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09/01/2023 | FRANCE | N°21/06849

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre a, 09 janvier 2023, 21/06849


6ème Chambre A





ARRÊT N°21



N° RG 21/06849 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SFKJ













M. [X] [O]



C/



PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE PRES LE TJ DE NANTES































Copie exécutoire délivrée

le :



à :



Me RODRIGUES-DEVESAS,

PARQUET GENERAL





















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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 09 JANVIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Sylvie ALAVOINE, Conseillère,

Assesseur : Madame Emmanuelle DESVALOIS, Conseiller,



GREFFIER :



...

6ème Chambre A

ARRÊT N°21

N° RG 21/06849 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SFKJ

M. [X] [O]

C/

PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE PRES LE TJ DE NANTES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me RODRIGUES-DEVESAS,

PARQUET GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 09 JANVIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Sylvie ALAVOINE, Conseillère,

Assesseur : Madame Emmanuelle DESVALOIS, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Christine NOSLAND, lors des débats, et lors du prononcé,

MINISTERE PUBLIC :

Monsieur Yves DELPERIE, avocat général, lors des débats,

DÉBATS :

A l'audience publique du 14 Novembre 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 09 Janvier 2023 par mise à disposition au greffe

****

APPELANT :

Monsieur [X] [O]

né le 20 Décembre 2001 à [Localité 4] (ANGOLA)

Chez At Home

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Stéphanie RODRIGUES-DEVESAS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/13219 du 26/11/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)

INTIMÉS:

LE MINISTERE PUBLIC en la personne du procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nantes

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par le procureur général près la cour d'appel de Rennes

Monsieur [X] [O], né le 20 décembre 2001 à [Localité 4] (Angola) a souscrit le 12 décembre 2019 une déclaration de nationalité en vertu de l'article 21-12 du Code civil.

Le 6 mars 2020, la directrice des services de greffe judiciaire du tribunal d'instance de Nantes a refusé l'enregistrement de sa déclaration, celle-ci étant jugée irrecevable motif pris de la non-conformité de l'acte de naissance fourni à la législation angolaise sur les déclarations de naissance et du fait que cet acte était daté de 2017, de sorte qu'il ne justifiait pas d'un état civil fiable et probant au sens de l'article 47 du Code civil.

Monsieur [X] [O] a fait assigner le 6 juillet 2020 Monsieur le procureur de la République aux fins de voir dire qu'il a acquis la nationalité française par déclaration souscrite le 12 décembre 2019.

Par jugement du 30 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Nantes a, notamment, débouté Monsieur [X] [O] de l'intégralité de ses demandes, constaté l'extranéité de Monsieur [X] [O], ordonné la mention prévue par l'article 28 du Code civil et condamné Monsieur [X] [O] aux dépens.

Par une déclaration du 31 octobre 2021, Monsieur [X] [O] a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.

Aux termes de ces dernières écritures notifiées le 2 novembre 2022, Monsieur [X] [O] demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris,

statuant à nouveau,

- annuler la décision de refus d'enregistrement de sa déclaration de nationalité,

en conséquence

- dire qu'il est de nationalité française,

- ordonner la mention prévue à l'article 28 du Code civil,

- laisser les dépens à la charge du trésor public.

Aux termes de ces écritures notifiées le 27 avril 2022, le ministère public demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris,

- juger que Monsieur [X] [O], se disant né le 20 décembre 2001 à [Localité 4] (Angola), n'est pas français,

- rejeter le surplus de ses demandes, notamment sa demande d'enregistrement de déclaration de nationalité française,

- ordonner la mention prévue par l'article 28 du Code civil,

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

Ces conclusions sont expressément visées pour complet exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile

Aux termes des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation, ou le cas échéant une copie des conclusions soulevant la contestation, sont déposées au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

En l'espèce, est versé aux débats le récépissé de la copie de l'acte d'appel daté du 17 mai 2022 délivré par le ministère de la justice, les diligences de l'article 1043 du code de procédure civile ont ainsi été respectées.

Sur la charge de la preuve

L'article 30 du code civil dispose que la charge de la preuve, en matière de nationalité française incombe à celui dont la nationalité est en cause. Toutefois cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de Français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants.

En l'espèce, Monsieur [O] ne disposant pas d'un certificat de nationalité française, il lui appartient de faire la preuve de sa qualité de français.

Sur le fond

En application de l'article 21-12 du code civil, L'enfant qui a fait l'objet d'une adoption simple par une personne de nationalité française peut, jusqu'à sa majorité, déclarer, dans les conditions prévues aux articles 26 et suivants, qu'il réclame la qualité de Français, pourvu qu'à l'époque de sa déclaration il réside en France.

Toutefois, l'obligation de résidence est supprimée lorsque l'enfant a été adopté par une personne de nationalité française n'ayant pas sa résidence habituelle en France.

Peut, dans les mêmes conditions, réclamer la nationalité française :

1° L'enfant qui, depuis au moins trois années, est recueilli sur décision de justice et élevé par une personne de nationalité française ou est confié au service de l'aide sociale à l'enfance ;

2° L'enfant recueilli en France et élevé dans des conditions lui ayant permis de recevoir, pendant cinq années au moins une formation française, soit par un organisme public, soit par un organisme privé présentant les caractères déterminés par un décret en Conseil d'Etat.

Par ailleurs, il résulte de l'article 16 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, que le déclarant doit fournir un extrait de son acte de naissance et justifier d'un état civil certain s'agissant d'une déclaration fondée sur l'article 21-12 du code civil exclusivement réservée aux mineurs et dont la minorité doit être vérifiée à la date de la souscription.

En toute hypothèse, il convient de rappeler que tout requérant qui aspire à la reconnaissance de sa nationalité doit justifier d'un état civil fiable au sens de l'article 47 du code civil qui dispose que tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.

Il résulte de ces dispositions que les actes d'état civil répondant à ces exigences bénéficient d'une présomption de force probante.

Contrairement à ce qui est soutenu par l'appelant, ces dispositions ne sont pas de nature à écarter l'exigence de légalisation des actes de l'état civil établis par une autorité étrangère et destinés à être produits en France, laquelle s'impose, sauf convention contraire, selon la coutume internationale au souscripteur d'une déclaration de nationalité.

La France n'ayant conclu aucune convention de dispense de légalisation avec l'Angola, cette formalité s'impose. La cour rappelle à cet égard que la légalisation est une mesure administrative qui consiste à authentifier une signature et la qualité du signataire de l'acte et doit être faite par les agents diplomatiques ou consulaires de France dans le pays concerné ou par les agents diplomatiques ou consulaires de ce pays en France.

Il sera en outre rappelé, s'il en était besoin, que si l'avis de la police aux frontières est un élément de preuve que le juge aura à apprécier, il ne s'impose pas à l'autorité judiciaire seule compétente pour connaître des litiges relatifs à l'état civil et à la nationalité.

En l'espèce, Monsieur [O] produit :

- une 'DECLARACAO' et sa traduction. Le document daté du 20 novembre 2017, émis par la direction nationale des bureaux de l'état civil et du notariat, atteste de l'authenticité de l'extrait de copie intégrale de l'acte de naissance annexé,

- un acte de naissance et sa traduction n°4853 dressé sur le registre de l'année 2017 du 2nd bureau de l'état civil de [Localité 4], selon lequel [X] [O] est né le 20 décembre 2001 à [Localité 4]. Le document précise que l'acte a été établi sur les déclarations de l'enregistré lui-même.

- une certification et sa traduction en date du 15 juin 2017 selon laquelle 'ceci' est une photocopie conforme à l'original de l'acte de naissance n°4853 du registre de l'année 2017 du 2nd bureau de l'état civil de [Localité 4].

Parmi ces documents, seule la certification comporte un tampon humide du ministère des affaires étrangères angolais, qui n'est pas une autorité compétente pour légaliser le document, ainsi qu'il a été rappelé plus haut.

Outre qu'aucun de ces documents n'est légalisé conformément à la coutume internationale, force est de constater que la déclaration tardive produite par l'appelant, établie 16 ans après sa naissance, sur les seules déclarations de l'intéressé, n'est aucunement vraisemblable, étant relevé que Monsieur [O] résidait déjà sur le territoire national et sous mesure de tutelle le 15 juin 2017, date à laquelle il aurait fait établir son acte de naissance. Il est incontestablement prouvé qu'il n'était pas sur le territoire angolais, au jour où il prétend avoir effectué ladite déclaration.

Enfin, la Cour relève à l'instar du premier juge que le décret-loi n°4767 du 5 mai 1967 établissant un code de l'état civil congolais prévoit que la déclaration de naissance doit être effectuée dans les 30 jours suivant la naissance par la mère, le père, un membre de la famille ou proche, infirmière, sage-femme, accompagnant à la naissance ou personnel soignant (article 120). Le même décret-loi prévoit que lorsque le délai fixé a été dépassé, le Ministère public devra collecter les informations nécessaires et saisir la juridiction compétente aux fins d'enregistrement de la déclaration (article 121).

Monsieur [O] ne conteste pas l'existence de ces dispositions et se contente de répondre qu'il appartient à la Cour de lui indiquer les démarches à suivre afin de saisir le Ministère public angolais. Ce faisant, il se méprend sur l'office du juge qui n'a pas à le conseiller sur la mise en oeuvre d'une procédure à l'étranger, mais se contente de se prononcer sur la force probante des éléments qui lui sont soumis.

Il résulte de l'ensemble de ces constatations que les documents soumis à l'attention de la Cour sont apocryphes et ne font pas foi au sens de l'article 47 du code civil. Il s'en suit que Monsieur [X] [O] ne dispose pas d'un état civil certain et fiable, ce qui fait obstacle à toute action acquisitive ou déclarative de nationalité, française, outre qu'il ne démontre pas son état de minorité au jour de sa déclaration de nationalité.

Le jugement sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.

Monsieur [O] succombant en ses demandes, il sera condamné aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Condamne Monsieur [X] [O] aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre a
Numéro d'arrêt : 21/06849
Date de la décision : 09/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-09;21.06849 ?
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