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05/03/2008 | FRANCE | N°06/06029

France | France, Cour d'appel de Rennes, 05 mars 2008, 06/06029


Septième Chambre





ARRÊT No



R.G : 06/06029













S.A. AON CONSEIL ET COURTAGE



C/



S.A.R.L. LES CHARMILLES

S.A. BATIROC PAYS DE LOIRE

S.A. AGF IART

















Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée

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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 05 MARS 2008





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président,

Monsieur Patrick GARREC, Conseiller,

Madame Agnès LAFAY, Conseiller,



GREFFIER :



Catherine VILLENEUVE, lo...

Septième Chambre

ARRÊT No

R.G : 06/06029

S.A. AON CONSEIL ET COURTAGE

C/

S.A.R.L. LES CHARMILLES

S.A. BATIROC PAYS DE LOIRE

S.A. AGF IART

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 05 MARS 2008

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président,

Monsieur Patrick GARREC, Conseiller,

Madame Agnès LAFAY, Conseiller,

GREFFIER :

Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 10 Janvier 2008

devant Madame LAURENT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Madame LAURENT, Conseiller, à l'audience publique du 05 Mars 2008, date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTE :

S.A. AON CONSEIL ET COURTAGE

45 rue Kléber

92697 LEVALLOIS-PERRET

représentée par la SCP GAUTIER-LHERMITTE, avoués

assistée de la SCP RANCON CAVENEL & ASSOCIÉS, avocats

INTIMÉES :

S.A.R.L. LES CHARMILLES

Z.A. de la Gare

49360 MAULEVRIER

représentée par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués

assistée de Me Lionel MAISON, avocat

S.A. BATIROC PAYS DE LOIRE

13 rue La Pérouse

44000 NANTES

représentée par la SCP JACQUELINE BREBION ET JEAN-DAVID CHAUDET, avoués

assistée de Me BLANCHE, avocat

----

S.A. AGF IART

87 rue de Richelieu

75002 PARIS

représentée par la SCP BAZILLE J.J. & GENICON S., avoués

assistée de Me Carole SAVARY, avocat

*********************

La SA Batiroc Pays de la Loire (Batiroc) qui exerce une activité de crédit-bail immobilier a conclu en 1993 avec la SARL Les charmilles une opération de crédit-bail portant sur l'acquisition d'un terrain à Maleuvrier (Maine et Loir) et la construction d'un bâtiment à usage d'abattoir. Une extension a été financée de la même façon en 1995.

Les contrats de crédit-bail immobilier stipulent que le bailleur assurera les biens immobiliers en valeur à neuf notamment contre les risques d'incendie, paiera la prime afférente qui sera ensuite refacturée au preneur, mandate le preneur pour procéder à la signature du contrat couvrant le bâtiment, le preneur entérinant ainsi les déclarations constitutives du risque figurant dans le contrat. Le preneur doit assurer ses risques propres.

La société Batiroc a souscrit par l'intermédiaire d'un courtier, le cabinet SGAP aux droits de qui vient la SA AON conseil et courtage (AON), une police d'assurance collective "tous risques sauf" (TRS) auprès d'une coassurance dont la cie AGF assurances IART est l'apériteur.

La société Les charmilles a adhéré à ce contrat.

Le courtier a reçu mission de la mise en place des assurances garantissant le patrimoine immobilier de Batiroc et des relations avec les crédits-preneurs.

En vue du renouvellement des conventions d'assurance de la société Batiroc à échéance du 28 février 2003 le cabinet AON a négocié avec les assureurs qui souhaitaient abandonner la garantie de certains risques sensibles dont font partie les abattoirs.

C'est dans ces conditions que les assureurs ont continué à assurer ces risques sensibles déjà en portefeuille moyennant une prime augmentée de 40% et une franchise portée de 1 500 à 80 000 euros.

Le 1er juin 2003 les bâtiments occupés la SARL Les charmilles ont été ravagés par un incendie. La cie AGF a refusé de prendre en charge le paiement d'une année de loyer et a appliqué au règlement du sinistre la franchise de 80 000 euros.

Le preneur a contesté cette décision.

Par jugement du 12 juillet 2006 le tribunal de grande instance de Nantes a notamment condamné in solidum le courtier et le crédit-bailleur à payer au preneur la somme de 78 500 euros représentant la différence de franchise.

Pour se déterminer ainsi le premier juge a constaté que le crédit-preneur n'a été informé de l'augmentation très substantielle de la franchise que par lettre du 7 mai 2003 envoyée par AON précédée d'une lettre de Batiroc du 22 avril 2003 soit postérieurement à l'échéance ; que si la société Batiroc peut se voir opposer cette franchise puisqu'elle en était informée dès janvier et a signé un avenant rétroactif au 28 février 2003 en septembre 2003, le crédit-preneur ne le peut ; que le bailleur n'a pas défendu les intérêts de son preneur et le courtier a manqué à son obligation de conseil.

La cie AGF, condamnée à payer à la SARL Les charmilles la somme de 108 823,80 euros représentant une année de loyer, ne conteste pas cette décision en appel.

La société AON a fait appel du jugement.Elle fait valoir qu'elle n'a commis aucune faute contractuelle à l'égard de son client la société Batiroc qui a été tenu informée des conditions du renouvellement rappelées par courrier du 7 janvier 2003 et qui les a acceptées comme en témoigne la lettre qu'elle a envoyée à son preneur le 22 avril 2003.

Elle rappelle que le contrat est conclu sous forme d'une police à adhésion automatique par avis d'aliment, ces avis d'aliment ayant pour objet d'enregistrer toute nouvelle incorporation, toute modification, tout retrait et toute perception des primes au comptant.

Elle soutient que ses seules obligations à l'égard des crédits-preneurs consistent en relations commerciales dans la gestion de leur adhésion à la police, envoi et réception des avis d'aliment, suivi des sinistres ; que le crédit-preneur n'est pas souscripteur ni assuré et qu'il n'a pas le choix de ne pas adhérer à la police ni de refuser les modifications du contrat d'assurance ; qu'elle n'était pas tenue de l'informer avant l'échéance de ces modifications.

Elle estime qu'elle a rempli ses obligations contractuelles et n'a pas commis de faute quasi-délictuelle à l'égard de la société Les charmilles.

En tout état de cause elle rappelle que le bailleur avait accepté, par dérogation au contrat de crédit-bail immobilier, que la société Les charmilles recherche un autre contrat d'assurance ce qu'elle n'a pas fait, excluant un lien de causalité entre une faute prétendue et le dommage.

Enfin elle conteste qu'il y ait solidarité.

La société Batiroc expose que l'assurance est une assurance pour compte prise tant dans son propre intérêt que dans celui du crédit-preneur qui a reçu mandat de procéder à la signature de l'avis d'aliment de la police et de veiller à sa bonne exécution.

Elle soutient que la modification de franchise n'est pas applicable à la période contractuelle du 28 février 2003 au 28 février 2004 puisque l'assureur n'avait pas donné son accord qui lui était demandé par AON le 23 janvier 2003 ; qu'en outre seul l'avis d'aliment adressé au preneur dans les délais utiles, soit avant échéance, est susceptible de modifier la convention ; que l'avis d'aliment intervenu le 7 mai 2003 n'a pu avoir d'effet, aux termes du contrat, qu'à la date d'échéance annuelle qui suit cette modification soit à compter du 28 février 2004 et n'est pas applicable au sinistre survenu à la société Les charmilles.

Elle soutient qu'elle n'a commis aucune faute dès lors qu'elle s'est assurée de l'information du crédit-preneur par le courtier et que l'avenant signé en septembre 2003 ne comportait pas la nouvelle franchise et était nécessaire pour régler le sinistre.

Subsidiairement elle demande la garantie d'AGF et d'AON, la première pour avoir empêché la résiliation faute d'avoir émis un avis d'aliment trois mois avant l'échéance, la seconde pour avoir donné une information tardive à la société Les charmilles.

Elle fait en outre valoir que le crédit-preneur est resté passif alors qu'il avait un mandat de représentation.

La cie AGF rappelle que la société Batiroc a accepté sans réserve les indemnités d'assurance qui déduisaient la franchise de 80 000 euros. Elle soutient que le contrat n'a pas été résilié en raison des accords intervenus avec AON dont témoigne la lettre du 23 janvier 2003 qui constitue un avenant.

La SARL Les charmilles fait valoir que son information très tardive ne lui a laissé aucune alternative ; que le contrat en ce qui la concerne s'est reconduit tacitement aux conditions antérieures ; qu'il y a eu connivence et passivité de Batiroc et d'AON.

A titre subsidiaire elle demande la condamnation de la cie AGF qui n'a pas permis de résilier le contrat avant l'expiration du délai de trois mois antérieur à la date d'échéance.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens, la cour renvoie au jugement attaqué et aux dernières écritures déposées le 3 janvier 2008 pour AON, le 11 décembre 2007 pour Batiroc, le 20 avril 2007 pour la cie AGF et le 27 octobre 2007 pour la SARL Les charmilles.

SUR CE

Considérant que le contrat d'assurance est un contrat consensuel ; que l'ensemble des couvertures d'assurance de la société Batiroc (assurances construction, tous risques sauf et "umbrella") était renégocié chaque année par le courtier ; que la société Batiroc était nécessairement informée des discussions avec les assureurs compte tenu de l'intérêt financier qui s'y attachait ;

Que, par lettre du 7 janvier 2003 faisant suite à une réunion dans les locaux de Batiroc concernant ses contrats cadre, AON lui confirmait les conditions 2003 et lui joignait deux modèles de lettre qu'elle proposait à l'attention des preneurs ; que Batiroc n'a pas protesté et ne se trouvait manifestement pas en état de négocier de meilleures conditions ;

Que la lettre envoyée par AON à AGF le 23 janvier 2003 ne démontre pas que l'assureur n'avait pas agréé le projet qui lui était soumis par le courtier puisqu'elle se réfère à leurs différents échanges et reprend les conditions 2003 indiquées le 7 janvier à Batiroc ;

Qu'en définitive les conditions négociées par AON et acceptées par Batiroc ont été adoptées ;

Qu'au demeurant Batiroc était tellement convaincue qu'elles s'appliquaient à l'échéance du 28 février 2003 que, dans la lettre qu'elle a adressée à son preneur le 22 avril 2003, elle indiquait "notre pool d'assureurs pour renouveler votre adhésion, va vous appliquer une majoration tarifaire hors indice FFB et une franchise de 80 000 euros sur la garantie incendie-explosion-chute de la foudre ;

Qu'en outre elle a accepté sans réserve l'indemnité d'assurance faisant application de la franchise de 80 000 euros que lui a versée l'assureur ;

Que c'est à bon droit que le premier juge a dit que la modification est applicable à Batiroc ;

Considérant que le contrat de crédit-bail immobilier ne permet au preneur que d'adhérer à l'assurance souscrite par son bailleur ; qu'il n'a pouvoir ni de négocier le contrat d'assurance ni de décider de changer d'assureur ;

Que, dès lors que le souscripteur a accepté les conditions de l'assurance, le preneur y adhère nécessairement, son rôle mineur consistant à signer le contrat du bâtiment, entérinant ainsi les déclarations constitutives du risque et à recevoir les avis d'aliments, la prime étant payée par le bailleur qui la lui refacture ;

Que pour les mêmes raisons que ci-dessus les modifications des conditions d'assurance sont opposables au preneur envers lequel le courtier n'a aucun devoir de conseil particulier à défaut pour celui-là de pouvoir prendre une décision quelconque ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la coassurance souhaitait se débarrasser de divers risques dont ceux exploités dans le bâtiment où exerçait le preneur ; qu'il n'est pas prétendu que Batiroc ou son courtier ont été négligents dans la recherche de la meilleure couverture possible qui était de l'intérêt commun du bailleur et du preneur ; qu'ils ont réussi à garder les risques déjà en portefeuille au 31 décembre 2002 assurés auprès de l'assurance groupe, les nouveaux risques "sensibles" en étant exclus ;

Que Batiroc, "viscéralement attachée à une bonne couverture d'assurance pour ses bâtiments", a accepté selon lettre du 22 avril 2003, par dérogation au contrat de crédit-bail immobilier, de souscrire directement auprès d'une compagnie du choix de son preneur un contrat TRS offrant des garanties similaires à celles de son pool d'assureurs habituels et d'un coût significativement inférieur ;

Que la SARL Les charmilles n'a pas recherché ou n'a pas trouvé d'assureur qui prenne le risque en charge ;

Considérant qu'aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de Batiroc ni d'AON à l'encontre de la SARL Les charmilles ;

Considérant qu'il est évident que la lettre du 7 janvier 2003 d'AON à Batiroc ne peut être que la suite de pourparlers entamés de longue date avec la coassurance par le mandataire du souscripteur ; que celui-ci n'a à aucun moment manifesté sa volonté de rompre le contrat ;

Qu'il a été dit ci-dessus que le preneur n'avait aucune faculté de négociation avec l'assureur ; qu'il ne peut donc lui reprocher de ne pas avoir finalisé cet accord avant la date limite de résiliation puisque le souscripteur continuait à négocier et que ces négociations ont abouti avant la date d'échéance comme il résulte des lettres des 7 et 23 janvier 2003 ;

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement en audience publique,

Infirmant le jugement, déboute la SARL Les charmilles de sa demande au titre de la franchise.

Vu l'article 700 du code de procédure civile dit n'y avoir lieu à indemnité de procédure.

Condamne la SARL Les Charmilles aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 06/06029
Date de la décision : 05/03/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Nantes


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-03-05;06.06029 ?
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