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16/04/2024 | FRANCE | N°22/06447

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre du surendettement, 16 avril 2024, 22/06447


Chambre du Surendettement



Redressement judiciaire civil



ARRÊT N° 43



N° RG 22/06447 - N° Portalis DBVL-V-B7G-TH5H





DÉBITEUR :

[W] [V] épouse [E]







Mme [W] [V] épouse [E]



C/



[14]

SIP [Localité 19]

[11] CHEZ [20]

[17] AB

[13] [Adresse 12]

[15]

















Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
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Copie exécutoire délivrée

le :



à :



Mme [W] [V] épouse [E]

[14]

SIP [Localité 19]

[11] CHEZ [20]

[17] AB

[13] [Adresse 12]

[15]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENN...

Chambre du Surendettement

Redressement judiciaire civil

ARRÊT N° 43

N° RG 22/06447 - N° Portalis DBVL-V-B7G-TH5H

DÉBITEUR :

[W] [V] épouse [E]

Mme [W] [V] épouse [E]

C/

[14]

SIP [Localité 19]

[11] CHEZ [20]

[17] AB

[13] [Adresse 12]

[15]

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Mme [W] [V] épouse [E]

[14]

SIP [Localité 19]

[11] CHEZ [20]

[17] AB

[13] [Adresse 12]

[15]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 16 AVRIL 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Hélène BARTHE-NARI, magistrat chargé d'instruire l'affaire, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Pierre DANTON, lors des débats, et Mme Aichat ASSOUMANI, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 Novembre 2023

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 16 Avril 2024, après prorogations, par mise à disposition au greffe

****

APPELANTE :

Madame [W] [V] épouse [E]

[Adresse 5]

[Localité 16]

Comparante en personne et assistée de Me Olivier DERSOIR, avocat au barreau de RENNES

INTIME(E)S :

[14]

[Adresse 21]

[Localité 4]

Régulièrement convoqué(e) par lettre recommandée avec accusé de réception daté du 02/03/2023

SIP [Localité 19]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Régulièrement convoqué(e) par lettre recommandée avec accusé de réception daté du 02/03/2023

[11] CHEZ [20]

[Adresse 3]

[Localité 10]

Régulièrement convoqué(e) par lettre recommandée avec accusé de réception daté du 03/03/2023

[17] AB

[Adresse 24]

[Adresse 24]

[Localité 2] SUEDE

Représenté(e) par Me Pierre SIROT avocat au barreau de NANTES, substitué par Me Mélodie RUFF avocat au barreau de NANTES

[13]

[Adresse 12]

[Adresse 12]

[Adresse 12]

[Localité 8]

Régulièrement convoqué(e) par lettre recommandée avec accusé de réception daté du 03/03/2023

SA [15]

[Adresse 6]

[Localité 9]

Régulièrement convoqué(e) par lettre recommandée avec accusé de réception daté du 03/03/2023

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 4 août 2020, Mme [W] [V] épouse [E] a saisi la commission de surendettement des particuliers du Morbihan aux fins de bénéficier de mesures de traitement de sa situation de surendettement . Sa demande a été déclarée recevable le 29 septembre 2020.

Par jugement en date du 23 avril 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lorient a :

- déclaré Mme [W] [E] recevable en sa contestation de créance,

- constaté son désistement de vérification des créances du SIP [Localité 19],

- fixé pour les besoins de la procédure de surendettement, le montant de la créance n°26936618 de la [11] à l'égard de Mme [E] à la somme de 0 euro,

- fixé pour les besoins de la procédure de surendettement, le montant de la créance n°81323069482 de [13] à l'égard de Mme [E] à la somme de 0 euro,

- fixé pour les besoins de la procédure de surendettement, le montant de la créance n°0931396486303/42533/10312535-01 du [14] à l'égard de Mme [E] à la somme de 5 367,79 euros,

- fixé pour les besoins de la procédure de surendettement, le montant de la créance n°10195433247 de [15] à l'égard de Mme [E] à la somme de 10 713,65 euros,

- fixé pour les besoins de la procédure de surendettement, le montant de la créance n°12388695442 de [15] à l'égard de Mme [E] à la somme de 7 220,34 euros,

- rappelé que le jugement était immédiatement exécutoire,

- rappelé que la décision n'avait pas autorité de chose jugée au principal,

- renvoyé le dossier de Mme [W] [E] à la commission de surendettement des particuliers du Morbihan aux fins de poursuite de la procédure.

Par décision du 9 décembre 2021, la commission a imposé un plan de rééchelonnement du paiement des créances sur 111 mois sur la base d'une mensualité de remboursement de 217 euros, permettant à la débitrice de conserver sa résidence principale, la vente de ce bien immobilier compte tenu de sa situation et de sa valeur ajoutée aux coûts de relogement n'apparaissant pas une solution adaptée.

La société [17] AB, venant aux droits de la société [11] à la suite d'une cession de créance, a formé un recours contre cette décision.

Par jugement du 30 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Lorient, statuant en matière de surendettement a, notamment déclaré le recours recevable et bien fondé et déclaré Mme [W] [E] née [V] irrecevable en la procédure de surendettement.

Par déclaration en date du 7 octobre 2022, Mme [E] a relevé appel de cette décision.

L'appelante et les créanciers déclarés ont été convoqués à l'audience de la cour du 24 novembre 2023.

A cette date, Mme [E] a comparu, représentée par son conseil. Reprenant oralement ses conclusions écrites, elle a demandé à la cour de :

- réformer le jugement du tribunal judiciaire de Lorient du 30 septembre 2022 dont appel,

- à titre principal,

- déclarer le recours de la société [17] AB irrecevable,

- constater que la décision de recevabilité de la procédure de surendettement notifiée à [17] AB par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 octobre 2020 a fait l'objet d'un recours,

à titre subsidiaire,

- déclarer Mme [E] recevable et bien fondée dans sa demande de surendettement,

- constater qu'il ne peut être relevé à son encontre d'éléments caractérisant une mauvaise foi,

à titre infiniment subsidiaire,

- constater que la société [17] AB ne dispose pas d'une créance certaine, liquide et exigible,

en tout état,

- débouter la société [17] AB de l'intégralité de ses demandes,

- la condamner au paiement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

De son côté, la société [17] AB a demandé à la cour de :

à titre liminaire,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lorient le 30 septembre 2022 en toutes ses dispositions faute pour Mme [E] de formuler des demandes de nature à saisir la cour d'appel,

à titre principal,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lorient le 30 septembre 2022 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société [17] AB de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

statuant à nouveau,

- condamner Mme [W] [V] épouse [E] à payer à la société [17] AB la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance,

- débouter Mme [W] [V] épouse [E] de l'ensemble de ses demandes,

à titre subsidiaire, si par impossible, la cour devait infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé Mme [E] irrecevable à la procédure de surendettement et examiner ses demandes,

- juger recevable le recours formé par la société [17] AB à l'encontre des mesures imposées par la commission de surendettement des particuliers du Morbihan,

en conséquence,

- déchoir Mme [E] du bénéfice des dispositions applicables au traitement de sa situation de surendettement,

- débouter Mme [W] [V] épouse [E] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Mme [W] [V] épouse [E] à payer à la société [17] AB la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles,

subsidiairement, si par impossible la cour ne devait pas déchoir Mme [E] du bénéfice du surendettement,

- débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- fixer la créance de la société [17] AB à la procédure de surendettement de Mme [E] à la somme de 385 082,79 euros,

- rejeter les mesures que la commission de surendettement des particuliers du Morbihan entend imposer à Mme [E],

- accorder à Mme [E] un moratoire d'une durée de douze mois afin de lui permettre de vendre le bien immobilier situé à [Localité 16] (56), [Adresse 5],

en tout état de cause,

- condamner Mme [E] à payer à la société [17] AB la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Les autres créanciers n'ont pas comparu ni fait connaître leurs observations.

EXPOSÉ DES MOTIFS :

A titre liminaire, il sera rappelé qu'aux termes de l'article 946 du code de procédure civile, la procédure est orale de sorte que les observations faites par la société [17] AB sur les conclusions de Mme [E], en l'état de ses demandes formées à l'audience, sont inopérantes.

Sur la recevabilité du recours de [17] AB :

Mme [E] conclut à l'infirmation du jugement qui a estimé le recours de la société [17] recevable. Elle soutient que celle-ci ne serait plus recevable à contester la recevabilité de sa demande de surendettement qui lui a été adressée par la commission de surendettement le 12 octobre 2020 ni le projet de plan conventionnel dont elle a été informée le 25 avril 2021. Elle prétend également que la société [17] AB a été avisée de l'instance ayant donné lieu au jugement du 23 avril 2021par son cédant et souligne qu'elle n'a formé aucun recours, notamment pas de tierce-oppostion. Elle soutient enfin que ce créancier a reçu toutes les correspondances adressées par la commission et qu'elle en a adressé de son côté depuis le 1er juillet 2021.

Mme [E] conclut en conséquence que la société [17] AB a eu les moyens de faire valoir ses droits et considère que c'est de manière abusive qu'elle tente d'utiliser l'erreur d'adresse apparue à l'occasion du jugement du 23 avril 2021. Selon elle, la société [17] AB n'est plus recevable à solliciter une quelconque somme à son encontre.

En réponse, la société [17] AB précise à l'audience ne pas revenir sur la recevabilité de Mme [E] au bénéfice de la procédure de surendettement. Elle fait valoir que son recours formé, le 23 décembre 2021, porte sur les mesures imposées par la commission de surendettement notifiées le 14 décembre 2021 et que le délai légal de recours ayant été respecté, sa contestation est recevable. Elle considère que le jugement du 23 avril 2021 qui ne lui a pas été notifié ne lui est pas opposable. Enfin, soulignant les nombreuses erreurs commises par Mme [E] et la commission quant à l'identité du créancier et son adresse postale, elle prétend ne jamais avoir été avisée de la procédure de surendettement de la débitrice et ne pas avoir pu déclarer sa créance ni avoir été avisée en temps utile de la procédure de vérification des créances dont le tribunal judiciaire de Lorient a eu à connaître.

Comme l'a relevé en effet le tribunal, la société [17] AB a formé recours contre les mesures imposées qui lui ont été notifiées le 14 décembre 2021 dans le délai de 30 jours prévu par l'article R. 733-6 du code de la consommation. Son recours est donc recevable. Par ailleurs, il est constant que la société [17] AB n'est pas mentionnée sur le jugement du 23 avril 2021 parmi les créanciers de Mme [E] et que seule la société [11] a été convoquée à l'audience de vérification de créances alors qu'il résulte des pièces produites qu'elle avait cédé la créance qu'elle détenait sur les époux [E] à la société [17] AB le 16 décembre 2019 et que cette cession de créance avait été notifiée à chacun des époux par courrier du 5 mars 2020. Cette décision n'est donc pas opposable à la société [17] AB et n'a pas autorité de chose jugée à son encontre.

De surcroît, les courriers relatifs à cette créance envoyés par la commission l'ont été à une adresse qui n'est pas celle du siège social de la société [17] AB et sont pour la plupart adressés à la société [11] - [17] à service de surendettement.

En tout état de cause, il est de jurisprudence constante qu'une vérification de créance opérée par le juge des contentieux de la protection ne vaut que pour les besoins de la procédure, qu'elle ne s'impose pas au juge du surendettement saisi d'une nouvelle demande et est dépourvue de l'autorité de chose jugée au principal. En outre, une telle vérification n'a pas pour effet de priver le juge des contentieux de la protection de vérifier la validité et le montant des titres de créance lorsqu'il est saisi ultérieurement d'une contestation relatives aux mesures recommandées ou imposées, comme c'est le cas en l'espèce.

C'est donc en vain que Mme [E] soutient que le recours de la société [17] AB n'est pas recevable.

Sur la déchéance de la procédure de surendettement :

Le tribunal a considéré que Mme [E] était de mauvaise foi pour avoir manqué aux obligations de la procédure de surendettement en ne procédant pas à la vente de son bien immobilier alors qu'elle avait bénéficié, lors de la saisine de la commission de surendettement avec son mari ou seule, de nombreux moratoires pour y parvenir. Il a déclaré la débitrice irrecevable à la procédure de surendettement.

En appel, Mme [E] se défend de toute mauvaise foi et fait valoir que la vente de la maison a été rendue difficile par l'état de santé de son époux, la procédure de divorce puis le décès de M. [E]. Elle a souligné devant la cour, que l'acte de notoriété n'avait été établi par le notaire que le 13 avril 2023.

La société [17] AB, sur laquelle pèse la charge de la preuve de la mauvaise foi de la débitrice, a précisé à l'audience qu'elle ne contestait pas la recevabilité de Mme [E] mais qu'elle portait le débat sur la déchéance de la procédure de surendettement de la débitrice. Soulignant que Mme [E] avait dissimulé les différentes procédures antérieures de surendettement dont elle avait fait l'objet avec son époux depuis 2014 et qu'elle ne produisait aucun justificatif de mise en vente de sa maison entre 2016 et 2019, elle en a conclu que la débitrice avait fait de fausses déclarations aux fins de bénéficier de la procédure de surendettement et qu'elle devait être déchue de son bénéfice.

Il sera rappelé qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de la consommation, est déchue du bénéfice de la procédure de surendettement:

' 1° toute personne qui a sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts,

2° toute personne qui a détourné ou dissimulé ou tenté de détourner ou de dissimuler tout ou partie de ses biens,

3° toute personne qui sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, a aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou aura procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel ou pendant l'exécution du plan ou des mesures prévues à l'article L. 733-1 ou à l'article L. 733-4 .'

Par ailleurs, et selon l'article L.712-3 du code de la consommation, cette déchéance peut être prononcée par le juge des contentieux de la protection à l'occasion des recours exercés devant lui ainsi que dans le cadre de la procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire. Le juge a notamment le pouvoir de la relever d'office.

Cette déchéance sanctionne donc un débiteur déjà déclaré recevable à la procédure de surendettement mais pour lequel viendrait à être révélés, après la déclaration de recevabilité, l'un ou plusieurs des manquements visés par l'article 761-1 du code de la consommation.

Il est de principe que l'énumération des cas de déchéance de l'article L. 761-1 est limitative.

En l'espèce, il ne peut être soutenu que Mme [E] a fait de fausses déclarations pour bénéficier de la procédure de surendettement parce qu'elle n'a pas repris tout l'historique des procédures antérieures à sa saisine de la commission le 4 août 2020. La commission de surendettement dispose en effet de l'ensemble des procédures antérieures dont M et Mme [E] l'ont saisie aux fins d'apurer leur situation de surendettement . Elle est en mesure de reprendre les éléments des précédentes saisines des époux [E] et de vérifier les mesures imposées aux débiteurs.

Par ailleurs, le décès de M. [E] le 24 juin 2020 ne permettait pas à la débitrice de procéder seule à la vente du bien immobilier commun au couple. L'appelante a produit dans le cadre du délibéré comme elle y a été autorisée, les nombreux échanges qu'elle a eus avec le notaire pour obtenir l'acte de notoriété qui n'a été dressé que le 13 avril 2023. Cet acte fait état de l'existence des trois enfants du couple qui viennent aux droits de leur père. Mme [E] justifie néanmoins avoir confié mandat de vente sans exclusivité à l'agence immobilière [22] de [Localité 16] dès le 4 mai 2023.

En conséquence, aucune dissimulation, aucune fausse déclaration de la part de Mme [E] n'est démontrée. Sa mauvaise foi n'est pas davantage établie. Le jugement déféré sera donc infirmé.

Sur la créance de la société [17] AB :

La validité et le montant des créances pouvant être de nouveau discutées dans le cadre de la contestation de mesures imposées, la société [17] AB est en droit de solliciter la fixation de sa créance nonobstant le jugement du 23 avril 2021 qui n'a aucune autorité de chose jugée au principal et n'en a pas, de toute façon, à son égard, la décision ayant été rendue sans qu'elle soit convoquée à l'audience de vérification de la créance qui lui a été cédée.

Il est acquis aux débats que M et Mme [E] se sont vus octroyés le 19 juin 2008 un prêt d'un montant de 417 426 euros remboursable en 300 mensualités par la société [23] aux droits de laquelle sont venues, par fusion absorption successives, la société [18], puis la société [18] et la société [11]. Cette dernière a cédé sa créance à la société [17] AB, laquelle par courrier en date du 14 décembre 2022, a mis en demeure Mme [E] de régler la somme de 35 965,31 euros sous huit jours, puis a prononcé la déchéance du terme le 26 décembre 2022, sollicitant le réglement de la somme de 386 466,34 euros.

Mme [E] conteste le montant de cette créance faisant valoir que le décompte produit par l'intimée ne reprend pas les paiements effectués du 1er août 2008 au 1er juillet 2012, pour un montant de 147 916 euros et que le premier incident de paiement est intervenu le 1er août 2012. Elle souligne également que la suspension des paiements à partir de la décision de recevabilité du plan de surendettement le 1er novembre 2013 n'est pas pris en compte par la société créancière. Elle produit un décompte de la créance et les différents relevés de banque justifiant de règlements effectifs à hauteur de 178 088,04 euros. Considérant que la société [17] AB est dans l'impossibilité de caractériser sa créance, elle demande à la cour d'en constater l'absence.

Si la société [17] AB reconnaît que M et Mme [E] ont bien réglé à compter du déblocage des fonds quarante-sept échéances d'un montant de 3 147,15 euros chacune soit la somme totale de 147 916,05 euros, elle souligne, en produisant le tableau d'amortissement que cette somme se décompose comme suit :

- 125 531,18 euros d'intérêts,

- 20 903,49 euros de capital.

Elle rejoint également Mme [E] sur le fait que les premiers impayés ont été enregistrés à compter du 1er août 2012 mais fait valoir que des règlements partiels ont été effectués et notamment que des paiements sont intervenus dans le cadre des plans d'apurement. Elle comptabilise ainsi un montant de 23 830,54 euros au titre des règlements reçus du 1er août 2012 au 7 juin 2022. Elle considère donc qu'au 7 juin 2022, il lui restait dû la somme de 386 466,34 euros.

Cependant, il résulte des documents produits par Mme [E] que la décision de recevabilité de la première saisine de la commission par les époux [E] a été prononcée le 29 novembre 2013 par la commission et que par jugement du 13 mai 2014, statuant sur la contestation formée par la société [23] sur la recevabilité des débiteurs, le tribunal d'instance de Lorient a déclaré recevable la requête en ouverture d'une procédure de surendettement présentée par M et Mme [E] et renvoyé à la commission aux fins de poursuite de la procédure en vue de la vente de la résidence principale. Il s'ensuit qu'à compter de la date de recevabilité, la créance de la société [23] a cessé de produire intérêts ou générer des pénalités de retard et ce jusqu'à la mise en oeuvre des mesures de traitement de la situation de surendettement conformément aux dispositions de l'article L. 722-14 du code de la consommation.

Dès le 27 octobre 2014, Mme [E] a saisi à nouveau la commission d'une demande tendant à voir reconnaître sa situation de surendettement . Celle-ci a préconisé un moratoire de 24 mois pour procéder à la vente de la maison, dont la valeur, estimée à 600 000 euros, était de nature à permettre d'apurer la totalité du passif des époux [E]. Par jugement du 11 octobre 2016, le tribunal d'instance de Lorient a confirmé le principe d'un moratoire pour procéder à la vente du bien immobilier. Par suite d'une nouvelle saisine par Mme [E], la commission, par décision du 11 juin 2019, a élaboré un plan définitif, accepté par les créanciers, avec un moratoire de 24 mois.

En l'absence des documents justifiant des plans d'apurement des créances établis pendant les moratoires, il sera considéré que pendant 13 mois, seul le capital était dû par les époux [E]. Selon le tableau d'amortissement du prêt, le montant des intérêts sur cette période du 1er novembre 2013 au 1er novembre 2014 s'élève à la somme de 31 333,21 euros.

En conséquence, compte tenu des règlements partiels effectués depuis le 1er août 2012 et des moratoires prononcés pour 24 mois par deux fois, avec plan d'apurement du 12 décembre 2016 au 15 novembre 2018 puis du 31 juillet 2019 au 29 septembre 2020, la somme due à la société [17] AB se décompose comme suit :

- au 27 novembre 2014 : capital à échoir : 350 501,03 euros

- total échéance impayées du 1er août 2018 au 7 juin 2022 : 28 462,64 euros

- total règlements reçus : 23 830,54 euros

total dû au 7 juin 2022 : 355 133,13 euros

La créance de la société [17] AB sera donc fixée à la somme de 355 133,13 euros.

Les ressources déclarées par Mme [E] à hauteur de 2600 euros par mois, ne permettent pas l'apurement de la créance de la société [17] AB dans son intégralité même en excédant la durée de 84 mois alors que la valeur du bien immobilier dont elle est propriétaire indivise, permet d'apurer une partie significative des dettes voire la totalité. En conséquence, il convient d'octroyer un moratoire de 24 mois à Mme [E] pour procéder à la vente du bien situé [Adresse 5] à [Localité 16].

Il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque en appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour ,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 30 septembre 2022 par le tribunal judiciaire de Lorient,

Déclare la société [17] AB recevable en sa contestation,

Déboute la société [17] AB de sa demande en déchéance de Mme [W] [E] de la procédure de surendettement,

Fixe la créance de la société [17] AB à la somme de 355 133,13 euros,

Suspend l'exigibilité des créances dues par Mme [W] [E] pendant 24 mois à compter de la signification de la présente décision, aux fins de procéder dans ce délai à la vente du bien situé [Adresse 5] à [Localité 16],

Dit qu'il appartiendra à Mme [W] [E] de saisir à nouveau la commission de surendettement des particuliers du Morbihan si la vente du bien ne permettait pas l'apurement du montant total des dettes, soit la somme de 378 434,91 euros,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse les dépens s'il en existe à la charge de l'Etat,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIER. LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre du surendettement
Numéro d'arrêt : 22/06447
Date de la décision : 16/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-16;22.06447 ?
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