EXPOSE DU LITIGE.
Vu le jugement rendu le 12 janvier 2006 par le Tribunal de Grande Instance de NANTES qui saisi des difficultés nées des opérations de liquidation partage des successions de Louisa X... conjoint survivant de Francis Y... et de sa cousine Emma X... ordonnées par jugement précédent du 19 avril 2001 a pour l'essentiel :
-constaté que les consorts Y... ont suffisamment rendu compte de la gestion de Paul Y... aux droits duquel elles viennent en qualité d'héritières,
- homologué à l'exception des valeurs immobilières, l'état liquidatif dressé par Me: PICART-RAJALU notaire le 20 juin 2003,
-au visa du jugement du 19 avril 2001 précité homologuant l'accord des parties, attribué préférentiellement l'immeuble situé à MONTLUCON indivis entre les défuntes à Mmes Lucienne Y... née Z..., Isabelle Y... et Nathalie Y... épouse A... pour sa valeur de 22 837,35 € et l'immeuble situé à COMMENTRY à Mme Yvonne B... née Y... pour sa valeur de 53 357,16 € à charge pour la seconde de verser aux premières une soulte de 15 244,90 €,
-ordonné l'enregistrement et la publication du jugement,
-débouté Mme B... de toutes ses demandes,
- débouté la partie adverse de leur demande reconventionnelle en reddition de comptes,
-condamné Mme B... aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 2 700 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
Vu les moyens développés par Mme Yvonne B... appelante dans ses dernières conclusions du 16 octobre 2007 aux termes desquelles elle demande de :
Ø dire et juger que le notaire liquidateur commis, ou tout autre que la Cour estimerait devoir désigner, devra établir les comptes entre les parties et recueillir tous éléments sur la reddition des comptes des mandataires, sauf à recourir à expertise et notamment,
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)›- dire et juger qu'il sera tenu compte de l'impense faite par la concluante pour le compte de l'indivision, de la réfection du réseau interne d'égout dans la maison de COMMENTRY, pour la somme de 31 598,00 F soit 4 817,08 €,
Ø dire et juger que la succession de Monsieur Paul Y... sera tenue de rendre les comptes de sa gestion des biens de Madame Louisa C... pour la période de janvier 1987 à février 1992,
Ø dire et juger que les sommes dont l'emploi n'est pas justifié et dont aura personnellement bénéficié Paul Y... sont constitutives de recel, et qu'il sera, dès lors, fait application de l'article 792 du code civil,
débouter Mesdames Y... de toutes leurs demandes, notamment reconventionnelle et de réévaluation des immeubles de MONTLUCON et COMMENTRY, sauf à ordonner une mesure d'instruction par voie de consultation,
Ø voir rejeter toutes autres demandes des intimés,
Ø les condamner au paiement de la somme de 5 000,00 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Ø voir ordonner l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de partage,
Vu les moyens développés dans les conclusions en date du 6 novembre 2007 de Mme Lucienne Z..., Isabelle Y... et Nathalie Y... intimées demandant au contraire de :
'-débouter Mme B... de l'ensemble de ses prétentions et confirmer le jugement du 12 janvier 2006 à l'exception de la valeur des immeubles,
condamner Mme B... à produire la reddition des comptes de Louisa Y... ainsi que des deux indivisions successorales en cause,
›- à titre subsidiaire, ordonner une expertise portant également sur la gestion de M. Paul B...,
$gt;. condamner Mme B... à rapporter à la succession la somme de 16 312 € prélevée sur le compte de Mme Louisa Y... en 1990,
confirmer les attributions des immeubles sauf à évaluer l'immeuble de MONTLUCON à 58 000 € et celle de l'immeuble de Commentry à 94 000 € et à fixer la soulte due par Mme B... aux concluantes à 18 000 €,
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›- ordonner l'enregistrement et la publication de la décision,
subsidiairement, en cas d'infirmation du jugement, dire que Mme B... est débitrice envers les indivisions successorales d'une indemnité égale aux travaux effectués sur l'immeuble sis à Commentry,
›- condamner Mme B... aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
DISCUSSION
- Sur l'évaluation des immeubles attribués :
Considérant que par jugement précédent du 19 avril 2001, le Tribunal de Grande Instance de NANTES a fixé sur la base d'un accord des parties en date du 4 février 1997 l'immeuble sis à Commentry attribué préférentiellement à Mme Yvonne B... et celui situé à MONTLUCON attribué aux consorts Y... à la valeur identique de 310 000 F = 47 259.20 € ;
Considérant que Mme Yvonne B... reproche au premier juge d'avoir procédé à une réévaluation des immeubles en cause en contravention avec les dispositions du jugement antérieur devenu définitif ;
Mais considérant que l'attribution préférentielle n'est qu'une modalité du partage ; que la décision qui l'accorde n'emporte pas transfert de propriété du bien mais oblige seulement à le placer dans le lot de l' attributaire ; que l'évaluation devant être faite à la date la plus proche du partage, l'autorité de chose jugée ne peut être attachée à la décision du 19 avril 2001 se rapportant à la valeur des biens, en l'absence de disposition fixant la date de la jouissance divise, que d'ailleurs, les dépenses d'entretien des immeubles notamment celui de Commentry ont été financées à l'aide de deniers indivis postérieurement à l'accord et jugement invoqués ;
Considérant toutefois que les biens en cause seront évalués à ce jour, date à laquelle sera fixée la jouissance divise ; qu'au vu des éléments d'information contenus au dossier et non contredits, il y a lieu sans qu'il soit besoin de recourir à une mesure d'expertise de fixer à 94 000 € la valeur de l'immeuble sis à Commentry et à 58 000 € celle de l'immeuble situé à MONTLUCON, d'où une soulte de 18 000 € à charge de Mme Yvonne B... ;
- Sur les redditions de comptes par les héritiers de Paul Y... :
Considérant que par acte sous seing privé du 8 juin 1987, Mme Louisa X... épouse de Francis Y... prédécédé a donné
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mandat de gestion à son fils Paul, l'autorisant à cette fin et notamment à verser et retirer toutes sommes sur ses comptes bancaires et de Caisse d'Epargne ainsi qu'à encaisser les revenus provenant de la location de ses biens immobiliers ;
Considérant que Paul Y... étant décédé le 4 février 1992, Mme Yvonne B... héritière de Louisa X... a poursuivi les consorts Y... ayant-cause du mandataire en reddition de comptes ;
Considérant que c'est par une juste appréciation des éléments communiqués non démentie par les débats devant la Cour que le Tribunal par des motifs qui sont adoptés a estimé que les consorts Y... dont il n'est pas démontré qu'elles détenaient des pièces ou explications autres que celles déjà fournies avaient satisfait à leur obligation de rendre compte ;
Considérant que cette reddition fait apparaître hors dépenses quotidiennes de la mandante un solde de 55 000 F = 8 384.70 € non justifié ;
Mais considérant qu'il ne saurait être exigé d'un fils mandataire de sa mère, d'exiger d'elle des reçus des remises de sommes en raison des relations de confiance existant entre eux comme en l'espèce ; que les calculs établis par Mme Yvonne B... ne tiennent pas compte des mouvements de fonds entre les comptes de la défunte relevés par les consorts Y... et que la somme restant en discussion ne paraît pas excéder les dépenses cumulées d' entretien de Mme Louisa X... durant la période considérée écoulée entre le 8 juin 1987 et le 2 février 1992 ; que le mari d'Yvonne B... qui avait repris de fait la gestion des biens de sa belle-mère au décès de Paul Y... chiffrait lui-même à cette date et suivant une estimation dont il n'est pas allégué qu'elle serait inexacte, les dépenses de la mandante à 13 907 F = 2 120.11 € soit à un montant légèrement supérieur à celui des recettes évalué à 13 147 F = 2 004.25 € ; que le dossier ne révèle pas qu'au cours du mandat exercé par son fils, Mme Louisa X... ait manqué de fonds nécessaires au règlement de ses frais quotidiens ; qu'en l'absence de détournement démontré, le Tribunal sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme Yvonne B... en sa demande en restitution des fonds ;
- Sur la reddition de compte sollicitée à l'encontre de Mme D...
B... :
Considérant qu'il est acquis aux débats que M. Paul B... a assuré la gestion des biens de Mme Louisa X... à compter du décès de Paul Y... ; que toutefois son épouse a concouru à l'administration de l'immeuble de Commentry pour le moins à compter de l'année 1995 ainsi que l'établissent un récapitulatif des travaux exposés suivi d'un mandat de gestion donné à un professionnel ainsi qu'un relevé de compte ouvert conjointement avec la défunte annoté d'explications relatives aux opérations y figurant, tous documents signés ou écrits de la main de Mme Yvonne B... ;
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Considérant qu'il lui appartiendra de rendre compte de sa gestion entre les mains du notaire liquidateur désigné ;
Considérant en revanche qu'aucune demande ne peut être faite à l'encontre de M. Paul B..., non appelé à la procédure ;
Considérant en tout état de cause, qu'il appartiendra au notaire liquidateur de tirer toutes conséquences de la date de jouissance divise, sur les comptes d'administration des successions en cause ;
- Sur les impenses :
Considérant que Mme Yvonne B... qui justifie avoir saisi le notaire liquidateur d'une demande de prise en compte du règlement de travaux d'assainissement, factures à l'appui de 20 682,90 F et 10 915,50 F par courrier du 20 mai 2003 est recevable à en solliciter l'inscription dans son compte d'administration ; que l'état liquidatif sera rectifié sur justificatif entre les mains du notaire liquidateur du paiement sur les deniers de Mme Yvonne B... ;
- Sur le rapport des dons :
Considérant que non soumise au premier juge la demande de rapport à succession pour la somme de 16 312 F = 2 486.75 € formée par les consorts Y... à l'encontre de Mme Yvonne B... n'en est pas moins recevable en cause d'appel en application de l'article 555 du code de procédure civile dès lors que les parties sont en matière de partage respectivement demanderesses et défenderesses quant à l'établissement de l'actif et du passif, de sorte que toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse ;
Considérant qu'il est établi par les pièces produites que Mme Yvonne B... a reçu un chèque de 50.000 F = 7 622.45 € émis le 1' février 1989 sur le compte chèque détenu par Mme Louisa X... à la Banque HERVET ; que ce chèque qui traduit un dessaisissement des fonds irrévocable de la titulaire du compte au profit de la bénéficiaire caractérise un don manuel rapportable à la succession avec intérêts au taux légal à compter de l'ouverture de la succession de la donatrice ;
Considérant, sur le surplus, que les consorts Y... seront déboutés de leur demande, faute de rapporter la preuve que les fonds en cause déposés sur un compte ouvert au nom des époux Paul Y... aient été la propriété de Mme Louisa X... ;
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-Sur le recel :
Considérant qu'aucun divertissement de fonds successoraux n'étant établi à la charge de Paul Y..., la demande en application des peines de recel successoral formée par Mme Yvonne B... sera écartée ;
-Sur la publicité et l'enregistrement de la décision :
Considérant qu'il n'y a pas lieu à procéder à ces formalités, la décision n'emportant pas transfert de propriété ;
-Sur les dépens et article 700 du code de procédure civile :
Considérant qu'échouant pour l'essentiel, Mme Yvonne B... supportera les dépens d'appel en sus de ceux de première instance ; qu'elle ne peut davantage prétendre au bénéfice de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Considérant en revanche qu'il sera alloué aux consorts Y... une somme de 2 000 € en application de ce texte, cette indemnité s'ajoutant à celle accordée par le premier juge ;
DISCUSSION
LA COUR,
Réformant le jugement, statuant à nouveau,
Fixe la jouissance divise des biens dépendant des successions de Louisa et Emma X... au jour du présent arrêt,
Fixe à cette date la valeur de l'immeuble sis Commentry attribué à Mme Yvonne Y... épouse B... à 94 000 € et celle de l'immeuble sis à MONTLUCON attribué à Mmes Lucienne Y... née Z..., Isabelle Y... et Nathalie Y... épouse A... à 58 000 €,
Fixe à 18 000 € la soulte due par Mme Yvonne B...,
Dit qu'il appartiendra au notaire liquidateur d'établir et arrêter les comptes d'administration des successions en cause, à la date de la jouissance divise ci-dessus fixée,
Dit qu'il appartiendra à Mme Yvonne Y... épouse B... de rendre compte auprès du notaire liquidateur de l'administration du bien situé à Commentry de 1995 jusqu'au jour de la jouissance divise,
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Déclare irrecevable la demande en expertise formée à l'encontre de M. Paul B...,
Dit qu'il appartiendra aux consorts Y... de tirer toutes conséquences de droit des éléments de reddition de comptes fournis par les époux B... à ce jour à charge pour la partie la plus diligente de saisir à nouveau le premier juge pour qu'il soit statué en cas de difficultés,
Déboute Mme Yvonne Y... épouse B... de sa demande en application des peines de recel successoral à l'encontre des consorts Y..., venant aux droits de Paul Y...,
Dit que Mme Yvonne Y... épouse B... devra rapporter à la succession de Mme Louisa X... la somme de 7 622,45 € correspondant à un don manuel avec intérêts au taux légal au jour d'ouverture de la succession,
Déboute les consorts Y... du surplus de leur demande,
Déclare recevable la demande formée par Mme Yvonne Y... épouse B... tendant à la prise en compte d'impenses chiffrées à 4 817,08 €,
Dit qu'il appartiendra au notaire liquidateur d'inscrire cette dépenses dans les comptes de l'état liquidatif, sur justificatif entre ses mains du règlement opéré sur les deniers de Mme Yvonne B...,
Dit qu'il n'y a pas lieu à publier et enregistrer la présente décision, Confirme le jugement pour le surplus,
Renvoie les parties devant le notaire liquidateur pour établissement de l'état liquidatif conforme aux dispositions précitées,
Condamne Mme Yvonne Y... épouse B... aux dépens d'appel avec droit de recouvrement prévu à l'article 699 du code de procédure civile,
Condamne Mme Yvonne Y... épouse B... à payer à Mine Lucienne Y... née Z..., Isabelle Y... et Nathalie Y... épouse A... la somme de 2 500 € au titre des frais non répétibles d'appel,
Déboute Mme Yvonne Y... épouse B... de sa demande en indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER.-LE PRESIDENT.-