 : pièce n°10 de la SA Generali).
Ainsi que le font valoir la SARL VBP et les consorts [R], cette définition manque de clarté : le « fait dommageable » peut s'entendre, dans le cas particulier, soit de la fabrication défectueuse des boîtiers Solexus, soit du montage de ces boîtiers sur les panneaux Scheuten, soit encore de l'installation des panneaux, tous faits distincts qui ont concouru à la réalisation du dommage ; de plus, la définition du terme sinistre ne précise pas si « l'ensemble de faits dommageables », devant être considérés comme un sinistre unique, doit s'étendre à des faits, en l'occurrence la pose de panneaux, réalisés en des lieux distincts pour des maîtres de l'ouvrage distincts, ou si elle se limite au contraire à la pose de différents panneaux de même modèle, effectuée en un même lieu pour le même maître de l'ouvrage.
Il convient, vu l'ambiguïté de cette clause et conformément à l'article 1190 du code civil, de l'interpréter à l'encontre de la SA Generali, s'agissant d'un contrat d'adhésion proposé par cette société : la notion de sinistre, au sens des Conditions générales susdites, sera donc interprétée en ce sens que l'ensemble des faits dommageables est constitué de la pose de l'ensemble des panneaux installés sur commande de la SARL VBP, de sorte que le plafond de garantie et la franchise s'appliqueront exclusivement au sinistre subi par cette société, et non à l'ensemble des sinistres survenus pour la même cause à la suite de défaillances de panneaux de marque Scheuten.
L'indemnité que le tribunal a condamné la SA Generali à payer à la SARL VBP comprend le coût de remplacement des panneaux, pour une somme de 216 845,12 euros, somme non contestée, qui relève de la garantie décennale obligatoire et qui n'est pas subordonnée à la franchise ou au plafond de garantie ; le jugement sera confirmé de ce chef. Il convient d'examiner ensuite les éléments du préjudice immatériel, soumis en revanche à la franchise et au plafond de 200 000 euros par sinistre.
La SARL VBP demande réparation des frais de remplacement ponctuel des panneaux, pour une somme de 21 229,80 euros, et produit une facture émise le 31 mars 2014 par la SARL Free Power, portant à payer cette somme hors taxe, à l'adresse de la SARL VBP et pour des « dépannages à titre conservatoire » ; cependant, pas plus que devant le tribunal, la SARL VBP ne justifie devant la cour du paiement de cette facture ; elle produit d'ailleurs un constat de Me [M] [B], huissier de justice, selon lequel l'installation était toujours hors service le 11 avril 2014 donc après la date de la facture : les panneaux défectueux étaient enlevés, des bacs acier de la toiture présentaient des traces de brûlures, et l'huissier n'a pas constaté la présence de panneaux neufs. Le premier juge a rejeté à bon droit la demande présentée de ce chef par la SARL VBP.
Le tribunal a revanche condamné la SA Generali à réparation pour le coût financier des emprunts contractés par la SARL VBP afin de remplacer les panneaux ; la SA Generali conteste cette demande, au motif qu'il n'est pas établi que les frais en cause aient eu pour objet l'installation de nouveaux panneaux.
La SARL VBP produit une lettre du Crédit Agricole, contenant des informations relatives à un acte de prêt de 215 924 euros, édité le 21 mars 2014, avec « date valeur réalisation » du 2 juin 2014, le capital prêté étant destiné à l'objet suivant : « Solaire / Travaux bâtiments à usage professionnel » (pièce n°14 de la SARL VBP). Elle produit encore le contrat d'un autre prêt conclu en mars 2014 avec le Crédit Agricole, sur un capital de 50 805 euros prêté pour l'achat de « matériel à usage professionnel / attente de financement » (référence 875933) ; les avenants au prêt de 215 924 euros, avenants établis à effet d'avril 2017 et d'avril 2020, comportant chacun la réduction du montant des échéances mensuelles de remboursement ; et un relevé de ses frais financiers, résultant de ces différents contrats (pièces n°22 à 25). Il est rappelé que le sinistre est survenu en mai 2013, et que la SARL VBP a fait constater par un huissier que l'installation était toujours hors service le 11 avril 2014. Au vu de ces éléments précis et concordants, il apparaît que les prêts en cause sont en relation avec le sinistre, qu'il s'agisse du prêt de 215 924 euros, consenti expressément pour des travaux sur des bâtiments et pour une installation « solaire », à une période où l'installation sinistrée n'était pas encore remise en état, des deux avenants conclus pour réaménager ce prêt principal, ou du prêt secondaire de 50 805 euros, souscrit à la même période et dans l'attente du versement du solde du capital de 215 924 euros, qui n'est intervenu que le 2 juin 2014. Le jugement sera confirmé, en ce qu'il a accueilli ce chef de demande, à hauteur de 48 199,64 euros, somme portée sur le relevé des frais financiers.
Le tribunal a fixé la perte d'exploitation à 16 400 euros ; la SARL VBP demande à ce titre l'allocation d'une somme de 32 000 euros, et la SA Generali conteste tout droit pour cette société à réparation, faute pour elle de justifier de son préjudice.
Le préjudice calculé par la SARL VBP se fonde sur la variation de production, en kWh et en euros, entre d'une part la période annuelle 2012/2013 (de mai à avril), et d'autre part les périodes similaires des années 2013/2014 et 2014/2015 ; le décompte présenté mentionne des pertes de production de 49 655 et de 2 449 kWh, soit un total de 52 104 kWh, et une perte évaluée sur la base d'un prix de rachat moyen de 0,607486667 euros par kWh, soit un résultat de 31 652,48 euros, arrondi à 32 000 euros (pièce n°15 de la SARL VBP). Ce calcul est fondé sur des données objectives, au contraire de ce que soutient la SA Generali : les chiffres de production figurant dans le décompte se retrouvent dans les relevés de comptage émis par ERDF pour les périodes indiquées (pièce n°21 de la SARL VBP) ; il convient cependant, comme l'a énoncé le tribunal, de tenir compte d'autres facteurs ayant pu influer sur la production, tels que les aléas climatiques, et de l'insuffisance des termes de comparaison présentés par la SARL VBP, qui ne verse aux débats aucun relevé postérieur au mois de juin 2014, alors que de tels relevés auraient permis de mieux apprécier l'ampleur de la perte de revenus pendant la période d'arrêt de l'installation, consécutive au sinistre, par comparaison avec la période postérieure aux travaux de réfection de l'installation. Il y a lieu, comme l'a fait le tribunal, d'admettre le principe de cette perte, mais de réduire, au vu des éléments présentés, l'indemnisation due à ce titre à la moitié approximative de la somme demandée, soit 16 000 euros.
Le montant total des sommes dues à la SARL VBP, pour les préjudices immatériels, s'établit ainsi à 48 199,64 + 16 000 = 64 199,64 euros ; cette somme n'atteint pas le plafond de garantie de 200 000 euros prévue dans le contrat d'assurance, mais doit être réduite en application de la franchise, s'agissant d'une garantie facultative ; cette franchise s'établit par sinistre, selon le contrat (pièce n°3 de la SARL Free Power), à 20 % des dommages immatériels, avec un minimum de 2 700 euros et un maximum de 25 000 euros ; les 20 % de la dite somme s'élevant à 64 199,64 x 20 % = 12 839,93 euros, il convient de ne faire droit à la demande de la SARL VBP à ce titre que sous déduction de cette franchise, soit 64 199,64 ' 12 919,92 = 51 359,71 euros.
La SA Generali sera donc condamnée, en sa qualité d'assureur responsabilité de la SARL Free Power, à l'encontre de qui la SARL VBP exerce une action directe, à payer à celle-ci, pour l'ensemble de ses préjudices, une somme de 216 845,12 + 51 359,71 = 268 204,83 euros. Le jugement sera réformé de ce chef.
Les consorts [R] demandent condamnation de la SA Generali à leur verser 20 000 de dommages et intérêts, pour les divers préjudices, tels que préjudice moral, tracas et pertes de temps, que leur a causés le sinistre en litige ; cependant et comme le fait valoir la SA Generali, ces préjudices ne se distinguent pas de celui de la SARL VBP, qui était seule maître de l'ouvrage, et qui en cette qualité a seule droit à réparation sur le fondement d'une garantie dérivant de la garantie décennale, bénéficiant au seul maître de l'ouvrage ; le tribunal a rejeté à bon droit cette demande.
Le jugement sera infirmé, en revanche, dans sa disposition ayant condamné la SA Generali à prendre à sa charge les coûts de reprise et de recyclage ou de destruction des panneaux, de tels frais ne relevant pas de la garantie décennale obligatoire, et étant exclus des garanties assurées par la SA Generali, selon les Dispositions générales du contrat d'assurance (page 22, excluant les frais de retrait de produits exécutés par l'assuré).
Il sera fait droit à la demande de Groupama d'Oc tendant à la confirmation du jugement, en ce qu'il a condamné la SA Generali à lui payer une somme de 8 380,17 euros : Groupama d'Oc, assureur de dommages de la SARL VBP, justifie suffisamment, au moyen d'une quittance subrogative établie le 14 janvier 2015 au nom de la SARL VBP, portant la signature du gérant M. [A] [R] (signature semblable à celle figurant sur d'autres documents tels que le procès-verbal de réception de l'installation), et au moyen d'une lettre d'envoi d'un chèque de même montant (8 380,17 euros), identifié par son numéro et expédié à la SARL VBP le 24 décembre 2014, d'une subrogation intervenue à son profit dans les conditions prévues à l'article 1250 du code civil. La SA Generali n'est d'ailleurs pas fondée à opposer à Groupama d'Oc la franchise contractuelle, dès lors que la nature exacte des dommages couverts par Groupama n'est pas indiquée, et qu'il n'est pas exclu que ces dommages relèvent de la garantie décennale obligatoire.
Les condamnations prononcées ou confirmées à l'encontre de la SA Generali produiront intérêts à compter de l'assignation du 1er décembre 2015, avec capitalisation, comme le demandent la SARL VBP, les consorts [R] et Groupama d'Oc.
II - Sur les actions en garantie exercées par la SA Generali :
Le tribunal a déclaré la SA Generali irrecevable en ses recours, vu l'expiration du délai de deux ans applicable à l'action en garantie des vices cachés, à celui de trois ans applicable à l'action pour produits défectueux de l'article 1245-6 du code civil.
La SA Generali conteste l'irrecevabilité : elle soutient que, étant subrogée dans les droits de la société VBP, mais aussi dans ceux de son assurée la SARL Free Power, elle a valablement interrompu le délai d'action en garantie des vices cachés, par l'assignation en référé-expertise qu'elle a fait délivrer aux sociétés Scheuten et Alrack, assurées par les sociétés AIG et Allianz.
Comme l'a exactement énoncé le tribunal, le délai de deux ans, applicable à l'action en garantie des vices cachés de l'article 1648 du code civil, et le délai de trois ans prévu par l'article 1386-17 ancien du même code, applicable à l'action pour produits défectueux, ont commencé de courir, pour la SA Generali, le jour où elle a été assignée en référé-expertise par la SARL VBP, le 9 août 2013 ; le cours de ces deux délais a été suspendu à partir de l'ordonnance prononçant l'expertise, le 23 août 2013, et ce jusqu'au terme de la mission de l'expert, le 21 novembre 2014 lorsque M. [F] [N] a déposé en l'état son rapport ou « note de clôture » ; à compter de cette date, les deux délais ont commencé de courir à nouveau, pour les durées de deux et de trois ans, conformément à l'article 2231 du code civil : la prescription est donc intervenue, pour le plus long de ces deux délais, le 22 novembre 2017 ; or la SA Generali ne justifie d'aucun acte interruptif de prescription avant cette date, les premiers actes de cette nature étant les assignations qu'elle a fait délivrer les 7 et 8 novembre 2018, entre autres aux sociétés AIG Europe Limited et Allianz Benelux, donc après que la prescription soit acquise.
Le jugement sera confirmé, en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formées par la SA Generali contre ces deux sociétés.
Il n'y a d'ailleurs pas lieu de fixer, au passif des sociétés Scheuten Solar ou Alrack BV, des créances de la SA Generali comme le demande cette dernière, puisqu'elle s'est désistée de son appel à l'encontre des organes des procédures collectives ouvertes à l'égard des sociétés fabricantes.
Il convient encore de confirmer le jugement, dans ses dispositions relatives aux frais de première instance.
La SA Generali, appelante principale, n'obtenant pas satisfaction dans le principal de ses demandes devant la cour, sera condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'aux frais d'expertise judiciaire.
Il n'est pas contraire à l'équité de laisser à chacune des parties la charge des frais d'instance irrépétibles qu'elle a exposés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
Statuant après en avoir délibéré, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Infirme le jugement, en ce qu'il a fixé au passif de la SARL Free Power les créances de la SARL VBP aux sommes de 281 444,76 euros à titre principal, et de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et déclare irrecevables les demandes présentées de ce chef par la SARL VBP ;
Infirme le jugement, en ce qu'il a condamné la SA Generali à prendre en charge les coûts de reprise et de recyclage ou de destruction des panneaux ; et statuant à nouveau de ce chef rejette la demande présentée à ce titre par la SARL VBP ;
Infirme le jugement, en ce qu'il a condamné la SA Generali à garantir la SARL Free Power, et à payer à la SARL VBP la somme de 281 444,76 euros et, statuant à nouveau de ce chef, condamne la SA Generali à payer à la SARL VBP une somme de 268 204,83 euros à titre de dommages et intérêts ;
Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions ;
Y ajoutant, dit que les condamnations à paiement prononcées contre la SA Generali au profit de la SARL VBP, des consorts [R] et de Groupama d'Oc, produiront intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2015, avec capitalisation à condition d'être décomptés par années entières ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne la SA Generali aux dépens qui comprendront les frais d'expertise judiciaire;
Dit qu'en application de l'article 699 du code de procédure civile, Me Rahon, Avocat, pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans percevoir de provision.
Le Greffier La Présidente