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20/03/2008 | FRANCE | N°06/04251

France | France, Cour d'appel de Rennes, 20 mars 2008, 06/04251


Quatrième Chambre




ARRÊT No


R. G : 06 / 04251


BV








S. A. R. L. L-M EXPERTISES


C /


M. Marcelin Denis X...

Me Henri Y...

Mme Marie-Hélène Z...épouse X...

Mme Michelle A...épouse B...

Mme Claude Josiane A...épouse D...

Mme Danièle Annie A...épouse E...

Mme Josette Nicole A...épouse F...

Mme Martine Françoise G...

















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dis

positions de la décision déférée














Copie exécutoire délivrée
le :


à :




RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 20 MARS 2008




COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ...

Quatrième Chambre

ARRÊT No

R. G : 06 / 04251

BV

S. A. R. L. L-M EXPERTISES

C /

M. Marcelin Denis X...

Me Henri Y...

Mme Marie-Hélène Z...épouse X...

Mme Michelle A...épouse B...

Mme Claude Josiane A...épouse D...

Mme Danièle Annie A...épouse E...

Mme Josette Nicole A...épouse F...

Mme Martine Françoise G...

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée
le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 20 MARS 2008

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Jean THIERRY, Président,
Madame Brigitte VANNIER, Conseiller,
Madame Françoise LE BRUN, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Agnès EVEN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 Janvier 2008

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Jean THIERRY, Président, à l'audience publique du 20 Mars 2008, date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTE :

S. A. R. L. L-M EXPERTISES exerçant sous l'enseigne DETEX
15 rue Henri Gautier
44600 SAINT NAZAIRE

représentée par la SCP JACQUELINE BREBION ET JEAN-DAVID CHAUDET, avoués
assistée de Me PEREZ, avocat

INTIMÉS :

Monsieur Marcelin Denis X...

...

44600 ST NAZAIRE

représenté par la SCP JEAN LOUP BOURGES & LUC BOURGES, avoués
assisté de Me ROBARD-HERVOUET, avocat

Maître Henri Y...

...

BP 60
44602 SAINT NAZAIRE CEDEX

représenté par la SCP D'ABOVILLE DE MONCUIT SAINT-HILAIRE & LE CALLONNEC, avoués
assisté de la SELARL EFFICIA, Me K..., avocat

Madame Marie-Hélène Z...épouse X...

...

44600 ST NAZAIRE

représentée par la SCP JEAN LOUP BOURGES & LUC BOURGES, avoués
assistée de Me ROBARD-HERVOUET, avocat

Madame Michelle A...épouse B...

...

33730 VILLANDRAUT

représentée par la SCP GAUVAIN & DEMIDOFF, avoués
assistée de Me VITAL MAREILLE substitué par Me M..., avocat

N...Claude Josiane A...épouse D...

15 rue Nicolas Fortin
75013 PARIS

représentée par la SCP GAUVAIN & DEMIDOFF, avoués
assistée de Me VITAL MAREILLE substitué par Me M..., avocat

N...Danièle Annie A...épouse E...

...

91380 CHILLY MAZARIN

représentée par la SCP GAUVAIN & DEMIDOFF, avoués
assistée de Me VITAL MAREILLE substitué par Me M..., avocat

N...Josette Nicole A...épouse F...

...

75020 PARIS

représentée par la SCP GAUVAIN & DEMIDOFF, avoués
assistée de Me VITAL MAREILLE substitué par Me M..., avocat

Madame Martine Françoise G...

...

44600 ST NAZAIRE

représentée par la SCP GAUTIER-LHERMITTE, avoués
assistée de la SCP CADORET TOUSSAINT DENIS, avocats

I-Exposé du litige :

Par acte sous seing privé établi par Madame Martine G..., agent immobilier, signé le 22 octobre 2001 par les acheteurs et le 5 décembre 2001 par les vendeurs, Mesdames Michelle, Claude, Danièle et Josette A...(les consorts A...) ont vendu à Monsieur Marcellin X...et Madame Marie-Hélène Z...(les époux X...) une maison d'habitation sise à La Baule, ..., au prix de 213 428, 62 €.

Cette promesse synallagmatique de vente a été notifiée aux acquéreurs par lettre recommandée avec accusé de réception présentée le 7 décembre 2001.

A la demande de l'agent immobilier, la société LM Expertises SARL, exerçant à l'enseigne DETEX, a réalisé le 14 décembre 2001 un diagnostic portant sur la recherche de larves, d'insectes xylophages et de champignons lignivores.

Madame G...a transmis le rapport établi par la société LM Expertises aux époux X...le 21 décembre 2001.

La vente a été réitérée par acte authentique par-devant Maître Henri Y..., notaire à Saint-Nazaire le 21 février 2002.
Le 11 mars 2002, les époux X...ont constaté sur une partie des bois du solivage bas du palier du premier étage un champignon qu'un laboratoire de mycologie a identifié le 8 avril suivant comme étant de la mérule.

Le 22 mai 2002, l'expert mandaté par la compagnie d'assurances des époux
X...
a confirmé ce diagnostic.

Les époux X...ont en outre constaté que la cheminée du salon était inutilisable.

Ils ont fait assigner les consorts A..., N...
G...et la " société DETEX " devant le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Saint-Nazaire qui, le 9 juillet 2002, a désigné un expert dont les opérations furent étendues à Maître Y...le 12 décembre 2002.

Après dépôt du rapport d'expertise, les époux X...ont fait assigner en indemnisation de leur préjudice les consorts A..., la " société DETEX ", Madame G...et Maître Y...et le Tribunal, par jugement du 27 mars 2006 assorti de l'exécution provisoire, a :
- Condamné les consorts A...à payer à la " société DETEX " la somme de 160, 68 €
- Condamné in solidum la " société DETEX " et Madame G...à payer aux époux X...la somme de 34 432, 14 € au titre des travaux et frais annexes et celle de 15 245 € au titre de leur préjudice de jouissance
-Condamné la " société DETEX " à garantir Madame G...à hauteur de 90 % de cette condamnation
-Condamné les consorts A...à payer aux époux X...la somme de 2 660 € au titre des désordres affectant la cheminée
-Dit que Maître Y...devra procéder à la déconsignation de la somme de 1 430 € au profit des époux X...au titre des travaux d'assainissement
-Condamné les consorts A...à verser aux époux X...la somme complémentaire de 295, 40 € au titre des travaux d'assainissement
-Condamné in solidum les consorts A..., la " société DETEX et Madame G...à payer aux époux X...la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
-Rejeté le surplus des demandes
-Condamné in solidum aux dépens en ce compris ceux des instances en référé et le coût de l'expertise les consorts A..., la " société DETEX " et Madame G...et dit que dans leurs rapports entre eux la " société DETEX " supportera 90 % de ces frais, Madame G...5 % et les consorts A...5 %, ce partage valant également pour les frais irrépétibles.

La société LM Expertises a interjeté appel de ce jugement à l'encontre des consorts A..., de Madame G...et des époux X..., lesquels ont assigné Maître Y...en report d'appel.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision critiquée et aux conclusions déposées le 24 mai 2007 par Maître Y..., le 26 décembre 2007 par les époux X...et à une date qui sera précisée ci-après par la société LM Expertises et par Madame G....

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 janvier 2008.

II-Motifs :

Sur les incidents de procédure

Les époux X...demandent que soient écartées des débats les conclusions déposées par Madame G...le 17 janvier 2008 et les conclusions déposées par la société LM Expertises le 15 janvier 2008, ainsi que les pièces portant les numéros 14 et 15 de son bordereau de communication, que cette société a communiquées le même jour.

La société LM Expertises conclut à la recevabilité de ses conclusions déposées le 15 janvier 2008 en réponse à celles déposées par les époux X...le 26 décembre 2007 ou, subsidiairement, demande le rejet des dernières écritures des époux X....

Les conclusions de Madame G..., déposées après l'ordonnance de clôture, sont irrecevables par application de l'article 783 du nouveau code de procédure civile.
Les dernières écritures de Madame G...au vu desquelles la cour statuera sont donc celles déposées le 15 février 2007.

Les conclusions déposées par la société LM Expertises le 15 janvier 2008 comportent en page 13 un paragraphe ajouté à ses précédentes conclusions qui d'une part contient une argumentation répondant à celle développée par les époux X...dans leurs conclusions déposées le 26 décembre 2007 et d'autre part reprend une argumentation qu'elle avait déjà développée dans ses précédentes écritures.

Le dépôt de ces conclusions de dernière heure prises en réplique à celle des époux X..., qui ne contenaient ni prétention ni moyen nouveau et qui ne nécessitaient aucune réponse n'a pas empêché que le principe du contradictoire soit respecté.

Elles ne seront donc pas écartées des débats et c'est à leur vu que la cour statuera.

Ne seront pas non plus écartées des débats les pièces 14 et 15 communiquées par la société LM Expertises le même jour, dès lors qu'il s'agit d'un arrêt de cour d'appel et d'un jugement de tribunal de grande instance qui n'ont pas à donner lieu à commentaire de la part des autres parties.

Sur le fond

Sur la demande des époux X...dirigée contre les consorts A..., la société LM Expertises, Madame G...et Maître Y...

S'agissant de la mérule

La société LM Expertises fait grief au Premier Juge d'avoir retenu qu'elle avait commis une faute dans l'accomplissement de sa mission pour s'être abstenue d'identifier les agents biologiques auteurs des dégâts qu'elle avait constatés et pour avoir rédigé un rapport propre à induire en erreur tout lecteur non professionnel alors, selon elle :
- que l'objectif principal de sa mission était la recherche de termites
-qu'elle a réalisé ses constatations sans procéder à des dégradations ou des sondages destructifs et qu'elle a rédigé son rapport dans le respect de la loi du 8 juin 1999, du décret du 3 juillet 2000 et de la norme XP P 03 200
- que l'information des acquéreurs a été complète en l'état de ce qui pouvait être décelé et qu'elle a été délivrée dans la limite des obligations du diagnostiqueur, qui excluent l'activité de conseil et d'offre de service pour le traitement des pathologies constatées.

Les époux X...concluent au contraire à la confirmation du jugement déféré.

Ils concluent de même à la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de Madame G..., ce que celle-ci conteste au terme de son appel incident.

Ils font en revanche grief au Premier Juge de ne pas avoir retenu la responsabilité des consorts A...et de Maître Y....

Il ressort du rapport d'expertise judiciaire qu'il existe une prolifération de champignons lignivores dans la maison acquise par les époux X...et que ce champignon existait à la date à laquelle la société LM Expertises a réalisé son état parasitaire.

La mission que Madame G...avait confiée à la société LM entreprise en sa qualité de mandataire des venderesses était, ainsi qu'il est exposé en première page du rapport, la recherche de larves, d'insectes xylophages et de champignons lignivores.

Cette mission excédait donc la recherche de termites rendue obligatoire dans la zone concernée par la loi du 8 juin 1999 et s'étendait à la recherche de champignons.

Elle a été réalisée, selon ce qui figure en partie supérieure de la première page du rapport, suivant la norme XP P 03 200 qui est en effet applicable à la recherche de tous les agents biologiques du bois, au nombre desquels figurent les champignons.

Cette norme impose au diagnostiqueur de rechercher s'il existe des infestations ou des altérations en procédant à un examen extérieur et intérieur le plus complet possible et orienté en particulier vers les lieux où existent des risques d'humidification, de décrire les infestations ou altérations constatées en précisant le type de champignon auteur du dégât, précision étant apportée de ce qu'un champignon responsable de pourriture cubique est de type basidiomycète.

Pour rédiger son rapport, la société LM Expertises a utilisé le modèle d'état parasitaire relatif à la présence de termites dans les immeubles tel qu'il est fixé par l'arrêté du 10 août 2002, ce qui a eu pour conséquence que le résultat des recherches relatives au champignon n'a pu figurer qu'en quatrième et dernière page sous le titre " constatations diverses ".

Ces constatations sont au nombre de quatre.

La première concerne la petite vrillette ; la deuxième concerne la grosse vrillette ; la troisième précise que le bois n'est attaqué par la grosse vrillette que lorsqu'il a été préalablement dégradé par un champignon lignivore ; la quatrième concerne des traces de pourriture cubique visibles sur les dormants de fenêtres dans la salle à manger, sur la porte du placard de cette salle et sur le dormant de la porte fenêtre de la quatrième chambre au premier étage.

Sous le titre " parties d'ouvrage n'ayant pas été examinées ", il est indiqué que les marches de l'escalier sont recouvertes et n'ont pas été contrôlées et que les parquets du palier et des trois chambres au premier étage sont recouverts et n'ont pas été contrôlés.

C'est précisément sous la moquette de l'étage que le 11 mars 2002 (date figurant au dos des photographies versées aux débats), soit dans le délai de validité du rapport, que les époux X...ont découvert que le plancher bois était dégradé par ce qui devait se révéler être de la mérule.

De ceci il résulte que la société LM Expertises, qui était chargée d'une mission portant non seulement sur la recherche de termites mais encore de champignons lignivores, n'a pas tiré les conséquences de l'emploi qu'elle faisait d'un modèle de rapport adapté aux seuls termites, ce qui avait pour effet d'exclure du corps même du rapport les constatations relatives au champignon et de les rejeter en fin de rapport, hors du titre " conclusions ", sous le titre " constatations diverses ", peu susceptible d'attirer l'attention d'un acheteur profane.

Ce mode de rédaction induit par le support employé, se devait d'être compensé par le recours à tout procédé de nature à attirer l'attention des futurs lecteurs profanes sur l'importance des constations opérées, tel l'emploi d'une calligraphie différente mettant en évidence les termes champignons lignivores et pourriture cubique et tel l'accompagnement du rapport par un courrier précisant la portée des constatations effectuées.

Au lieu de cela, ce qui est mis en évidence par l'emploi de la couleur rouge et qui attire donc l'attention en dernière page du rapport, c'est le dernier paragraphe indiquant que l'état parasitaire est un constat et non une expertise, que le diagnostic ne porte pas sur la résistance mécanique des bois et matériaux et que le diagnostic n'est réalisé que sur les bois visibles et accessibles de l'intérieur du bâtiment.

Mais pour autant la société LM expertise, qui avait été alertée sur la présence d'agents biologiques du bois pour avoir constaté la présence de dégradations dues à un champignon lignivore ainsi que la présence de pourriture cubique qu'elle savait être la manifestation d'une attaque de champignons de type basidiomycète, n'a pas attiré l'attention des lecteurs profanes de son rapport sur le risque sérieux qui existait que le champignon soit également présent dans les parquets recouverts et par suite non visibles et non examinés et ne leur a pas conseillé de faire poursuivre leurs investigations dans cette direction.

Or une telle démarche était de l'essence même de sa mission et n'est pas, contrairement à ce que soutient la société LM Expertise, proscrite par les règles déontologiques de sa profession qui, au terme de la norme dont elle revendique l'application lui interdisent seulement l'activité de conseil, d'offre de service pour le traitement ou la vente de produits de préservation, afin que soit respecté, au-delà même de la recherche de termites, l'esprit de l'article 9 de la loi du 8 juin 1999 qui énonce que les fonctions de diagnostic sont exclusives de toute activité de traitement préventif, curatif ou d'entretien.

C'est donc à juste titre que le Premier Juge a considéré que la société LM Expertises n'avait pas correctement rempli ses obligations et qu'elle a retenu qu'elle avait engagé sa responsabilité à l'égard des époux X...en application de l'article 1382 du code civil.

De ce qui vient d'être dit sur les imperfections du rapport de la société LM Expertises, il se déduit que les acheteurs, profanes en matière immobilière et en matière de pathologie du bois, ne pouvaient en comprendre la portée à sa seule lecture et ne pouvaient en particulier pas en déduire que la maison qu'ils achetaient était attaquée par un champignon susceptible de se développer de façon dévastatrice.

Il n'en est pas de même de Madame G..., professionnelle de l'immobilier, qui connaissait nécessairement l'existence des champignons lignivores et les conséquences de leur présence, puisqu'elle avait pris soin de demander à cet égard la réalisation d'un diagnostic qui n'était pas légalement obligatoire.

Or, alors qu'elle avait en mains un rapport qui employait des termes, opaques pour un profane, mais transparents pour un professionnel, elle s'est contentée de le transmettre aux acheteurs sans le moindre commentaire, alors qu'elle aurait dû attirer leur attention sur les deux lignes du rapport dont il résultait que la présence du champignon était certaine et sans leur conseiller de faire réaliser des investigations complémentaires pour déterminer l'étendue de l'infestation et ses conséquences en terme de coût de remise en état.

Le fait que les acheteurs se soient rapprochés téléphoniquement de la société LM expertise ne dispensait pas Madame G...d'exécuter sa propre obligation de conseil, qui perdurait quand bien même le délai de rétractation était passé dès lors que, l'acte authentique de vente n'étant pas encore signé, les acheteurs conservaient, pour le cas où un vice d'ampleur serait révélé, la faculté de rechercher avec les venderesses une solution amiable à la difficulté ou de renoncer à la vente en payant la clause pénale prévue à la promesse de vente, qui était moins élevée que le montant des travaux de remise en état.

Le Premier Juge a donc exactement considéré que Madame G...avait engagé sa responsabilité à l'égard des acheteurs.

S'agissant de Maître Y..., s'il est exact que, n'ayant pas négocié la vente et n'étant intervenu qu'en qualité de rédacteur d'acte, il n'avait pas à faire preuve d'initiatives dans les domaines relevant des diligences préliminaires à l'acte, il n'était pas pour autant dispensé d'analyser et de tirer les conséquences des documents qui lui étaient remis en vue de la rédaction de cet acte.

Il ne pouvait en particulier se contenter d'annexer le rapport de diagnostic à son acte sans en prendre sérieusement connaissance et sans s'interroger sur les conséquences qu'il pouvait avoir sur la vente qu'il s'apprêtait à authentifier.

Or, ainsi qu'il vient d'être dit, le rapport de diagnostic révélait clairement pour un professionnel de l'immobilier, comme tel tenu d'en connaître les pathologies les plus courantes, la présence de champignons lignivores dans la maison.

Sans pouvoir se retrancher derrière le fait que d'autres professionnels de l'immobilier étaient intervenus avant lui, Maître Y...se devait donc de s'assurer que les acheteurs avaient compris le sens et la portée de ce rapport et leur en expliquer les conséquences.

Même si cette information ne parvenait aux acheteurs qu'alors que la vente état parfaite, puisque les conditions suspensives étaient réalisées, elle leur laissait encore la possibilité de rechercher un accord amiable avec les venderesses ou de renoncer à la vente en payant la clause pénale d'un montant moins élevé que le coût des travaux.

Au lieu de quoi les acheteurs se sont trouvés engagés dans la vente sans autre possibilité que d'exposer des frais importants pour éviter que leur maison se trouve dévastée par la mérule.

Il sera ajouté que l'obligation d'information du notaire était d'autant plus impérieuse que son acte contenait une clause de non garantie des vices cachés, qui réduisait les chances des acquéreurs d'obtenir, pour le cas où l'existence d'un vice d'ampleur serait démontrée, l'anéantissement de la vente ou la réduction du prix, ce qui ne pouvait que les conduire à privilégier la recherche d'une solution amiable avec les venderesses tant que le prix n'était pas payé ou à défaut l'abandon de leur projet contre paiement de la clause pénale.

C'est donc à tort que le Premier Juge a écarté la responsabilité de Maître Y....

En revanche, c'est à juste titre qu'il a considéré que les consorts A...n'étaient pas tenus à garantie des vices cachés à l'égard des acheteurs.

Ainsi qu'il a été dit ci-dessus le vice est établi par l'expert et il est demeuré caché aux acheteurs profanes.

La mérule atteignant le dressing sur le palier de l'étage, les portes-fenêtres du rez de chaussée, le plafond de la pièce de séjour et les murs de façade, ce vice était d'une importance telle qu'il diminuait l'usage de la maison au point que les acheteurs ne l'auraient pas acquise ou n'en auraient donné qu'un moindre prix s'ils en avaient eu connaissance.

Toutefois l'acte de vente comportant une clause de non garantie des vices cachés, les venderesses ne peuvent être tenues d'une telle garantie que s'il est démontré qu'elles ont agi de mauvaise foi.

Or, en l'absence d'autre élément d'appréciation, le rapport d'expertise ne permet pas d'établir la preuve de la mauvaise foi alléguée par les acheteurs.

En effet, il sera observé que les venderesses avaient manifesté leur bonne foi en faisant réaliser un diagnostic de la maison.

En outre, il a été indiqué en cours d'expertise sans que ceci soit contesté, que la maison était fermée depuis sa mise en vente au mois d'août 2000 et que les travaux consistant dans le changement de quelques solives, dont les acheteurs se prévalent pour conclure que les venderesses avaient connaissance du vice, avaient été réalisés début des années 1960, donc à une époque trop éloignée de la date à laquelle la mérule a été découverte pour qu'il soit possible d'en conclure que les travaux étaient consécutifs à la présence du champignon et de surcroît à une époque où les venderesses n'étaient pas encore propriétaires du bien qu'elles n'ont recueilli par succession qu'en 1999.

Dans ces circonstances, même à supposer que la pourriture cubique ait été présente et visible sur les dormants des portes-fenêtres avant la fermeture de la maison en mars 2000, rien ne démontre que les venderesses, profanes en matière immobilière et en matière de pathologie des bois, en connaissaient l'origine et la nature.

Faute de preuve de la mauvaise foi des venderesses, la clause de non garantie des vices cachés doit recevoir application.

Seuls seront donc condamnés à réparer le préjudice des époux X...la société LM Expertises, Madame G...et Maître Y....

Ils seront condamnés in solidum dès lors que leurs négligences respectives ont concouru à la réalisation de l'entier dommage dont les acheteurs demandent réparation.

Le préjudice subi par les époux X...directement consécutif aux négligences des responsables ne consiste pas en la perte de la chance qu'ils auraient eue de négocier une réduction du prix de vente avec les venderesse, mais bien, de façon certaine, dans la nécessité où ils se sont trouvés d'exposer les sommes nécessaires à la réalisation des travaux d'éradication du champignon et de remise en état de la maison.

S'agissant de ces derniers travaux, il résulte tant des devis sur lesquels l'expert a fondé ses évaluations que du rapport établi par le centre de contrôle technique du bois et de l'ameublement le 22 juillet 2003 en cours d'expertise, que les travaux ont consisté en la dépose de tout revêtement masquant les maçonneries et les bois à protéger, la mise à nu des murs et maçonneries par piquage, la dépose des éléments dont les caractéristiques se sont révélées insuffisantes et des bois dont la résistance mécanique s'est avérée défectueuse, la destruction des champignons par passage à la flamme, le grattage des joints, le traitement en profondeur par introduction d'un fongicide dans des puits réalisés tous les 40 cm sur une profondeur égale aux deux tiers de l'épaisseur des murs et des maçonneries, la réalisation d'une application de surface, le traitement des bois.

Dans ces conditions, Maître Y...ne peut être approuvé lorsqu'il prétend que les travaux de plâtrerie et de peinture dont les époux X...demandent le paiement ne trouvent pas leur cause dans les travaux d'éradication de la mérule mais dans la seule nécessité de rénover un immeuble ancien.

Cette allégation est d'ailleurs de surcroît contredite par l'attestation du banquier des époux X...qui indique que ceux-ci n'avaient pas prévu de financer des travaux dans leur nouvelle maison qu'ils pensaient pouvoir occuper en l'état.

C'est donc à juste titre que le Premier Juge a alloué aux époux X...la somme totale de 34 432, 14 € telle qu'évaluée par l'expert.

C'est tout aussi pertinemment qu'il a écarté la demande des époux X...tendant au remboursement de la facture de 609, 58 € émise par la société Rouaud suite au traitement en février 2004 de murs non traités lors de sa première intervention, dès lors qu'il n'est pas démontré que cette deuxième intervention trouve sa cause dans les fautes de la société LM Expertises, de Madame G...et de Maître Y...et non dans une insuffisance du premier traitement réalisé par cette société.

Les responsables seront en revanche condamnés à verser aux époux X...la somme de 58, 58 € en réparation des frais qu'ils ont dû exposer en avril 2002 pour faire identifier par un laboratoire de mycologie la nature de la pourriture qu'ils avaient prélevée.

La cour n'est saisie d'aucun moyen à l'encontre de l'évaluation que le Premier Juge a faite du préjudice de jouissance des époux X..., qu'il a fixée à 15 245 € conformément à l'avis de l'expert, en raison de l'impossibilité où ils se sont trouvés d'occuper la maison pendant 20 mois.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Les époux X...qui ont subi les tracas d'une procédure judiciaire, d'une expertise et qui justifient des démarches qu'ils ont dû entreprendre pour faire échec à la résiliation du bail du logement qu'ils occupaient au moment de l'achat de la maison, se verront en outre allouer une somme de 1 000 € en réparation de leur préjudice moral.

S'agissant de la cheminée :

Les époux X...font valoir que la cheminée du salon n'est pas utilisable alors que le descriptif de l'agent immobilier faisait état d'une maison équipée d'une cheminée.

Ils recherchent par suite, sur le fondement de l'article 1641 du code civil, la garantie des venderesses, qui concluent à l'infirmation du jugement sur ce point et la responsabilité de Madame G..., qui conclut à sa confirmation en ce qu'il l'a mise hors de cause.

Il est justifié que les documents publicitaires et la fiche descriptive de l'immeuble rédigés par l'agent immobilier mentionnaient l'existence d'un salon ou d'un séjour " avec cheminée " et l'expert a mis en évidence que la cheminée n'était pas en état de fonctionner car le conduit qui la desservait avait été supprimé en partie haute.

La lecture des dires que l'expert a annexés à son rapport enseigne que les venderesses connaissaient l'impossibilité de faire fonctionner cette cheminée, puisqu'elles ont, lors d'une visite sur place le 10 janvier 2002, dissuadé les acheteurs d'y faire du feu et qu'elles ont laissé dans le foyer un message mentionnant " ne pas faire de feu ".

La nature exacte de l'information donnée ce jour là par les venderesses fait cependant débat, les époux X...faisant valoir que leur a été signalé un défaut " infime " sous toiture, tandis que les venderesses assurent avoir déclaré que la cheminée était actuellement inutilisable parce qu'" il manquait la maçonnerie de la partie supérieure du conduit.. (en partie infime d'ailleurs) ".

Cependant, même formulée ainsi que le soutiennent les acheteurs, l'information diffusée par les venderesses antérieurement à la signature de l'acte authentique de vente, dont il se déduisait que la cheminée ne pouvait être utilisée, était de nature à susciter l'interrogation des acheteurs qui ont le droit d'être informés mais également le devoir de se renseigner et à leur permettre, si le bon fonctionnement de la cheminée était essentiel pour eux, de rechercher les causes exactes du non-fonctionnement et si le défaut leur paraissait important, de tenter de résoudre à l'amiable la difficulté avec les venderesses.

Une telle information, donnée dans de telles circonstances, interdit de considérer que les venderesses étaient de mauvaise foi.

Dès lors, même à supposer que le fait que le séjour comporte une cheminée en état de fonctionner soit entré dans le champ contractuel, en dépit du fait que ni l'acte sous seing privé ni l'acte authentique ne portent mention de l'existence de cette cheminée dans la description du bien vendu, la demande des époux X...doit être rejetée, sans qu'il y ait lieu d'ordonner la réouverture des débats pour inviter les parties à s'expliquer sur le point de savoir si le défaut allégué était de nature à diminuer tellement l'usage de la maison que les acheteurs ne l'auraient pas acquise ou qu'ils n'en auraient donné qu'un moindre coût s'ils l'avaient connu.

La demande des époux X...dirigée contre Madame G...ne peut pas davantage prospérer, puisqu'il résulte du rapport d'expertise que l'absence de conduit de cheminée ne se voyait ni du séjour ni de l'extérieur, dès lors qu'une cheminée était présente en toiture et que seul un professionnel de la construction pouvait s'apercevoir que la souche avait été modifiée et que l'ancien conduit ne sortait pas du toit.

Pour constater l'absence de conduit, il eût fallu que l'agent immobilier se rende dans les combles perdus de très faible volume et très difficilement accessibles.

De telles investigations excèdent la mission de l'agent immobilier et Madame G..., dont il n'est pas établi qu'elle avait été informée de l'absence de conduit de cheminée par les venderesses avant l'acte de vente sous seing privé des 22 octobre et 5 décembre 2001, ne peut se voir reprocher un manquement à son obligation de conseil.

S'agissant de l'assainissement :

Le notaire ayant signalé dans son acte l'absence de conformité du système d'assainissement aux règles de déversement des eaux usées et pluviales, une somme de 1430 € a été consignée par les vendeurs et séquestrée afin de garantir à l'acquéreur la conformité complète et définitive de l'immeuble aux règles d'hygiène de la commune et de lui permettre de payer la facture relative aux travaux nécessaires à cette mise aux normes, dont l'évaluation se fondait sur un devis de Monsieur O....

Or, il s'est avéré en cours d'expertise que les services compétents ont vérifié les réseaux après réalisation des travaux objets du devis et qu'ils ont exigé le rehaussement de la trappe d'accès d'un regard, ce qui a coûté 295, 40 €.

Le rapport de visite annexé au rapport d'expertise faisant clairement apparaître qu'en l'absence de réalisation de cet ouvrage le système demeurait non conforme, les venderesses tenues de délivrer aux acheteurs un bien conforme aux normes, ce à quoi elles se sont contractuellement engagées, devront prendre en charge le coût des travaux supplémentaires nécessaires à la mise en conformité du réseau d'assainissement de la maison.

Le jugement sera donc également confirmé de ce chef.

Il sera également fait droit à la demande des époux X...tendant au paiement de la somme de 141, 86 € correspondant au coût de la vidange d'une fosse selon facture du 23 décembre 2002, produite au cours de l'expertise et mise par l'expert en relation avec la non-conformité du réseau d'assainissement.

La société LM Expertises, Madame G...et Maître Y...seront condamnés in solidum à payer aux époux X...une indemnité de 2 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au titre de leurs frais irrépétibles de première instance d'une part, d'appel d'autre part, l'équité commandant que les consorts A...soient dispensés de toute condamnation à ce titre tant en première instance qu'en appel.

Sur les demandes en garantie réciproques des responsables

La société LM Expertises demande la garantie de Madame G..., celle-ci demande la garantie de la société LM expertises et Maître Y...demande la garantie de la société LM expertises.

Eu égard à la gravité des fautes dont chacun des responsables s'est rendu coupable et qui ont été caractérisées ci-dessus, la charge définitive de l'indemnisation des époux X...s'agissant de leurs préjudices consécutifs à la présence de la mérule et de l'indemnité qui leur est due au titre de leurs frais irrépétibles sera supportée à hauteur de 50 % par la société LM expertises, 40 % par Madame G...et 10 % par Maître Y....

Sur la demande en paiement de la société LM Expertises

La cour n'est saisie d'aucun moyen à l'encontre du jugement en ce qu'il a condamné les consorts A...à payer à la société LM Expertises la somme de 160, 88 €.
Il sera donc confirmé de ce chef.

***

Il ne sera pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile au profit des consorts A..., ni de la société LM Expertises, de Madame G...et de Maître Y....

Aucune part des dépens ne sera mise à la charge des consorts A...qui ne succombent qu'en ce qu'ils sont condamnés à payer aux époux X...les sommes de 295, 40 € et 141, 86 €.

La société LM Expertises, Madame G...et Maître Y...seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel et en supporteront la charge définitive dans les proportions sus-dites.

- Par ces motifs :

LA COUR :

- Déclare irrecevables les conclusions déposées par Madame G...

le 17 janvier 2008

- Confirme le jugement en ce qu'il a

* Condamné les consorts A...à payer à la " société DETEX " la somme de 160, 68 €

* Dit que Maître Y...devra procéder à la déconsignation de la somme de 1 430 € au profit des époux X...

* Condamné les consorts A...à verser aux époux X...la somme de 295, 40 €

- Y ajoutant

-Condamne in solidum Mesdames Michelle, Claude, Danièle et Josette A...à payer à Monsieur Marcellin X...et Madame Marie-Hélène Z...la somme 141, 86 €

- L'infirme pour le surplus

-Statuant à nouveau des chefs infirmés

-Condamne in solidum la société LM Expertises, Madame Martine G...et Maître Henri Y...à payer à Monsieur Marcellin X...et Madame Marie-Hélène Z...les sommes de 34 432, 14 €, 15 245 €, 58, 58 € et 1 000 €

- Dit que dans leurs rapports entre eux la charge définitive de cette indemnisation sera supportée à hauteur de 50 % par la société LM expertises, 40 % par Madame G...et 10 % par Maître Y...et que les parties se doivent réciproquement garantie dans ces proportions

-Rejette toutes demandes plus amples ou contraires

-Condamne in solidum la société LM Expertises, Madame Martine G...et Maître Henri Y...à payer à Monsieur Marcellin X...et Madame Marie-Hélène Z...la somme de 2 000 € au titre de leurs frais irrépétibles de première instance et celle de 2 000 € au titre de leurs frais irrépétibles d'appel

-Les condamne in solidum aux dépens de première instance qui comprendront ceux des instances en référé et le coût de l'expertise et d'appel et qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile

-Dit que dans leurs rapports entre eux la charge définitive de ces condamnations sera supportée à hauteur de 50 % par la société LM expertises, 40 % par Madame G...et 10 % par Maître Y...et que les parties se doivent réciproquement garantie dans ces proportions.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 06/04251
Date de la décision : 20/03/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Saint-Nazaire


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-03-20;06.04251 ?
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