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02/11/2022 | FRANCE | N°21/00790

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre commerciale, 02 novembre 2022, 21/00790


COUR D'APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale















ARRET N°



DU : 02 Novembre 2022



N° RG 21/00790 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FSLJ

ADV

Arrêt rendu le deux Novembre deux mille vingt deux



Sur APPEL d'une décision rendue le 18 février 2021 par le Tribunal de commerce de CLERMONT-FERRAND (RG n° 19/004672)



COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente

Monsieur Christophe VIVET, Pré

sident

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller



En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l'appel des causes et du prononcé



ENTRE :



La BANQUE NUGER

SA à directoire et consei...

COUR D'APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 02 Novembre 2022

N° RG 21/00790 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FSLJ

ADV

Arrêt rendu le deux Novembre deux mille vingt deux

Sur APPEL d'une décision rendue le 18 février 2021 par le Tribunal de commerce de CLERMONT-FERRAND (RG n° 19/004672)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente

Monsieur Christophe VIVET, Président

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

La BANQUE NUGER

SA à directoire et conseil de surveillance immatriculée au RCS de Clermont-Ferrand sous le n° 855 201 463 00335

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : la SCP LANGLAIS BRUSTEL LEDOUX & ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANTE

ET :

M. [D] [H]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : la SELARL POLE AVOCATS, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMÉ

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, à l'audience publique du 08 Septembre 2022, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame DUBLED-VACHERON, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 02 Novembre 2022 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige:

La société par actions simplifiée (SAS) Airsoft Center 63 a souscrit plusieurs contrats de prêts auprès de la société anonyme (SA) Banque Nuger pour lesquels Monsieur [D] [H], gérant, s'est porté caution personnelle et solidaire:

-prêt professionnel de 60 000 € du 31 mai 2013 d' une durée de 84 mois au taux fixe de 3,90 % garanti par la caution de M.[H] pour un montant de 23 400 €, dans la limite de 30 % de l'encours du prêt principal, intérêts, commissions, frais et accessoires.

-prêt professionnel de 80 000 € du 09 novembre 2016 remboursable en 84 mensualités au taux fixe de 1,70 % garanti par la caution de M.[H] pour un montant de 31 200 €, dans les limites de 30 % de l'encours du prêt principal, intérêts, commissions, frais et accessoires.

Le 28 juillet 2015, la SA Banque Nuger a accordé une autorisation de découvert à la SAS Airsoft Center 63 pour un montant de 10 000 € au taux de 11,950 % l'an, correspondant au taux de base bancaire au jour de la souscription de la facilité, majorée de 4 points accordée en contrepartie d'une caution personnelle et solidaire de M. [H] de tous les concours bancaires consentis à la SAS Airsoft Center pour un montant de 13 000 euros ;

Par jugement du 20 avril 2017, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la SAS Airsoft Center 63.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 mai 2017, la SA Banque Nuger a déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire.

Le redressement judiciaire a été converti en liquidation judiciaire par décision du 19 octobre 2017.

Aux termes de trois ordonnances du 30 janvier 2018, le juge commissaire du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a admis les créances de la SA Banque Nuger pour les montants suivants :

- 25 605,61 € à titre chirographaire,

- 842,37 € à titre privilégié,

- 1 046,10 € à titre privilégié.

Suivant jugement du 17 octobre 2018, le tribunal de commerce a prononcé la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actifs.

Par courriers recommandés avec accusé de réception des 31 mai 2017 et 12 mars 2018, la SA Banque Nuger a mis en demeure M. [H] de lui régler les sommes dont elle l'estimait redevable au titre des engagements de caution souscrits.

Suivant exploit du 22 mai 2019, la société Banque Nuger a sollicité la condamnation de Monsieur [D] [H], en sa qualité de caution de la SAS Airsoft Center 63, à lui payer :

- la somme de 9 555,93 € au titre de l'engagement de caution souscrit pour le prêt d'un montant initial de 60 000 €, au taux conventionnel du contrat, à hauteur de 3,90 % à compter du 20 mars 2019 ;

- la somme de 24 389,29 € au titre du prêt accordé pour un montant initial de 80 000 € avec intérêts au taux conventionnel de 1,70 % à compter du 20 mars 2019 ;

- La somme de 13 000,00 € au titre de la caution accordée au découvert en compte avec intérêts à compter du 20 mars 2019.

Par jugement rendu le 18 février 2021, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a :

-dit que M. [H] était redevable envers la SA Banque Nuger des sommes de :

*9 555,93 euros au titre de l'acte de cautionnement affecté au prêt du 31 mai 2013,

*24 389,29 eurs au titre de l'acte de cautionnement affecté au prêt du 9 novembre 2016,

*13 000 euros correspondant à la limite de la garantie de M.[H] au concours accordé à la SAS Airsoft Center 63 ;

-dit que la SA Banque Nuger était redevable envers M.[H] de la somme de 24  389,29 euros correspondant au montant réclamé au titre de l'engagement de caution affecté au prêt du 9 novembre 2016 ;

-ordonné la compensation entre lesdites sommes et condamné en conséquence, M. [H] à payer à la SA Banque Nuger la somme de 22 555,93 euros ;

-débouté M.[H] de ses demandes à l'encontre de la SA Banque Nuger pour participer aux risques financiers découlant de la défaillance de la SAS Airsoft Center 63;

-dit que M.[H] pourrait s'acquitter de sa dette en 24 mois par 23 versements mensuels de 100 euros chacun, le 24 ème versement intervenant pour règlement du solde restant dû en principal et intérêts, le premier devant intervenir dans les trente jours de la signification du jugement et les 23 autres le 10 de chacun des 23 mois suivants, étant rappelé que faute pour lui de payer à la bonne date une seule des mensualités prévues, la totalité des sommes restant dues deviendrait immédiatement exigible ;

-ordonné la mainlevée de l'inscription d'hypothèque conservatoire régularisée en exécution d'une ordonnance du 25 septembre 2019 ;

-débouté les partie du surplus de leurs demandes ;

-condamné M.[H] à verser à la SA Banque Nuger la somme de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-ordonné l'exécution provisoire du jugement ;

-condamné M.[H] aux dépens.

Par déclaration au greffe du 7 avril 2021, la SA Banque Nuger a formé un appel limité de cette décision en ce qu'elle a retenu à sa charge une somme de 24 389,29 euros, ordonné la compensation entre les sommes dues, octroyé des délais de paiement à M.[H] et ordonné la mainlevée de l'hypothèque judiciaire conservatoire.

Aux termes de conclusions N°3, notifiées le 14 avril 2022, la SA Banque Nuger demande à la cour :

-d'infirmer le jugement en ce qu'il a :

*dit qu'elle était redevable envers M.[H] de la somme de 24 389,29 euros correspondant au montant réclamé au titre de l'engagement de caution affecté au prêt du 9 novembre 2016 ;

*ordonné la compensation entre lesdites sommes (dues par Monsieur [D] [H] à la SA Banque Nuger à savoir 9 555,93 €, 24 389,29€ et 13 000€ , et dues par la SA Banque Nuger à Monsieur [D] [H] à savoir la somme de 24 389,29 euros) ;

*condamné en conséquence M. [H] à lui payer la somme de 22 555,93 euros ;

*dit que M.[H] pourrait s'acquitter de sa dette en 24 mois ;

*ordonné la mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire régularisée en exécution d'une ordonnance du juge de l'exécution du 25 septembre 2019 ;

-de confirmer ce jugement en toutes ses autres dispositions ;

-En conséquence,

*de débouter Monsieur [H] de l'intégralité de ses demandes,

* de condamner Monsieur [H] en sa qualité de caution, à lui payer :

- la somme de 9 555,93 € au titre de l'engagement de caution souscrit pour le prêt d'un montant initial de 60 000 €, et cela au taux conventionnel du contrat, à hauteur de 3,90 % à compter du 20 mars 2019 ;

- la somme de 24 389,29 € au titre du prêt accordé pour un montant initial de 80.000 € avec intérêts au taux conventionnel de 1,70 % à compter du 20 mars 2019 ;

- la somme de 13 000,00 € au titre de la caution accordée au découvert en compte avec intérêts à compter du 20 mars 2019 ;

*de condamner Monsieur [H] à lui payer une indemnité de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des frais irrépétibles d'ores et déjà alloués en première instance, outre les dépens des procédures de première instance et en cause d'appel.

S'agissant de sa condamnation à verser à M. [H] une somme de 24 389,29 euros au titre de l'acte de cautionnement garantissant le remboursement du prêt du 9 novembre 2016, la société Banque Nuger fait grief au tribunal de commerce d'avoir considéré qu'elle a manqué à son devoir d'information sur la période de franchise concernant la mise en jeu de la garantie Bpifrance.

Elle rappelle que la Bpifrance a opposé une déchéance de garantie en raison de l'ouverture d'une procédure collective pendant le délai de carence ; que la garantie de cette société ne bénéficie qu'au prêteur, ainsi que le stipule très clairement le contrat de prêt, ce qui la dispensait de devoir communiquer à l'emprunteur ou à la caution les démarches effectuées auprès de la société Bpifrance.

Elle ajoute que M.[H] a pris connaissance, concomitamment à la signature de l'acte de caution, des conditions générales de cette garantie qui spécifiaient qu'elle n'était pas mobilisable en cas de redressement judiciaire de la société Airsoft Center 63 dans les 9 mois suivant la mise en place du crédit.

S'agissant de la demande de mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire, la SA Banque Nuger précise que :

* le montant global sur lequel est portée l'inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire se décompose comme suit :

- 24.389,29 € au titre du prêt accordé pour un montant initial de 80 000 €

- 13 000 € au titre de la caution accordée au découvert en compte courant.

*seul le prêt professionnel accordé pour un montant initial de 80 000 €, était effectivement contre-garanti par Bpifrance à hauteur de 50 %.

Elle souligne que le tribunal a donné mainlevée de cette hypothèque au motif que l'inscription d'hypothèque était en grande partie basée sur les sommes dues au titre du prêt de 80 000 euros, et rappelle qu'elle conteste avoir failli à son obligation d'information envers la caution au titre de ce prêt.

La SA Banque Nuger s'oppose à la demande de M.[H] concernant sa participation aux risques financiers, et fait observer :

- qu'elle n'a commis aucun manquement en accordant un premier concours, le 31 mai 2013 à une société en cours de création ; qu'à cette date la société Airsoft Center 63 présentait des capitaux propres négatifs et une perte de 124.762 euros pour partie imputable aux achats de marchandises et à la variation de stock de marchandises ce qui n'était pas incohérent pour un début d'activité, le chiffre d'affaires réalisé s'élevant par ailleurs à 69.082 euros ;

-que les comptes annuels 2014 laissaient apparaître un résultat d'exploitation satisfaisant puisqu'il s'était considérablement amélioré ; que le chiffre d'affaires était passé de 69.082 euros à 368.334 euros au 31 décembre 2014 ; que ce second exercice était donc prometteur avec un EBE de 47 K€ et une capacité d'auto financement de 36 K€ ;

-qu'elle n'a consenti aucun crédit supplémentaire le 25 octobre 2015; que la facilité de trésorerie accordée le 28 juillet 2015 était justifiée par l'évolution favorable du chiffre d'affaires de la société dont témoignent les comptes annuels au 31 décembre 2015;

-que si les comptes annuels au 31 décembre 2016 montrent que les capitaux propres sont négatifs à hauteur de 75.203 euros et que la société a réalisé un résultat négatif de 88.092 euros c'est en raison de l'investissement financier réalisé grâce au crédit de 80.000 euros octroyé le 9 novembre 2016.

Elle affirme en conséquence n'avoir commis aucune faute.

S'agissant des sommes dues, elle rappelle que le 30 janvier 2018, le juge commissaire a rejeté l'intégralité des contestations revendiquées par Monsieur [H] ;

que sur la base de ces décisions, elle a adressé le 12 mars 2018 un décompte actualisé de ses créances au jour de la liquidation judiciaire ;

qu'en application des dispositions de l'article L. 643-1 du code de commerce « le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues » ;

que la caution est irrecevable à contester, dans tout litige postérieur l'opposant au créancier principal, les créances admises au passif du débiteur en procédure collective dès lors qu'elle n'a pas contesté leurs montants dans les formes et selon les délais prévus par les articles L 622-2 et L 624-3-1 du code de commerce et qu'il n'y a pas lieu à une nouvelle vérification.

La SA Banque Nuger conteste enfin l'octroi de délai de paiement considérant que M. [H] est âgé de 75 ans; que déduction faite de ses charges d'emprunts à la consommation, il lui reste une somme de 350 euros pour faire face aux charges de la vie courante, ce qui rend impossible la mise en place d'un échéancier. Elle soutient que M. [H] cherche à gagner du temps sans avoir aucunement l'intention de mettre en vente son bien immobilier pour solder sa dette.

Par conclusions notifiées le 8 septembre 2021, M.[H] a formé appel incident contre le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il l'a débouté de ses demandes à l'encontre de la SA Banque Nuger pour participer aux risques financiers découlant de la défaillance de la société Airsoft Center 63.

Suivant conclusions notifiées le17 mai 2022, Monsieur [H] demande à la cour de recevoir son appel incident.

Au visa des articles 2298 du code civil, 1142 et suivants du code civil en sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 applicables aux actes de cautionnement en date des 10 mars 2013 et 28 juillet 2015, et de l'article 1240 du code civil applicable au cautionnement en date du 25 octobre 2016, M.[H] de condamner la SA Banque Nuger à lui payer :

-à titre indemnitaire le montant des sommes réclamées au titre des engagements de caution souscrits à concurrence de 9 555,93 € au titre de l'acte de cautionnement affecté au prêt du 13 avril 2013, et 24 389,29 € au titre de l'acte de cautionnement affecté au prêt du 9 novembre 2016 ;

Il demande à être déchargé de l'intégralité des conséquences des actes de cautionnement souscrits, après compensation.

A titre subsidiaire, il entend voir la société Banque Nuger condamnée à supporter le risque financier à concurrence de 50% des sommes réclamées et de limiter en conséquence sa condamnation aux sommes suivantes :

*4 502,48 € au titre de l'acte de cautionnement affecté en date du 10 mars 2013 ;

*11 876,89 € au titre de l'acte de cautionnement affecté en date du 25 octobre 2016 ;

*11 122 € au titre de l'acte de cautionnement tous engagements en date du 28 avril 2015.

Il sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il lui a accordé des délais de paiement et a ordonné la mainlevée de l'hypothèque judiciaire conservatoire.

Il demande enfin à la cour de condamner la SA Banque Nuger à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner aux dépens de la procédure.

M. [H] rappelle qu'il était associé minoritaire de la société Airsoft Center 63 et qu'il en est devenu l'associé majoritaire et le président à la demande de la banque. Il ajoute que la situation de caution avertie ne fait pas disparaître la responsabilité de l'établissement bancaire eu égard aux circonstances connues lors de l'octroi des financements.

Il soutient ainsi que la situation du débiteur principal était extrêmement précaire et fait observer que les concours bancaires ont été accordés alors que la société qu'il présidait présentait des capitaux propres négatifs et un résultat négatif sans que l'octroi d'un prêt en 2013 ne permette une amélioration de la situation.

Il ajoute :

-qu'à la date du 31 mai 2013, les comptes reflétant la situation de la trésorerie et de l'endettement étaient connus ; que les investigations qu'aurait dû faire la banque avant d'accorder le prêt auraient mis en évidence la fragilité de l'entreprise ;

-que le prêt du 25 octobre 2015 et la facilité de caisse augmentée le 28 juillet 2015 ont permis de présenter un meilleur bilan mais que le dossier de gestion relatif à l'exercice 2015 aurait dû alerter la banque sur le fait que le prêt était de nature à aggraver la situation financière de la société Airsoft Center 63.

M. [H] conteste le montant des sommes réclamées par la SA Banque Nuger.

Concernant le cautionnement affecté au prêt du 10 avril 2013, il soutient que le montant de sa garantie s'élève à 9 004, 95 euros et qu'après compensation il convient de ramener cette somme à celle de 4 502,48 euros.

Concernant l'acte de cautionnement souscrit en garantie de l'acte de prêt du 9 novembre 2016, il souligne :

- que l'acte de cautionnement ne rappelle pas les conséquences de la garantie Bpifrance ;

- qu'il n'est pas établi qu'il a signé les conditions générales de la garantie Bpifrance avant de se porter caution et soutient que s'il avait eu connaissance de la période de franchise, il aurait tout mis en oeuvre 'pour éviter que celle-ci puisse être déchue'.

Concernant l'acte de cautionnement du 28 juillet 2015, M. [H] soutient qu'à la date du jugement déclaratif le compte présentait un solde débiteur de 21 447,14 euros; qu'en tenant compte des remises qui doivent être appliquées à la caution, son engagement est limité à la somme de 11 122 euros, ramenée à celle d 5 561 euros, après prise en compte de l'indemnisation due par la banque.

Concernant la mainlevée de l'hypothèque, il fait valoir que l'impossibilité de mise en oeuvre de la garantie Bpifrance ne remet pas en cause le principe de l'obtention de la garantie ; que l'une des conditions d'octroi de cette garantie était l'impossibilité de régulariser une inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire sur l'immeuble constituant l'habitation principale du dirigeant.

Il fait enfin valoir qu'il pourra éventuellement obtenir un financement pour régler ses dettes s'il peut proposer une inscription en premier rang sur sa résidence principale et affirme avoir fait les démarches nécessaires à la vente de ce bien immobilier.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 mai 2022.

Motifs:

* sur le défaut d'information de la caution:

La garantie Bpifrance (anciennement OSEO) vise à faciliter l'accès au crédit en couvrant une partie de la dette en cas de défaillance de l'emprunteur et ne peut être invoquée ni par l'emprunteur ni par la caution. Elle ne constitue pas une garantie supplémentaire à l'acte de cautionnement pour les besoins du prêt mais une garantie subsidiaire au seul bénéfice de prêteur.

Il appartient à la banque de justifier qu'elle a correctement rempli son obligation d'information sur l'objet exact et le fonctionnement de la garantie Bpifrance.

A cette fin, la banque peut annexer au contrat de prêt les conditions générales ou le contrat de prêt lequel doit comporter une mention qui indique que les conditions générales, voires particulières ont été portées à la connaissance de la caution.

Le manquement à ce devoir d'information pré-contractuelle constitue une faute.

Les contrats de prêts souscrits les 31 mai 2013 et 9 novembre 2016, bénéficiaient pour l'un de la garantie OSEO et pour l'autre de la garantie Bpifrance.

Il résulte du courrier adressé par Bpifrance à la SA Banque Nuger le 1er juin 2017, que Bpifrance a accepté la mise en jeu de la garantie pour le prêt du 31 mai 2013.

Le tribunal de commerce a donc justement considéré que M.[H] ne pouvait se prévaloir d'un manque d'information concernant le mécanisme de déclenchement de la garantie Bpifrance pour ce prêt.

Concernant le prêt du 9 novembre 2016, le tribunal de commerce, considérant que l'existence d'une période de franchise n'est pas mentionnée sur l' acte de cautionnement ou sur l'acte de prêt, a jugé que la société Banque Nuger a manqué à son devoir d'information.

La Bpifrance a accordé sa garantie à la SA Banque Nuger le 10 août 2016 pour l'octroi d'un prêt moyen terme de 80 000 euros à la SAS Airsoft Center 63.

Le contrat de prêt paraphé par M.[H] en sa qualité de président de la SAS Airsoft Center 63, mentionne en son article 8 la participation de Bpifrance Financement et le fait que cette garantie ne bénéficie qu'au prêteur.

Aux termes de l'article 7.3 desdites conditions générales, il est précisé que la garantie ne pourra pas être mise en jeu si l'une des conditions visées à l'article 7.1 intervient moins de 9 mois à compter de la mise en place du crédit. L'article 7.1 stipule que la garantie est mise en jeu si le bénéficiaire fait l'objet d'une procédure collective, dès le prononcé du jugement de redressement ou de liquidation judiciaire.

M. [H] a paraphé chaque page des conditions générales susvisées.

Toutefois, rien ne permet de vérifier la date à laquelle M.[H] a signé ce document et l'acte de cautionnement ne mentionne pas qu'il a reçu préalablement copie desdites conditions générales.

Il s'en suit que la SA Banque Nuger ne démontre pas avoir pleinement satisfait à son devoir d'information.

Pour autant, M.[H] ne fait pas grief au tribunal d'avoir jugé qu'ayant renoncé au bénéfice de discussion il ne pouvait se prévaloir d'un manque d'information concernant le mécanisme de déclenchement de la garantie Bpifrance.

Il ne soutient pas qu'il n'aurait pas contracté s'il avait eu connaissance de l'existence d'une période de franchise ou qu'il a perdu une chance de ne pas contracter, mais prétend que s'il avait eu connaissance de la période de franchise appliquée par BPI France, tout aurait été mis en oeuvre pour éviter que 'celle-ci puisse être déchue'.

M.[H] ne justifiant pas de l'existence de son préjudice sera débouté de sa demande.

Il convient en conséquence de réformer le jugement en ce qu'il a condamné la SA Banque Nuger à lui verser la somme de 24 389,29 euros.

* Sur le soutien abusif :

M.[H] soutient que la banque aurait engagé sa responsabilité en accordant des prêts et facilités de trésorerie à la SAS Airsoft Center 63 en sachant qu'elle conduisait cette dernière à une situation irrémédiablement compromise.

La société Airsoft Center 63 a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 18 août 2012.

La société Banque Nuger lui a consenti un premier crédit de 60 000 euros le 31 mai 2013, soit dans la première année de son activité.

A cette date, la SA Banque Nuger ne pouvait disposer des comptes annuels arrêtés au 31 décembre 2013 produit en pièce 14 par l'intimé.

La Banque Nuger fait justement observer qu'au cours de ce premier exercice, le résultat négatif d'exploitation est en bonne partie dû aux achats de marchandises et aux variations de stocks.

Les comptes arrêtés au 31 décembre 2014 montrent une évolution favorable de la société, le résultat étant devenu bénéficiaire (9 179 euros pour un déficit de 42 493 euros en 2013), le chiffre d'affaires étant passé de 69 082 euros à 368 334 euros.

Les soldes intermédiaires de gestion font apparaître une marge commerciale de 50,19%, une valeur ajoutée de 31,17% et un excédent brut d'exploitation permettant de mesurer la capacité de l'entreprise à générer des ressources avec son activité principale de 47 107 euros.

M.[H] évoque l'octroi d'un prêt du 25 octobre 2015 dont il ne justifie pas et dont la société Nuger conteste l'existence.

Il ne pourra donc en être tenu compte dans l'analyse de l'évolution de la société Airsoft Center 63.

Le 28 juillet 2015, la Banque Nuger a accordé à la société Airsoft Center 63, par avenant à la convention de compte courant, une facilité de trésorerie de 10 000 euros garantie par M. [H] , caution, à concurrence de 13 000 euros en principal, intérêts, frais et accessoires.

A cette date la société Banque Nuger disposait du bilan arrêté au 31 décembre 2014. Compte tenu de l'évolution favorable de la société, telle que le confirme le bilan arrêté au 31 décembre 2015, la banque Nuger ne peut se voir reprocher une facilité de trésorerie permettant plus de souplesse à la société Airsoft Center 63 dans la gestion.

A la fin de l'année 2015, le montant des capitaux propres est redevenu positif ( 12 889 euros), et le résultat d'exploitation est passé de 9 719 euros à 17 853 euros.

Enfin, la banque a accordé un crédit de 80 000 euros le 9 novembre 2016 au regard des comptes annuels 2015. Les comptes annuels arrêtés au 31 décembre 2016 mentionnent un résultat négatif cependant le chiffre d'affaire de la société était encore de 221 174 euros.

M.[H] ne rapporte pas la preuve qu'à la date de l'octroi du prêt la situation de l'entreprise était irrémédiablement compromise ; que la banque connaissait cette situation ; que le prêt ne pourrait en aucun cas être remboursé et qu'en apportant son concours la banque a artificiellement maintenu l'activité ou aggravé la situation de la société Airsoft Center 63.

Il ne justifie notamment pas d'incidents de paiement dans le règlement du précédent crédit ou d'un solde débiteur en compte courant excessif.

Au regard de ces éléments, le jugement sera confirmé en ce qu'il a écarté la demande de M.[H] tendant à voir condamner la SA Banque Nuger à participer aux risques financiers découlant de la société Airsift Center 63.

* Sur le montant des sommes dues :

Par ordonnances des 31 janvier 2018, le juge commissaire a admis la créance de la SA Banque Nuger au passif du redressement judiciaire de la société Airsoft Center 63, comme suit :

-découvert en compte au 20 avril 2017 : 25 605,61 euros à titre chirographaire

-prêt de 60 000 euros : 842,37 euros à titre privilégié, cette somme correspondant à une mensualité impayée du mois d'avril 2017

-prêt de 80 000 euros : 1 046,10 euros à titre privilégié au titre d'une échéance impayée du mois d'avril 2017.

S'agissant d'une procédure collective ouverte avant le 1er octobre 2021, l'admission de ces créances est opposable à la caution.

Le 13 décembre 2017, la A Banque Nuger a actualisé sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Airsoft Center 63 :

-découvert en compte : 27 259,03 euros (soit 25 605,61 euros outre 1 653,42 euros au titre des intérêts de retard du 20 avril 2017(date du redressement judiciaire) au 19 octobre 2017(date de la liquidation judiciaire).

-prêt de 60 000 euros : 30 632,28 euros soit 842,37 euros au titre de l'échéance impayée augmentée des intérêts de retard entre le 10 avril 2017 et le 19 octobre 2017 et 29 174,12 euros au titre du capital restant dû augmenté des intérêts de retard du 10 avril 2017 au 19 octobre 2017.

-prêt de 80 OOO euros : 79 909, 43 euros soit 1 046, 10 euros au titre de l'échéance impayée augmentée des intérêts de retard dûs du 4 avril 2017 au 19 octobre 2017 et 78 133,14 euros correspondant au capital restant dû augmenté des intérêts de retard du 4 avril 2017 au 19 octobre 2017.

La décision d'admission des créances s'impose à la caution qui ne peut plus se prévaloir d'exceptions inhérentes à la dette et ne justifie pas avoir exercé un recours contre l'état des créances.

Par ailleurs, il résulte des documents produits que la Banque Nuger a transféré sur le compte RJ le montant des remises CB intervenues postérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire.

Le compte RJ était débiteur au 12 janvier 2018 date de sa clôture d'une somme de 66,10 euros.

Le tribunal de commerce a donc justement constaté que le solde débiteur du compte courant de la société Airsoft Center 63 ne s'était pas réduit avant le prononcé de la liquidation judiciaire et présentait donc un solde supérieur au montant garanti par M. [H] de 13 000 euros.

Concernant l'acte de cautionnement souscrit pour le prêt de 60 000 euros , M.[H] s'est porté caution dans la limite de la somme de 23 400 euros en principal, intérêts et pénalités de retard dans la limite de 30% de l'encours du du prêt principal, intérêts, commissions, frais et accessoires.

A la date de la liquidation judiciaire le montant de la créance était de 30 632,28 euros .

La SA Banque Nuger est donc bien fondée à solliciter de la caution la somme de 9 555,93 euros euros représentant 30% de la somme due à la date du jugement de liquidation judiciaire, augmentée des intérêts de retard du 12 mars 2018 au 20 mars 2019 (date du dernier décompte).

Concernant l'acte de cautionnement souscrit pour le prêt de 80 OOO euros, M.[H] s'est porté caution pour un montant maximal de 31 200 euros dans la limite de 30% de l'encours du prêt principal, intérêts, commissions, frais et accessoires.

La créance de la SA Banque Nuger s'élevait à la somme de 79 909,43 euros à la date de la liquidation judiciaire.

La SA Banque Nuger est donc bien fondée à solliciter de la caution la somme de 24 389,29 euros représentant 30% de la somme due à la date du jugement de liquidation judiciaire, augmentée des intérêts de retard du 12 mars 2018 au 20 mars 2019 ( date du dernier décompte).

Le jugement sera confirmé sur ce point.

* sur la mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire

Les conditions générales Bpifrance paraphées par M.[H] indiquent:' pour le recouvrement de la créance garantie, le logement servant de résidence principale aux personnes physiques, bénéficiaires ou cautions personnelles, ne peut en aucun cas faire l'objet d'une hypothèque conventionnelle ou judiciaire en garantie du crédit ni d'une saisie immobilière et le prix de vente de ce bien ne peut être appréhendé sauf accord exprès du vendeur.Cette interdiction s'applique en toutes circonstances et sans limite de temps ; notamment après règlement de la garantie ou en cas de déchéance de la garantie par Bpifrance ou de renonciation à la garantie par l'établissement.'

Par ordonnance du 25 septembre 2019, le juge de l'exécution a autorisé la SA Banque Nuger a prendre une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire à l'encontre de M.[H] pour avoir sûreté et conservation de la somme de 37.389,29 euro en principal et accessoires.

Cette somme correspond aux engagements de caution souscrits à concurrence de 24 389,29 euros au titre du prêt de 80 000 euros pour lequel la Banque Nuger a obtenu la garantie de Bpifrance et à concurrence de la somme de 13 000 euros au titre de l'autorisation de découvert.

Il s'en suit que le jugement doit être partiellement réformé sur ce point, la mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire étant limitée à la somme de 24 389,29 euros .

*sur l'octroi de délais de paiement :

M. [H] est âgé de 75 ans. Le montant global de sa pension de retraite s'élève à 2 703, 85 euros par mois. Il supporte des charges d'emprunts à la consommation de 1 792,45 euros.

Il justifie avoir confié au mois d'octobre 2021 deux mandats de vente à des agences immobilières pour la vente de sa maison.

L'octroi de délais de paiement, tels qu'octroyés par le tribunal, est de nature à lui permettre de trouver un moyen de s'acquitter de sa dette envers la SA Banque Nuger.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

*Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile:

M. [H] succombant en son appel incident et en ses demandes sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

L'équité commande de limiter les sommes allouées à la Banque Nuger sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 800 euros.

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ;

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand du 18 février 2021 en ce :

-qu'il a dit que M. [H] était redevable envers la SA Banque Nuger de la somme de 9 555,93 euros au titre de l'acte de cautionnement affecté au prêt du 31 mai 2013, de la somme de 24 389,29 euros au titre de l'acte de cautionnement affecté au prêt du 9 novembre 2016, et de la somme de 13 000 euros correspondant à la limite de garantie concernant les concours accordés à la SAS Airsoft Center 63 ;

-qu'il a débouté M.[H] de sa demande tendant à voir condamner la SA Banque Nuger à participer aux risques financiers découlant de la société Airsift Center 63 ;

- qu'il a accordé des délais de paiement sur une durée de 24 mois à M. [H] pour s'acquitter des condamnations prononcées à son encontre en sa qualité de caution des engagements de la société Airsoft Center 63 ;

- qu'il a condamné M. [H] à verser à la SA Nuger une somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-qu'il a condamné M.[H] aux dépens de première instance.

L'infirme pour le surplus des dispositions soumises à la cour.

Statuant à nouveau :

Rejette les demandes de M.[H] tendant à la condamnation de la SA Banque Nuger d'avoir à lui payer les sommes de 9 555, 93 au titre de l'acte de cautionnement affecté au prêt du 31 mai 2013 et la somme de 24 389,29 euros au titre de l'acte de cautionnement affecté au prêt du 9 novembre 2016 ;

Ordonne la mainlevée partielle de l'inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire prise en exécution de l'ordonnance du juge de l'exécution du 25 septembre 2019 ;

Dit que cette inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire produira ses effets pour avoir paiement de la somme de 13 000 euros ;

Condamne M.[D] [H] à verser à la société Banque Nuger la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [D] [H] aux dépens d'appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21/00790
Date de la décision : 02/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-02;21.00790 ?
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