La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/06/2008 | FRANCE | N°

France | France, Cour d'appel de Rennes, Ct0032, 18 juin 2008,


Septième Chambre

ARRÊT No

R. G : 06 / 08007

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT NAZAIRE
FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS

C /

Association GOURDON XV
Association RUGBY CLUB TRIGNACAIS
FEDERATION FRANCAISE DE RUGBY
M. Christophe X...
COMPAGNIE LA SAUVEGARDE

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée
le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRA

NÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 18 JUIN 2008

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Gabrielle...

Septième Chambre

ARRÊT No

R. G : 06 / 08007

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT NAZAIRE
FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS

C /

Association GOURDON XV
Association RUGBY CLUB TRIGNACAIS
FEDERATION FRANCAISE DE RUGBY
M. Christophe X...
COMPAGNIE LA SAUVEGARDE

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée
le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 18 JUIN 2008

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président,
Monsieur Patrick GARREC, Conseiller,
Madame Agnès LAFAY, Conseiller,

GREFFIER :

Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 30 Avril 2008

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président, à l'audience publique du 18 Juin 2008, date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTS :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT NAZAIRE
28 Avenue Suzanne Lenglen
44600 ST NAZAIRE

représentée par la SCP JEAN LOUP BOURGES et LUC BOURGES, avoués
assistée de la SCP ROBARD-HERVOUET et KIERZKOWSKI-CHATAL, avocats

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS
64 rue Defrance
94682 VINCENNES CEDEX

représentée par la SCP D'ABOVILLE DE MONCUIT SAINT-HILAIRE et LE CALLONNEC, avoués
assistée de Me Jean-Pierre Z..., avocat

----

INTIMÉS :

Association GOURDON XV
Stade Louis A...
46300 GOURDON

représentée par la SCP BAZILLE Jean-Jacques, avoués
assistée de la SCP LETU-CAYLA ET ASSOCIES, avocats,
Me Paul MAURIAC, avocat

Association RUGBY CLUB TRIGNACAIS
Stade Lesvières
B. P. 15
44570 TRIGNAC

représentée par la SCP BAZILLE Jean-Jacques, avoués
assistée de la SCP LETU-CAYLA ET ASSOCIES, avocats,
Me Paul MAURIAC, avocat

FEDERATION FRANCAISE DE RUGBY
...
75431 PARIS 9

représentée par la SCP BAZILLE Jean-Jacques, avoués
assistée de la SCP LETU-CAYLA ET ASSOCIES, avocats,
Me Paul MAURIAC, avocat

Monsieur Christophe X...
...
46350 C... FENELON

représenté par la SCP BAZILLE Jean-Jacques, avoués

COMPAGNIE LA SAUVEGARDE
...
75017 PARIS

représentée par la SCP BAZILLE Jean-Jacques, avoués
assistée de la SCP LETU-CAYLA ET ASSOCIES, avocats,
Me Paul MAURIAC, avocat

***************

M. Pierrick D... a été gravement blessé le 3 mai 1998 lors d'un match de rugby au cours d'une mêlée ordonnée dans laquelle il occupait le poste de talonneur pour son club, l'association Rugby club trignacais, qui était opposé à l'association Gourdon XV dans le championnat de France division III excellence B. Il a subi une fracture luxation des vertèbres cervicales C5 / C6 qui a sectionné la moelle épinière et entraîné une paraplégie.

Par arrêt du 6 mars 2002 cette cour, statuant sur une décision de la commission d'indemnisation des victimes d'infraction près le tribunal de grande instance de Saint Nazaire au fond du 15 janvier 2001 a confirmé celle-ci en son principe d'octroi à M. D... d'une provision et de prononcé d'une expertise.

Le préjudice de M. D... a été liquidé par décision du 3 novembre 2003.

Le fonds de garantie a demandé que les deux clubs sportifs, la Fédération française de rugby (FFR) et leur assureur, la GMF puis La Sauvegarde intervenue volontairement à la procédure, soient condamnés à le garantir des condamnations prononcées ou à intervenir au profit de M. D....

Les défendeurs ont appelé M. X..., joueur talonneur au club Gourdon XV, en garantie.

Par jugement du 2 mai 2005 le tribunal de grande instance de Saint Nazaire a ordonné une enquête en présence d'un expert, le Professeur Jean-Paul E..., médecin.

Puis par jugement du 27 novembre 2006 la même juridiction a débouté le fonds de garantie, la caisse primaire d'assurance maladie et la caisse des dépôts et consignations, intervenantes volontaires, de leurs demandes.

Le fonds de garantie et la caisse primaire d'assurance maladie de St Nazaire ont fait appel de cette décision. Les recours ont été joints.

Le fonds de garantie rappelle que les associations sportives ont pour mission d'organiser, de diriger et de contrôler l'activité de leurs membres au cours des compétitions sportives auxquelles ils participent et sont responsables au sens de l'article 1384 alinéa 1 du code civil des dommages qu'ils causent à cette occasion ; que la faute caractérisée par une violation des règles du jeu peut résulter d'une action collective.
Il soutient qu'en l'espèce la faute du joueur Christophe X... est démontrée par son exclusion pour jeu dangereux et par la sanction maximale de 12 matchs de suspension infligée après un recours du club de Gourdon et donc en pleine connaissance de cause des faits.
Il fait valoir que M. D... a remplacé en cours de match le talonneur qui avait été expulsé alors que celui-ci aurait dû être remplacé par un joueur spécifiquement formé à ce poste difficile, ce qui est de nature à engager la responsabilité tant de la Fédération française de rugby qui a la qualité de commettant de l'arbitre que du club de Trignac dont l'entraîneur et l'encadrement n'auraient pas dû accepter ce remplacement improvisé.
Il souligne que le match a été violent et que l'accident s'est produit en fin de match alors que le club de Gourdon était mené au score et que la mêlée était refaite pour la troisième fois ; que l'arbitre a été défaillant alors que le paquet d'avant de Trignac était en infériorité numérique, ce qui était de nature à aggraver les risques.

En tout état de cause il demande la condamnation de la FFR qui n'a pu verser le dossier de la procédure disciplinaire, qui a pris une sanction qui a influencé la commission d'indemnisation des victimes d'infraction et la cour et dont l'arbitre a laissé jouer la mêlée alors que l'équipe de Trignac n'était pas prête ; que les règles de la mêlée ont été transformées en raison des risques anormaux encourus par les joueurs.

La caisse primaire d'assurance maladie reprend les moyens du fonds de garantie pour demander le remboursement de ses débours.

M. X... fait valoir que l'arbitre a commandé l'entrée en mêlée, que l'équipe de Gourdon est entrée plus vite que l'équipe de Trignac ; qu'il n'a pas souhaité se défendre devant l'instance fédérale mais que rien ne prouve qu'il a commis une faute. Il reprend les moyens soutenus par la FFR, les clubs et leur assureur.

Les associations Gourdon XV, Rugby club trignacais, la FFR et La Sauvegarde concluent à la confirmation du jugement.

Le Rugby club trignacais soutient que M. D... était parfaitement apte à occuper le poste de talonneur auquel il avait joué de longues années et que les règles de remplacement le permettaient.

La FFR ne conteste pas qu'elle peut assumer le rôle de commettant de l'arbitre ; elle soutient qu'il est inexact que le remplacement du talonneur expulsé ait été improvisé et que l'arbitre ait commis des fautes, celles-ci s'appréciant comme une erreur dans l'application de normes formelles et objectives ou une transgression des principes généraux du droit.

L'association Gourdon XV soutient qu'il n'existe pas de présomption de responsabilité et que la victime doit faire la preuve d'une irrégularité ou infraction grave à la règle et à l'esprit du jeu ; qu'aucune faute caractérisée ne saurait être imputée au joueur X... ; que l'entrée plus précipitée de l'équipe de Gourdon ne constitue pas une infraction à la réglementation sportive ; que si le match s'est déroulé avec un certain engagement, l'accident n'a pas été causé par une faute caractérisée.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens, la cour renvoie à décision attaquée et aux dernières écritures déposées le 27 avril 2007 pour le fonds de garantie, le 8 avril 2008 pour la caisse primaire d'assurance maladie, le 7 avril 2008 pour M. X... et pour la FFR, les clubs et leur assureur.

SUR CE

Considérant que, compte tenu de la composition de la cour qui a rendu l'arrêt du 6 mars 2002, il a été proposé qu'elle siège dans une autre formation, ce que les parties n'ont pas souhaité ;

Considérant qu'aux termes de l'article 706-11 du code de procédure pénale le fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l'infraction ou tenues à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle le remboursement de l'indemnité ou de la provision versée par lui, dans la limite du montant des réparations à la charge desdites personnes ;
Considérant que les associations sportives, ayant pour mission d'organiser, de diriger et de contrôler l'activité de leurs membres au cours des compétitions sportives auxquelles ils participent sont responsables, au sens de l'article 1384 alinéa 1er du code civil, des dommages qu'ils causent à cette occasion dès lors qu'une faute caractérisée par une violation des règles du jeu est établie à l'encontre du joueur ayant occasionné le dommage même si celui-ci n'a pas été personnellement identifié ;

Que la charge de la preuve de cette faute incombe à la victime et en l'espèce au fonds subrogé dans les droits de celle-ci ;

Considérant que le juge n'est pas lié par le constat de l'arbitre et la sanction prononcée par les instances sportives dans la détermination de la faute caractérisée ; qu'il lui appartient de se décider au vu de l'ensemble des éléments soumis à son appréciation ;

Que l'arbitre, M. F..., a précisé au cours de l'enquête devant le tribunal qu'il avait commandé l'entrée en mêlée ; que l'équipe de Gourdon est entrée plus vite que l'équipe de Trignac, ce qui peut être dangereux ;

Que la victime a déclaré que le but de l'équipe adverse était d'enfoncer la mêlée et qu'il ne pouvait pas dire s'il y avait eu une attitude de jeu dangereux de la part de Gourdon ;

Que M. G..., pilier de l'équipe de Trignac, indique que les deux équipes " ne sont pas entrées comme des sauvages mais sont quand même entrées " ;

Que l'expert en présence de qui l'enquête s'est déroulée a précisé que le rapport d'expertise ne permet pas de déterminer de quelle manière la fracture s'est constituée ;
Qu'une fois que l'arbitre a donné l'ordre d'entrée, une équipe peut décider de prendre l'autre par surprise en entrant plus vite dans la mêlée, ce qui est une prise de risque mais n'est pas un acte délictueux ;
Qu'il pense qu'il y a eu entrée en mêlée extrêmement vive, que M. D... était en retard et a encaissé le choc ;

Considérant qu'il ne résulte pas de ce qui précède la preuve d'une faute caractérisée à l'encontre de l'un ou de plusieurs joueurs, même non identifiés, de l'équipe de Gourdon dès lors que l'entrée en mêlée n'a pas été contraire aux règles du rugby telles qu'elles étaient alors codifiées, que le rugby est un sport de contact et qu'aucune violence ou faute particulière n'est établie ; que la cause de l'accident reste indéterminée ;

Considérant qu'après l'expulsion de son talonneur, l'arbitre a demandé à M. D..., capitaine de l'équipe de Trignac, de désigner son remplaçant, conformément à la règle ; que M. D... s'est désigné lui-même compte tenu du contexte de ce match rugueux alors que le remplaçant titulaire était junior ;

Que le parcours sportif de M. D..., qui avait déjà occupé ce poste notamment dans des championnats ou coupe de France militaires, sa condition physique d'athlète très entraîné qui faisait à l'époque 1h30 de musculation par jour et était sapeur pompier professionnel excluent que les dirigeants de son équipe et l'arbitre en sa qualité de préposé de la FFR aient commis une faute engageant leur responsabilité en acceptant cette auto-désignation ;

Considérant que, s'il est patent que le match était très engagé, voire violent à certains moments, il a été dit ci-dessus que les blessures subies par M. D... ne sont pas imputables à une faute prouvée d'un joueur ou d'une équipe ; que dès lors il n'y a pas lieu de rechercher une faute dans le comportement de l'arbitre au moment de l'entrée en mêlée puisqu'elle ne serait pas susceptible d'être en lien de causalité avec le préjudice ;

Considérant que M. X... n'a pas comparu devant les instances fédérales ; que le fonds ne peut reprocher à l'arbitre et à la Fédération une erreur dans l'appréciation de la faute du joueur, la cour ayant retenu le 6 mars 2002 " une entrée en mêlée ordonnée brutale ou plus exactement vicieuse, consistant à soumettre son adversaire à une pression-flexion qui dénote l'intention de nuire ", ce qui ne résulte pas du rapport de l'arbitre ; que la décision ayant condamné le fonds à indemniser M. D... est essentiellement fondée sur les témoignages recueillis avant l'enquête ordonnée par le premier juge ;

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement en audience publique,

Confirme le jugement.

Vu l'article 700 du code de procédure civile dit n'y avoir lieu à indemnité de procédure.

Condamne le fonds de garantie aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Ct0032
Numéro d'arrêt :
Date de la décision : 18/06/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Saint-Nazaire, 27 novembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2008-06-18; ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award