Première Chambre B
ARRÊT No
R.G : 07/01953
S.A.S. CONSTRUCTIONS METALLIQUES RICHARD - CMR
C/
CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE PAYS DE LA LOIRE
S.A.S. POIRIER
Confirme la décision déférée
POURVOI no F 0817724
DU 28.07.08
(Ns Réf. Pourvoi 26/08)
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 09 MAI 2008
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Jean-Bernard PIPERAUD, Président,
Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Conseiller,
Madame Véronique BOISSELET, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Marie-Noëlle CARIOU, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 28 Mars 2008, Monsieur Jean-Pierre GIMONET entendu en son rapport,
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé par l'un des magistrats ayant participé au délibéré, à l'audience publique du 09 Mai 2008, date indiquée à l'issue des débats
****
APPELANTE :
S.A.S. CONSTRUCTIONS METALLIQUES RICHARD - CMR
25 rue du Vignoble
44330 LA CHAPELLE HEULIN
représentée par la SCP D'ABOVILLE DE MONCUIT SAINT-HILAIRE & LE CALLONNEC, avoués
assistée de la SCP EOCHE-DUVAL MORAND ROUSSEAU & ASSOCIES, avocats
INTIMÉES :
CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE PAYS DE LA LOIRE dite GROUPAMA LOIRE BRETAGNE
23, Boulevard Solférino, CS 51209
35012 RENNES CEDEX
représentée par la SCP BAZILLE Jean-Jacques, avoués
assistée de Me ROBET, avocat
S.A.S. POIRIER
Parc Industriel de l'Erette
44810 HERIC
représentée par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués
assistée de la SCP TOULZA PIBOT-DANGLEANT CHAPUT MEYER LE TERTRE & DUBREIL, avocats
La société Chantiers de l'Atlantique, chargée de la construction d'un paquebot de croisière dénommé «CRYSTAL SERENITY » a sous-traité les livraison et pose de balcons préfabriqués des cabines des ponts 8 à 11à la société Constructions Métalliques Richard qui a elle-même sous-traité l'application des peintures des structures en acier à la société POIRIER et la pose des parquets en teck à la société SNMI ;
En suite de la constatation du décollement du teck sur des balcons, une expertise a été ordonnée puis un protocole d'accord a été conclu les 17 janvier et 23 janvier 2006 entre la société Chantiers de l'Atlantique et la société Constructions Métalliques Richard, par lequel la seconde versait à la première une somme de 600.000 € pour règlement définitif de sa réclamation ;
Par jugement du 26 février 2007, le tribunal de commerce de NANTES a
- débouté la société Constructions Métalliques Richard de toutes ses demandes,
- condamné la société Constructions Métalliques Richard à payer à la société POIRIER la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles,
- condamné la société Constructions Métalliques Richard à payer à la compagnie GROUPAMA la somme de 1.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles,
- condamné la société Constructions Métalliques Richard aux dépens ;
La société Constructions Métalliques Richard a interjeté appel de cette décision et, par conclusions du 25 juillet 2007, a demandé à la cour :
- d'infirmer le jugement ,
- de juger que la société POIRIER est entièrement responsable des dommages occasionnés aux balcons du paquebot,
- d'homologuer le rapport d'expertise,
- de condamner in solidum la SAS POIRIER et son assureur, GROUPAMA PAYS DE LA LOIRE, au paiement d'une indemnité de 600.000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 6 avril 2006, date du dépôt des conclusions au greffe du Tribunal de Commerce de NANTES, avec capitalisation des intérêts dus depuis plus d'un an,
- de condamner in solidum la SAS POIRIER et son assureur, GROUPAMA PAYS DE LA LOIRE, au paiement d'une indemnité de 8.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles ainsi qu'à payer les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ;
La SAS POIRIER, par conclusions du 25 octobre 2007, a demandé à la cour :
- de confirmer le jugement,
- subsidiairement, de condamner GROUPAMA à la garantir de toute condamnation à l'exception de la franchise contractuelle,
- de condamner in solidum la société CMR et GROUPAMA, ou l'un à défaut de l'autre, à lui payer la somme de 15.000 € à titre d'indemnité pour frais irrépétibles ainsi qu'à payer les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ;
La CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AG BNE PAYS DE LA LOIRE, par conclusions du 30 janvier 2008, a demandé à la cour de confirmer le jugement et de débouter la société CMR de toutes ses demandes, subsidiairement, de juger que sa garantie sera limitée à 146.952 euros et, en toute hypothèse, de condamner la société CMR à lui verser la somme de 3.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles ainsi qu'à payer les dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
SUR CE,
Considérant que la société CHANTIERS DE L'ATLANTIQUE qui a confié à la société CONSTRUCTIONS METALLIQUES RICHARD (société CMR) la fabrication, la livraison et la pose des balcons préfabriqués H32 des cabines des ponts 8 à 11, du paquebot CRYSTAL SERENITY a précisé comme suit la "spécification technique peinture à appliquer sur la structure acier des balcons préfabriqués" :
"- une couche 50 um EPOXY ZINC 52,
- une couche 100 um INTERTUF 262 red,
- une couche 100 um INTERGARD 162 off white,
- une couche 50 um INTERTHANE 990 white ;
NOTA:
- Le dessous des balcons ainsi qu'un retour de 150 mm sur le dessus est à traiter avec ce système.
- Pour le dessus du balcon, en dehors des zones de 150 mm en abord, le système à appliquer est Sa 2,5 et une couche EPOXY ZINC 52." ;
Que la société CMR a passé commande de l'application des peintures à la société POIRIER et de la fabrication et du collage de panneaux de teck à la société SNMI ;
Que la société SNMI, par lettre du 14 mai 2002 a précisé à la société CMR que la société SIKA lui avait fait savoir que la colle SIKAFLEX 291 utilisée pour la pose du teck ne pouvait être en contact direct avec le primaire Epoxy zinc devant être appliqué sur le dessus des balcons et lui a demandé de bien vouloir lui faire préparer quatre éprouvettes en tôle de 200/200 revêtues de la peinture INTERTUF 262, pour deux d'entre elles, et de la peinture INTERTHANE 990 pour les deux autres ;
Que la société CMR a répercuté cette demande d'éprouvettes à la société POIRIER ;
Considérant que l'expert, Monsieur A..., a relevé que la société POIRIER avait appliqué :
sur le dessus des balcons et en périphérie :
- une couche époxy zinc (50 microns) ,
- une couche INTERTUF 262 RED (100 microns),
- une couche INTERGARD 162 blanc crème(100 microns),
- une couche INTHERTHANE 990 BLANC ;
sur la partie centrale du plancher :
- une couche époxy zinc (50 microns) ,
- une couche INTERTUF 262 RED (100 microns),
- une couche INTERGARD 162 blanc crème(100 microns);
Que l'expert a établi que la cause des désordres était "la mauvaise compatibilité de la peinture INTERGARD 162 avec la colle SIKAFLEX " et a souligné que· les sous-traitants auraient dû réaliser ou faire réaliser des essais de compatibilité de l'ensemble des revêtements protecteurs avec les colles utilisées ;
Considérant que la société CMR n'a pas assuré une coordination suffisante des interventions des sociétés POIRIER et SNMI et ne s'est notamment préoccupée de le compatibilité de la colle avec le complexe de peinture que par des échanges avec la société SNMI ;
Qu'il en est résulté une certaine hésitation et une imprécision dans les spécifications techniques du système peinture + colle + teck en ce qui concerne le centre des planchers dans ses relations avec ses sous-traitants ;
Qu'ainsi, après avoir d'abord envisagé de demander à la société POIRIER l'application du complexe de peinture conformément à la demande de la société CHANTIERS DE L'ATLANTIQUE -prévoyant d'appliquer la colle sur la couche époxy zinc au centre du plancher des balcons- la société CMR, avisée par SNMI de l'incompatibilité entre cette couche de peinture et la colle SIKA, a adressé un fax à cette dernière lui indiquant qu'au centre du balcon, le plancher recevrait après sablage une couche INTERTUF 262 RED ;
Que la société SNMI a alors demandé qu'on lui prépare quatre éprouvettes en tôle de 200/200 revêtues :
- 2 de la peinture INTERTUF 262,
- 2 de la peinture INTERTHANE 990 ;
Qu'une telle demande de la société SNMI se comprend à la lumière des indications précédemment données par la société CMR en ce qui concerne le centre des planchers qui ne devaient recevoir ni EPOXY ZINC ni INTERGARD 162 ;
Considérant que la commande du 21 mai 2002 de la société CMR à la société POIRIER a donné les normes et définitions des peintures à appliquer sans préciser le sort réservé au centre du plancher et a comporté une demande de préparation des 4 éprouvettes en tôle, deux revêtues de la peinture INTERTUF 262 et deux revêtues de la peinture INTERTHANE 990, sans donner de précision complémentaires à la société POIRIER ;
Que la société POIRIER a adressé les éprouvettes en cause qui ne contenaient pas de couche EPOXY ZINC ni de couche INTERGARD 162 ;
Considérant que la société POIRIER soutient que la société CMR lui a demandé en dernier lieu d'appliquer la couche INTERGARD 162 sur la totalité du plancher et par-dessus la couche INTERTUF 262 en ce qui concerne le centre desdits planchers, ce que conteste cette dernière ; que toutefois, force est de constater que la société CMR a procédé à la réception des balcons peints avant de les remettre à la société SNMI et qu'elle n'a pu que constater que les planchers des balcons n'étaient pas peints de la même couleur sur le pourtour et au centre, les peintures INTERGARD 162 et INTERTHANE 990 étant l'une blanc crème et l'autre blanche, alors que la couche INTERTUF 262 est de
couleur rouge ; qu'il n'apparaît pas que la société CMR ait émis quelque réserve que ce soit sur la peinture des planchers qu'elle a acceptée en l'état, ce qui démontre que cette application correspondait à ce qu'elle avait commandé ;
Considérant encore qu'il ressort du rapport d'expertise que les analyses en laboratoire des échantillons témoins fournis par la société CMR, constitués pour les uns de trois couches, dont la supérieure INTERGARD 162, et pour les autres de 4 couches dont la supérieure INTERTHANE 990, ont démontré qu'intervenait dans tous les cas de figure une rupture du système de protection composé de plusieurs couches de peinture au niveau de la couche INTERGARD 162 même si celle -ci était recouverte d'une couche INTERTHANE 990 ; que la procédure de réparation préconisée par l'expert exclut d'ailleurs toute présence d'une couche INTERGARD 162 dans le complexe de peinture ;
Qu'il apparaît ainsi que la société POIRIER démontre que les désordres en cause sont intervenus à raison des hésitations de la société CMR quant à ses préconisations techniques en ce qui concerne le centre des planchers des balcons et à raison de sa faute tenant à l'absence de recherche de l'incompatibilité de la colle SIKA avec l'ensemble du complexe de peinture comprenant l'INTERGARD 162, recherche qu'elle a entendu mener avec la société SNMI sans y associer la société POIRIER ;
Que, par ailleurs, si l'expert a indiqué de manière lapidaire et sans aucune explication, dans la réponse à un dire, que la surépaisseur de peinture et le temps de séchage trop court de cette peinture avaient contribué aux désordres, il reste qu'il n'a pas repris cet élément dans ses conclusions dans lesquelles il n'a fait que rapporter l'épaisseur du complexe de peinture sans indiquer qu'elle aurait le moindre rôle causal dans la survenue des désordres ; que le jugement sera donc confirmé ;
PAR CES MOTIFS
La cour
Confirme le jugement;
Condamne la société Constructions Métalliques Richard à payer à la société POIRIER la somme de 2.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles ;
Condamne la société Constructions Métalliques Richard à payer à la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AG BNE PAYS DE LA LOIRE la somme de 2.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles ;
Condamne la société Constructions Métalliques Richard aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT