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06/07/2023 | FRANCE | N°23/02454

France | France, Cour d'appel de Rennes, Référés 7ème chambre, 06 juillet 2023, 23/02454


Référés 7ème Chambre





ORDONNANCE N°7/2023



N° RG 23/02454 - N° Portalis DBVL-V-B7H-TWIW













S.A.S. LE CLEZIO INDUSTRIE



C/



M. [J] [W]































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE RENNES





ORDONNANCE DE RÃ

‰FÉRÉ

DU 06 JUILLET 2023





Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,



GREFFIER :



Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 06 Juin 2023



ORDONNANCE :



Contradictoire, prononcée publique...

Référés 7ème Chambre

ORDONNANCE N°7/2023

N° RG 23/02454 - N° Portalis DBVL-V-B7H-TWIW

S.A.S. LE CLEZIO INDUSTRIE

C/

M. [J] [W]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 06 JUILLET 2023

Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,

GREFFIER :

Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 Juin 2023

ORDONNANCE :

Contradictoire, prononcée publiquement le 06 Juillet 2023, par mise à disposition date indiquée à l'issue des débats

****

Vu l'assignation en référé délivrée le 06 Avril 2023

ENTRE :

S.A.S. LE CLEZIO INDUSTRIE RCS: 440 240 638

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Vincent LE FAUCHEUR de la SELEURL Cabinet Vincent LE FAUCHEUR, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS

substitué par Me DUTEIL, avocat au barreau de PARIS

ET :

Monsieur [J] [W]

né le 17 Août 1961 à [Localité 4]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Nicolas BILLON de la SELARL SIMON ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [J] [W] a été engagé en qualité de de directeur par la SAS [V] Industrie suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 27 octobre 1999.

Le 11 mars 2014, M. [W] a démissionné de ses fonctions de directeur de la SAS [V] Industrie après avoir été désigné Président de la société par décision unanime des associés.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 08 juin 2020, la société [V] Industrie représentée par son associée unique, la SARL Financière VLH, a convoqué M. [W] à une réunion ayant pour ordre du jour la révocation du président, la nomination d'un nouveau président et les pouvoirs en vue de réaliser les formalités.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 04 août 2020, la SAS [V] Industrie confirmait à M. [W] sa révocation votée lors de l'assemblée générale du 23 juin 2020.

 ***

M. [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint Brieuc le 25 février 2021 afin de voir reconnaître l'existence d'un lien de subordination juridique avec la société [V] Industrie, la requalification de la relation professionnelle en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, la requalification de la rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et le paiement de différentes sommes à titre de dommages-intérêts, rappels de salaire et indemnités, le tout avec exécution provisoire.

Par jugement en date du 06 février 2023, le conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc a :

- Rejeté la demande de sursis à statuer formulée par la société [V] Industrie ;

- Rejeté la demande d'incompétence formulée par la société [V] Industrie et s'est déclaré compétent pour connaître du litige ;

- Requalifié la relation professionnelle entre la société [V] Industrie et M. [W] en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet ;

- Dit et jugé que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- Condamné la SAS [V] Industrie à payer à M. [W] les sommes suivantes:

- 21 204 euros brut au titre de l'indemnité de préavis

- 2 120,40 euros brut au titre des congés payés afférents

- 92 767,50 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

- 50 000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- Débouté M. [W] de sa demande de dommages et intérêts en réparation des circonstances brutales et vexatoires du licenciement ;

- Débouté M. [W] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé ;

- Condamné la SAS [V] Industrie à payer à M. [W] la somme de 5 000 euros pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- Condamné la SAS [V] Industrie payer à M. [W] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la SAS [V] Industrie aux entiers dépens et aux éventuels frais d'exécution de la décision à intervenir ;

- Dit et jugé que les sommes allouées à M. [W] produiront intérêts au taux légal à compter de la saisine pour les sommes à caractère salarial, et à compter de la notification de la présente décision pour les autres, outre le bénéfice de l'anatocisme ;

- Condamné la SAS [V] Industrie à la remise de documents sociaux sous astreinte de 80 euros par jour dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision à intervenir, le conseil se réservant le droit de liquider l'astreinte ;

- Ordonné l'exécution provisoire sur le tout nonobstant appel ni caution;

- Fixé le salaire mensuel de référence de M. [W] à la somme de 7 068 euros et son ancienneté à 20 ans et 11 mois ;

- Ordonné en conséquence le remboursement à Pôle Emploi par la SAS [V] Industrie de tout ou partie des indemnités de chômage versées à M. [W], du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;

- Reçu la demande reconventionnelle de la société [V] Industrie relative à la fixation du salaire mensuel de référence de M. [W] à la somme de 7 068 euros ;

- Reçu la demande reconventionnelle de la société [V] Industrie relative a la fixation du montant de l'indemnité de préavis de Monsieur [J] [W] à la somme de 21 204 euros et de l'indemnité de congés payés y afférents à la somme de 2 120,40 euros ;

- Reçu la demande reconventionnelle de la société [V] Industrie de débouter M. [W] de sa demande de dommages et intérêts pour rupture vexatoire de relations ;

- Reçu la demande reconventionnelle de la société [V] Industrie de débouter M. [W] de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;

- Reçu et débouté par ailleurs la société [V] Industrie au titre de toutes ses autres demandes reconventionnelles.

***

La SAS [V] Industrie a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 17 mars 2023.

Par acte d'huissier en date du 06 avril 2023, la SAS [V] Industrie a fait assigner en référé M. [W] pour l'audience du 6 juin 2023 afin d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire et demande au Premier président de la cour d'appel de Rennes ou son délégué, de :

À titre principal,

- Constater qu'il existe des moyens sérieux de réformation du jugement rendu parle conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc le 06 février 2023

- Constater que l'exécution du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc le 06 février 2023 risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives pour la société [V] Industrie.

- Constater que la société [V] Industrie a formulé des la première instance des observations sur l'exécution provisoire sollicitée.

En conséquence,

- Ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire de la totalité du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc le 06 février 2023

À titre subsidiaire

- Aménager l'exécution provisoire attachée au jugement rendu par le conseil de prud'homme de Créteil le 24juin 2022, en autorisant la société [V] Industrie à consigner la totalité des condamnations prononcées par le conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc auprès de la Caisse des dépôts et des consignations soit les sommes suivantes :

- 21 204 euros bruts au titre de I'indemnité de préavis,

- 2 120,40 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 92 767,50 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 50 000 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 5 000 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par voie de conclusions développées oralement à l'audience par son avocat, la sociétré [V] Industrie réitère les demandes contenues dans son exploit introductif d'instance.

Elle fait valoir en substance que:

- Le conseil de prud'hommes n'a pas motivé sa décision sur l'exécution provisoire facultative ;

- Il n'a pas analysé les conditions essentielles pour caractériser l'existence d'un lien de subordination ; or, la société [V] Industrie ne disposait pas d'un pouvoir de sanction sur M. [W], lequel n'était pas intégré dans un service organisé ;

- Il n'a pris en compte que les pièces du salarié sans examiner celles produites par l'employeur ; le contexte du mandat social de M. [W] n'a pas été pris en considération ;

- Le conseil de prud'hommes a retenu à tort une ancienneté de 20 ans et 11 mois au lieu de 6 ans et 3 mois; le montant de l'indemnité de licenciement est donc erroné ; l'incidence sur le barème de l'article L1235-3 du code du travail est également importante ; le contrat de travail du 27 octobre 1999 a été rompu le 11 mars 2014 suite à la démission et cette période ne pouvait donc entrer en ligne de compte dans le calcul de l'ancienneté ;

- Le risque de conséquences manifestement excessives est établi ; le montant des sommes devant être versé au titre de l'exécution provisoire est supérieur à 174.000 euros, soit plus de 2 ans et demi de salaire, alors que la société n'a aucune information sur les capacités financières de M. [W] pour rembourser une telle somme en cas d'infirmation du jugement ; M. [W] a produit un faux document en 1ère instance et une procédure pénale est en cours;

- Elle a présenté des observations en première instance sur l'exécution provisoire.

Par voie de conclusions développées à l'audience par son avocat, M. [W] demande au premier président de:

- Débouter la société [V] Industrie de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;

- En cas d'aménagement de l'exécution provisoire, ordonner le versement des sommes assorties de l'exécution provisoire entre les mains du conseil de M. [W] en qualité de séquestre, au plus tard dans un délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

En tout état de cause,

- Débouter la société [V] Industrie de l'ensemble de ses demandes ;

- La condamner au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

M. [W] fait valoir en substance que:

- La société [V] Industrie ne produit aucun élément nouveau susceptible de justifier une possible infirmation du jugement entrepris ; le jugement est parfaitement motivé sur l'ensemble des demandes et notamment sur l'exécution provisoire ; le conseil de prud'hommes a parfaitement caractérisé l'existence d'un lien de subordination juridique ; le conseil de prud'hommes n'avait aucune obligation de viser dans sa décision chacune des pièces communiquées ;

- La motivation révèle que le conseil de prud'hommes a pris en compte le contexte du mandat social de M. [W] ; aucune erreur de droit n'a été commise concernant la qualification juridique de la relation liant ce dernier à la société [V] Industrie ;

- Dans la mesure où la convention du 11 mars 2014 est requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée, la relation de travail n'aurait jamais dû cesser et la société a d'ailleurs mentionné dans la plupart des bulletins de salaire une ancienneté remontant au 27 octobre 1999 ; l'ancienneté est donc bien de 20 ans et 11 mois ;

- Le risque de conséquences manifestement excessives n'est pas démontré ; la société Le Clezio Industrie inverse la charge de la preuve en reprochant au salarié de ne pas justifier de ses capacités financières ; aucune suite n'a été donnée à la plainte dont fait état l'employeur ; de surcroît les autres nombreuses pièces produites par le salarié ont emporté la conviction du conseil de prud'hommes ; le montant des condamnations ne permet pas de démontrer à lui seul l'existence de circonstances manifestement excessives ;

- Seule la somme de 110.479,90 euros correspondant à l'exécution provisoire facultative pourrait faire l'objet d'un éventuel aménagement ; toutefois, l'employeur ne justifie pas d'un intérêt légitime à cette mesure.

***

MOTIFS DE LA DÉCISION

1- Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire:

Aux termes de l'article R1454-28 du code du travail, à moins que la loi ou le règlement n'en dispose autrement, les décisions du conseil de prud'hommes ne sont pas exécutoires de droit à titre provisoire. Le conseil de prud'hommes peut ordonner l'exécution provisoire de ses décisions.

Sont de droit exécutoires à titre provisoire, notamment :

(...)

3° Le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement.

Ce texte renvoie donc aux sommes visées au 2° de l'article R1454-14-2° du code du travail qui est relatif à celles dont le Bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes peut ordonner le versement, à savoir:

a) Le versement de provisions sur les salaires et accessoires du salaire ainsi que les commissions; b) Le versement de provisions sur les indemnités de congés payés, de préavis et de licenciement; c) Le versement de l'indemnité compensatrice et de l'indemnité spéciale de licenciement en cas d'inaptitude médicale consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle mentionnées à l'article L. 1226-14 ;

e) Le versement de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8 et de l'indemnité de fin de mission mentionnée à l'article L. 1251-32.

Le jugement du conseil de prud'hommes de Saint Brieuc dont appel a ordonné l'exécution provisoire sur la totalité des condamnations prononcées à l'encontre de la société [V] Industrie.

L'article 514-3 du code de procédure civile, situé dans la section 1 intitulée 'L'exécution provisoire de droit' du chapitre IV intitulé 'L'exécution provisoire', dispose qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

L'article 514-1 dispose en effet que le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire.

Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

Aux termes de l'article 517-1 du même code, lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président et dans les cas suivants :

1° Si elle est interdite par la loi ;

2° Lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 et 518 à 522 (...).

En l'espèce, il est justifié de ce que la société [V] Industrie a formulé devant le conseil de prud'hommes des observations sur la demande d'exécution provisoire, ainsi que cela résulte du paragraphe II-4-9 figurant en page 75/83 de ses conclusions de première instance et ainsi que cela est rappelé en page 3 du jugement querellé.

Pour statuer sur les demandes pécuniaires en lien avec l'existence d'un contrat de travail, telle que l'a reconnue le conseil de prud'hommes, les premiers juges, après avoir rappelé que M. [V] avait démissionné le 11 mars 2014 des fonctions salariées pour lesquelles il avait été embauché le 27 octobre 1999, ont indiqué: 'Au regard de la requalification de la relation professionnelle entre M. [W] et la société [V] Industrie entre le 11 mars 2014 et le 23 juin 2020 en contrat de travail, le conseil fixe l'ancienneté de M. [W] dans l'entreprise à 20 ans et 11 mois'.

Or, entre le 11 mars 2014 et le 23 juin 2020 il s'est écoulé une durée de 6 ans et 3 mois.

En outre, la démission du 11 mars 2014 n'apparaît pas avoir été contestée par M. [W] devant la juridiction prud'homale.

L'incidence de ce décompte de l'ancienneté est déterminante quant au calcul de l'indemnité de licenciement, mais également quant à la détermination du quantum des dommages-intérêts alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au regard des dispositions de l'article L1235-3 du code du travail.

En effet, l'indemnité de licenciement fixée par le conseil de prud'hommes à hauteur de 92.767,50 euros se trouve ramenée à 22.087,50 euros si l'on retient une ancienneté de 6 ans et 3 mois, tandis que le barème figurant à l'article L 1235-3 du code du travail prévoit pour une ancienneté de 20 ans une indemnisation comprise entre 3 mois et 15,5 mois de salaire, le conseil de prud'hommes ayant alloué à M. [W] plus de 7 mois de salaire à ce titre, l'indemnisation étant située à un maximum de 7 mois de salaire lorsque l'ancienneté est de 6 ans.

Il existe donc un risque sérieux de réformation de la décision entreprise sur la question de l'ancienneté du salarié et de ses conséquences pécuniaires.

Le risque de conséquences manifestement excessives doit être apprécié au regard des facultés de paiement du débiteur ou des facultés de remboursement du créancier, ces deux critères étant alternatifs et il suppose la perspective d'un préjudice irréparable ainsi que d'une situation irréversible en cas d'infirmation.

Sur ce point, force est de constater qu'hormis des supputations sur les facultés contributives de M. [W], il n'est justifié ni de ce que la trésorerie de la société [V] Industrie ne permette, sans menace irréversible pour la pérennité de l'entreprise, le paiement des sommes affectées de l'exécution provisoire, ni de ce que le salarié soit dans l'incapacité de restituer les sommes qui lui seraient versées dans ce cadre. Aucune pièce ne permet d'objectiver une telle situation.

L'une des deux conditions cumulatives exigées tant par l'article 514-3 que par l'article 517-1 du code de procédure civile faisant défaut, la demande d'arrêt de l'exécution provisoire doit être rejetée.

2- Sur la demande de consignation:

En vertu de l'article 12 du code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.

La demande subsidiaire d'aménagement de l'exécution provisoire s'analyse, telle qu'elle est formulée au dispositif des conclusions de la société [V] Industrie, comme une demande de consignation relevant des dispositions de l'article 521 alinéa 1er du code de procédure civile, aux termes desquelles la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l'exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.

Les sommes allouées par le conseil de prud'hommes de St Brieuc à titre d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents ont un caractère alimentaire et ne peuvent donc donner lieu à consignation.

Il est en revanche justifié, eu égard aux développements qui précèdent sur les dispositions du jugement querellé relatives à l'ancienneté du salarié et leurs conséquences sur le calcul de l'indemnité conventionnelle de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'ordonner la consignation, entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations, des sommes correspondant aux condamnations assorties de l'exécution provisoire facultative (indemnité conventionnelle de licenciement, dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile).

3- Sur les dépens et frais irrépétibles:

La société [V] Industrie, partie perdante, sera condamnée aux dépens de la présente instance en référé, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

Il n'est pas inéquitable de laisser M. [W] supporter la charge de ses frais irrépétibles et il convient donc de le débouter de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Déboute la société [V] Industrie de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;

Ordonne la consignation entre les mains de la Caisse des Dépôts et Consignations des sommes correspondant aux condamnations assorties de l'exécution provisoire facultative ;

Disons que cette consignation devra intervenir dans un délai de deux mois à compter du prononcé de la présente ordonnance ;

Disons que la société [V] Industrie devra justifier dans ce même délai à l'avocat de M. [W] de la consignation effectuée, faute de quoi il pourra être procédé au recouvrement de la dite somme ;

Déboute M. [W] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société [V] Industrie aux dépens.

La greffière Le président de chambre délégué


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Référés 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23/02454
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;23.02454 ?
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