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04/07/2023 | FRANCE | N°23/03204

France | France, Cour d'appel de Rennes, Recours fiscaux - cont.pp, 04 juillet 2023, 23/03204


Recours fiscaux - cont.PP





ORDONNANCE N°1/2023



N° RG 23/03204 - N° Portalis DBVL-V-B7H-TZV5



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES



ORDONNANCE DU 04 JUILLET 2023





Nous, Fabrice ADAM, premier président de chambre délégué par ordonnance du premier président de la cour d'appel de Rennes, assisté de Marie-Claude COURQUIN, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante après avoir ente

ndu lors des débats du 21 juin 2023



M. [W] [T] et Mme [K] [T], demeurant [Adresse 1] - [Localité 2]



Représentés par Me Perrine LIMON-DUPARCMEUR, avcoate au barreau de VANNES



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EXPOSÉ D...

Recours fiscaux - cont.PP

ORDONNANCE N°1/2023

N° RG 23/03204 - N° Portalis DBVL-V-B7H-TZV5

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DU 04 JUILLET 2023

Nous, Fabrice ADAM, premier président de chambre délégué par ordonnance du premier président de la cour d'appel de Rennes, assisté de Marie-Claude COURQUIN, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante après avoir entendu lors des débats du 21 juin 2023

M. [W] [T] et Mme [K] [T], demeurant [Adresse 1] - [Localité 2]

Représentés par Me Perrine LIMON-DUPARCMEUR, avcoate au barreau de VANNES

****

EXPOSÉ DU LITIGE':

Avisé par un policier municipal de [Localité 2] de la présence [Adresse 1] à [Localité 2] d'un chien de race dalmatien se trouvant à l'extérieur dans un état de cachexie sévère, les gendarmes de la brigade de [Localité 3] (Morbihan) ont ouvert une enquête à l'encontre de ses propriétaires, [W] et [K] [T], pour sévices graves envers un animal domestique, et ont procédé, le 17 avril 2023, à la saisie sur place de deux chiens':

- Gipsie, dalmatien femelle, née le 7 septembre 2011,

- 8, dalmatien femelle, née le 2 septembre 2014.

Ces animaux ont été confiés, sur réquisition du procureur de la République près le tribunal judiciaire de Lorient en date du 19 avril 2023, à la Société Protectrice des Animaux (refuge d'Inzinzac).

Celle-ci ayant sollicité par lettre du 4 mai 2023 l'autorisation de les céder à titre onéreux, le procureur de la République a saisi, par requête du 16 mai 2023, le président du tribunal judiciaire de Lorient aux fins que leur cession soit autorisée sur le fondement des dispositions de l'article 99-1 du code de procédure pénale.

Par ordonnance du 24 mai 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lorient a fait droit à cette requête, retenant que les deux chiennes présentaient un état de dénutrition sévère et qu'il résulte d'un certificat vétérinaire que leur maintien en box est de nature à compromettre leur évolution et leur bien être, et, en définitive, leur adoption.

Les époux [T] ont formé un recours contre cette décision par déclaration effectuée le 2'juin 2023 au greffe du tribunal judiciaire de Lorient.

Aux termes de leurs écritures (20 juin 2023), M. [W] [T] et Mme [K] [L] épouse [T] nous demandent d'annuler l'ordonnance critiquée et de l'infirmer.

Ils font valoir que le président du tribunal était seul compétent pour statuer en l'absence de délégation au profit du juge des libertés et de la détention qui a pourtant connu du dossier.

Au fond, ils contestent la décision, relevant que les certificats médicaux ne caractérisent pas suffisamment en quoi les conditions de placement sont susceptibles de rendre les deux animaux dangereux ou de mettre leur santé en péril, précisant que la perte de chance de bénéficier d'une adoption ne suffit à permettre la cession.

Ils critiquent l'enquête qui a été conduite, soutenant que leurs chiennes étaient bien soignées et suivies par un vétérinaire mais que leur état s'est brusquement dégradé. Ils prétendent que la décision est disproportionnée.

Le procureur général près la cour d'appel de Rennes ne s'oppose pas à l'annulation de la décision critiquée en l'absence de délégation mais estime qu'il convient d'autoriser la cession des animaux.

Il observe que contrairement à ce qui est soutenu, le certificat vétérinaire a été établi plus de 15 jours après la saisie des deux chiennes et que leur état de santé justifie qu'elles soient cédées pour être adoptées.

SUR CE':

L'article 99-1 du code de procédure pénale énonce que':

«'Lorsque, au cours d'une procédure judiciaire ou des contrôles mentionnés à l'article L. 214-23 du code rural et de la pêche maritime, il a été procédé à la saisie ou au retrait, à quelque titre que ce soit, d'un ou plusieurs animaux vivants, le procureur de la République près le tribunal judiciaire du lieu de l'infraction ou, lorsqu'il est saisi, le juge d'instruction peut placer l'animal dans un lieu de dépôt prévu à cet effet ou le confier à une fondation ou à une association de protection animale reconnue d'utilité publique ou déclarée. La décision mentionne le lieu de placement et vaut jusqu'à ce qu'il ait été statué sur l'infraction.

Lorsque les conditions du placement sont susceptibles de rendre l'animal dangereux ou de mettre sa santé en péril ou de ne plus répondre à la satisfaction des besoins physiologiques propres à son espèce, le juge d'instruction, lorsqu'il est saisi, ou le président du tribunal judiciaire ou un magistrat du siège délégué par lui peut, par ordonnance motivée prise sur les réquisitions du procureur de la République et après avis d'un vétérinaire, ordonner qu'il sera cédé à titre onéreux ou confié à un tiers ou qu'il sera procédé à son euthanasie...

Cette ordonnance est notifiée au propriétaire s'il est connu, qui peut la déférer soit au premier président de la cour d'appel du ressort ou à un magistrat de cette cour désigné par lui, soit, lorsqu'il s'agit d'une ordonnance du juge d'instruction, à la chambre de l'instruction dans les conditions prévues aux cinquième et sixième alinéas de l'article 99'».

Le recours effectué par M. et Mme [T] est recevable pour avoir été effectué dans les forme et délai (10 jours) de l'ordonnance critiquée.

Sur la nullité de l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention':

L'ordonnance fixant pour l'année 2023 la répartition des magistrats du siège dans les services du tribunal judiciaire de Lorient ne délègue pas au juge des libertés et de la détention la connaissance des demandes fondées sur l'article 99-1 du code de procédure pénale. Aussi, ce magistrat n'avait-il pas, en l'absence de délégation, le pouvoir de connaître cette demande et son ordonnance ne peut qu'être annulée.

Au fond':

La décision prise par le premier président de la cour d'appel statuant sur recours contre l'ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire sur le fondement de l'article 99-1 du code de procédure pénale, n'est pas susceptible de pourvoi devant la chambre criminelle de la Cour de cassation (Crim., 4 juin 2002, Bull. Crim. 2002 n° 126), n'ayant pas la nature d'une décision pénale, mais l'est devant la première chambre civile (1re Civ., 24 janvier 2006, Bull. 2006, I, n° 26).

La procédure suivie en appel est donc de nature civile (ce type d'affaire figure d'ailleurs à la nomenclature des affaires civiles). Il s'ensuit qu'en cas d'annulation, la dévolution s'opère dans les termes de l'article 562 al 2 du code de procédure civile et il doit être statué sur la requête.

En premier lieu, il convient de rappeler qu'il n'appartient pas au juge saisi sur le fondement de l'article 99-1 de statuer sur le bien fondé des poursuites et des saisies effectuées, mais seulement d'autoriser ou non, au vu de l'avis d'un vétérinaire, la cession, la remise à un tiers ou l'euthanasie d'un animal.

Il sera, en second lieu, précisé que Gypsie et 8 (Jypsie) ont été examinées par Mme [O] [P], vétérinaire à [Localité 5], qui a établi des certificats le 3 mai 2023, quatorze jours après la saisie des chiennes.

S'agissant de la chienne Gypsie, le certificat du docteur [P] précise ':

«'Gypsie présente à son arrivée un état général très alarmant. Cette chienne de 16 kg (poids très en dessous de la norme pour un animal de cette race et de cette taille) présente un état cachectique sévère avec une dénutrition avancée, associée à des difficultés locomotrices compte tenu de son état fortement débilité.

Il est à noter, également, une parasitose externe (puces et tiques) et interne importante. De plus la chienne présente une plaie chronique sur le doigt externe de l'antérieur gauche. L'examen sanguin a révélé une leucocytose et une anémie faiblement régénérative pouvant être en rapport avec une infection bactérienne concomitante. L'évaluation du comportement laisse apparaître une chienne apeurée et anxieuse.

Bien que tout soit mis en 'uvre pour assurer les besoins vitaux et comportementaux de cet animal, la vie en box n'est pas adaptée à l'évolution psychique de la chienne, et il est à craindre une potentielle dégradation du comportement de Gypsie c'est à dire une aggravation de son état d'anxiété important ce qui pourrait compromette l'adoption future de la chienne.

Par ailleurs, Gypsie étant très affaiblie, fortement amaigrie et atteinte de plaies en cours de soins, la vie en collectivité et en box l'expose potentiellement à un ralentissement de sa remise en état et à un plus grand nombre d'agents pathogènes.

Il serait donc pertinent pour le bien être sur le plan comportemental et physique que le séjour de Gypsie en refuge soit le plus court possible. Un séjour prolongé en box constitue une réelle perte de chance pour une vie ultérieure équilibrée'».

S'agissant de la chienne 8 alias Jypsie alias Une Fleur, le certificat précise':

«'La chienne "8" présente à son arrivée un état général très alarmant. Cette chienne de 17 kg (poids très en dessous de la norme pour un animal de cette race et de cette taille) présente un état cachectique sévère avec une dénutrition avancée, associée à des difficultés locomotrices compte tenu de son état fortement débilité.

Il est à noter, également, une parasitose externe (puces et tiques) et interne importante. L'examen sanguin a révélé une leucocytose et une anémie faiblement régénérative pouvant être en rapport avec une infection bactérienne concomitante. L'évaluation du comportement laisse apparaître une chienne apeurée et anxieuse.

Bien que tout soit mis en 'uvre pour assurer les besoins vitaux et comportementaux de cet animal, la vie en box n'est pas adaptée à l'évolution psychique de la chienne, et il est à craindre une potentielle dégradation du comportement de la chienne "8" c'est à dire une aggravation de son état d'anxiété important ce qui pourrait compromette l'adoption future de la chienne.

Par ailleurs, la chienne "8" rebaptisée Une Fleur étant affaiblie et amaigrie, la vie en collectivité et en box l'expose potentiellement à un ralentissement de sa remise en état.

Il serait donc pertinent pour le bien être sur le plan comportemental et physique que le séjour de la chienne en refuge soit le plus court possible. Un séjour prolongé en box constitue une réelle perte de chance pour une vie ultérieure équilibrée'».

Contrairement à ce qu'indiquent les requérants, ces certificats ne sont pas fondés sur la perte de chance que les deux chiennes soient adoptées (ce qui est effectivement évoqué comme une conséquence) mais sur le fait que les conditions de placement en refuge ne répondent pas à la satisfaction des besoins physiologiques propres à leur espèce, ce qui constitue l'une des hypothèses expressément prévues par le texte précité permettant d'autoriser leur cession.

Si les requérants font également valoir qu'un seul certificat par animal est produit aux débats et que les deux certificats remontent à plus d'un mois, il sera relevé que le texte n'en exige pas plusieurs, établis à un intervalle réguliers.

Enfin, la cession des animaux - qu'il convient d'autoriser - n'est nullement disproportionnée au regard de l'état de santé des deux chiennes lorsqu'elles ont été saisies, tel qu'il résulte non seulement des certificats mais également des photographies jointes au dossier pénal où elles apparaissent dans un état cadavérique caractérisé par une très forte dénutrition.

Il sera, en conséquence, fait droit à la demande.

PAR CES MOTIFS':

Statuant par ordonnance rendue publiquement':

Vu l'article 99-1 du code de procédure pénale':

Annulons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lorient le 24 mai 2023.

Vu l'article 562 al 2 du code de procédure civile':

Autorisons la cession à titre onéreux des chiennes Gipsy identifiée 250 269 604 501 916 et Huit identifiée 250 268 600 013 667 confiées à la Société protectrice des animaux (refuge d'[Localité 4]).

Laissons les éventuels dépens à la charge de M. et Mme [W] et [K] [T].

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Recours fiscaux - cont.pp
Numéro d'arrêt : 23/03204
Date de la décision : 04/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-04;23.03204 ?
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