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10/11/2004 | FRANCE | N°JURITEXT000006945111

France | France, Cour d'appel de riom, 10 novembre 2004, JURITEXT000006945111


COUR D'APPEL DE RIOM Chambre Commerciale ARRET N° DU : 10 Novembre 2004 N : 03/00916 CB Arrêt rendu le dix Novembre deux mille quatre Sur APPEL d'une décision rendue le 8.11.2002 par le Tribunal de commerce LE PUY ENTRE : S.A. SAGEM Représentée APPELANTE ET : Société BAUZER INDUSTRIE, venant aux droits de la Société LIMOUZIN INDUSTRIES s Représentée Société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL B.V., société de droit hollandais Représentée INTIMES DEBATS : A l'audience publique du 13 Octobre 2004, la Cour a mis l'affaire en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience publique

de ce jour. A cette audience, M. le Président, a prononcé publiquement...

COUR D'APPEL DE RIOM Chambre Commerciale ARRET N° DU : 10 Novembre 2004 N : 03/00916 CB Arrêt rendu le dix Novembre deux mille quatre Sur APPEL d'une décision rendue le 8.11.2002 par le Tribunal de commerce LE PUY ENTRE : S.A. SAGEM Représentée APPELANTE ET : Société BAUZER INDUSTRIE, venant aux droits de la Société LIMOUZIN INDUSTRIES s Représentée Société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL B.V., société de droit hollandais Représentée INTIMES DEBATS : A l'audience publique du 13 Octobre 2004, la Cour a mis l'affaire en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience publique de ce jour. A cette audience, M. le Président, a prononcé publiquement l'arrêt suivant conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile : PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement rendu le 8.11.2002 par le tribunal de commerce du PUY en VELAY en ces termes: - se déclare compétent pour juger du litige qui oppose la société BAUZER INDUSTRIE venant aux droits de la société LIMOUZIN INDUSTRIES, la SA SAGEM et la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV et prononce la jonction des instances - constate la qualité de sous-traitant de la société LIMOUZIN INDUSTRIES et reconnaît son droit à s'en prévaloir - condamne la SA SAGEM à payer et porter la somme de 7.372 USD avec intérêts au taux légal à compter du 2 août 2000 date de l'assignation et jusqu'à final paiement, à la société BAUZER INDUSTRIE venant aux droits de LIMOUZIN INDUSTRIE, somme correspondant à la différence entre la créance de LIMOUZIN INDUSTRIE sur société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV et la somme perçue par LIMOUZIN INDUSTRIE dans le cadre du redressement judiciaire - condamne la SA SAGEM à verser à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV la somme de 39.282,54 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente décision et jusqu'à final paiement - condamne la SA SAGEM à verser à la société BAUZER INDUSTRIE la somme de 4.500 euros sur le fondement de

l'article 700 du nouveau code de procédure civile -condamne la SA SAGEM à verser à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile -débouté les parties de toutes autres demandes, fins et conclusions.

Vu la déclaration d'appel de la SA SAGEM en date du 28.03.2003.

Vu les conclusions signifiées par la SA SAGEM le 3 juin 2004 aux termes desquelles elle demande de:

*confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a: -reconnu la compétence du tribunal français -débouté la société BAUZER INDUSTRIE de ses demandes fondées sur la garantie à première demande ou sur une garantie contractuelle qu'aurait donnée la SA SAGEM. -reconnu l'applicabilité de la loi du 31.12.1975 et la qualité de sous-traitant de la société BAUZER INDUSTRIE. -fait droit à l'action directe formée par la société BAUZER INDUSTRIE à son encontre en sa qualité de sous-traitant sur le fondement de la loi du 31.12.1975 -dit que le quantum de la créance de la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV sur la SA SAGEM est de 39.282,54 euros -débouté la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV de ses demandes au titre des intérêts au taux légal néerlandais depuis l'année 1998 et au titre des frais extra-judiciaires

*réformer le jugement en ce qu'il a: -condamné SAGEM à payer à la société BAUZER INDUSTRIE la somme de 7.372 US dolars avec intérêts à compter du 2 août 2000 et à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV la somme de 39.282,54 EUROS

*si la Cour retient la qualité de sous-traitant de la société BAUZER INDUSTRIE et le bien fondé de l'action de cette dernière à l'égard de la société SAGEM au titre de l'action directe prévue par l'article 12 de la loi du 31.12.1975 -constater que la société BAUZER INDUSTRIE ne réclame plus la condamnation de la société SAGEM qu'à hauteur de

35.824,35 euros ou 29.065,55 euros -dire que la SA SAGEM paiera l'une ou l'autre de ces sommes dans la limite de ce qu'elle reste devoir à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV soit 39.282,54 euros et le solde à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV avec intérêt au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir

*si la Cour accordait à la société BAUZER INDUSTRIE des intérêts de retard à compter d'une date antérieure à l'arrêt, dire et juger que SAGEM paiera ces intérêts sur la somme qu'elle doit à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV laquelle sera amputée d'autant.

* si par extraordinaire la Cour retenait les demandes de la société BAUZER INDUSTRIE à l'encontre de la SA SAGEM fondée sur une garantie contractuelle -débouter la société BAUZER INDUSTRIE de ses demandes en application de l'article 1281 al.2 du code de commerce

*à titre subsidiaire, dire et juger en tout état de cause que cette demande ne saurait excéder la somme de 29.065,55 euros et dire et juger que cette somme sera déduite de celle que SAGEM doit à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV.

* confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV de sa demande en paiement de la somme de 6.286,63 euros au titre d'une pénalité contractuelle

*à titre subsidiaire, condamner la société BAUZER INDUSTRIE à en garantir la SAGEM

* confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV de sa demande au titre des intérêts au taux légal néerlandais depuis l'année 1998

*à titre subsidiaire, si la Cour faisait droit à cette demande de la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV, condamner la société BAUZER INDUSTRIE à en garantir la SA SAGEM.

* réformer le jugement en ce qu'il a condamné la SA SAGEM à verser à chacune des sociétés, société BAUZER INDUSTRIE et société TULIP

COMPUTERS INTERNATIONAL BV, la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

*faire droit à la demande de la SA SAGEM formée en première instance au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et condamner la société BAUZER INDUSTRIE à lui payer la somme de 4.574 euros

* condamner la société BAUZER INDUSTRIE et/ou la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV à payer à la SA SAGEM la somme de 10.000 euros pour ses frais irrépétibles en appel.

Vu les conclusions signifiées le 26.04.2004 par la société BAUZER INDUSTRIE aux termes desquelles elle demande de: -réformer partiellement le jugement entrepris -condamner à titre principal la SA SAGEM à régler à la société BAUZER INDUSTRIE la somme de 50.499,60 euros de laquelle doit être déduite la somme de 14.675,25 euros d'ores et déjà perçue, soit un solde de 35.824,35 euros outre intérêts au taux légal à compter du 25 mai 1998 -à titre subsidiaire, condamner la SA SAGEM à payer une somme de 29.065,55 euros de laquelle doit être déduite la somme de14.675,25 euros d'ores et déjà perçue outre intérêts au taux légal à compter du 25 mai 1998 -débouter la SA SAGEM et la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV de toutes demandes reconventionnelles formées contre la société BAUZER INDUSTRIE -condamner la SA SAGEM à régler à la société BAUZER INDUSTRIE la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du NCPC. Vu les conclusions signifiées le 9 juin 2004 par la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV aux termes desquelles elle demande de :

-dire les sociétés SAGEM et BAUZER INDUSTRIE mal fondées en leurs conclusions et demandes -confirmer le jugement entrepris en ce qu'il

a condamné la société SAGEM à verser à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV la somme de 39.282ä45 euros en principal ainsi que la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile -y ajoutant, condamner la société SAGEM à payer à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV au titre des intérêts moratoires une somme de 17.084,40 euros calculée au 15 mars 2004 lesdits intérêts continuant à courir au taux actuel de 4 % jusqu'à la date du paiement effectif -condamner en outre la société SAGEM à payer à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV la somme de 6.286,63 euros au titre de la pénalité contractuelle -condamner chacune des sociétés, la société SAGEM et la société BAUZER INDUSTRIE à verser à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV une somme complémentaire de 5.000 euros pour ses frais irrépétibles en appel. Sur quoi, la COUR,

Attendu que la SA SAGEM, société française, a commandé à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV, société ayant son siège au Pays Bas, des ordinateurs "PC entrée de gamme" ; que la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV s'est adressée à la société française LIMOUZIN INDUSTRIES aux droits de laquelle se trouve la société BAUZER INDUSTRIES, pour obtenir la fourniture de châssis nus d'ordinateurs. ;

que la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV a fait l'objet d'une procédure collective ouverte aux Pays-Bas le 24 avril 1998.

Attendu que la compétence de la juridiction française retenue par le tribunal de commerce du PUY en VELAY pour connaître de l'ensemble du litige n'est pas remise en cause en appel, les recours portant sur:

-les droits revendiqués par la société BAUZER INDUSTRIE à l'encontre de la SA SAGEM, soit sur le fondement de l'action directe du sous-traitant ou soit sur le fondement de la garantie contractuelle

alléguée. -les demandes en paiement formulées par la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV à l'encontre de la SA SAGEM -les appels en garantie dirigés à titre subsidiaire par la SA SAGEM à l'encontre de la société BAUZER INDUSTRIE. 1-sur l'action engagée par la société BAUZER INDUSTRIE à l'encontre de la SA SAGEM 1-1-sur la qualification contractuelle

Attendu qu'à titre principal devant la Cour, la société BAUZER INDUSTRIE fonde son action sur l'article 12 de la loi française sur la sous-traitance du 31.12.1975 en faisant valoir que le contrat la liant à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV répond à la qualification de contrat de sous-traitance et non pas à celle de contrat de vente, les produits fabriqués par ses soins à savoir des châssis informatiques nus livrés à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV étant réalisés spécifiquement pour les besoins du donneur d'ordre, en l'occurrence la SA SAGEM; qu'elle fait observer que la SA SAGEM fournissait à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV ses propres spécifications techniques retransmises par cette dernière à la société BAUZER INDUSTRIE;

Attendu que la SA SAGEM adoptant la même argumentation ne s'oppose pas au bien fondé de l'action directe engagée contre elle par la société BAUZER INDUSTRIE en sa qualité de sous-traitant;

Attendu qu'en revanche la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV demande d'écarter la qualification de contrat de sous-traitance au profit de celle de contrat de vente, en considérant que la convention la liant à la SA SAGEM comme celle la liant à la société BAUZER INDUSTRIE sont des contrats de vente de marchandises destinées à la fabrication de produits industriels; qu'elle en veut pour preuve le fait qu'aucun contrat d'entreprise ne soit versé au débat et que dans ses propres conclusions, la société BAUZER INDUSTRIE ait évoqué à plusieurs reprises l'existence d'un contrat de vente (pages 2 et 5)

en faisant référence aux conditions "de vente" mentionnées dans la télécopie du 11.02.1997;

qu'elle soutient en outre que la loi applicable en l'espèce est, quelle que soit la nature du contrat, vente ou entreprise, la loi hollandaise pour en déduire qu'en tout état de cause, la société BAUZER INDUSTRIE ne peut prospérer dans ses revendications contre le SA SAGEM fondées sur l'action directe reconnue par la loi française au bénéfice du sous-traitant;

Attendu qu'en droit il est constant que le contrat d'entreprise et le contrat de vente n'étant soumis à aucun formalisme, le fait que les conventions intervenues entre les parties et dont l'existence n'est pas contestée, n'aient été matérialisées par aucun écrit n'emporte aucune conséquence quant à leur qualification juridique;

que s'agissant des expressions figurant dans les conclusions déposées pour le compte de la société BAUZER INDUSTRIE qui peuvent constituer tout au plus une maladresse, elles ne remettent manifestement pas en cause l'argumentation soutenue par cette société qui revendique tout au long de ses écritures et clairement sa qualité de sous-traitante, étant observé que la télécopie en date du 11.02.1997 ne comporte elle-même aucun terme caractérisant la nature du contrat, les notions de "commande, prix et livraison" mentionnées dans ce document pouvant s'appliquer indifféremment au contrat de vente et au contrat de fournitures de produits réalisés par un entrepreneur;

Attendu que pour se prononcer sur la qualification des liens contractuels il convient de se référer aux deux critères, l'un économique, l'autre psychologique, dégagés par une jurisprudence constante pour opérer la distinction entre contrat de vente et contrat d'entreprise;

Attendu que le premier implique de vérifier dans la convention quel est l'élément en valeur le plus important, de la main d'oeuvre ou de

la matière; qu'en l'occurrence, aucune des parties n'ayant produit au dossier d'élément permettant utilement de le mettre en oeuvre, force est de constater que la référence à ce critère n'est pas opérante;

Attendu que le second critère impose de rechercher l'intention des parties, la convention étant considérée comme un contrat de vente si les parties ont voulu laisser toute liberté au fabricant dans la conception et la réalisation du produit et comme un contrat d'entreprise si à l'inverse, le fabricant n'a fait que suivre les indications particulières du client- entrepreneur principal- la substitution du produit commandé par un produit équivalent s'avérant impossible;

Attendu que la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV ne rejette pas ce critère mais soutient qu'elle a vendu des ordinateurs à la SA SAGEM pour la fabrication desquels elle a acheté diverses fournitures à la société LIMOUZIN INDUSTRIE, assimilant les circonstances de l'espèce à celles à son avis très similaires d'une affaire ayant donné lieu à l'arrêt rendu le 4 juin 2003 par la 1 ère chambre civile de la cour de cassation;

Attendu que dans le litige faisant suite à la commande par la société Peugeot Citroùn automobile (PCA) de diverses marchandises dont des boulons anti-vol à la société AAMV qui s'était adressée à la société Mecatech pour la fabrication de ces boulons, la cour de cassation, saisie d'un pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES qui avait rejeté la demande de la société Mecatech contre la société PCA fondée sur l'action directe du sous-traitant, a par arrêt du 4 juin 2003, écarté le moyen tiré de l'application de la loi du 31.12.1975 sur la sous-traitance en considérant qu'ayant retenu, par un motif non critiqué, que le contrat unissant la société PCA et la société AAMV n'était pas un contrat d'entreprise mais un contrat de fourniture de marchandises, la cour d'appel en a exactement déduit

que, quelle que soit la nature des relations contractuelles liant la société AAMV à la société Mecatech, cette dernière société ne pouvait se prévaloir des dispositions de la loi du 31.12.1975 sur la sous-traitance;

que cette jurisprudence n'est nullement transposable en l'espèce;

qu'il est en effet constant que la SA SAGEM a passé commande auprès de la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV d'ordinateurs PC entrée de gamme ayant des caractéristiques très particulières spécifiées dans un document comportant plusieurs pages intitulé "spécification d'achat système partie civile entrée de gamme - P166+", document propre à la SA SAGEM et comportant l'interdiction expresse de reproduction et de divulgation;

que la commande passée à LIMOUZIN INDUSTRIE concerne la fourniture de châssis soumis eux-mêmes à des spécifications bien précises quant à leur dimension et à leur configuration, celles-ci devant permettre le montage de cartes spécifiques de SAGEM, utilisées dans l'application "Quadrige"; que ces boîtiers étaient réalisés pour la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV selon des prescriptions particulières exigées par SAGEM;

que dès lors qu'il résulte de ces éléments que le contrat passé entre la SA SAGEM et la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV de même que celui passé entre la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV et la société LIMOUZIN INDUSTRIE sont des contrats de même nature relevant de la qualification de contrats d'entreprise soumis à un même donneur d'ordre, le problème juridique posé par le présent litige ne peut trouver sa solution dans la jurisprudence invoquée par la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV; 1-2-sur la loi applicable

Attendu que la société BAUZER INDUSTRIE et la SA SAGEM considèrent

que la loi applicable à l'action engagée par la société BAUZER INDUSTRIE est la loi française tandis que la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV revendique l'application de la loi Hollandaise, en se fondant sur la convention de la HAYE du 15 juin 1955 dans l'hypothèse d'un contrat de vente et la Convention de Rome du 19 juin 1980 dans l'hypothèse d'un contrat d'entreprise;

Attendu que les articles 4-1 et 4-2 de la convention de Rome du 19 juin 1980 dont le champ d'application concerne les obligations contractuelles dans les situations comportant un conflit de lois, prévoient, qu'à défaut de choix, le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits et présument que le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où la partie, qui doit fournir la prestation caractéristique, a au moment de la conclusion du contrat sa résidence habituelle ou, s'il s'agit d'une société, son administration centrale;

Attendu que la notion de prestation caractéristique, critère essentiel de rattachement dans le système de présomption édicté par la convention de Rome, conduit à retenir l'application de la loi hollandaise au contrat souscrit entre le SA SAGEM et la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV et l'application de la loi française au contrat souscrit entre la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV et la société LIMOUZIN INDUSTRIE; qu'au demeurant cette solution s'impose d'autant plus en l'espèce qu'existe une co'ncidence dans chaque contrat entre le lieu d'exécution de la prestation caractéristique et la localisation du domicile du débiteur de l'obligation d'exécution;

qu'en fonction des liens unissant plusieurs contrats, la jurisprudence a pu considérer qu'une même loi devait s'appliquer, le contrat de sous-traitance se trouvant alors soumis à la loi applicable au marché principal;

Attendu que toutefois ces solutions adoptées avant l'entrée en vigueur de la convention de Rome ne peuvent être maintenues, qu'au vu des dispositions de ce texte, étrangères à toute notion de groupe ou chaîne de contrats, il convient, en l'absence de choix des parties, d'appliquer la loi de la résidence habituelle du sous-traitant, débiteur de la prestation caractéristique, en l'occurrence, la loi française;

Attendu que les droits revendiqués par la société BAUZER INDUSTRIE au soutien de son action directe étant régis par la loi française, l'argumentation développée par la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV sur le fondement de l'ordre public international est inopérant;

Attendu qu'il s'ensuit en définitive que la société BAUZER INDUSTRIE est en droit de revendiquer le bénéfice de l'action directe prévue par l'article 12 de la loi du 31.12.1975 sur la sous-traitance; 1-3- sur le moyen tiré de l'extinction de la créance de la société BAUZER INDUSTRIE par l'effet de la novation

Attendu qu'il est incontestable que la société BAUZER INDUSTRIE a accepté dans le cadre de la procédure collective suivie contre la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV et conformément aux dispositions applicables de la loi hollandaise sur la faillite, une proposition de règlement forfaitaire de sa créance, accord approuvé le 23 juillet 1998 , homologué par décision ayant acquis l'autorité d'une décision finale non susceptible d'appel le 1er août 1998, et suivi de paiement;

Attendu que cet accord ne portant que sur le montant des sommes reçues en paiement de sa créance dans le cadre juridique très spécifique de la procédure collective suivie à l'égard de son cocontractant, n'emporte certainement pas novation des droits et obligations dont puisse se prévaloir la société BAUZER INDUSTRIE en

exécution du contrat souscrit avec la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV; qu'admettre une solution inverse reviendrait à vider de son objet l'action directe prévue par l'article 12 de la loi française sur la traitance à l'effet de protéger précisément le sous-traitant de la défaillance de l'entrepreneur principal consécutive notamment à une cessation des paiements, étant de plus observé que la loi applicable au contrat régit entre autres modalités, l'extinction des obligations qu'il engendre conformément aux dispositions de l'article 10 de la Convention de Rome;

Attendu qu'en revanche la vérification de la créance de la société BAUZER INDUSTRIE à l'encontre de la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV intervenue au cours de la procédure collective en raison de facture(s) inconnue(s) ou de discussion sur l'exécution de la prestation (lettre adressée par société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV le 29.07.1998) doit être prise en compte pour limiter les demandes présentées par la société BAUZER INDUSTRIE au montant de la créance vérifiée;

1-4-sur le quantum de la créance de société BAUZER INDUSTRIE à l'égard de la SA SAGEM

Attendu qu'il ressort du dossier que l'admission de la créance de la société BAUZER INDUSTRIE déclarée initialement à hauteur de 111.286,46 NLG a été arrêtée à un montant limité à 96.503 NLG et que la société BAUZER INDUSTRIE a obtenu un règlement forfaitaire égal à 32.450,96 NLG; qu'il lui reste dû la somme de 64.052,04 NLG soit 29.065,55 euros; que la SA SAGEM doit être condamnée au paiement de cette somme, outre intérêts au taux légal à compter du 25.05.1998, date de la mise en demeure adressée par LIMOUZIN INDUSTRIE à la SA SAGEM, et ce dans la limite de la créance de société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV à l'encontre de la SA SAGEM au titre du marché

principal; que le jugement sera donc infirmé en ses dispositions contraires à la présente décision; 2-sur l'action en paiement dirigée par la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV à l'encontre de la SA SAGEM

Attendu qu'il résulte des pièces communiquées aux débats que la créance de la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV à l'encontre de la SA SAGEM au titre du marché dont l'exécution a été en partie sous-traité à la société LIMOUZIN INDUSTRIE s'élève à la somme en principal de 39.282,54 euros; que la créance de la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV doit être ramenée à la somme de 10.216,99 euros après déduction de la créance de la société BAUZER INDUSTRIE sous-traitante dès lors que la loi sur la sous-traitance du 31.12.1975 doit recevoir application et que les accords acceptés par la société BAUZER INDUSTRIE dans le cadre de la procédure collective de la société hollandaise n'ont pas éteint le droit du sous-traitant à recouvrer le solde de sa créance à l'encontre de l'entrepreneur principal;

Attendu que la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV a renoncé aux intérêts contractuels sollicités sur la base d'un taux annuel de 12 % contesté par la SA SAGEM;

Attendu que la loi hollandaise s'appliquant au contrat liant ces deux sociétés, la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV est en droit d'obtenir le paiement d'intérêts moratoires calculés sur la base du taux et selon le régime juridique prévus par la loi hollandaise, soit à compter des dates d'échéance figurant sur les factures et avec capitalisation des intérêts selon les modalités définies par la loi; que pour autant les calculs versés aux débats par la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV ne sauraient être entérinés dès lors qu'ils reposent sur un montant en principal excessif devant être

ramené à 10.216,99 euros;

Attendu que le fait que divers organismes aient revendiqué auprès de la SA SAGEM le paiement des sommes qu'elle devait à société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV est sans incidence sur le calcul de la dette qui résulte de l'application du contrat et de la loi afférente au contrat, les intérêts moratoires devant s'appliquer dès lors que la SA SAGEM n'a pas honoré en temps utile son obligation contractuelle de paiement;

Attendu qu'en ce qui concerne les frais de recouvrement extra-judiciaires réclamés par la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV (pénalité contractuelle de 6.286,63 euros), le certificat de coutume du 15.11.2001 indique qu'en vertu du paragraphe 2 de l'article 96 du Livre 6 du code civil hollandais, le tribunal peut accorder une compensation pour les frais raisonnables ayant été engagés dans une tentative d'obtenir un paiement amiable, cette compensation pouvant être évaluée suivant un certain barême avec un maximum de 15 % du montant en principal outre intérêt dû jusqu'au jour où l'assignation est signifiée au défendeur, ce qui n'exclurait pas l'octroi d'une somme plus élevée si des frais supérieurs avaient été engagés auquel cas ces frais doivent être raisonnables;

Attendu que ces dispositions légales étant rappelées, il n'y a pas lieu d'en faire application en l'espèce, la demande formée de ce chef par la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV n'étant pas suffisamment étayée par les pièces produites ; 3-sur les appels en garantie formé par la SA SAGEM à l'encontre de la société BAUZER INDUSTRIE

Attendu que ce recours est dépourvu de tout fondement légal; que la société BAUZER INDUSTRIE sous-traitant n'a agi que dans le respect des droits qui lui sont reconnus par la loi française et ne saurait

se voir reprocher aucun manquement dans l'exécution de ses obligations de nature à justifier la charge d'avoir à supporter en tout ou partie le paiement des sommes que doit la SA SAGEM à son co-contractant la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV; que la SA SAGEM sera donc déboutée des appels en garantie dirigés contre la société BAUZER INDUSTRIE; 4- sur les demandes fondées sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et sur les dépens

Attendu que l'équité commande de confirmer les sommes allouées de ce chef par les premiers juges et de condamner la SA SAGEM à payer en cause d'appel une indemnité de 1.000 euros supplémentaires à chacune des bénéficiaires;

Attendu que la SA SAGEM qui succombe devra supporter les entiers dépens; PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré,

DÉCLARE les appels recevables en la forme.

RÉFORMANT partiellement le jugement entrepris, statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la SA SAGEM à payer et porter à la société BAUZER INDUSTRIE la somme en principal de 29.065,55 euros outre intérêts au taux légal àrecevables en la forme.

RÉFORMANT partiellement le jugement entrepris, statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la SA SAGEM à payer et porter à la société BAUZER INDUSTRIE la somme en principal de 29.065,55 euros outre intérêts au taux légal à compter du 25 mai 1998 jusqu'à parfait paiement outre la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

DÉBOUTE la société BAUZER INDUSTRIE du surplus de ses demandes.

CONDAMNE la SA SAGEM à payer et porter à la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV :

-la somme en principal de 10.216,99 euros assortie d'intérêts moratoires calculés sur la base du taux et selon le régime juridique applicables en vertu de la loi hollandaise, soit à compter des dates d'échéance figurant sur les factures et avec capitalisation des intérêts selon les modalités définies par ladite loi.

-la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

DÉBOUTE la société TULIP COMPUTERS INTERNATIONAL BV du surplus de ses demandes.

DÉBOUTE la SA SAGEM de ses appels en garantie;

CONDAMNE la SA SAGEM aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du NCPC. Le greffier

Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de riom
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006945111
Date de la décision : 10/11/2004

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE - Définition - Différence avec le contrat de vente - Contrat portant sur un travail spécifique pour les besoins du donneur d'ordre.

Le contrat portant sur la fourniture de matériel ayant des caractéristiques très particulières spécifiées par le donneur d'ordre constitue non pas un contrat de vente mais un contrat d'entreprise

CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accords et conventions divers - Convention de Rome du 19 juin 1980 - Loi applicable aux obligations contractuelles - Article 4 - Absence de choix des parties - Loi du pays présentant les liens les plus étroits.

La notion de prestation caractéristique, critère essentiel de rattachement dans le système de présomption édicté par les articles 4-1 et 4-2 de la convention de Rome du 19 juin 1980 conduit à retenir l'application de la loi française au contrat de sous-traitance. Dès lors, le sous-traitant est en droit de revendiquer le bénéfice de l'action directe prévue par l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre1975


Références :

Convention de Rome du 19 juin 1980, articles 4-1 et 4-2
loi n° 75-1334 du 31 décembre1975, article 12

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.riom;arret;2004-11-10;juritext000006945111 ?
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