COUR D'APPEL DE RIOM 2ème Chambre
ARRET N AFFAIRE N : 03/02630 ARRÊT RENDU LE vingt cinq Janvier deux mille cinq JAF, origine Tribunal de Grande Instance de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 07 Août 2003, enregistrée sous le n 02/4419 ENTRE : M.X APPELANT ET : Mme X... INTIMEE Y... : Après avoir entendu, en application des dispositions des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, à l'audience du 06 Décembre 2004, hors la présence du public, sans opposition de leur part, le Conseiller ayant présenté un rapport, les avocats des parties en leurs plaidoiries, les Magistrats chargés du rapport en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré et à l'audience publique de ce jour, indiquée par les magistrats rapporteurs, le Président a prononcé publiquement l'arrêt suivant :
EXPOSE DU LITIGE Du mariage entre Z... et X... sont issus deux enfants: Roxanne, née le 15/03/1990 et Alexiane, née le 25/11/1992. Par jugement rendu le 13 octobre 1998, le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Clermont-Ferrand a, sur leur requête conjointe, prononcé le divorce des époux A..., confié l'exercice de l'autorité parentale conjointement aux deux parents, fixé la résidence des enfants chez la mère, organisé un doit de visite et d'hébergement du père et fixé sa part contributive à l'entretien et l'éducation des enfants à 609.80 euros par mois. Par ordonnance de référé du 11 juillet 2001, il a été fait interdiction à X... de quitter le territoire national avec les deux enfants jusqu'au 30 juin 2002, sauf accord exprès du père; Par ordonnance de référé du 12 juin 2002, X... a été autorisée à faire établir des passeports au profit des enfants; MadameY est partie vivre en Tha'lande avec ses filles et Monsieur Z... a saisi le Juge aux affaires familiales du Tribunal de grande Instance de CLERMONT-FERRAND le 13 décembre 2003 : par
ordonnance en date du 7 août 2003, le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Clermont-Ferrand a débouté Z... de sa demande de transfert de la résidence habituelle des enfants ainsi que de sa demande en suppression de pension alimentaire; Par déclaration régulière en date du15 septembre 2003, Z... a interjeté appel de cette décision. Dans ses conclusions en date du 13 janvier 2004, l'appelant expose que Madame X... a obtenu l'autorisation d'établir des passeports pour un séjour limité aux vacances en Turquie, que le Juge aux affaires familiales avait été particulièrement explicite sur la portée de l'autorisation, que son ex épouse a donc trompé la religion du Tribunal alors même qu'elle préparait son départ de longue date, qu'il ne souscrit pas à son projet de vie qui est imposé aux enfants mineurs , que le suivi de la scolarité reste une préoccupation et que la scolarité par le biais du CNED est un leurre ; il n'y a aucune garantie dans le suivi et dans le contrôle des connaissances ; il ne sait rien de la façon, dont vit la mère ni d'ailleurs avec qui elle vit et elle est particulièrement discrète sur ses revenus et charges ; contrairement à ce qu'a écrit le premier juge, ce n'est pas un ressentiment à l'égard des son ex-épouse qui l'anime puisqu'il partage sa vie avec Madame B... depuis des années . Il a été sans nouvelle de ses enfants pendant plusieurs semaines et a du prendre contact avec l'ambassade pour connaître l'adresse de la mère et reprendre contact ; l'éloignement géographique n'est pas motivé par des motifs raisonnables et contrarie de manière sérieuse et durable ses contacts avec ses enfants ; le coût pour aller voir ses enfants en Tha'lande est démesuré , il a du contracter un emprunt pour aller voir ses filles en Tha'lande ; Il estime que Madame X... ne rapporte pas la preuve d'un quelconque harcèlement de sa part ; Ainsi il subit de façon néfaste l'égo'sme de l'intéressée ; Il demande à la Cour : .
la réformation de l'ordonnance, .
de constater que l'intimée n'a pas respecté les termes de la décision du 12 juin 2002, que si l'ordonnance l'avait autorisée à établir des passeports, Madame X... n'avait pas pour autant obtenu l'autorisation de partir s'installer en Tha'lande ; .
d'ordonner le transfert d'hébergement des enfants au domicile du père, .
de dire et juger que les droits de visite et d'hébergement de la mère s'exerceront à l'amiable et sur le territoire français avec l'obligation pour la mère de prendre en charge les frais de transport des enfants, .
de fixer à la somme de 305 euros par mois la pension alimentaire que la mère devra verser au père pour sa part contributive à l'entretien et l'éducation des deux enfants et de l'y condamner en tant que besoin, .
de supprimer la pension alimentaire mise à sa charge.
Dans ses conclusions en date du 15 septembre 2004, Fabienne X... soutient: que Z... n' a cessé de l'importuner elle et ses filles, allant même jusqu'au harcèlement, au point qu'elle ne pouvait plus travailler normalement et que les enfants manifestaient de l'anxiété pour aller chez leur père, qu'elle n' a jamais fait une quelconque
obstruction aux relations père-enfants, qu'en revanche ce dernier ne les lui avait pas remis à leur mère le 1er août 2002 à l'issue de l'exercice de son droit de visite et d'hébergement et que c'est dans ces conditions qu'elle s'était installée à CH TELLERAULT , qu'elle avait alors informé Monsieur Z... de son adresse et que de toutes façons il a toujours été au courant de la situation des enfants communs avec lesquels il correspond, contrairement à ses dires, et qu'elle ne l'a pas mis à l'écart des résultats scolaires ; Elle juge que la scolarité des enfants est satisfaisante, qu'elles sont très heureuses de vivre en Tha'lande. Contrairement à ce qu'écrit le père, il sait pertinemment ce que font ses filles et est en contact avec elles ; il connaît son ami, Monsieur C... qui n'est pas tha'landais mais cambodgien ; Monsieur Z... persiste dans une attitude négative et destructrice ; de plus il n'assure aucun frais pour ses filles et se limite à la pension alimentaire ; Elle demande à la Cour de confirmer l'ordonnance, subsidiairement d'ordonner une enquête sociale qui en ce qui lui concerne pourra être confiée au consulat de France à KRABI et de condamner l'appelant à lui payer et porter la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. La procédure a été clôturée par une ordonnance du 1er décembre 2OO4 SUR QUOI LA COUR Attendu en premier lieu qu'il convient de rappeler que les courriers des enfants adressés directement à la Présidente de la Chambre de la famille ne sont pas recevables ; Attendu que Madame X... verse à son dossier les copies de plusieurs courriers des enfants adressés à leur père et montrant sans contestation possible que les filles sont très attachées à leur père, lui racontent leur quotidien et la découverte qu'elles font d'un pays et d'un mode de vie différent ; Attendu d'autre part que plusieurs attestations montrent que Madame X... s'est très bien intégrée, se montre une mère attentive, que les enfants se sont également créé un environnement amical,
communiquent, partagent des loisirs avec les enfants de leur quartier, que le couple D... est bien intégré et bien considéré, que le beau-père s'occupe bien des enfants ; Attendu que l'ensemble des témoignages décrit une famille équilibrée et entourant bien les enfants qui s'épanouissent dans cet environnement ;
Attendu que cet aspect n'a pas échappé au premier juge qui a motivé sa décision sur le fait que les enfants sont heureuses dans leur environnement actuel, mais aussi que le père est tenu au courant de leur scolarité, qui est loin d'être aussi mauvaise que le père ne le prétend, ainsi que le fait qu'en l'état le contact n'est pas rompu puisque les enfants manifestent leur attachement à leur père, le souci de garder des liens avec leurs amis et les membres de la famille restés en France ; Attendu que de son côté le père produit des témoignages dont il ressort qu'il s'occupait beaucoup de ses filles lorsqu'elles étaient avec lui et qu'il en était près proche, que les témoins relatent son inquiétude depuis le départ des enfants, qu'il fait état de ses démarches au moment du départ pour savoir où se trouvaient ses filles et leur mère ; Attendu que rien ne permet de pouvoir mettre en doute son angoisse, relevée par le juge dans l'ordonnance du 12 juin 2002, que de même rien ne permet de mettre en doute son désarroi face à la situation actuelle et de le qualifier de façon réductrice en le ramenant à son intérêt personnel d'époux blessé faisant prévaloir cet intérêt sur celui des enfants, ainsi que l'a analysé la décision entreprise, d'autant que le déroulement des faits pourrait tout aussi bien conduire à dire de même que la mère a eu en vue son intérêt, de partir avec son ami, et l'a fait prévaloir sur celui des enfants ; Attendu encore que si la même décision peut mentionner que la mère n'a jamais fait obstruction aux relations père-enfants et ce dès la séparation du couple, ce ne peut être qu'en occultant le fait (et ses conséquences) que la mère a bafoué le
principe de l'autorité parentale conjointe, qui implique que les décisions relatives aux enfants soient prises en commun, qu'en l'espèce celle consistant à couper les enfants de leur environnement et à les emmener à l'autre bout du monde est une décision particulièrement grave que la mère a prise et mise à exécution sans consulter le père, et est de nature à mettre une obstruction définitive aux relations père-enfants, qu'il suffit pour se convaincre de la volonté de la mère de mettre le père devant le fait accompli de lire la lettre du 18 novembre 2002 qui informe le père de ce que ses filles sont à des milliers de kilomètres, qu'il peut venir les voir quant il veut et qu'il est invité à régler la pension alimentaire par virement; Attendu qu'il n'est d'ailleurs pas sans intérêt de remarquer que la mère, qui oublie les préceptes légaux lorsqu'il s'agit de respecter les droits du père, sait les retrouver pour déposer plainte pour non représentation d'enfant en août 2002 alors que le père est légitimement inquiet ou pour faire établir un paiement direct de la pension alimentaire ; Attendu que les différents éléments du dossier établissent que le départ a été préparé de longue date, que Madame X... avait déclaré lorsqu'elle avait demandé l'autorisation d'établir des passeports ne vouloir partir qu'en Turquie pour les vacances, que le magistrat l'avait expressément mise en garde dans l'ordonnance et qu'elle a trompé la religion du Tribunal et menti au père pour arriver à ses fins ; Attendu en conséquence que le départ des enfants a été réalisé en fraude des droits du père et ne peut être avalisé au prétexte, au demeurant non démontré, que leur intérêt serait de vivre en Tha'lande ; Attendu en effet qu'elles semblent vivre comme en vacances, que cependant rien ne permet de penser que la coupure radicale qu'elles vivent s'avérera bénéfique ni que la situation actuelle de leur mère est durable et permet d'envisager une stabilité à long terme, alors
que très rapidement des orientations devront être prises pour leur avenir, et que tous ces points doivent être débattus avec le père ; Attendu d'autre part qu'elles suivent un enseignement par correspondance et que les interrogations du père à cet égard sont légitimes alors que les deux enfants vont avoir 15 et 13 ans en 2005 et doivent préparer leur avenir ; Attendu que ces éléments d'incertitude rendent inutile une enquête sociale dont le seul intérêts serait de retarder l'issue du litige et de prolonger une situation acquise par fraude au profit de Madame X... ; Attendu en conséquence que la résidence principale des enfants sera fixée chez le père, qu'eu égard à la date de la présente décision, intervenant en cours d'année scolaire, les enfants devront être de retour au plus tard pour effectuer la rentrée scolaire 2005-2006 les frais du retour devant être à la charge de la mère; Attendu que la pension alimentaire sera supprimée à compter du mois du 1er août 2005 ; Attendu que les droit de visite et d'hébergement de la mère s'exerceront, sauf meilleur accord des parties, pendant les grandes vacances scolaires, sur le territoire national ; Attendu que la mère ne donne aucune indication sur ses ressources, que compte tenu de l'âge des enfants il convient de fixer à 180 euros la contribution qu'elle devra mensuellement verser au père pour l'entretien et l'éducation des enfants ; Attendu qu'elle supportera les dépens ; PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement après débats hors la présence du public et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Dit recevable en la forme l'appel de Monsieur Z... ; Au fond, infirme la décision rendue le 7 août 2003 par le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande Instance de CLERMONT-FERRAND ; Fixe au domicile du père la résidence des enfants Roxanne et Alexiane à compter du 1er août 2005 ;
Ordonne à la mère de rapatrier les enfants sur le territoire français au plus tard pour cette date ; Supprime à compter du 1er août 2005 la pension alimentaire due par Monsieur Z... pour ses enfants et fixe au montant de 180 euros la contribution que Madame X... devra porter et payer à compter de cette même date au père pour l'entretien et l'éducation des enfants, au besoin l'y condamne ; Dit que cette pension sera payable d'avance dans les cinq premiers jours du mois et qu'elle sera due au-delà de la majorité des enfants s'ils restent à charge ou s'ils poursuivent des études à charge pour le père de justifier de la situation en chaque début d'année scolaire ; Dit que cette pension sera indexée sur l'indice national des prix à la consommation des ménages publié par l'INSEE et variera automatiquement le 1er septembre de chaque année et pour la première fois à compter du 1er septembre 2006 selon le calcul suivant : Nouveau montant de la pension =
C... x B C C... =
montant de la pension fixée par la décision de justice B = nouvel indice à la date de révision (dernier indice publié et connu au jour de la révision) C = indice au jour de la décision Dit que la mère, sauf meilleur accord des parties, exercera ses droits de visite et d'hébergement pendants les vacances d'été et sur le territoire français, première moitié les années paires, et seconde moitié les années impaires ;
Déboute Madame X... de sa demande relative à l'organisation d'une enquête sociale ;
La condamne aux dépens de l'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.