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29/08/2024 | FRANCE | N°24/02878

France | France, Cour d'appel de Rennes, Référés 7ème chambre, 29 août 2024, 24/02878


Référés 7ème Chambre





ORDONNANCE N°4/2024



N° RG 24/02878 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UY34













S.A.S. TV GETAL



C/



M. [M] [R]































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE RENNES





ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ >
DU 29 AOUT 2024







Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre

délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,



GREFFIER :



Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats, et Madame Françoise DELAUNAY, lors du prononcé,



DÉBATS :



A l'audience publique du 16 Juillet 2024



ORDONNANCE :



Contr...

Référés 7ème Chambre

ORDONNANCE N°4/2024

N° RG 24/02878 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UY34

S.A.S. TV GETAL

C/

M. [M] [R]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 29 AOUT 2024

Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre

délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats, et Madame Françoise DELAUNAY, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 16 Juillet 2024

ORDONNANCE :

Contradictoire,

prononcée publiquement le 29 Août 2024, par mise à disposition date indiquée à l'issue des débats

****

Vu l'assignation en référé délivrée le 02 Mai 2024

ENTRE :

S.A.S. TV GETAL

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Murielle VANDEVELDE-PETIT de la SELAS KPMG AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LYON substituée par Me William DULAC, avocat au barreau de LYON

ET :

Monsieur [M] [R]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Amaury GAULTIER, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-MALO

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Le 1er avril 2018, M.'[M] [R] a été recruté par la société Tv Getal en qualité de chargé d'affaire par le biais d'un contrat à durée indéterminée régularisé le 16 avril suivant.

Par avenant du 11 janvier 2019, M. [R] est devenu ingénieur d'affaire et a vu sa rémunération évoluer en conséquence.

En novembre 2021, la société TV Getal envisageait de faire évoluer le périmètre d'intervention de M. [R].

M.'[R] a, par lettre recommandée du 31 août 2022, pris acte de la rupture de son contrat de travail, considérant que son employeur avait commis des manquements graves dans l'exécution de celui-ci.

Par déclaration au greffe du 9 février 2023, M.'[R] a saisi le conseil des prud'hommes de Dinan aux fin de requalification de la prise d'acte de rupture de son contrat et de condamnation de la société TV Getal à lui verser diverses indemnités.

Par jugement du 6 mars 2024, le conseil des prud'hommes a notamment :

- jugé que la prise d'acte de rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 4'735 euros brut,

- condamné la société TV Getal à verser à M. [R] les sommes suivantes :

' 14'205 euros bruts au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 14'205 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

' 1'420,5 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

' 6'210 euros bruts au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

' 27'036,24 euros bruts au titre de rappel de commissions pour l'année 2021,

' 27'415,05 euros bruts au titre du rappel de commission pour l'année 2022,

' 5'445,13 euros bruts au titre des congés payés afférents aux rappels de commissions,

' 3'174,65 euros bruts au titre du rappel des commissions sur contrats d'entretien pour les années 2021 et 2022,

' 317,46 euros bruts au titre des congés payés afférents au rappel des commissions sur contrats d'entretien,

' 2'400 euros bruts au titre du solde de la prime d'installation,

' 2'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision à hauteur de 10 mois de salaires, soit la somme brute de 47'350 euros.

La société TV Getal a interjeté appel de cette décision par déclaration du 22 avril 2024.

Par exploit signifié à M. [R] le 2 mai 2024 (enrôlé deux fois les 15 et 29 mai 2024, ce double enrôlement ayant fait l'objet d'une jonction par mention au dossier), la société TV Getal sollicite, au visa des articles 517 et suivants du code de procédure civile, l'arrêt de l'exécution provisoire de la décision et, à titre subsidiaire, l'autorisation de consigner la somme de 47'350 euros.

Elle invoque l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision, puisque le contrat de travail précisait que le secteur attribué pourrait être unilatéralement modifié à son initiative dans l'intérêt de l'entreprise, sans que l'employé ne puisse prétendre à une indemnité ni à une révision de son indemnisation. Elle fait valoir qu'il avait été convenu que l'avenant du 1er janvier 2019 serait temporaire et rappelle que M. [R] n'a pas tenu son engagement de s'installer avec sa famille en région Occitanie, d'où est résultée une gestion insatisfaisante de son portefeuille. Elle affirme avoir, par avenant du 2 mai 2022, proposé à M. [R] un nouveau secteur géographique proche de son domicile, que l'intimé n'a pas retourné signé.

Elle soutient que M. [R] a pris acte de la rupture de son contrat en invoquant un manquement inexistant, l'avenant litigieux n'ayant pas été mis en 'uvre. Elle considère donc que c'est à tort que le conseil des prud'hommes a retenu une modification du contrat de travail. Elle estime, en outre, que la juridiction de première instance n'a pas pris en considération ses pièces lorsqu'elle a statué sur les rappels de salaires au titre des commissions.

Elle prétend qu'il existe un risque de conséquences manifestement excessives résultant de l'exécution provisoire de la décision, sa situation économique étant fragile en raison de la baisse significative de son chiffre d'affaire sur plusieurs trimestres consécutifs. Elle indique avoir réalisé plusieurs cessions partielles de fonds, des fermetures de dépôts, ainsi qu'une mise en place d'échéancier de désendettement. Elle considère que M. [R] ne sera pas en mesure de restituer les sommes en cas d'infirmation de la décision critiquée.

Dans ses dernières conclusions (12 juillet 2024), M. [M] [R] nous demande au visa des articles 514 et suivants du code de procédure civile, de :

- juger la demande de l'appelante irrecevable,

en tout état de cause,

- juger la demande de l'appelante mal fondée,

en conséquence,

- débouter l'appelante de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- la condamner à lui verser la somme de 2'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [R] soulève l'irrecevabilité de la demande, la société TV Getal n'ayant formulé aucune observation sur l'exécution provisoire devant le juge de première instance, et n'ayant rapporté dans ses moyens que des éléments antérieurs à la décision du 6 mars 2024.

Il fait valoir qu'il n'existe aucune chance de réformation de la décision tant que l'appelante ne justifie pas de la date de notification de la décision de première instance. Il ajoute que la société TV Getal n'apporte aucun moyen tendant à l'annulation de ladite décision, et qu'elle s'est contentée d'un résumé de ses conclusions de première instance. Il ajoute que l'employeur a tenté de lui confier un secteur géographique déjà attribué et ne lui a plus fourni de travail depuis, le placardisant.

Il estime qu'il n'existe pas de conséquences manifestement excessives, l'appelante n'ayant apporté que quelques éléments ne permettant pas de s'assurer de la prétendue fragilité de sa situation financière. Il ajoute que les cessions effectuées lui ont permis de bénéficier de disposer d'actifs liquides suffisants pour payer les sommes dues. Il affirme disposer de revenus corrects et être en capacité de restituer les sommes en cas de réformation de la décision. Il précise n'avoir aucune dette ni intention de dépenser les sommes en jeu avant le terme de l'instance.

Il conteste la demande de constitution d'une garantie, celle-ci n'ayant pas été évoquée en première instance et ne respectant pas les conditions de l'article 514-3 du code de procédure civile. Il considère, en outre, cette demande contradictoire avec la prétendue situation financière fragile de l'appelante.

SUR CE :

Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire':

L'article R 1454-28 du code du travail énonce que : «'à moins que la loi ou le règlement n'en dispose autrement, les décisions du conseil de prud'hommes ne sont pas exécutoires de droit à titre provisoire. Le conseil de prud'hommes peut ordonner l'exécution provisoire de ses décisions.

Sont de droit exécutoires à titre provisoire, notamment :

1° le jugement qui n'est susceptible d'appel que par suite d'une demande reconventionnelle,

2° le jugement qui ordonne la remise d'un certificat de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l'employeur est tenu de délivrer ;

3° le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R 1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement'».

Les rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R 1454-14 (dans sa rédaction applicable au présent litige) sont : a) les salaires et accessoires du salaire ainsi que les commissions, b) les indemnités de congés payés, de préavis et de licenciement, c) l'indemnité compensatrice et de l'indemnité spéciale de licenciement en cas d'inaptitude médicale consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle mentionnées à l'article L 1226-14, e) l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L 1243-8 et l'indemnité de fin de mission mentionnée à l'article L 1251-32.

En l'occurrence, la décision du conseil des prud'hommes de Dinan est assortie de l'exécution provisoire de droit à hauteur de 9 mois de salaire soit la somme de 42'615'euros, l'exécution provisoire ordonnée ne pouvant légalement porter que sur le dixième mois (4'735'euros).

S'agissant des premières, l'arrêt de l'exécution provisoire est régie par l'article 514-3 du code de procédure civile («'En cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance'»), alors que l'arrêt de l'exécution provisoire des secondes est soumis aux dispositions de l'article 517-1'du même code («'Lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président et dans les cas suivants.

1° Si elle est interdite par la loi ;

2° Lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 et 518 à 522'»).

Il appartient à la partie qui entend se prévaloir de ces dispositions de démontrer que les conditions cumulatives qu'elles prévoient sont réunies.

a ' sur la fraction de la condamnation assortie de l'exécution provisoire de droit (article 514-3)':

Il est constant que la société TV Getal n'a pas fait d'observation sur l'exécution provisoire devant le premier juge de sorte que sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire en ce qu'elle porte sur les sommes assorties de droit de l'exécution provisoire, n'est recevable que si elle démontre l'existence de conséquences manifestement excessives révélées depuis le jugement. Or, en l'espèce, force est de constater que les conséquences dont elle fait état étaient connues au jour de l'audience. Il s'ensuit que sa demande de ce chef ne peut qu'être déclarée irrecevable.

b ' sur la fraction de la condamnation assortie de l'exécution provisoire ordonnée (article 517-1)':

La société TV Getal ne conteste pas être mesure de régler la somme de 4'735'euros puisqu'elle offre de la consigner (cf. infra).

Par ailleurs, elle ne peut raisonnablement prétendre que la perte éventuelle de cette somme engendrerait pour elle les conséquences susvisées.

Il en résulte que la condition tirée de l'existence de conséquences manifestement excessives n'est pas satisfaite. La demande d'arrêt de l'exécution provisoire fondée sur cette disposition ne peut dès lors qu'être rejetée.

Sur la demande de consignation':

L'article 521 du code de procédure civile donne le pouvoir discrétionnaire au premier président (2e Civ., 27 février 2014, pourvoi n° 12-24.873, Bull. 2014, II, n° 54 : « Le pouvoir, prévu à l'article 521 du code de procédure civile, d'aménager l'exécution provisoire [est] laissé à la discrétion du premier président ») d'autoriser la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions à consigner, pour éviter que l'exécution provisoire soit poursuivie, des espèces ou valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.

Cette consignation peut n'être que partielle.

Il est, en l'espèce, conforme à l'intérêt des deux parties d'ordonner une consignation partielle à hauteur de 50 % des sommes assorties de l'exécution provisoire à l'exception toutefois de celles allouées au titre des frais irrépétibles qui devront être payées au salarié. Cette solution permet à M.'[R] de bénéficier d'ores et déjà d'une partie des sommes qui lui ont été accordées et à la société TV Getal d'être garantie de récupérer une partie des fonds en cas d'infirmation de la décision.

Sur les dépens et les frais irrépétibles':

La société TV Getal qui échoue pour l'essentiel en ses prétentions supportera la charge des dépens.

Elle devra verser à son adversaire une somme de 1'000'euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant par ordonnance rendue contradictoirement :

Vu les articles R 1454-28 et R 1454-14 2° du code du travail, 514-3, 517-1 et 521 du code de procédure civile':

Déclarons irrecevable la demande d'arrêt de l'exécution provisoire de droit dont est assortie, à concurrence de neuf mois de salaire, la décision rendue le 6 mars 2024 par le conseil des prud'hommes de Dinan

Rejetons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire dont est assortie pour le surplus la décision rendue le 6 mars 2024 par le conseil des prud'hommes de Dinan.

Autorisons la société TV Getal à consigner entre les mains de la Caisse des Dépôts et Consignations la somme de 23'675'euros pour garantir la moitié de la condamnation exécutoire par provision dans un délai d'un mois à compter du prononcé de la présente décision.

Disons que la société TV Getal devra justifier dans le dit délai au conseil de M. [R] de la consignation ainsi effectuée, faute de quoi ce dernier pourra procéder au recouvrement de la totalité de la somme due.

Rejetons pour le surplus (50 % des sommes allouées assorties de l'exécution provisoire et 100 % de la condamnation au titre des frais irrépétibles) la demande de consignation et disons que les dites sommes devront être versées à M. [M] [R].

Condamnons la société TV Getal aux dépens.

La condamnons à payer à M. [M] [R] une somme de 1'000'euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Référés 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24/02878
Date de la décision : 29/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 07/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-29;24.02878 ?
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