COUR D'APPEL DE RIOM 2ème Chambre
ARRET N DU : 23 Mars 2004 AFFAIRE N : 03/01847 EN PRESENCE DU MINISTERE PUBLIC JAF, origine Tribunal de Grande Instance CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 26 Juin 2003, enregistrée sous le n 01/4373 ENTRE : Mme X Représentant : Me Z (avoué à la Cour) - Représentant : Me A (avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RIOM) APPELANTE ET : M. Y Représentant : la SCP B (avoués à la Cour) - Plaidant par Me C (avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND) Mme Y 12 AVENUE DE LATTRE DE TASSIGNY 63190 LEZOUX Représentant : la SCP B (avoués à la Cour) - Plaidant par Me C (avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND) INTIMES DEBATS :Après avoir entendu à l'audience tenue en chambre du conseil le 23 Février 2004 les représentants des parties en leurs plaidoiries ou explications, le Ministère Public en ses réquisitions, la Cour a mis l'affaire en délibéré pour la décision être rendue à l'audience tenue en chambre du conseil de ce jour, indiquée par le Président, à laquelle ce dernier a lu le dispositif de l'arrêt dont la teneur est la suivante, conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Par jugement en date du 26 Juin 2003, le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de CLERMONT- FERRAND, statuant après dépôt d'un rapport d'enquête sociale, a débouté X de sa demande aux fins de se voir accorder un droit de visite et d'hébergement sur son petit fils Dorian, né le 5 Décembre 2000 des relations entre Y, son fils et Mme Y, l'épouse de ce dernier.
Par déclaration régulière en date du 11 Juillet 2003, x a interjeté appel de cette décision.
Dans ses conclusions récapitulatives en date du 16 Janvier 2004, l'appelante demande à la Cour de réformer la décision, et de dire
qu'elle exercera son droit de visite sur ses petits enfants les premiers samedis de chaque mois de 14 heures à 17 heures au lieu neutre " LE COUVIGE ".
Elle expose qu'en cours de procédure son fils Y a eu une autre petite fille à l'automne 2003 ; elle soutient que malgré plusieurs demandes amiables il lui a été refusé tout contact avec ses petits enfants et expose qu'à la suite du dépôt du rapport d'enquête sociale elle a considérablement réduit ses demandes ce qui démontre sa réelle motivation qui est l'intérêt de ses petits enfants à connaître leur grand- mère.
X reconnaît que son fils Y est en rupture totale avec elle, contrairement à ses autres enfants, conteste avoir été la mauvaise mère qu'il affirme avoir eu, et précise être remariée et mener avec son nouveau conjoint une vie stable.
Y et son épouse , intimés, concluent par écritures en date du 12 Décembre 2003, à la confirmation de la décision.
Ils font état de l'enfance et de l'adolescence douloureuses vécues par Y en raison de la mauvaise vie de sa mère et du manque évident d'éducation reçu, de son instabilité affective après son divorce, alors qu'il n'avait que 15 ans, et de son alcoolisme installé.
Ils soutiennent que le rapport conflictuel existant encore entre eux est de nature à déstabiliser Dorian, ce d'autant plus que l'enquête sociale a mis en évidence les tendances manipulatrices de X
Le Ministère public conclut à la réformation de la décision et à l'octroi d'un droit de visite à l'appelante avec précautions et en lieu neutre . SUR QUOI
Attendu que l'article 371- 4 du Code Civil présume qu'il est de l'intérêt des enfants d'entretenir des relations personnelles avec leurs grands parents à moins qu'il ne soit justifié de motifs graves de nature à y faire obstacle ;
Attendu qu'en l'espèce, il résulte des éléments du dossier et de l'enquête sociale diligentée dans le cadre de la procédure en première instance, que, quelques en soient les raisons réelles, les relations entre Y et sa mère se sont fortement dégradées au cours de son adolescence, et tout particulièrement après le divorce des parents ; qu'ils sont actuellement en totale rupture du fait de la position deY qui refuse tout contact avec sa mère et qu'une relation de force s'est installée entre eux ;
Attendu que X n'a vraisemblablement pas mené la vie que son fils attendait d'une mère qu'il aurait aimée plus maternelle, et très certainement plus stable dans sa vie affective, tout particulièrement après le divorce ; qu'il sera toutefois observé qu'elle a élevé quatre enfants dont elle a assumé l'éducation seule après avoir quitté un mari alcoolique et que Y est resté au domicile familial jusqu'à l'âge de 22 ans ;
Attendu qu'il ne saurait être reproché à X de vouloir avoir une relation affectueuse avec son petit fils Dorian qu'elle ne connaît pas ; qu'il résulte de l'enquête sociale que ses filles ont une totale confiance en elle et lui confient leurs enfants sans aucun problème ; que le fait qu'elle soit remariée avec un homme plus jeune qu'elle n'est pas, en soi, de nature à mettre en doute ses capacités affectives à l'égard de ses petits enfants ; qu'enfin l'enquête sociale n'a pas mis en évidence les allégations d'alcoolisme proférées par Y, et qui sont contredites par les documents médicaux versés au dossier ;
Attendu que l'intérêt des enfants est de connaître leur grand-mère paternelle ; que toutefois ces relations ne peuvent s'installer qu'en toute confiance et sérénité, faute de quoi elles auraient inévitablement un effet négatif contraire au but recherché ;
Attendu que pour ce faire, le recours à un point rencontre, lieu
neutre, apparait indispensable ainsi qu'en convient l'appelante afin, de permettre la mise en place entre X et son petit-fils d'une relation progressive et sécurisante dans un contexte sans hostilité à l'égard des parents ;
Attendu que la décision sera réformée et le droit de visite de la grand- mère sur son petit-fils organisé ainsi qu'il sera précisé au dispositif ;
Attendu, pour la petite fille née au cours de l'automne 2003, que, s'agissant d'un nourrisson , l'organisation d'un droit de visite dans les conditions sus précisées n'est pas adapté ; qu'il n'y a pas lieu en l'état de faire droit à la demande de x ;
Attendu que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens. SUR QUOI
LA COUR, statuant en chambre du conseil, contradictoirement, après débats en chambre du conseil,
DECLARE l'appel recevable,
AU FOND
REFORME la décision,
DIT que x exercera son droit de visite sur son petit-fils , dans les locaux du lieu d'accueil " LE COUVIGE, un samedi par mois de 14 heures à 16 heures 30, à charge pour les parents d'y amener l'enfant et de l'y rechercher, pendant une durée de six mois,
DIT que les frais d'intervention du lieu d'accueil seront supportés par moitié par chacune des parties et recouvrés selon les règles de l'aide juridictionnelle,
DIT qu'à l'issu du délai de six mois, sauf accord des parties, le Juge aux Affaires Familiales devra à nouveau être saisi à l'initiative de la partie la plus diligente,
DIT n'y avoir lieu en l'état à droit de visite sur le second enfant des époux Y,
DIT que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens qui seront recouvrés selon les règles de l'aide juridictionnelle.