Cinquième Chamb Prud'Hom
ARRÊT No43
R.G : 06/07961
S.C.P. BERNARD X...
C/
Mme Clarisse Y...
Me Nicole Z...
CENTRE DE GESTION ET D'ETUDES A.G.S. RENNES
POURVOI No 19/08 DU 21.03.08
Réf Cour de Cassation:
S 0841401
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 22 JANVIER 2008
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Louis-Marc PLOUX, Président de Chambre,
Madame Simone CITRAY, Conseiller,
Madame Catherine LEGEARD, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Guyonne A..., lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 23 Octobre 2007
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé par l'un des magistrats ayant participé au délibéré, à l'audience publique du 22 Janvier 2008; date indiquée à l'issue des débats: 04 décembre 2007.
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APPELANTE :
S.C.P. BERNARD X...,
représentée par son gérant Maître Bernard X....
...
29600 MORLAIX
représentée par Me Jean-Yves FAGON, avocat au barreau de MORLAIX
INTIMES :
Madame Clarisse Y...
...
22200 TREGONNEAU
représentée par Me Florence RICHEFOU, avocat au barreau de SAINT BRIEUC
Maître Nicole Z..., ès qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SCP X....
Ledit mandataire demeurant ...
CS 71937
29603 BREST CEDEX
non comparante bien que régulièrement convoquée;
INTERVENANT:
CENTRE DE GESTION ET D'ETUDES A.G.S. RENNES
4 cours Raphaël Binet
Immeuble Le Magister
35069 RENNES CEDEX
représenté par Me Benjamine FAUGERE-RECIPON, avocat au barreau de RENNES substitué par Me Marie-Noëlle B..., avocat au barreau de RENNES
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Par acte du 7 décembre 2006, Maître B X... gérant de la SCP X... interjetait appel d'un jugement rendu le 23 novembre 2006 par le Conseil de Prud'hommes de Guingamp qui, dans le litige l'opposant à Madame Y..., déclarait que la procédure de licenciement n'a pas été respectée et que le licenciement était abusif. La SCP X... était condamnée à verser à Madame Y... des dommages et intérêts et les indemnités de rupture.
La SCP X... maintient qu'à la suite de la suppression du cabinet secondaire d'avocat de Guingamp, il a été proposé à Madame Y... d'aller travailler dans le cabinet principal de Morlaix, ce qu'elle a refusé; que dans ces conditions, son licenciement était inévitable. Il est demandé d'infirmer le jugement et de débouter la salariée de toutes ses demandes.
Madame Y... sollicite la confirmation du jugement, mais demande à la Cour de fixer son préjudice du fait de rupture de son contrat de travail à la somme de 50 000 euros . Elle réclame au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile la somme de 2000 euros.
Le CGEA de Rennes s'en remet à justice sur le motif du licenciement et demande à la Cour de réduire le montant des dommages et intérêts alloués à la salariée.
Pour un exposé plus complet de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère au jugement déféré et aux conclusions régulièrement communiquées à l'adversaire qui ont été déposées et développées à l'audience des plaidoiries du 23 octobre 2007 puis versées dans les pièces de procédure à l'issue des débats
MOTIFS DE LA DÉCISION
Rappel sommaire des faits:
Maître Bernard X..., avocat, ancien associé de la SCP d'avocats GOURIOU-COTRIAN-BERNAS qui avait acquis le 1 août 1993 le cabinet de Maître Pierre PASQUIOU avocat inscrit au barreau de Guingamp et avait conservé dans ses effectifs Madame Clarisse Y... en qualité de secrétaire, à la suite du départ des deux autres associés au mois d'avril 2004 , s'est retrouvé seul pour assurer la gestion de trois cabinets exploités par la SCP : un à Morlaix, l'autre à Guingamp et le troisième à CARHAIX . Le 20 janvier 2005, Maître X..., constatant qu'il ne pouvait pas assurer dans de bonnes conditions la direction de ces trois sites, décidait de procéder à la fermeture du cabinet de Guingamp et en informait Madame Y... sa secrétaire . Madame Y... invitée à se rendre à Morlaix sur son nouveau lieu de travail le 21 mars 2005 à l'issue d'un congé de maladie, refusait cette proposition et invitait son employeur à la licencier pour motif économique .Par lettre du 19 avril 2005, Maître X..., constatant le refus de sa secrétaire d'aller travailler à Morlaix, lui notifiait son licenciement pour motif économique .Contestant cette décision, Madame Y... saisissait le Conseil de Prud'hommes de Guingamp pour faire juger que son licenciement était abusif.
Par jugement du 16 janvier 2006, le Tribunal de grande Instance de Guingamp prononçait le redressement judiciaire de la SCP X..., mais autorisait la poursuite de l'activité du cabinet d'avocat.
Sur la procédure de licenciement:
Considérant qu'il est établi que la SCP X... a informé par courrier les bâtonniers de l'Ordre des avocats de Guingamp et de l'Ordre des avocats de Morlaix, que le cabinet secondaire de Guingamp était fermé à compter du 1er avril 2005, que Madame Y... secrétaire exerçant dans le cabinet de Guingamp a été informée de la fermeture de ce cabinet dès le 18 février 2005 et invitée à rejoindre le cabinet principal de Morlaix , ....
Considérant que si l'employeur, en raison du refus exprimé dans un courrier du 19 mars 2005 de Madame X... de rejoindre le cabinet principal de Morlaix ,décidait de procéder à la rupture de son contrat de travail, il lui appartenait de respecter les dispositions de l'article 19 de la convention collective des personnels des cabinets d'avocats rédigée en ces termes:
" en cas de maladie....le licenciement ou la démission ne peuvent pas intervenir avant la fin du mois qui suit celui de la date normale de la reprise du travail, sauf faute grave "
Considérant que par application de ces dispositions qui sont calquées sur celles de l'article 321-1-2 du Code du Travail, s'agissant de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail, la SCP X... ne pouvait initier la procédure de licenciement avant le 4 mai 2005 , soit un mois après la reprise du travail , ce qui n'a pas été le cas;
qu'il en résulte que, faute d'avoir bénéficié de cette période de réflexion d'un mois destinée à permettre à Madame Y... de prendre une décision éclairée en mesurant les conséquences de son choix , la SCP a commis une faute qui prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.
Sur les droits de Madame Y...:
Considérant que le licenciement de Madame Y... étant sans cause réelle et sérieuse, c'est à juste titre que les premiers juges ont condamné l'employeur à lui régler les indemnités de rupture dont le préavis de deux mois et l' indemnité conventionnelle de licenciement;
que, s'agissant d'évaluer le préjudice de la salariée résultant de la rupture de son contrat, compte tenu de son ancienneté, 26 ans et six mois , de son âge à la date du licenciement, 47 ans et de sa situation professionnelle actuelle: secrétaire dans une étude de notaires à Paimpol pour laquelle elle perçoit un salaire mensuel de 1422 euros , il lui sera accordée à titre de dommages et intérêts la somme de 28 800 euros et la somme de 469,85 euros au titre des frais d'exécution d'une ordonnance de référé.
Considérant que les autres dispositions du jugement serons confirmées et il sera accordé à la salariée au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile la somme de 1800 euros par contre il ne sera pas fait droit
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,
Réforme pour partie le jugement du 23 novembre 2006
Dit que le licenciement de Madame Clarisse Y... est sans cause réelle et sérieuse
Condamne la SCP X... à verser à Madame Y... :
- à titre de dommages et intérêts: la somme de 28 800 euros
- au titre des frais d'huissier: la somme de 469,85 euros
- au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile la somme de 1800 euros
Confirme les autres dispositions du jugement
Condamne la société SCP X... aux dépens.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT