COUR D'APPEL DE RIOM Chambre Commerciale
POURVOI No M 0870146
ARRET No-
DU : 18 Juin 2008
N : 07 / 01559 CJ Arrêt rendu le dix huit Juin deux mille huit
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Mme Claudine BRESSOULALY, Présidente Mme Chantal JAVION, Conseillère M. Vincent NICOLAS, Conseiller
lors des débats et du prononcé : Mme C. GOZARD, Greffière
Sur APPEL d'une décision rendue le 4. 5. 2007 par le Tribunal de commerce LE PUY EN VELAY
A l'audience publique du 14 Mai 2008 Mme JAVION a fait le rapport oral de l'affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 785 du CPC
ENTRE :
M. Jacques-René X...... KAPPEL GRAFFENHAUSEN 77966 ALLEMAGNE Représentant : Me Barbara GUTTON-PERRIN (avoué à la Cour)- Représentant : Me François Y... (avocat au barreau de STRASBOURG)
APPELANT
ET :
SAS SATAB RUBANS
3 Route du Fau
43240 SAINT JUST MALMONT Représentant : Me Sébastien RAHON (avoué à la Cour)- Représentant : la SCP CLERGUE COCHET ABRIAL ROBILLARD (avocats au barreau de SAINT ETIENNE)
S. A. S. SATAB DECORATION
Z. I. La Garnasse
43240 SAINT JUST MALMONT Représentant : Me Sébastien RAHON (avoué à la Cour)- Représentant : la SCP CLERGUE COCHET ABRIAL ROBILLARD (avocats au barreau de SAINT ETIENNE)
INTIMES
grosse délivrée le à Me Gutton Perrin et Me Rahon
DEBATS :
A l'audience publique du 14 Mai 2008, la Cour a mis l'affaire en délibéré au 18 Juin 2008 l'arrêt a été prononcé publiquement conformément à l'article 452 du Code de Procédure Civile :
FAITS ET PROCEDURE :
Le 1er janvier 1997, il a été conclu un contrat d'agent commercial exclusif entre M. X... et la société SATAB pour la représentation de cette société sur une partie de l'Allemagne et de l'Autriche moyennant une indemnité fixe HT de 8. 000 deuch mark par mois et une commission de 6 % sur les ventes réalisées.
Par courrier du 14 avril 2004, la société SATAB DECORATION, venant aux droits de la société SATAB, a informé M. X... de son intention de proratiser l'indemnité mensuelle fixe à compter du 1er avril 2004 au motif d'une importante baisse de son chiffre d'affaires. Par courrier du 9 juillet 2004, M. X... a répondu qu'il était prêt à accepter la réduction de sa commission fixe à 2. 045, 17 € par mois à la double condition que lui soit confirmé son départ de la société au 31 août 2005 et qu'il lui soit versée une indemnité globale, forfaitaire, transactionnelle et définitive et pour solde de tout compte d'un montant de 22. 870 €.
Après d'autres échanges de correspondances, la société SATAB DECORATION a adressé à M. X... une lettre du 28 septembre 2004 mettant par écrit les dispositions qu'ils auraient arrêtées le jour même portant notamment sur le fixe mensuel de 2. 045, 17 €, le terme de leur collaboration au 31 décembre 2004, et le versement au plus tard le 15 septembre 2005 d'une indemnité transactionnelle définitive et globale de 22. 870 €. M. X... a cessé son activité à la fin de l'année 2004.
Début octobre 2005, des courriers se sont croisés entre la société SATAB DECORATION et Me Y..., conseil de M. X..., la société ayant d'une part adressé à son ancien agent une lettre datée du 4 octobre 2005 dans laquelle elle lui envoie avec un peu de retard un chèque de 22. 870 € ainsi qu'un exemplaire de l'accord transactionnel à signer et à lui retourner, et Me Y..., ayant d'autre part adressé à la société SATAB DECORATION une lettre datée du 3 octobre 2005 dans laquelle en premier lieu, il conteste les termes du courrier du 28 septembre 2004 son client faisant observer qu'il n'a jamais été convenu d'une indemnité transactionnelle, définitive et globale de 22. 870 € et qu'aucune convention n'a d'ailleurs jamais été passée à ce sujet. En second lieu, il observe que cette indemnité qui aurait dû être versée au plus tard le 15 septembre 2005 n'a toujours pas été payée. Dans ces conditions, il indique que son client sollicite le versement d'une indemnité de clientèle calculée conformément à la jurisprudence en la matière.
M. X... n'a jamais signé l'exemplaire d'accord transactionnel mais a encaissé le chèque. Les échanges de correspondances se sont poursuivis sans parvenir à un accord entre les parties de sorte que M. X... a finalement saisi la justice par assignations des 24 mai 2006 et 3 janvier 2007 aux fins de condamner les deux sociétés SATAB à lui payer les sommes de 18. 406 € au titre de rappels de commissions, 154. 112 € au titre de l'indemnité de clientèle, 19. 263, 90 € au titre de l'indemnité de préavis, 50. 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, et 10. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par jugement du 4 mai 2007, le tribunal de commerce du PUY a débouté M. X... de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné au paiement d'une indemnité au titre des frais irrépétibles estimant qu'il était rapporté la preuve d'une transaction intervenue entre les parties dès lors que M. X... n'avait pas contesté les termes du courrier du 28 septembre 2004 pendant plus d'un an et qu'il avait encaissé le chèque de 22. 870 € correspondant à l'indemnité transactionnelle réclamée par lui dans son courrier du 9 juillet 2004.
Vu l'appel général interjeté par M. X... contre la SAS SATAB RUBANS et la SAS SATAB DECORATION suivant déclaration du 20 juin 2007.
Vu les dernières conclusions de l'appelant signifiées le 10 mars 2008 et celles des intimées signifiées le 29 novembre 2007.
PRETENTIONS DES PARTIES :
M. X... demande d'infirmer le jugement et reprend ses réclamations initiales en les dirigeant exclusivement contre la société SATAB DECORATION. Il conteste l'exception de transaction qui lui est opposée aux motifs :
- que l'accord prétendu est contraire aux dispositions d'ordre public des articles L. 134-12 et L. 134-16 du code de commerce dès lors que le montant de 22. 870 € ne couvre même pas le rappel de commissions et l'indemnité de préavis, que ce montant proposé dans son courrier du 9 juillet ne correspondait qu'à l'indemnité de clientèle et qu'il entendait alors par ailleurs continuer son activité jusqu'au 31 août 2005,- que le projet d'accord transactionnel transmis par le courrier du 4 octobre 2005 fait état de données inexactes en mentionnant un courrier du 31 décembre 2004 notifiant à l'agent commercial la rupture du contrat alors qu'il n'a jamais existé,- qu'il n'existe pas de concessions réciproques,- qu'en tout état de cause le délai de versement de l'indemnité a été dépassé alors qu'il s'agit d'un terme constituant une condition résolutoire.
Il évalue ses diverses indemnités de la manière suivante :
- rappel de commissions : montant de la réduction unilatérale du fixe mensuel d'avril 2004 à décembre 2004, soit 2. 045, 17 € X 9,- indemnité de clientèle : deux ans de commissions suivant la moyenne des trois dernières années, soit 77. 055, 67 € X 2,- indemnité de préavis sur trois mois : 77. 055, 67 : 12 = 6. 421, 31 € X 3, étant précisé que la notification de la rupture est intervenue le 4 octobre 2005, soit postérieurement à son départ,- rupture abusive appréciée à 50. 000 € au regard du contexte.
La société SATAB RUBANS et la société SATAB DECORATION ont conclu à la confirmation du jugement. Elles rappellent que si l'article 2044 du code civil prévoit que la transaction est un contrat rédigé par écrit, la jurisprudence a cependant toujours admis que cette exigence devait être interprétée comme ne concernant que la preuve du contrat et non sa forme, laquelle preuve est libre en matière commerciale. Elles estiment que la transaction s'est déroulée en 3 temps : réduction du montant du fixe par SATAB, acceptation par M. X... contre un départ en retraite au 31 août 2005 et versement d'une indemnité globale, forfaitaire, transactionnelle et définitive de 22. 870 €, accord intervenu le 28 septembre 2004 avec avancement du départ à la retraite au 31 décembre 2004 et versement de l'indemnité au 15 septembre 2005.
Elles soutiennent que cette transaction a bien été acceptée par l'appelant qui a encaissé le chèque remis avec quelques jours de retard, même s'il n'a pas retourné l'exemplaire signé, et qu'elle n'est aucunement entachée de nullité dès lors qu'elle porte uniquement sur l'indemnité de rupture, que le rappel de commissions est totalement fantaisiste, et que le préavis a été respecté puisque M. X... a été payé jusqu'au 31 décembre 2004.
SUR QUOI :
Attendu qu'il échet en premier lieu de mettre hors de cause la société SATAB RUBANS, le contrat initial d'agent commercial conclu avec M. X... ayant été repris par la société SATAB DECORATION en janvier 2001 ;
Attendu que s'il est constant que des pourparlers ont été engagés en 2004 entre les parties pour négocier le départ de M. X..., il n'est pas établi par contre l'existence d'une transaction valable et régulière contrairement à ce qu'a retenu le tribunal de commerce dès lors que la lettre du 28 septembre 2004 de la société SATAB DECORATION n'a jamais fait l'objet d'une acceptation expresse de la part de M. X... ni même d'une acceptation tacite suffisamment claire et précise, sa cessation d'activité en décembre 2004 pouvant parfaitement lui avoir été imposée et l'encaissement du chèque de 22. 870 € l'ayant été à titre d'acompte tel que cela ressort du courrier de son conseil du 20 décembre 2005 ;
Qu'il a au contraire clairement manifesté son refus en faisant intervenir son avocat et en ne retournant pas l'exemplaire d'accord transactionnel joint au courrier de la société SATAB DECORATION du 4 octobre 2005 ;
Qu'il apparaît au surplus que tant dans le courrier de 28 septembre 2004 que dans " l'accord transactionnel " non signé par M. X..., il n'existait pas de concessions réciproques, tous les avantages étant du côté de la société SATAB DECORATION ;
Que cette dernière était d'ailleurs bien consciente du caractère irrégulier de cet accord transactionnel, ne pouvant intervenir qu'après la rupture du contrat, puisqu'elle fait état de la notification d'une rupture par courrier du 31 décembre 2004 qui n'a en fait jamais existé ;
Attendu qu'il convient par suite d'infirmer le jugement et de statuer au fond sur les demandes indemnitaires présentées par l'appelant ; Que l'article 17 du contrat prévoit sous la dénomination " Montant des commissions " une indemnité fixe mensuelle de HT de 8. 000 DEM et une commission de 6 % sur les ventes ;
Que M. X... est bien fondé à réclamer un rappel de ses commissions fixes sur 9 mois, soit la différence entre la contre valeur de 8. 000 DM et le règlement mensuel de 2. 045, 17 €, celles-ci ayant été réduites unilatéralement par la société SATAB DECORATION à 2. 045, 17 € d'avril à décembre 2004, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 novembre 2005 ;
Qu'il résulte des pièces produites par l'appelant, non contestées par la partie adverse, que la moyenne des commissions mensuelles sur les trois dernières années était de 6. 421, 31 € ; Que suivant la jurisprudence la plus courante, l'indemnité de clientèle est égale au montant des de deux années de commissions calculées sur la moyenne des trois dernières années, soit en l'espèce la somme de 154. 112 € ;
Qu'il n'a pas été notifié à M. X... le préavis de 3 mois prévu par l'article 25 du contrat ; Qu'il sera donc fait à sa demande d'indemnité de 19. 263, 93 € ;
Qu'il y a lieu par contre de rejeter sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat qui n'apparaît pas suffisamment caractérisée ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi
Infirme le jugement déféré.
Statuant à nouveau,
Dit qu'il n'est pas établi l'existence d'une transaction valable et régulière entre M. Jacques René X... et la société SATAB DECORATION.
Condamne la SAS SATAB DECORATION à payer à M. Jacques René X... :
- la différence entre la contre valeur par mois de 8. 000 DM et les versements mensuels de 2. 045, 17 € sur une période de 9 mois au titre de rappel des commissions fixes d'avril à décembre 1994, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 novembre 2005,- la somme de 154. 112 € au titre de l'indemnité de clientèle et la somme de 19. 263, 93 € au titre de l'indemnité de préavis, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation.
Déboute M. X... de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive.
Met hors de cause la SAS SATAB RUBANS.
Condamne la SAS SATAB DECORATION à payer à M. Jacques René X... la somme de 4. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Condamne la SAS SATAB DECORATION aux dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière, La présidente
C. GozardC. Bressoulaly