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21/02/2008 | FRANCE | N°07/04484

France | France, Cour d'appel de Rennes, 21 février 2008, 07/04484


Première Chambre B





ARRÊT No



R.G : 07/04484













S.A. CUMMINS FRANCE

Société ARCOMA

M. Jean-Jacques X...




C/



Société ARCOMA

M. Jean-Jacques X...


S.A. CUMMINS FRANCE

S.A. CLERIVET MARINE

















Infirme la décision déférée















Copie exécutoire délivrée

le :



à :




r>POURVOI B 0814845 du 14/05/2008 (nos réf CA RENNES : pourvoi 32/2008 B1)RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 21 FEVRIER 2008





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Madame Françoise SIMONNOT, Président,

Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Conseiller,

Madame Véro...

Première Chambre B

ARRÊT No

R.G : 07/04484

S.A. CUMMINS FRANCE

Société ARCOMA

M. Jean-Jacques X...

C/

Société ARCOMA

M. Jean-Jacques X...

S.A. CUMMINS FRANCE

S.A. CLERIVET MARINE

Infirme la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

POURVOI B 0814845 du 14/05/2008 (nos réf CA RENNES : pourvoi 32/2008 B1)RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 21 FEVRIER 2008

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Françoise SIMONNOT, Président,

Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Conseiller,

Madame Véronique BOISSELET, Conseiller,

GREFFIER :

Patricia Y..., lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Janvier 2008, Madame Françoise SIMONNOT, Président, entendue en son rapport.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 21 Février 2008 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTES & INTIMEES :

S.A. CUMMINS FRANCE

...

69680 CHASSIEU

représentée par la SCP D'ABOVILLE DE MONCUIT SAINT-HILAIRE & LE CALLONNEC, avoués

assistée de la SCP PIQUET-GAUTHIER - GUTTON - ROUME, avocats

La copropriété du navire "ESPADON BLEU" composée de :

1/ La société ARCOMA, Société Coopérative Maritime à responsabilité limitée et à capital variable, prise en sa qualité de copropriétaire du navire "ESPADON BLEU", sise Quai des Servannais à SAINT MALO, dont le siège social est sis :

7 rue Trichet

35400 SAINT MALO

représentée par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués

assistée de la SCP KERMARREC - MOALIC, avocats

2/ Monsieur Jean-Jacques X..., pris en sa qualité d'ancien copropriétaire du navire "ESPADON BLEU"

...

35400 SAINT MALO

représenté par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués

assisté de la SCP KERMARREC - MOALIC, avocats

INTIMÉES :

La copropriété du navire "ESPADON BLEU" composée de :

1/ La société ARCOMA, Société Coopérative Maritime à responsabilité limitée et à capital variable, prise en sa qualité de copropriétaire du navire "ESPADON BLEU", sise Quai des Servannais à SAINT MALO, dont le siège social est sis :

...

35400 SAINT MALO

représentée par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués

assistée de la SCP KERMARREC - MOALIC, avocats

2/ Monsieur Jean-Jacques X..., pris en sa qualité d'ancien copropriétaire du navire "ESPADON BLEU"

...

35400 SAINT MALO

représenté par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués

assisté de la SCP KERMARREC - MOALIC, avocats

(Intimée & Appelante)

S.A. CUMMINS FRANCE

...

69680 CHASSIEU

représentée par la SCP D'ABOVILLE DE MONCUIT SAINT-HILAIRE & LE CALLONNEC, avoués

assistée de la SCP PIQUET-GAUTHIER - GUTTON - ROUME, avocats

(Intimée & Appelante)

S.A. CLERIVET MARINE

ZA de Langourian

22430 ERQUY

représentée par la SCP JACQUELINE BREBION ET JEAN-DAVID CHAUDET, avoués

assistée de Me Z..., avocat

Se plaignant d'anomalies de fonctionnement du moteur de marque Cummins installé par la société Clerivet Marine à bord de leur chalutier "Espadon Bleu" la société Arcoma et monsieur X... ont fait assigner devant le juge des référés commerciaux de Saint-Malo la société Cummins Diesel et ont obtenu, par ordonnance du 27 février 2001, la désignation d'un expert en la personne de monsieur A..., ordonnance rendue commune à la société Clerivet Marine par ordonnance du 16 juillet suivant.

Monsieur A... a déposé son rapport le 14 mars 2006.

Le tribunal de commerce de Saint-Malo, qui avait été saisi par la société Arcoma et par monsieur X... par assignations des 7 et 11 juillet 2006, par jugement du 22 mai 2007, a :

- homologué le rapport d'expertise en ce qu'il a conclu à l'inadaptation de l'installation de la société Cummins au navire "Espadon Bleu",

- mis hors de cause la société Clerivet Marine,

- condamné la société Cummins à payer à la société Arcoma et à monsieur X... :

- 32 420 € en réparation des jours perdus,

- 17 660 € au titre de la perte en valeur moyenne des marées,

lesdites sommes avec intérêts de droit à compter de l'assignation au fond,

- condamné la société Cummins à payer à la société Arcoma et à monsieur X... 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

La société Arcoma et monsieur X... ont relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 16 juillet 2007 et inscrite au rôle général sous le numéro 07/4484 ; la société Cummins France a elle aussi relevé appel du même jugement par déclaration du 23 juillet 2007 enrôlée sous le numéro 07/4685.

Les deux procédures ont été jointes le 27 septembre 2007.

La société Arcoma et monsieur X..., aux termes de leurs écritures signifiées le 9 janvier 2008 auxquelles il est renvoyé pour exposé de leurs moyens, sur le fondement de la garantie des vices cachés, sollicitent la condamnation in solidum des sociétés Cummins France et Clérivet Marine à leur payer :

- 40 000 € au titre de la baisse du prix de vente du moteur,

- 217 029 € en réparation des préjudices indirects,

lesdites sommes avec intérêts capitalisés à compter du 17 janvier 2001, date de l'assignation en référé-expertise,

- 10 000 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance,

- 10 000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Aux termes de ses écritures signifiées le 17 décembre 2007auxquelles il est renvoyé pour exposé de ses moyens, la société Cummins France conclut à l'irrecevabilité de la demande, et en tout état de cause, sollicite le rejet des demandes de la société Arcoma et de monsieur X... et la désignation, si besoin est, d'un nouvel expert. Elle sollicite 10 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société Clerivet Marine, aux termes de ses écritures signifiées le 19 décembre 2007auxquelles il est renvoyé pour exposé de ses moyens, conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il l'a mise hors de cause et, subsidiairement, demande à être garantie par la société Cummins France. Elle sollicite 5 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 14 janvier 2008.

DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DÉCISION

a) sur la recevabilité

Que la société Cummins France soutient que les demandes de la société Arcoma et de monsieur X... sont irrecevables, faute par eux de justifier de leur qualité de copropriétaires du navire "Espadon Bleu" et de leur intérêt à agir ;

Que la société Arcoma et monsieur X... établissent par la production d'un acte de francisation qu'ils sont devenus copropriétaires du chalutier le 2 décembre 1997 ;

Qu'ils ont qualité à agir en réparation des préjudices causés par des désordres survenus en 1999 et 2000 alors qu'ils étaient copropriétaires du navire ;

Que leur action est en conséquence recevable ;

b) sur la demande de nullité du rapport d'expertise

Que la société Cummins France, à l'appui de sa demande d'annulation du rapport d'expertise, se plaint de la durée des opérations et du dépôt d'un rapport non précédé de notes techniques ou de pré-rapport ;

Mais considérant que, si la cour ne peut que regretter la longueur de la durée des opérations d'expertise, le laps de temps qui s'est écoulé entre la désignation de l'expert et le dépôt du rapport ne constitue pas en soi une cause d'annulation ;

Que le défaut d'envoi par l'expert de notes techniques ou de pré-rapport ne constitue pas davantage une cause d'annulation du rapport d'expertise ;

Que la demande d'annulation du rapport d'expertise est écartée ;

c) au fond

Que l'expert a exposé :

- qu'entre le 8 juin et le 8 juillet 1999, la société Clerivet Marine avait installé à bord du navire "Espadon Bleu" un moteur diesel de marque Cummins, doté d'un module électronique de commande et de gestion de l'injection appelé "Centry", d'une pompe à injection Cummins PT et d'un boîtier de réglage d'avance STC,

- qu'à partir du 9 juillet 1999, des incidents se manifestant par un déséquilibre dans les pressions de turbo, la présence de fumées noires et une instabilité sont apparus, suscitant une intervention de la société Clerivet Marine le 19 juillet suivant, puis une intervention de la société Mecatlantic, qui avait fourni le moteur à la société Clerivet Marine, le 31 août suivant pour modifier les réglages de l'injection,

- qu'après une amélioration passagère, les instabilités du moteur étaient réapparues dès le 11 septembre 1999 et ont persisté malgré des interventions de la société Clerivet Marine les 12 et 13 octobre 1999 pour réglage des soupapes et injecteurs et de la société Mecatlantic le 2 novembre suivant,

- que, début janvier 2000, la société Clerivet Marine était intervenue sur le module de contrôle d'avance STC sans mettre un terme aux problèmes d'instabilité et de manque de puissance du moteur,

- que, finalement, il avait été décidé de mettre en place une pompe à régulation isochrone à régulation électronique EFC en remplacement du système "Centry", ce qui fut fait le 4 avril 2000,

- qu'à partir de début mai 2000, les problèmes d'instabilité étaient réapparus à nouveau et avaient donné lieu à plusieurs interventions,

- que, le 16 juillet 2000, une pompe classique à commande mécanique avait été installée,

- que ce type de régulation ne correspondant pas aux habitudes de pêche du patron, la pompe isochrone à régulation électronique était remise en place depuis le 16 octobre 2000 et que depuis lors, le moteur donne apparemment satisfaction ;

Que l'expert a expliqué que le système de régulation électronique constituait une amélioration par rapport au système classique mais que la moindre déficience de ce nouveau système électronique pouvait entraîner des dysfonctionnements graves et imprévisibles, la marche du moteur lui étant totalement liée ;

Qu'il a précisé que les éventuelles déficiences d'un système de régulation électronique ne résultaient pas généralement de la défectuosité de ses composants, ni même de sa conception, mais de la stabilité de son alimentation et de la qualité de transmission des informations des capteurs vers le module, transmission qui peut être perturbée par l'environnement au niveau de la connectique (vibrations, températures, courants parasites induits, etc...) ;

Qu'il a relaté avoir constaté lors de son examen du système câblé de démonstration "Centry" que ni le faisceau ni ses connexions n'étaient blindés ;

Qu'en conséquence, l'expert a attribué les dysfonctionnements du moteur à des perturbations du système de régulation électronique ensuite de la dégradation de la qualité des connexions et/ou de l'alimentation du module ECM, puis du module EFC, dégradation résultant d'une inadaptation des faisceaux de câblage fournis par la société Cummins France, ainsi qu'au positionnement des modules électroniques dans un environnement particulièrement agressif inhérent au fonctionnement d'un moteur diesel marin ;

Qu'il ne s'agit donc pas d'une inadaptation du système aux besoins de l'armement qui a fait du moteur un usage conforme à celui en vu duquel il était commercialisé, à savoir la pêche au large, mais d'un vice caché antérieur à la vente d'une gravité telle que la société Arcoma et monsieur X... ne l'auraient pas acquis ou en auraient donné un moindre prix s'ils l'avaient connu ; que la société Clerivet Marine, vendeur immédiat, leur doit sa garantie ;

Que la société Arcoma et monsieur X... jouissant de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à la société Clerivet Marine et disposant contre la société Cummins France, vendeur originaire et constructeur du moteur, d'une action directe contractuelle, cette société leur doit également la garantie des vices cachés, les désordres étant inhérents au système ;

Que la société Clerivet Marine et la société Cummins France sont toutes deux des vendeurs professionnels ; qu'en cette qualité, en application de l'article 1645 du code civil, elles sont réputées connaître les vices et doivent réparer toutes les conséquences dommageables occasionnées par les désordres constatés ;

Qu'en ce qui concerne les jours de mer perdus en raison de l'immobilisation du chalutier pour tenter de remédier aux dysfonctionnements, l'expert a retenu 20 jours d'immobilisation ;

Que, se fondant sur un rapport d'expertise établi par l'expert-comptable de la société Arcoma prenant comme élément de comparaison les chiffres d'affaires réalisés par six navires de type et longueur similaires et pratiquant la même pêche, il a évalué, déduction faite des frais non exposés pendant les immobilisations, un manque à gagner journalier de 2 021,47 €, d'où une perte pour 20 jours d'exploitation de 40 429 €, avec 10 % en plus ou en moins pour tenir compte du rôle de l'équipage dans la réalisation des performances ;

Que la méthode adoptée par l'expert permet de faire une juste évaluation du préjudice subi par l'armement dans des conditions raisonnables d'objectivité ;

Qu'il convient en conséquence de condamner in solidum la société Clerivet Marine et la société Cummins France à payer à la société Arcoma et à monsieur X... 40 429 €, la société Clerivet Marine étant entièrement garantie par la société Cummins France dès lors que les désordres ne sont pas imputables à une mauvaise installation ou à des réparations défectueuses de sa part ;

Que les défauts du moteur ayant diminué le rendement du bateau, en ce qui concerne la perte en valeur moyenne des marées, selon la même méthode que la cour approuve, l'expert aboutit à un préjudice de 176 600 €, déduction faite des coûts variables non exposés ;

Qu'il convient de condamner in solidum la société Clerivet Marine et la société Cummins France à payer à la société Arcoma et à monsieur X... 176 600 €, la société Clerivet Marine étant entièrement garantie par la société Cummins France ;

Que les dommages-intérêts ci-dessus alloués réparant intégralement le préjudice causé par les désordres du moteur, la demande de réduction du prix ne peut prospérer et sera rejetée ;

Qu'en application des dispositions de l'article 1153-1 du code civil qui permettent au juge de fixer le point de départ des intérêts à une date antérieure au jugement, les intérêts au taux légal sur les sommes ci-dessus allouées sont dus à compter du 11 juillet 2006, date de l'assignation introductive d'instance ;

Que les intérêts seront capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

Que la société Clerivet Marine et la société Cummins France seront condamnées in solidum à payer à la société Arcoma et à monsieur X... 6 000 € en indemnisation des frais irrépétibles de première instance et d'appel, la société Clerivet Marine étant entièrement garantie par la société Cummins France ;

Qu'il n'est pas contraire à l'équité de laisser à la charge de la société Clerivet Marine la charge de ses frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

Déclare la société Arcoma et monsieur X... recevables à agir,

Rejette la demande d'annulation du rapport d'expertise,

Condamne in solidum la société Clerivet Marine et la société Cummins France, la société Clerivet Marine étant entièrement garantie par la société Cummins France, à payer à la société Arcoma et à monsieur X... :

- 40 429 € au titre des jours de mer perdus,

- 176 600 € au titre de la perte en valeur moyenne des marées,

lesdites sommes avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2006 et capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- 6 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne in solidum la société Clerivet Marine et la société Cummins France, la société Clerivet Marine étant entièrement garantie par la société Cummins France, aux dépens de première instance incluant les frais de référé et d'expertise et d'appel et dit que ceux d'appel pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 07/04484
Date de la décision : 21/02/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Saint-Malo


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-02-21;07.04484 ?
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