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20/02/2008 | FRANCE | N°07/01489

France | France, Cour d'appel de Rennes, 20 février 2008, 07/01489


Septième Chambre




ARRÊT No


R. G : 07 / 01489












S. A. R. L. COMPAGNIE DU TOURISME ET DE LA PRESSE C. T. P.


C /


M. Patrice André X...

















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée














Copie exécutoire délivrée
le :


à :




RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 20 FEVRIER 2008




COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :


Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président,
Monsieur Patrick GARREC, Conseiller,
Madame Agnès LAFAY, Conseiller,


GREFFIER :


Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors...

Septième Chambre

ARRÊT No

R. G : 07 / 01489

S. A. R. L. COMPAGNIE DU TOURISME ET DE LA PRESSE C. T. P.

C /

M. Patrice André X...

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée
le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 20 FEVRIER 2008

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président,
Monsieur Patrick GARREC, Conseiller,
Madame Agnès LAFAY, Conseiller,

GREFFIER :

Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 17 Décembre 2007
devant Monsieur Patrick GARREC, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Patrick GARREC, Conseiller, à l'audience publique du 20 Février 2008, date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTE :

S. A. R. L. COMPAGNIE DU TOURISME ET DE LA PRESSE C. T. P.
13, rue Saint Etienne
89450 VEZELAY

représentée par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués
assistée de Me MARTY, avocat

INTIMÉ :

Monsieur Patrice André X...

...

91840 SOISY SUR ECOLE

représenté par la SCP JACQUELINE BREBION ET JEAN-DAVID CHAUDET, avoués
assisté de Me Catherine VERGNE, avocat

********************

I-CADRE DU LITIGE

A-OBJET

oAction engagée par M. Patrice X..., propriétaire des murs d'un local situé à LOCRONAN 1, rue SAINT MAURICE, composé d'un rez de chaussée de 60 m ² occupé par la COMPAGNIE DU TOURISME ET DE LA PRESSE (Société CTP) en vertu de " baux précaires " successifs, laquelle fait commerce d'ouvrages de presse, de librairie, d'édition, et vend des articles de bimbeloterie, bazar, confiserie, cadeau, souvenirs touristiques dans ce local depuis une première convention remontant à l'année 2000, contre ladite société CTP tenue pour un occupant sans droit ni titre du local, la dernière convention, dite BAIL PRECAIRE, signée le 9 Octobre 2003, lui donnant la jouissance des lieux pour une durée de 22 mois ayant expiré le 30 Septembre 2005.

o Action reconventionnelle de la Sté CTP qui, demeurée dans les lieux au delà du 30 Septembre 2005 sans être sommée de les abandonner avant la délivrance de deux commandements successifs visant cette fin à la date du 28 Octobre 2005 puis du 4 Novembre 2005, tend à s'opposer à cette prétention et à voir consacrer par le Juge saisi le plus compétent pour statuer sur cette revendication, qu'elle est désormais fondée à occuper les lieux dans le cadre d'un bail statutaire réglementé par le décret du 30 Septembre 1953
actuellement codifié (articles L 145-1 et suivants du Code de commerce), ce en application de l'article L 145-5 alinéa 2 dudit code.

Monsieur Patrice X... ayant saisi le Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE de sa demande tendant à voir constater que la Sté CTP était occupante sans droit ni titre des locaux, qu'elle devait en être expulsée et être condamnée à l'indemniser de cette occupation illicite à hauteur de 3 000 € par mois, celui-ci s'est déclaré incompétent pour connaître du litige qui lui était soumis aux termes d'un jugement en date du 27 Février 2006, jugement confirmé par arrêt de la Cour d'Appel de PARIS, actuellement définitif, du 28 Juin 2006 dans le cadre d'un contredit élevé par M. Patrice X....

Saisi en exécution du jugement confirmé qui le désignait comme territorialement compétent s'agissant d'un " local commercial relevant du louage d'immeuble ", le Tribunal d'instance de CHATEAULIN a tranché le litige au fond par le jugement actuellement soumis à la censure de la Cour.

Le litige, qui cesse d'avoir pour source principale la compétence de la juridiction saisie, n'en est pas moins influencé par cette discussion préalable puisque, contredit par la Société CTP, appelante, M. Patrice X... tient pour irrecevable la demande reconventionnelle de cette dernière et l'argumentation au fond qu'elle expose à son soutien car, selon sa thèse, elle heurte la chose définitivement jugée qui interdit de considérer, en substance, que la convention du 9 Octobre 2003 peut recevoir une qualification autre que celle retenue par la Cour de PARIS, savoir, à ses yeux, " un bail précaire " qui, arrivé à son terme, ne peut s'intégrer dans les dispositions statutaires évoquées par le décret de 1953 et ne peut non plus être tenu pour un bail dérogatoire censé permettre la mise en jeu du mécanisme légal inscrit dans les termes de l'article L 145-5 § 2 du Code de commerce.

Cette position, réfutée par la Sté CTP, donne lieu en conséquence à une discussion qui tend d'une part à définir ce qui a été jugé à ce jour, les décisions antérieures donnant lieu à interprétation, notamment de la part de la Sté CTP qui déclare cependant ne pas remettre en jeu la chose jugée en maintenant sa revendication à la consécration d'un bail commercial, d'autre part, à appréhender au fond la teneur et la légitimité des prétentions de la Sté CTP à l'existence d'un bail commercial soumis au statut.

Accessoirement, dans la mesure où l'existence de ce bail serait reconnue, les parties divergent encore sur le montant du nouveau loyer applicable et saisissent la Cour de leur différend persistant sur ce point.

B-DECISION DISCUTEE

Jugement du Juge du Tribunal d'Instance de CHATEAULIN en date du 15 Janvier 2007 qui a statué en ces termes :
" Constate que la Société CTP est occupant sans droit ni titre du local situé au rez de chaussée de l'immeuble sis 1, rue Saint Maurice à LOCRONAN appartenant à Monsieur X... Patrice,
-Dit que la société CTP devra rendre libre ce local de ses biens et de tous occupants de son chef dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision.
-Dit que passé ce délai, Monsieur X... Patrice pourra faire procéder à son expulsion des lieux occupés de ses biens et tous occupants de son chef, et que la société CTP sera tenue du paiement d'une astreinte de 150 euros par jour de retard pendant un délai de deux mois,
-Condamne la société CTP à régler à Monsieur X... Patrice la somme de 16 549 euros au titre des indemnités d'occupation échues entre le 1er Octobre 2005 et le 30 Novembre 2006 avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
-Condamne la société CTP à verser à Monsieur X... Patrice une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant de 1 273 euros à compter du 1er Décembre 2006,
-Condamne la société CTP à verser à Monsieur X... Patrice la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
-Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision.
-Condamne la société CTP aux entiers dépens. "

C-MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La Société CTP a relevé appel du jugement par déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 7 Mars 2007.

Elle a signifié, et déposé au greffe de la Cour le 3 Avril 2007, ses ultimes conclusions d'appelante accompagnées du visa d'une liste évoquant 7 documents communiqués et, au delà, de 4 bordereaux de pièces communiquées attestant la production, au total, de 23 documents, s'ajoutant à ceux initialement visés.

M. Patrice X... a signifié, et déposé au greffe de la Cour le 27 Juin 2007, ses ultimes conclusions en réplique accompagnées du visa d'une liste évoquant 13 documents produits en première instance,3 documents produits devant la Cour, et d'un bordereau attestant la transmission à l'avoué de la partie adverse des documents référencés 14 et 15.

II-MOTIFS DE LA DECISION

L'intimé soutient à tort au visa de l'article 564 du Code de Procédure Civile qu'un " argument nouveau " pourrait être déclaré irrecevable devant la Cour, ce que contredit formellement l'article 563 du Code de Procédure Civile : " Pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au Premier Juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves ".

Il importe moins, quant au point essentiel qui fait litige, de savoir quelles argumentations les parties ont échangées devant le Tribunal de grande instance puis devant la Cour d'Appel de PARIS que de savoir ce que cette dernière juridiction en a retenu pour asseoir la confirmation du jugement à l'issue d'un délibéré qui, forcément, l'obligeait à qualifier le contrat et à cerner l'objet essentiel du litige avant que d'en déduire la juridiction qui était compétente pour en connaître en raison de sa compétence générale ou d'attribution spécifique par référence aux paramètres juridiques susceptibles d'être développés par les parties.

A cet égard, il est donné acte aux parties, et, en particulier, à l'appelante de ce qu'elle déclare ne pas remettre en cause ce qui a été jugé par la Cour d'appel de PARIS : elle est légitime de ne pas s'engager dans cette voie dès lors que la présente Cour ne pourrait en tout état de cause réviser cette décision.

Il est rappelé que l'autorité de la chose jugée est forcément attachée, en toute logique juridique autant qu'en application de l'article 95 et / ou 77 du Code de Procédure Civile, selon que la discussion est portée devant la Cour d'appel et / ou devant le Juge du premier degré, à ce qui a nécessairement été jugé comme le préalable de fond déterminant la décision sur la compétence :
l'article 95 du Code de Procédure Civile le dispose expressément en ces termes " Lorsque le juge, en se prononçant sur la compétence, tranche la question de fond dont dépend cette compétence, sa décision a autorité de chose jugée sur cette question de fond ".

La Cour d'Appel n'est pas, contrairement au Premier Juge, tenue de statuer sur la question de fond et sur la compétence par des dispositions distinctes, l'article 77 du Code de Procédure Civile qui impose cette règle étant inséré dans un sous-titre 1 du chapitre relatif aux " exceptions d'incompétence ", tandis que l'article 95 relève du sous titre 5 qui évoque des
dispositions de procédure réputées communes aux deux degrés de juridiction :
il s'en déduit que ce qui a été jugé au fond par la Cour de PARIS se déduit des motifs de l'arrêt seulement mais que la disposition confirmant la compétence matérielle du Juge d'instance, donnée essentielle, a autorité de chose jugée à la mesure des motifs qui en sont le support nécessaire.

Il a d'ailleurs été jugé que l'arrêt rendu a, de ce chef, autorité de la chose jugée et peut être frappé de pourvoi en cassation (Cassation 3è chambre Civile 13 Novembre 1986-B. C. III no 158).

Or, sans entrer dans les méandres de la démonstration que propose l'appelante, non dénuée de pertinence au fond au demeurant, l'arrêt de la Cour d'Appel de PARIS n'appelle aucune interprétation faute d'être ambigu sur l'essentiel : il confirme la compétence du Juge d'instance, et celle du Juge de CHATEAULIN, lieu d'implantation de l'immeuble, précisément parce que, au fond, sans s'attarder sur les mérites de la demande reconventionnelle, il appréhende le litige comme un litige unique

* portant sur un " bail précaire ", exclu de droit et par la volonté des parties du champ d'application du décret de 1953, ce qui, selon cette analyse, donne toute sa valeur à l'objection tirée par M. X... de l'absolue incompétence du Juge d'instance pour connaître d'un contentieux qui reposerait sur la discussion de l'une ou l'autre des dispositions figurant actuellement dans les articles L 145-1 et suivants du Code de commerce

* portant, forcément (n'étant pas envisagé par la Cour de considérer que le " bail précaire " puisse, avant tout, n'être pas une convention de location mais une convention innommée) sur un louage d'immeuble puisqu'il ne peut s'agir, de par la volonté des parties, d'une location de locaux commerciaux (Cf. première conclusion), ce qui ôte cette fois toute pertinence à l'objection tirée de l'éventuelle compétence du Tribunal de Grande Instance pour apprécier si une convention d'occupation précaire, qui pourrait ne pas être tenue pour un bail, a pu, se perpétuant, entrer dans le champ d'application du décret, notamment en vertu de la règle posée par l'article L 145-5 § 2 du Code de Commerce.

Quoiqu'il en soit du bien fondé de cette approche des faits et conventions, elle comporte sa conclusion, claire, incontournable et exclusive : le Juge d'instance n'a pu être désigné compétent pour connaître du litige que parce que celui-ci portait sur les conséquences de l'expiration d'une convention de " louage d'immeuble ressortant de la compétence du Tribunal d'instance " (arrêt, page 2 in fine) et d'aucune autre sorte d'engagement synallagmatique.

Sur ce constat, il ne saurait être entré dans la discussion que propose
l'appelante tendant, alors qu'elle reconnaît que seule a été retenue par la Cour de PARIS la qualification " Louage d'immeuble ", à remettre en cause subrepticement cette conclusion en suggérant que le Juge aurait, ce qui n'était à l'évidence pas du tout son intention, implicitement renvoyé les parties à s'expliquer sur la base d'un " louage d'immeuble commercial " relevant de la qualification " bail dérogatoire ".

C'est clairement, dans les motifs de l'arrêt, un litige ayant pour objet exclusif un " louage d'immeuble " et dans la mesure où c'est un louage d'immeuble, où l'objet du litige est considéré lui-même, en toutes ses composantes, comme un litige excluant la discussion, sous cette qualification, des dispositions de l'un ou l'autre des articles du Code de Commerce référencés L 141-1 et suivants, c'est à bon droit que le Premier Juge a statué comme il l'a fait au principal en ignorant la revendication de l'appelante que la loi lui interdit de connaître, et en prenant acte d'une occupation sans droit ni titre, patente depuis le 1er Octobre 2005.

Le jugement est donc confirmé en sa disposition principale ordonnant la libération des locaux sous astreinte, laquelle sera confirmée en son montant, en sa durée comme en ses modalités de liquidation, dont la Cour n'entend pas se réserver la connaissance en application de l'article 35 de la loi du 9 Juillet 1991, la demande de l'intimé étant de ce chef écartée.

Le jugement est réformé en ce qu'il fixe à 1273 € le montant de l'indemnité d'occupation, laquelle peut être fixée à 1 353 € pour tenir compte, ce qui est légitime, en particulier dans le cadre du maintien prolongé
dans les lieux d'un occupant sans titre, des charges liées à cette occupation (80 €).

L'intimé n'explicitant pas les modalités de calcul des sommes revendiquées à ce titre, telles qu'arrêtées, selon ses dires, au 30 Juin 2007, cette demande, qui double de fait la précédente, sera écartée comme propre à contredire la portée de celle-ci.

Perdant sur son recours, la Société CTP est condamnée à payer à
M. Patrice X... 1 200 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile et déboutée de sa propre demande ayant le même fondement.

III-DECISION

La Cour,

-Réforme le jugement déféré en ce qu'il condamne la Société CTP à payer à Monsieur Patrice X... la somme de 16 549 Euros au titre des indemnités d'occupation échues entre le 1er Octobre 2005 et le 30 Novembre 2006, outre les intérêts au taux légal et une indemnité de 1 273 Euros par mois à titre d'indemnité d'occupation.

-Statuant de nouveau de ces chefs,

-Condamne la Société COMPAGNIE DU TOURISME ET DE LA PRESSE CTP à payer à Monsieur Patrice X... une indemnité d'occupation de 1 353 Euros à compter du 1er Octobre 2005 jusqu'à libération complète des locaux.

-Confirme le jugement en ses autres dispositions.

-Dit toutefois que la signification du présent arrêt constituera le point de départ du délai de 2 mois imparti à la Société CTP pour libérer les lieux.

-Ajoutant, condamne la Société COMPAGNIE DU TOURISME ET DE LA PRESSE à payer à Monsieur Patrice X... 1 200 Euros au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de la procédure d'appel.

-La déboute de sa propre demande ayant le même fondement.

-La condamne aux dépens d'appel ; autorise la S. C. P. BREBION-CHAUDET à les recouvrer par application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 07/01489
Date de la décision : 20/02/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Châteaulin


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-02-20;07.01489 ?
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