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01/06/2004 | FRANCE | N°03/02435

France | France, Cour d'appel de riom, 01 juin 2004, 03/02435


ENTRE : M. X APPELANT X... : Mme Y... INTIME Z... :

Après avoir entendu, en application des dispositions des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, à l'audience du 26 Avril 2004, hors la présence du public, sans opposition de leur part, les représentants des parties en leurs plaidoiries ou explications, les Magistrats chargés du rapport en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré et à l'audience publique de ce jour, indiquée par les magistrats rapporteurs, le Président a prononcé publiquement l'arrêt suivant :

X et Y... se sont mariés le 9 J

uin 2000, à JENDOUBA en TUNISIE ; ils ont eu deux enfants nés à AURILLAC, D...

ENTRE : M. X APPELANT X... : Mme Y... INTIME Z... :

Après avoir entendu, en application des dispositions des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, à l'audience du 26 Avril 2004, hors la présence du public, sans opposition de leur part, les représentants des parties en leurs plaidoiries ou explications, les Magistrats chargés du rapport en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré et à l'audience publique de ce jour, indiquée par les magistrats rapporteurs, le Président a prononcé publiquement l'arrêt suivant :

X et Y... se sont mariés le 9 Juin 2000, à JENDOUBA en TUNISIE ; ils ont eu deux enfants nés à AURILLAC, Djamel le 26 Juin 2001 et Lina le 13 Octobre 2002.

Le 9 Juillet 2003, la femme a présenté une requête en divorce devant le Juge aux Affaires Familiales d'AURILLAC. Elle était autorisée à résider séparément par ordonnance du 10 Juillet 2003 et par ordonnance sur requête du 31 Août 2003, il était fait interdiction de sortie du territoire national français de l'enfant Djamel sans l'autorisation préalable de ses deux parents.

Par ordonnance en date du 3 Octobre 2003, le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance d' AURILLAC :

- a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par x et s'est déclaré territorialement compétent

- a dit qu'il y avait lieu de faire application de la loi française

- a constaté la non conciliation des époux et :

- fixé provisoirement la résidence habituelle des enfants au domicile de la mère, l'autorité parentale étant exercée en commun par les deux parents

condamné monsieur x à payer à madame Y..., pour elle même au titre du devoir de secours la somme de 200 ä par mois, pour les enfants, une pension alimentaire mensuelle de 150 ä pour chacun soit 500 ä au total

- organisé le droit de visite et d'hébergement du père de la façon suivante : pour Lina, chaque samedi de 16 heures à 18 heures, pour Djamel, les premières, troisièmes, cinquièmes fins de semaines de chaque mois du samedi 16 heures au dimanche 18 heures et durant la moitié des vacances scolaires en alternance à charge pour lui de prendre ou faire prendre les enfants au domicile de la mère et de les y reconduire ou faire reconduire par une personne de confiance.

L'interdiction de faire sortir l'enfant Djamel du territoire français sans l'accord préalable des deux parents a été confirmée.

Avant dire droit au fond, une enquête sociale a été ordonnée.

Par déclaration régulière en date du 6 Octobre 2003, X a interjeté appel de cette décision.

Dans ses conclusions en date du 10 Mars 2004, l'appelant demande à la Cour de réformer l'ordonnance déférée et de déclarer recevable et bien fondée l'exception de litispendance internationale qu'il soulève au profit du Tribunal algérien de TLEMCEN.

Subsidiairement, si la Cour considère que le juge français est compétent, il demande que soit dit que seule la loi algérienne est applicable en l'espèce et conclut à la réformation de toutes les mesures concernant la résidence habituelle des enfants et la pension alimentaire.

Plus subsidiairement, il sollicite l'organisation d'une nouvelle enquête sociale, conclut à la fixation de la résidence principale des deux enfants à son domicile ainsi qu'à la suppression de toute pension alimentaire à sa charge ; si la résidence des enfants est maintenue au domicile de leur mère, il demande que ses droits de visite et d'hébergement sur Djamel et Lina soient étendus du vendredi après l'école au lundi matin, ainsi que durant la moitié des vacances scolaires, que soit supprimée la pension alimentaire de 200 ä par

mois au titre du devoir de secours et que soit réduite à de juste proportions celle due pour les enfants et que FY soit déboutée de toutes ses demandes reconventionnelles notamment de celle en restitution de passeports ; il demande enfin que l'interdiction de faire sortir l'enfant Djamel du territoire français sans l'autorisation des deux parents soit inscrite sur les passeports de ceux-ci.

X expose qu'il est de nationalité franco - algérienne, son épouse étant tunisienne et qu'ils se sont mariés en TUNISIE, sous le régime de la loi algérienne.

Il précise que les époux ont ensuite établi leur résidence en FRANCE et que leurs enfants sont nés à AURILLAC.

Il expose qu'il a diligenté deux procédures en divorce l'une devant le Tribunal de TUNIS saisi le 11 Août 2003 et l'autre devant le Tribunal de TLEMCEN en ALGERIE, le 26 Août 2003 et fonde sur cette saisine l'exception de litispendance internationale soutenant que celles-ci sont préalables à l'assignation en divorce de son épouse en date du 17 Octobre 2003, la requête préalable n'étant pas de nature à saisir le Tribunal.

Il se prévaut par ailleurs des dispositions des articles 12 et 13 de l'ordonnance algérienne N° 75- 58 du 26 Septembre 1975 pour demander que soit fait application du droit algérien en l'espèce.

Subsidiairement, il expose qu'il a élevé Djamel seul, son épouse délaissant cet enfant, il a pris un congé paternité lors de la naissance de Lina, et soutient qu'il présente toutes les qualités pour s'occuper au quotidien de ses enfants, contestant les conclusions de l'enquêtrice sociale, dont le rapport, déposé en cours de procédure d'appel est selon lui partial en sa défaveur.

Il reconnaît avoir conservé les passeports des enfants par crainte que son épouse, de nationalité tunisienne ne reparte en TUNISIE et

conteste être en possession des carnets de santé des enfants.

Enfin il fait observer que Y... dispose de revenus lui laissant un solde disponible très supérieur au sien après déduction des charges pour justifier sa demande de suppression de pension alimentaire au titre du devoir de secours.

Y..., intimée, dans ses écritures en date du 25 Mars 2004, conclut à la confirmation de la décision sur le rejet de l'exception de litispendance, le juge français ayant été saisi préalablement au juge étranger, et sur l'application de la loi française, rappelant que la famille a son domicile en FRANCE et que les deux enfants sont de nationalité française. Elle conclut au maintien de la résidence principale des enfants à son domicile ainsi qu'à celui du montant de la pension alimentaire due par X fixée à 500 ä au total reconnaissant toutefois percevoir un revenu mensuel procuré par un stage suivi au GRETA.

Elle conclut à la réformation de l'ordonnance sur l'autorité parentale qu'elle souhaite exercer à titre exclusif en raison du comportement violent et opposant du père des enfants et de sa famille ; elle précise que le Juge des Enfant est saisi, qu'une enquête est en cours dans le cadre d'une mesure d'AEMO et demande que le droit de visite de X sur ses deux enfants soit limité aux samedis après midi de 15 heures à 18 heures dans un lieu neutre.

Elle demande enfin que ce dernier soit condamné à lui remettre les passeports des deux enfants et le carnet de santé de Djamel sous astreinte de 50 ä par jour de retard à compter de la décision à intervenir. SUR QUOI

Attendu qu' aux termes de l'article 100 du Nouveau code de procédure civile, si le même litige est pendant devant deux juridictions de même degré également compétentes pour en connaître, la juridiction saisie en second lieu doit se dessaisir au profit de l'autre si l'une

des parties le demande ; que ces dispositions sont applicables en matière de litispendance internationale ;

Attendu qu'en l' espèce, Y... a déposé sa requête en divorce devant le Juge aux Affaires Familiales d'AURILLAC le 9 Juillet 2003, la saisine par X du Tribunal de TUNIS étant du 11 Août 2003 et celle du Tribunal de TLECEM du 26 Août ;

Attendu qu'en matière de divorce, la saisine prend effet à compter de la requête qui saisit le Tribunal, et fixe définitivement l'objet et la cause de la demande et non de l'assignation, que le Tribunal territorialement compétent est celui où se trouve la résidence de la famille ( art. 1070 du Nouveau Code de Procédure Civile), et que le droit applicable est la loi française lorsque les époux ont l'un et l'autre leur domicile sur le territoire français (art 310 du Code Civil) .

Attendu qu'ainsi que l'a justement analysé le premier juge, la conjonction de ces trois dispositions -étant précisé au surplus que les époux n'ont pas la même nationalité- donne compétence aux Tribunaux français et plus précisément au Juge aux Affaires Familiales d'AURILLAC, lieu de résidence de la famille, avec application de la loi française ;

Attendu que la décision sera confirmée en ce qu'elle a rejeté l'exception de litispendance et appliqué la loi française ;

Attendu, sur l'autorité parentale, que le principe est celui de l'exercice conjoint par les deux parents ; que seuls des motifs graves tirés de l'intérêt des enfants peuvent justifier de déroger à cette règle ;

Attendu qu'en l'espèce la séparation des époux s'est déroulée dans un climat extrêmement conflictuel, Y... et ses deux enfants ayant du trouver refuge en Juillet 2003 au CHRS de l'ANEF ; qu'il résulte de l'enquête sociale ordonnée par le juge conciliateur que le climat

familial était traître agressif et passionnel et que les deux parents sont en souffrance ; que toutefois, il n'est pas contestable qu'ils ne présentent ni l'un ni l'autre de carences éducatives même si l'opposition du père à l'intervention des travailleurs sociaux est de nature à entraver l'apaisement du conflit conjugal et par là même l'équilibre de Djamel et Lina qui sont l'enjeu majeur du conflit parental ;

Attendu qu'en l'état l'exercice de l'autorité parentale sera maintenu conjointement aux deux parents, étant précisé que celui ci ne pourra être effectivement maintenu que si les deux parents parviennent à faire preuve d'un esprit d'ouverture et de conciliation, dans le strict intérêt de leurs enfants afin que les décisions importantes les concernant puissent être prises sereinement ;

Attendu que, dans le cadre de cet exercice conjoint de l'autorité parentale, toute sortie du territoire national est en principe soumise à l'accord express des deux parents ; qu'ainsi que le sollicite le père mention en sera portée sur le passeport des deux parents en application des dispositions de l'article 373- 2-6 du Code civil ;

Attendu, qu'eu égard au très jeune âge des enfants, à la disponibilité de la mère, à ses capacités éducatives et à l'intérêt pour la fratrie à ne pas être séparée, la décision sera confirmée en ce qu'elle a fixé leur résidence principale au domicile de la mère et organisé les droits de visite du père pour Djamel , les 1°, 3°, 5° fins de semaines de chaque mois du samedi 16 heures au dimanche 18 heures ainsi que la moitié des vacances scolaires avec alternance et pour Lina chaque samedi de 16 heures à 18 heures étant rappelé aux deux parents qu'ils doivent prendre conscience de la nécessité pour l'équilibre de leurs enfants d'entretenir des relations suivies avec chacun d'eux et de respecter ces dispositions sans créer d'obstacle à

leur pratique, faute de quoi les modalités d'exercice de l'autorité parentale devront faire l'objet d'une nouvelle organisation plus contraignante et plus encadrée ;

Attendu que X devra restituer à Y... les passeports des enfants et leur carnet de santé dans les dix jours du prononcé de la présente décision sans qu'en l'état il n'y ait lieu à fixation d'une astreinte ;

Attendu, sur la part contributive du père à l'entretien des enfants, qu'eu égard aux besoins de ceux-ci, âgés de 3 ans et demi et 20 mois et aux revenus de X, qui est perçoit un salaire de 1 682 ä par mois, et doit faire face à des crédits importants souscrit du temps de la vie commune ( 822 ä mensuels) outre ses charges courantes étant précisé qu'il dispose d'un appartement de fonction, que celle-ci sera maintenue au montant mensuel de 150 ä par enfant tel que fixé par le premier juge ; que Y... percevant outre les prestations sociales soit 622, 82 ä un revenu mensuel de 652, 02 ä provenant de la rémunération d'un stage qu'elle suit au GRETA, la pension alimentaire mise à la charge de X à son profit au titre du devoir de secours sera supprimée à compter du présent arrêt ;

Attendu que rien ne permettant de mettre en cause l'objectivité du rapport d'enquête sociale ordonné par le juge conciliateur et déposé en cours de procédure d'appel, et en présence d'une mesure d'assistance éducative ordonnée par le Juge des Enfants qui donnera lieu à des investigations supplémentaires, il n'y a pas lieu à faire droit à la demande de nouvelle enquête sociale formulée par l'appelant ;

Attendu que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens d'appel. PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, après débats hors la présence du public et après en avoir délibéré conformément à la loi,

DECLARE l'appel recevable,

AU FOND,

REFORME PARTIELLEMENT la décision,

SUPPRIME, à compter du présent arrêt la pension alimentaire due par X à son épouse au titre du devoir de secours,

Y... AJOUTANT, dit que mention de l'interdiction de faire sortir les deux enfants du territoire national français sans l'accord préalable des deux parents devra être portée sur les passeports,

DIT que le père devra restituer à la mère, dans les dix jours du prononcé du présent arrêt, les carnets de santé des enfants et leurs passeports,

CONFIRME pour le surplus la décision déférée,

DIT n'y avoir lieu à nouvelle enquête sociale,

DIT que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens qui seront recouvrés selon les règles de l'aide juridictionnelle.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de riom
Numéro d'arrêt : 03/02435
Date de la décision : 01/06/2004

Analyses

DIVORCE, SEPARATION DE CORPS - Procédure - Requête

La requête en divorce formée par l'épouse devant le juge aux affaires familiales donne compétence à la juridiction française, malgré la saisine par le mari de deux juridictions étrangères. En effet, en matière de divorce, la saisine prend effet à compter de la requête qui saisit le tribunal et fixe définitivemnt l'objet et la cause de la demande et non de l'assignation. De plus, le tribunal territorialement compétent est celui où se trouve la résidence de la famille et le droit appliquable est la loi française lorsque les époux ont l'un et l'autre leur domicile sur le territoire française


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.riom;arret;2004-06-01;03.02435 ?
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