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20/04/2004 | FRANCE | N°03/01977

France | France, Cour d'appel de riom, 20 avril 2004, 03/01977


COUR D'APPEL DE RIOM 2ème Chambre ARRET DU : 20 Avril 2004 AFFAIRE N : 03/01977 Au fond, origine Tribunal de Grande Instance MOULINS, décision attaquée en date du 03 Juin 2003, enregistrée sous le n 02/592 ENTRE : Mme X... Y... : Me A(avoué à la Cour) - Plaidant par Me B (avocat au barreau de MOULINS) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RIOM M. Y Y... : Me A (avoué à la Cour) - Plaidant par Me B (avocat au barreau de MOULINS) APPELANTS ET : M. Z Y... :

Me C (avoué à la Cour) - Plaidant par la SCP D (avocats au barr

eau de MOULINS) INTIME DEBATS : Après avoir entendu à l'audience p...

COUR D'APPEL DE RIOM 2ème Chambre ARRET DU : 20 Avril 2004 AFFAIRE N : 03/01977 Au fond, origine Tribunal de Grande Instance MOULINS, décision attaquée en date du 03 Juin 2003, enregistrée sous le n 02/592 ENTRE : Mme X... Y... : Me A(avoué à la Cour) - Plaidant par Me B (avocat au barreau de MOULINS) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RIOM M. Y Y... : Me A (avoué à la Cour) - Plaidant par Me B (avocat au barreau de MOULINS) APPELANTS ET : M. Z Y... :

Me C (avoué à la Cour) - Plaidant par la SCP D (avocats au barreau de MOULINS) INTIME DEBATS : Après avoir entendu à l'audience publique du 01 Mars 2004 les représentants des parties en leurs plaidoiries ou explications, la Cour a mis l'affaire en délibéré pour la décision être rendue à l'audience publique de ce jour, indiquée par le Président, à laquelle ce dernier a lu le dispositif de l'arrêt dont la teneur est la suivante, conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Par jugement contradictoire en date du 3 juin 2003, le Tribunal de Grande Instance de MOULINS a :

- rappelé que E, de son vivant assistante administrative, divorcée de F, est décédée le 13 janvier 2001, laissant pour héritiers ses deux enfants X... et Y, et pour légataire au terme d'un testament du 3 mai 1997 Z, son compagnon ;

- indiqué que la succession de E se compose de la moitié indivise d'un immeuble à Dompierre-sur-Besbre (03), part grevée d'usufruit en vertu du testament susdit ; de la moitié indivise d'un immeuble à La Guillermie (03), part dégagée d'usufruit ; de la nue-propriété d'un immeuble à Saint Jean Plat de Corts (66) ; de liquidités, meubles meublants et automobiles ;

- indiqué que la de cujus avait en outre souscrit en 1970 une assurance pour le cas de décès, en application d'un accord collectif de l'entreprise Peugeot où elle travaillait, et ce au bénéfice, selon avenant établi en 1986 et refait en 1997, de Z ou subsidiairement des parents ou des enfants de la stipulante ;

- constaté l'accord des parties pour qu'il soit procédé aux opérations de liquidation et de partage, pour que Z se voie attribuer l'immeuble de Dompierre en totalité et en plaine propriété, pour que les deux autres immeubles soient attribués aux enfants de la défunte ;

- ordonné une expertise sur la valeur de l'immeuble situé à Dompierre ;

- débouté les enfants de la défunte de leur demande visant à réintégrer dans l'actif successoral le capital assuré par la défunte selon contrat susvisé de 1970, modifié en 1986 et 1997.

Par acte de leur avoué en date du 30 juillet 2003, enrôlé le 5 août 2003, X... et Y ont interjeté appel principal et général de la décision intervenue.

Devant la Cour, les appelants ont déposé des conclusions conformes aux articles 915 et 954 du Nouveau Code de Procédure Civile, dont les dernières en date sont du 20 février 2004, et dans lesquelles ils limitent finalement leur recours à la question des meubles meublants et à celle de l'assurance-vie souscrite par la de cujus. S'agissant des meubles, ils souhaitent que la Cour en ordonne la prisée. S'agissant des capitaux assurés, ils estiment qu'ils doivent être intégrés dans l'actif à partager. Ils demandent 2000 euros pour leurs frais irrépétibles de procédure.

Précisément, sur ce dernier point, les appelants fondent leur recours sur l'absence d'aléa véritable au moment de la souscription de l'assurance. En effet, ils affirment qu'en 1997, leur mère était

atteinte d'une sclérodermie, maladie incurable, et que les dispositions qu'elle a prises à cette époque en faveur de son concubin et en défaveur de ses enfants étaient purement successorales. Ils ajoutent que les capitaux assurés représentent une part tellement importante des actifs successoraux, que la jurisprudence dite "Leroux" doit trouver à s'appliquer.

L'intimé, Z, a conclu le 30 décembre 2003 pour la dernière fois. Il demande la confirmation du jugement de première instance, sauf sur l'expertise ordonnée, que l'intimé, faisant appel incident sur ce point, estime superflue. Il demande en outre 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A propos de l'expertise de l'immeuble de Dompierre, l'intimé l'estime inutile parce que la déclaration de succession en a fixé la valeur, en référence à l'acte d'achat de ce bien, établi peu de temps auparavant. Sur la prisée des meubles, Z soulève l'irrecevabilité de cette demande en cause d'appel, parce qu'elle serait nouvelle.

SUR QUOI LA COUR,

Recevabilité

Attendu que l'appel principal et l'appel incident, interjetés dans les forme et délai légaux, sont réguliers et recevables ;

Au fond

1° - Sur la prisée des meubles

Attendu que les meubles meublants dont il s'agit n'ont pas une valeur suffisante, selon les indications données par les parties, pour justifier une prisée ; qu'il n'est pas démontré que la valeur (forfaitaire) retenue à la déclaration de succession soit irréaliste ; qu'en somme, la demande des appelants, bien que recevable par application de l'article 566 du Nouveau Code de Procédure Civile, apparaît mal fondée ;

2° - Sur l'expertise de l'immeuble situé à Dompierre-sur-Besbre

Attendu que la valeur retenue à la déclaration de succession est, contrairement à ce que feint de croire l'intimé, contestable et en tout cas contestée ; que la valeur non négligeable du bien dont il s'agit, empêche de trancher arbitrairement en faveur d'un chiffre quelconque ; que le premier juge a donc été bien avisé d'ordonner une expertise dudit immeuble ;

3° - Sur les capitaux assurés

Attendu que E bénéficiait d'un contrat collectif décès ou invalidité, souscrit en 1976, à une époque où elle était âgée de 24 ans, par son employeur, la Société PSA PEUGEOT CITROEN, obligatoire pour ses salariés ;

Qu'elle a, en 1986, établi comme bénéficiaire Z, ou à défaut ses parents, et encore à défaut ses enfants ; que le contrat de 1976 n'a pas été résilié pour autant, n'a même pas été changé pour le surplus de ses clauses, n'a pas été juridiquement nové, de sorte que E est demeurée liée par le contrat de groupe que lui imposait, depuis dix ans, son employeur ;

Que E a souscrit, à titre personnel, le 3 mai 1997, une garantie supplémentaire en cas de décès ; que pas davantage qu'en 1986, il ne s'est agi d'un nouveau contrat, mais de la confirmation du contrat souscrit en 1976, avec une simple augmentation du capital décès par un capital supplémentaire de 150.000 F ; qu'elle a également, le 3 mai 1997, par acte sous seing privé, désigné comme bénéficiaire particulier en cas de décès Z, et à défaut, ses enfants, les mêmes observations pouvant être faites que ci-dessus, sur l'absence de résiliation, de modification substantielle ou de novation ;

Attendu que les sommes stipulées payables lors du décès de l'assuré à ses héritiers ou à un bénéficiaire déterminé autre que l'assuré lui-même, en vertu d'un contrat d'assurance, ne font pas partie de la succession de l'assuré, et en conséquence ne sont pas soumises à

l'impôt sous réserve de l'application des dispositions des articles 757-B et 990-1 du Code Général des Impôts ;

Attendu que les Consorts X... et Y, pour solliciter que l'assurance-vie contractée par Esoit rapportée à la succession de leur mère, ainsi que le capital perçu par Z dans le cadre de cette assurance, doivent démontrer que le contrat d'assurance établi en 1976 n' jamais eu ou a perdu sa dimension de couverture d'un aléa ; que tel est le sens, restreint et exclusif de toute autre interprétation, de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 18 juillet 2000 (arrêt LEROUX), qui a jugé que les articles L 132-12 et L 132-13 du Assurances ne s'applique pas aux contrats de capitalisation, lesquels ne sont pas des contrats d'assurance, et échappent à certaines règles spécifiques à l'assurance, notamment à celles qui concernent la dévolution du capital à un tiers bénéficiaire en cas de décès, parce que seule l'absence d'aléa qui caractérise l'opération d'assurance permet de requalifier un contrat d'assurance en contrat de capitalisation ;

Attendu qu'en l'espèce, il n'est pas douteux, s'agissant d'un contrat de groupe, que cette assurance ait eu en 1976 pour but de garantir un risque aléatoire, le décès ou l'invalidité, étant précisé autant que de besoin que l'assurée avait à cette époque 24 ans ;

Qu'ultérieurement, jamais le contrat litigieux n'a eu pour économie de constituer, au moyen de versements successifs, un capital déterminé à l'avance devant être remboursé, soit à une date fixe, soit par anticipation, par voie de tirage au sort, mécanisme qui dénote l'opération de capitalisation ;

Que les avenants établis en 1986 et 1997 n'ont pas anéantit l'aléa, critère de l'assurance-vie, au seul motif du versement d'une somme unique, élément indifférent à la qualification du contrat d'assurance-vie, comme l'a expliqué le premier juge ; que l'aléa résulte exclusivement de la chance de gain ou de perte chez chacun

des partenaires, laquelle dépend elle-même de la date de survenance du décès du souscripteur et de l'identité du bénéficiaire ;

Que le décès de E n'avait pas en 1986, ni même en 1997, un caractère de probabilité aussi élevé que le prétendent les appelants ; qu'en 1997, à l'âge de 45 ans, elle disposait d'un certificat du Docteur Z... (pièce n° 14 des appelants) énonçant le diagnostic de sclérodermie systémique et évoquant expressément une possibilité de thérapie, en la disant "pas très facile" ; que nulle personne disposant d'un tel document ne se persuade nécessairement que sa fin est proche, la tendance naturelle de tout un chacun étant de croire à sa propre guérison ; que de fait, la sclérodermie, si elle est semble-t-il incurable en l'état actuel des connaissances scientifiques, n'est pas d'évolution rapide, et fait alterner des périodes d'aggravation et des périodes de rémission ; qu'il faut, à titre de contre-épreuve, observer qu'en l'espèce, E est décédée le 3 janvier 2001, soit trois ans et demi après le diagnostic de la maladie ;

Attendu par ailleurs, que les Consorts X... et Y soutiennent également que Z a été bénéficiaire d'un capital décès entreprise et d'une assurance-vie dont les primes sont manifestement excessives ;

Que ce faisant, ils se réfèrent aux dispositions de l'article L 132-13 alinéa 2 du Code des Assurances qui ouvrent la possibilité de demander le rapport à la succession des primes payées par le souscripteur ainsi que leur réduction, à condition de démontrer que ces dernières ont été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ;

Que la jurisprudence rappelle qu'il n'existe pas de seuil légal de l'excès, par rapport au patrimoine du souscripteur ; que la proportion de ce patrimoine délaissée à l'assureur, doit être prise en considération, à égalité avec l'utilité de l'opération pour le souscripteur et avec l'âge de celui-ci ;

Qu'en l'espèce, X... et Y n'apportent strictement aucun élément de preuve dans le dossier qu'ils ont remis à la Cour, de sorte que la Cour ne peut se prononcer sur le rapport à succession, faute de constater le caractère excessif des primes versées ;

Que d'ailleurs, le premier juge a noté avec raison que la déclaration de succession établie en 2001 après le décès de E faisait état d'une masse active de succession largement supérieure au montant de la prime versée en 1997 et que celle-ci ne présentait aucun caractère excessif eu égard au patrimoine de E et à ses revenus de salaires ;

Que la Cour ne pourra donc que confirmer le jugement sur ce point.

4° - Sur les accessoires

Attendu que les deux parties succombant également dans leurs appels respectifs, il ne sera pas fait application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; que les dépens seront employés en frais privilégiés du partage à intervenir.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi, EN LA FORME, Reçoit X... et Y et Z en leurs appels, AU FOND, Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 juin 2003 par le Tribunal de Grande Instance de Moulins, Dit n'y avoir lieu d'appliquer l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Fait masse des dépens et dit qu'ils seront employés en frais privilégiés du partage à intervenir, Dit que Maîtres A et C, avoués, bénéficieront de l'application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de riom
Numéro d'arrêt : 03/01977
Date de la décision : 20/04/2004

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Droits de mutation - Mutation à titre gratuit - Succession - Biens imposables - Contrat d'assurance-décès

Les sommes stipulées payables lors du décès de l'assuré à ses héritiers ou à un bénéficiaire déterminé autre que l'assuré lui-même, en vertu d'un contrat d'assurance, ne font pas partie de la succession de l'assuré, et en conséquence ne sont pas soumises à l'impôt sous réserve de l'application des dispositions des articles 757-B et 990-1 du Code général des impôts. En l'espèce, il n'est pas douteux, s'agissant d'un contrat de groupe, que cette assurance ait eu en 1976 pour but de garantir un risque aléatoire, le décès ou l'invalidité, étant précisé autant que de besoin que l'assurée avait à cette époque 24 ans. Les modifications ultérieures de ce contrat, à savoir un changement de bénéficiaire à la 10ème année et une amélioration de la garantie à la 21ème année, n'ont pas constitué un nouveau contrat qui, en raison d'une maladie grave à évolution lente, aurait été dénué d'aléa et aurait perdu son caractère d'assurance


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.riom;arret;2004-04-20;03.01977 ?
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