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05/01/2022 | FRANCE | N°19/022721

France | France, Cour d'appel de riom, Co, 05 janvier 2022, 19/022721


COUR D'APPEL
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET No

DU : 05 Janvier 2022

No RG 19/02272 - No Portalis DBVU-V-B7D-FKQ4
FK
Arrêt rendu le cinq Janvier deux mille vingt deux

Sur APPEL d'une décision rendue le 5 novembre 2019 par le Tribunal de grande instance de CLERMONT-FERRAND (RG no 16/03026 ch1 cab2)

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président
Madame Virginie DUFAYET, Conseiller
M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire

En présence de : Mme Christine VIAL,

Greffier, lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

Le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA [Adresse 8]...

COUR D'APPEL
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET No

DU : 05 Janvier 2022

No RG 19/02272 - No Portalis DBVU-V-B7D-FKQ4
FK
Arrêt rendu le cinq Janvier deux mille vingt deux

Sur APPEL d'une décision rendue le 5 novembre 2019 par le Tribunal de grande instance de CLERMONT-FERRAND (RG no 16/03026 ch1 cab2)

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président
Madame Virginie DUFAYET, Conseiller
M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire

En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

Le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA [Adresse 8] pris en la personne de son syndic, la société CLB GESTION
SARL à associé unique immatriculée au RCS de [Localité 5] sous le no 443 983 846 00041
[Adresse 1]
[Localité 5]

Représentant : Me Coralie AMELA-PELLOQUIN, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

La société RÉSIDENCES SERVICES GESTION venant aux droits de la SAS STUD'CITY
SAS à associé unique immatriculée au RCS de [Localité 5] sous le no 404 362 576 00013
[Adresse 2]
[Localité 5]

Représentant : Me Coralie AMELA-PELLOQUIN, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANTES

ET :

M. [P] [V]
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 3]

Représentant : la SELARL TOURNAIRE - MEUNIER, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND
La société dénommée "SCI SARAH BERNHARDT"
SCI immatriculée au RCS de Villefrance-Tarare sous le no 519 871 610 00035
Le Guillon
[Localité 4]

Non représentée, assignée à étude

La société PATRIMOINE EVOLUTION
SARL à associé unique immatriculée au RCS de Villefrance-Tarare sous le no 384 136 032 00057
L Guillon
[Localité 4]

Non représentée, assignée à étude

INTIMÉS

DEBATS : A l'audience publique du 03 Novembre 2021 Monsieur [E] a fait le rapport oral de l'affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 785 du CPC. La Cour a mis l'affaire en délibéré au 05 Janvier 2022.

ARRET :
Prononcé publiquement le 05 Janvier 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

La SARL Patrimoine Evolution, promoteur immobilier, a entrepris la construction et la mise en vente d'une résidence hôtelière située à [Adresse 7] ; elle a obtenu à cette fin un permis de construire, qu'elle a transféré à la SCI Sarah Bernhard, créée spécialement pour ce projet de résidence étudiante dénommée [Adresse 8], et qui comportait différents services à l'usage des occupants.

La SCI Sarah Bernhardt, maître de l'ouvrage, a confié la maîtrise d'oeuvre à M. [P] [V], architecte, et a conclu des contrats avec différentes entreprises ; cette SCI a d'autre part vendu en l'état futur d'achèvement les 109 logements inclus dans la résidence. Les contrats de vente stipulaient que la gestion de la résidence serait confiée à une société d'exploitation, la SARL Sarah Bernhardt Gestion, et que chacun des acquéreurs s'obligeait à consentir un bail à cette société. Les lots ont été vendus, et les acquéreurs ont signé chacun le bail commercial prévu, portant sur leurs lots privatifs et sur les parties communes de la résidence ; selon chacun des actes de bail, les acquéreurs donnaient mandat à la société d'exploitation de gérer leur bien, et la résidence dans son ensemble.

La résidence a été construite, et a donné lieu à une réception le 31 août 2011, entre la SCI Sarah Bernhardt, l'architecte et les entrepreneurs ; le procès-verbal de réception contenait diverses réserves. Le même jour 31 août 2011, un procès-verbal de livraison a d'autre part été établi, lui aussi avec réserves, entre la SCI Sarah Bernhardt et la SARL Sarah Bernhardt Gestion, en sa qualité de mandataire des copropriétaires pour gérer l'ensemble de l'immeuble.

La SAS [Adresse 9], venue aux droits de la SARL Sarah Bernhardt Gestion, et le syndicat des copropriétaires, au vu des anomalies constatées sur l'ouvrage, ont obtenu du juge des référés du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand le prononcé d'une mesure d'expertise, suivant ordonnance du 24 juillet 2013. L'expert, M.[R] [M], a établi son rapport le 16 novembre 2015 ; il décrit divers désordres, affectant soit les parties communes, soit les parties privatives de l'ouvrage.

Le 5 novembre 2019, la SAS Résidences Services Gestion et le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic la SARL CLB Gestion, ont fait assigner M.[V], la SCI Sarah Bernhardt en sa qualité de venderesse, et la SARL Patrimoine Evolution devant le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, pour obtenir réparation de leurs préjudices.

Le tribunal, suivant jugement contradictoire du 5 novembre 2019, a :

- déclaré irrecevables les demandes formées par la SARL CLB Gestion en sa qualité de syndic ;

- déclaré irrecevables les demandes formées par la SAS Résidences Services Gestion ;

- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire ;

- rejeté les demandes des parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile, et condamné la SARL CLB Gestion aux dépens.

Le tribunal a fondé sa décision d'irrecevabilité des demandes de la SAS CLB Gestion ès qualités, sur le manque de précision suffisante de l'autorisation donnée par le syndicat au syndic pour agir en son nom, et d'autre part sur le fait que le syndic ne demandait condamnation que pour des désordres affectant les parties privatives, et non les parties communes de l'immeuble.

Sur la recevabilité des demandes de la SAS Résidences Services Gestion : le tribunal a énoncé que le bail commercial dont cette société était titulaire ne lui conférait pas le pouvoir d'agir en réparation des désordres affectant les parties communes.

Par déclaration reçue au greffe le 5 décembre 2019, le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic la SARL CLB Gestion, et la SAS Résidences Services Gestion ont interjeté appel de ce jugement, en toutes ses dispositions.

Les appelants demandent à la cour d'« annuler » le jugement, de déclarer leurs demandes recevables, et de condamner in solidum M. [V], la SCI Sarah Bernhardt et la SARL Patrimoine Evolution à payer à la SAS Services Gestion la somme principale de 34.777,02 euros, en réparation des désordres constatés sur les parties privatives, et au syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic, les sommes principales de 229,90, 4 530 et 680 euros, en réparation des désordres affectant les parties communes de la résidence.

Sur l'action du syndicat, concernant les parties communes : le syndicat des copropriétaires, représenté par le syndic la SARL CLB Gestion (ci-après : le syndicat), rappelle les dispositions de l'article 55 du décret du 17 mars 1967 ; il fait valoir que l'assemblée générale a, lors d'un vote du 25 avril 2018, donné au syndic une autorisation régulière, qui précise la nature et l'objet de l'action en justice, et qui désigne chacun des défendeurs, au contraire de ce qu'a énoncé le tribunal. Le syndicat ajoute que cette autorisation a d'ailleurs été confirmée et régularisée, s'il en était besoin, par une nouvelle résolution votée le 3 mars 2020. Sur le fond : il fait état des constatations et de l'avis de l'expert, pour demander réparation au maître d'oeuvre et au constructeur-vendeur, la SCI Sarah Bernhardt, sur le fondement soit de la garantie décennale, soit de

la garantie de parfait achèvement, soit de la responsabilité contractuelle de droit commun.

La SARL Résidences Services Gestion soutient elle aussi que son action est recevable, et qu'elle a qualité pour agir au nom des copropriétaires en réparation des désordres affectant les parties privatives, en vertu du mandat de gestion donné par les copropriétaires à la SARL Sarah Bernhardt Gestion, aux droits de laquelle se trouve subrogée la SARL Résidences Services Gestion : ce mandat de gestion confère à la société preneuse le pouvoir d'exercer, au nom des bailleurs, les actions fondées sur les garanties décennale et biennale.

Sur le fond : la SARL Résidences Services Gestion décrit les différents désordres, qui se retrouvent en série dans les 109 appartements, et qui pour la plupart n'ont pas été mentionnés dans le procès-verbal de réception.

M. [V] conclut à la confirmation intégrale du jugement.

Sur l'action exercée par le syndic de copropriété : il réaffirme que l'autorisation initiale donnée par l'assemblée générale le 25 avril 2018 est irrégulière, faute notamment de porter sur une action en justice sur le fond ; et il critique l'autorisation donnée a posteriori le 3 mai 2020, en ce qu'elle porte sur une action en réparation des désordres affectant non seulement les parties communes de l'immeuble, mais aussi les lots privatifs, en contravention à la loi du 10 juillet 1965 qui ne permet au syndicat des copropriétaires d'agir que pour les parties communes de l'immeuble. M. [V] conteste subsidiairement le bien fondé de l'action du syndicat, aux motifs que les désordres affectant les parties communes ne relèvent d'aucune des garanties légales particulières incombant à l'architecte, que l'action du syndicat ne pourrait donc se fonder que sur la responsabilité contractuelle de droit commun (dommages intermédiaires), et que le syndicat ne rapporte pas la preuve de fautes commises par M. [V], et qui engageraient sa responsabilité.

Sur l'action formée par la SARL Résidences Services Gestion, pour les parties privatives : M. [V] maintient que cette société ne détient pas le pouvoir d'agir au nom des copropriétaires, vu les termes du mandat de gestion que les copropriétaires lui ont donné, et qui ne lui permet d'agir que contre le vendeur. Subsidiairement, M.[V] discute le bien fondé des demandes, en relevant notamment que certains désordres n'ont pas fait l'objet de réserves, que seules les anomalies affectant le système d'éclairage pourraient l'obliger à garantie, mais que l'expert n'a pas rempli sa mission sur ce point, en s'abstenant de vérifier l'existence de ce désordre dans les 109 logements que comporte la résidence. Au cas où il serait néanmoins condamné, M. [V] demande que sa condamnation soit limitée à 20 % du montant des réparations à effectuer dans les parties privatives.

Il demande enfin que la SCI Sarah Bernhardt soit elle-même condamnée à le garantir de toute condamnation qui serait prononcée contre lui.

La SCI Sarah Bernhardt et la SARL Patrimoine Evolution, à qui le syndicat et la SAS Résidences Services Gestion font signifier leur acte d'appel le 14 février 2020, puis leurs conclusions d'appel le 12 mars 2020 (au siège de ces sociétés), ne se sont pas fait représenter devant la cour.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 9 septembre 2021.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des demandes et observations des parties représentées, à leurs dernières conclusions déposées au greffe le 30 juillet 2020 et le 31 août 2021.

Motifs de la décision :

Il convient de considérer que les parties appelantes demandent la réformation du jugement, puisque les moyens qu'elles énoncent au soutien de leurs demandes ne peuvent tendre qu'à la réformation du jugement, et non pas à son annulation, comme indiqué par erreur dans le dispositif de leurs conclusions.

I - Sur la recevabilité :

Ainsi que le fait valoir le syndicat, une assemblée générale de copropriétaires peut ratifier a posteriori une action en justice engagée par le syndic sans autorisation, ou régulariser une autorisation irrégulière, y compris en cause d'appel, tant que la juridiction n'a pas statué (Cass. Civ. 3ème 7 juillet 1999, pourvoi no 97-15.419 ;15 mars 2006, pourvoi no04-20.023 ; 19 décembre 2006, pourvoi no 05-20.559).

Le syndicat verse aux débats le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires qui s'est tenue le 3 mars 2020 ; il en ressort que l'assemblée générale, dans une résolution no 15, a "décidé d'habiliter [le syndic] pour toute procédure devant toute juridiction compétente et à tous niveaux de juridiction nécessaires (tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand et cour d'appel de Riom), afin d'engager notamment la responsabilité contractuelle et décennale des vendeurs et maîtres de l'ouvrage, le promoteur immobilier la SCI Sarah Bernhardt et la SARL Patrimoine Evolution et architectes, M. [P] [V] ou tout autre constructeur dont la responsabilité pourrait être recherchée au titre de la réalisation des travaux, pour obtenir la condamnation de ces derniers à supporter le coût des travaux de reprise nécessaires pour la réparation des désordres affectant la copropriété, constatés et chiffrés dans le rapport d'expertise à 37 545,85 euros HT soit 45 055,02 euros TTC, outre le coût de l'expertise, et plus précisément les désordres affectant les parties communes suivants : [le procès-verbal énumère ensuite une série d'anomalies de différentes natures] ; / Et les désordres affectant les parties privatives suivants : [...]. / L'assemblée générale, invitée à se prononcer sur l'habilitation, autorise le syndic à introduire l'action en première instance et à la poursuivre en interjetant appel. [...] / Cette résolution est adoptée à l'unanimité des présents ou représentés".

Par cette résolution, l'assemblée générale a régulièrement autorisé a posteriori le syndic à engager l'instance en cause, en première instance puis en appel, et a, s'il en était besoin, régularisé la précédente autorisation qu'elle avait donnée le 25 avril 2018, en précisant, dans sa résolution du 3 mars 2020, l'objet (avec l'indication de chacune des anomalies), la nature de l'action à exercer, ainsi que les personnes à assigner, conformément à l'article 55 du décret du 17 mars 1967. La circonstance que cette résolution ait porté aussi sur les parties privatives de l'immeuble, en infraction à l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 qui limite les attributions du syndicat des copropriétaires à la conservation de l'immeuble et à l'administration des parties communes, ne retire pas à la résolution en cause sa validité et son plein effet, pour ce qui concerne les parties communes. L'action du syndicat est donc recevable, pour les seules parties communes ; le jugement sera réformé sur ce point.

Sur les parties privatives : la SARL Résidences Services Gestion se prévaut du pouvoir donné par chacun des copropriétaires, dans le mandat de gestion inséré dans le bail commercial signé par chacun d'eux (pièce no 6 des appelants) ; ce mandat est ainsi rédigé, dans son paragraphe ayant trait aux actions fondées sur le droit de la construction : « Le Bailleur mandate irrévocablement le Preneur et en tant que de besoin, le subroge formellement dans ses droits et obligations relatifs à la mise en jeu contre le vendeur des garanties biennale et décennale auxquelles ce dernier est tenu, et à mettre en jeu également l'assurance dommages-ouvrage. Dans ces cas les indemnités versées seront encaissées par le Preneur qui aura la charge de faire exécuter les travaux ».

Les termes de ce mandat limitent expressément sa portée, comme le fait valoir M.[V], aux actions en garantie décennale et biennale exercées contre le seul vendeur, soit la SCI Sarah Bernhardt, et aux actions relevant de la garantie dommages-ouvrages ; ils ne permettent au mandataire d'exercer aucune autre action, notamment contre l'architecte ou contre les constructeurs. L'action formée par la SARL Résidences Services Gestion contre M. [V] sera déclarée irrecevable, de même que son action engagée contre la SARL Patrimoine Evolution, qui n'a pas non plus la qualité de vendeur des différents lots.

II – Sur le fond :

a) Parties communes :

Le syndicat demande réparation pour les anomalies suivantes : absence d'une échelle pour l'accès au toit-terrasse ; défauts du carrelage de l'ascenseur ; défaut de fermeture des toilettes à usage commun, reprise d'une plaque sur portillon, et absence de gravier sur un toit-terrasse ; défauts de conformité de la colonne sèche ; défauts affectant la laverie, la peinture extérieure et le local technique (pages 34 et 35 des conclusions des appelants).

Il convient d'examiner ces demandes au vu des fondements juridiques invoqués, et à l'égard d'une part de l'architecte, tenu à la garantie décennale, aux autres garanties propres au droit de la construction, et soumis le cas échéant à la responsabilité contractuelle de droit commun ; et à l'égard d'autre part de la SCI Sarah Bernhardt, tenue elle aussi, conformément à l'article 1646-1 du code civil et en qualité de vendeur d'immeuble à construire, des obligations auxquelles sont tenus les architectes et les entrepreneurs (garantie décennale et biennale notamment), ainsi qu'aux garanties particulières au droit de la vente.

En revanche la SARL Patrimoine Evolution, qui n'a pas vendu les lots en l'état futur d'achèvement, qui n'a contracté ni avec l'architecte ni avec les entrepreneurs, et qui n'est donc ni constructeur ni vendeur, n'est tenue quant à elle d'aucune responsabilité ou garantie envers les acquéreurs des lots, ou le syndicat des copropriétaires pour les parties communes ; les demandes formées contre elles ne sont pas fondées et doivent être rejetées.

L'expert, dont les constatations ne sont pas discutées, a notamment relevé et décrit les anomalies suivantes (pages 60 et suivantes de son rapport du 16 novembre 2015) :

1) Absence d'échelle pour accéder à la toiture-terrasse au droit des « skydômes » (page 63 du rapport d'expertise) : défaut d'achèvement selon l'expert, non réservé à la réception ;

2) Désordres du joint de carrelage de l'ascenseur, qui présente des affleurements pouvant porter atteinte à la sécurité des personnes utilisatrices et du personnel en charge de l'entretien du revêtement de sol ; la cause en réside, selon l'expert, dans une mauvaise conception et un défaut de mise en oeuvre ; cette anomalie n'a pas été réservée lors de la réception (cf. le procès-verbal de réception et ses annexes, pièce no 52 des parties appelantes), et n'apparaît pas non plus dans une lettre de mise en demeure envoyée le 21 février 2012 à la SARL Patrimoine Evolution (pièce no19) ; il en est fait mention pour la première fois dans un procès-verbal de constat dressé le 12 juillet 2012 par Me [K] [G], huissier de justice à [Localité 6], sollicité par le syndic (pièce no29 des appelants) ;

3) La porte des toilettes communes du rez-de-chaussée ne peut pas fermer, en raison d'un défaut d'achèvement et d'une mauvaise exécution des revêtements de sol (pages 51 et 63 du rapport d'expertise) ; anomalie non réservée à la réception ;

4) Absence de gravillons de protection sur la terrasse de la laverie, comme prévu au CCTP (pages 53 et 63 du rapport d'expertise) ; ce défaut d'achèvement n'a pas été réservé lors de la réception ;

5) Absence de butées au droit de l'ouverture de la porte d'entrée, de sorte que l'angle du tableau se dégrade en partie haute et basse ; déplacement et défaut de fonctionnement du clavier à code permettant l'ouverture de la porte (pages 52, 53 et 62 du rapport d'expertise), ces défauts n'ayant pas été réservés à la réception ;

6) Défauts de la colonne sèche destinée aux services de secours incendie : elle comporte au rez-de-chaussée un raccordement d'un diamètre inférieur à la colonne principale, et elle n'est pas étanche dans les étages supérieurs ; ces défauts portent atteinte à la sécurité, et résultent d'une faute d'exécution (page 60 du rapport d'expertise) ; le défaut de diamètre a été réservé lors de la réception ;

7) Absence d'un siphon d'évacuation dans le sol de la laverie, alors que ce siphon, non prévu, est indispensable en cas d'inondation ; cette anomalie a fait l'objet d'une réserve à la réception ;

8) Anomalie dans l'armoire de protection des circuits électriques, au sous-sol : absence de plastrons de sécurité (page 61 du rapport d'expertise) ; anomalie non réservée à la réception ;

9) Mauvaise exécution des peintures en façade, avec des « fantômes », des traces de rebouchage de fixations d'échafaudage et quelques microfissures, tous défauts d'ordre esthétique selon l'expert, non réservés à la réception.

Les désordres no 2, affectant un élément d'équipement, apparus après la réception, et qui selon l'avis non contesté de l'expert comportent un danger pour les occupants de l'immeuble et pour les personnes chargées de l'entretien, relèvent de la garantie décennale prévue à l'article 1792 du code civil ; la SCI venderesse et l'architecte sont tenus de plein droit à cette garantie ; le syndicat demande de ce chef une somme de 750 euros, selon un devis ABS qu'il ne produit cependant pas aux débats ; l'expert a en revanche annexé à son rapport un devis de l'EURL [D] [C] du 13 décembre 2013, prévoyant la dépose du carrelage de l'ascenseur et sa reprise pour un coût de 220 euros, ce devis étant approuvé par l'expert (page 64 de son rapport). Il sera fait droit à ce chef de demande, dans la limite de cette somme.

Les anomalies de la colonne sèche (défaut no 6) doivent être distinguées l'une de l'autre : l'erreur de diamètre du raccordement en rez-de-chaussée affecte un élément d'équipement, et porte atteinte à la sécurité de l'ouvrage dans son ensemble, mais elle a été réservée à la réception : elle ne relève donc pas de la garantie décennale, applicable aux seuls dommages apparus après réception, mais de la garantie de parfait achèvement, qui selon l'article 1792-6 du code civil incombe aux seuls entrepreneurs, et non pas aux architectes, ou aux vendeurs d'immeubles à construire (article 1646-1 du code civil) ; le syndicat n'a donc aucune action contre M. [V] ou contre la SCI Sarah Bernhardt en réparation de ce défaut.

Le défaut d'étanchéité de la colonne sèche, constaté par l'expert au cinquième étage (page 49 du rapport), constitue un désordre apparu après réception, résultant d'une mauvaise exécution par l'entreprise chargée de cette partie de l'ouvrage ; ce défaut, selon l'expert, porte atteinte à la sécurité du bâtiment et le rend donc impropre à sa destination (page 60 du rapport) ; l'architecte et la SCI sont tenus à cette garantie de plein droit, même si le défaut résulte de fautes d'exécution de l'entrepreneur : il leur incombait d'appeler en cause l'entreprise concernée, et de demander sa garantie. Le syndicat fait état d'un devis de remise en état Auvergne Fluides, annexé au rapport d'expertise, mais qui porte sur la réfection des deux anomalies : défaut de diamètre du

raccordement, et défaut d'étanchéité ; il convient de n'accueillir la demande que pour le coût des travaux de reprise de l'étanchéité, outre les travaux de remise en pression et de certificat APAVE, soit selon le devis pour une somme de 780 + 360 + 650 = 1 790 euros hors taxe, et 1 969 euros taxe comprise.

Aucune des autres anomalies dont il est demandé réparation ne relève de la garantie décennale, au sens de l'article 1792 du code civil : les dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Le montant total des réparations de nature décennale incombant à l'architecte et à la SCI pour les parties communes s'établit donc à 220 + 1969 = 2 198 euros ; ils seront condamnés in solidum à payer cette somme au syndicat. Il sera fait droit à la demande de garantie de M.[V] de ce chef, mais dans la limite de 20 % seulement : la responsabilité de l'architecte apparaît prépondérante, puisqu'il est professionnel de la construction et qu'en sa qualité de maître d'oeuvre il lui appartenait de veiller à la bonne réalisation des travaux.

Les anomalies no 1 et 4 (absence d'échelle d'accès à la toiture-terrasse, absence de gravillons sur la terrasse de la laverie) ne relèvent pas non plus de la garantie biennale de bon fonctionnement de l'article 1792-3 du code civil ; elles constituent des défauts de conformité au contrat, défauts qui étaient apparents au jour de la réception, et qui sont couverts par l'absence de réserve exprimée à cette date ; le syndicat n'a aucune action de ce chef.

Les défauts no 3 et 5 (impossibilité de fermer la porte des toilettes en raison de fautes d'exécution, absence de butée de la porte d'entrée qui provoque des dégradations, déplacement et défaut de fonctionnement du clavier à code), constituent en revanche des désordres relevant par nature de la garantie biennale de l'article 1792-3, applicable aux éléments d'équipement ; ils n'ont cependant fait l'objet ni de réserves à la réception, alors qu'ils étaient apparents, ni non plus de réclamation dans le délai d'un mois prévu à l'article 1642-1 du code civil, à compter de la livraison de l'immeuble du 31 mars 2011, faite à la SARL Sarah Bernhardt Gestion qui représentait l'ensemble des acquéreurs. Le syndicat n'a donc pas d'action non plus en réparation de ces désordres.

Le syndicat demande enfin l'allocation d'une somme de 4 530 euros, « au titre des travaux dans la laverie, peinture extérieure, mise en conformité du local technique selon devis de l'entreprise ABS », donc semble-t-il pour les anomalies no 7, 8 et 9 ; il ne produit cependant pas le devis ABS dont il fait état, qui est seulement cité dans le rapport d'expertise en pages 64 et 65, mais sans précision sur le coût de chaque poste de travaux (lesquels comprennent aussi la reprise d'autres désordres, tels que l'absence de fermeture de la porte des toilettes), de sorte que la cour n'est pas en mesure de vérifier le coût précis des travaux nécessaires à la reprise des trois anomalies en cause, étant observé au surplus que les défauts d'aspect de la peinture extérieure, bien qu'apparents à la réception, n'ont pas fait l'objet de réserves, de sorte que le syndicat, faute d'action engagée contre la SCI dans le mois de la livraison, ne peut obtenir réparation de ce chef. Le syndicat ne justifiant pas du montant de son préjudice pour les deux autres anomalies, sa demande n'est pas fondée et doit être rejetée.

b) Parties privatives :

La SARL Résidences Services Gestion demande réparation, à hauteur de 34 777,02 euros, pour les travaux, dans les parties privatives (les logements), de remplacement de réglettes d'éclairage défectueuses dans les cuisines, de déplacement des convecteurs, et de remplacement des luminaires dans les salles de bain.

L'expert a constaté, en visitant certains des logements, que les dispositifs d'éclairage sous les éléments de cuisine étaient trop proches de pièces de bois, ce qui provoquait

l'échauffement de celles-ci, comme le confirmaient des traces de brûlures ; que dans de nombreux studios des convecteurs étaient placés derrière une porte, situation qui comportait elle aussi un risque d'échauffement et de brûlure, lorsque la porte restait ouverte ; et que le dispositif d'éclairage dans les salles de bains semblait inapte et dangereux pour les occupants (pages 27, 54, 55, 56, 57, 63 et 64 du rapport d'expertise). Ces anomalies n'ont pas été réservées lors de la réception, et ne sont apparues que par la suite, à l'usage des logements. L'emplacement défectueux des dispositifs d'éclairage et des convecteurs, éléments d'équipement, crée un risque de détérioration et même d'incendie, qui rend l'immeuble impropre à sa destination.

La SARL Résidences Services Gestion verses aux débats un devis établi le 27 avril 2014 par l'entreprise P-B-Elec Rénove, prévoyant des travaux sur l'éclairage des cuisines (remplacement de 30 réglettes linolite, pose de 109 plaques inox et de 109 tubes halogène), sur le dispositif de chauffage (« déplacements de chauffage » pour 35 logements), et sur l'éclairage des salles de bains (dépose des luminaires, installation de réglettes et de moulures dans les salles de bains des 109 logements), l'ensemble pour un prix de 34 777,02 euros hors taxe (pièce no 53 produite par les appelants). L'expert a eu communication de ce devis, et il l'a qualifié d'acceptable, ainsi que les autres devis qui lui étaient soumis (page 64 du rapport d'expertise). Le caractère généralisé des défauts du système d'éclairage apparaît établi, sinon par les constatations personnelles de l'expert qui n'a pas visité tous les logements, du moins en revanche par un second constat de Me [W] [S] huissier de justice à [Localité 6], qui a procédé le 15 mars 2013 à la visite de tous les lots privatifs, et constaté dans chacun d'eux que le luminaire de la cuisine se situait à la jonction d'un meuble de rangement (pièce no 42 des appelants, l'expert s'étant fondé sur les constatations de Me [S], préalables au dépôt du rapport).

La demande de la SARL Résidences Services Gestion apparaît donc bien fondée de ce chef, et il y sera fait droit, à l'encontre de la SCI Sarah Berhnardt.

Les dépens, y compris les frais de référé et d'expertise, seront mis à la charge in solidum de M. [V] et de la SCI Sarah Bernahrdt ; il sera fait droit à la demande de garantie de M. [V] de chef à hauteur de 20 % seulement, vu sa responsabilité personnelle, en sa qualité de maître d'oeuvre, dans la survenue des anomalies constatées.

Il n'est pas contraire à l'équité de laisser à chacune des parties la charge des frais d'instance irrépétibles qu'elle a exposés.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement après en avoir délibéré, par arrêt de défaut et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ;

Infirme le jugement déféré ;

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevables les demandes formées par la SARL Résidences Services Gestion contre M. [P] [V] et la SARL Patrimoine Evolution ;

Déclare recevables les demandes formées par le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 8], représenté par son syndic la SARL CLB Gestion, contre M.[V] et contre la SCI Sarah Bernhardt ;

Rejette toutes les demandes formées par le syndicat contre la SARL Patrimoine Evolution ;

Condamne in solidum M. [P] [V] et la SCI Sarah Bernhardt à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 2 189 euros à titre de dommages et intérêts, par

application de l'article 1792 du code civil ; condamne la SCI Sarah Bernhardt à garantir M. [V] de ce chef, à concurrence de 20 % ;

Condamne la SCI Sarah Bernhardt à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 34 777,02 euros à titre de dommages et intérêts, par application de l'article 1792 du code civil ;

Condamne in solidum M. [P] [V] et la SCI Sarah Bernhardt aux dépens de première instance et d'appel, y compris les frais de référé et d'expertise ; condamne la SCI Sarah Bernhardt à garantir M. [V] de ce chef, à concurrence de 20 % ;

Rejette le surplus des demandes.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de riom
Formation : Co
Numéro d'arrêt : 19/022721
Date de la décision : 05/01/2022
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.riom;arret;2022-01-05;19.022721 ?
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