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22/01/2008 | FRANCE | N°06/01921

France | France, Cour d'appel de Rennes, 22 janvier 2008, 06/01921


EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Selon contrat et avenant des 28 Décembre 1990 et 11 Juin 1990, la société BRIT AIR a confié à la société AEDIFIS la construction d'un centre de formation aéronautique et d'un local simulateur d'une superficie d'environ 1 790 m2 d'après les plans de M X..., architecte, pour le prix de 10 500 000 F.

Selon contrat des 31 Mai et 5 Août 1996, elle a confié à l'EURL Atelier d'architecture Philippe X... et au bureau d'études I 2 C lNGENIERIE la maîtrise d'oeuvre d'une extension moyennant une rémunération de 577 432,80 F.

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nt qu'en 1999, la société BRIT AIR avait fait réaliser une seconde extension, por...

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Selon contrat et avenant des 28 Décembre 1990 et 11 Juin 1990, la société BRIT AIR a confié à la société AEDIFIS la construction d'un centre de formation aéronautique et d'un local simulateur d'une superficie d'environ 1 790 m2 d'après les plans de M X..., architecte, pour le prix de 10 500 000 F.

Selon contrat des 31 Mai et 5 Août 1996, elle a confié à l'EURL Atelier d'architecture Philippe X... et au bureau d'études I 2 C lNGENIERIE la maîtrise d'oeuvre d'une extension moyennant une rémunération de 577 432,80 F.

Exposant qu'en 1999, la société BRIT AIR avait fait réaliser une seconde extension, portant une atteinte grave et incontestable à leur oeuvre, l'Atelier d'architecture Philippe X... et M X... l'ont assignée devant le Tribunal de Grande Instance de MORLAIX sur le fondement des articles L121.1 et L 122.1 du Code de la Propriété Artistique pour la voir condamner, à titre principal, à remettre en état le bâtiment et à leur payer des dommages et intérêts, ou subsidiairement, à leur payer des dommages et intérêts seulement.

Par jugement du 14 Décembre 2005, le Tribunal a déclaré irrecevables les demandes d'Atelier d'architecture Philippe X... EURL, a débouté M Philippe X... de l'intégralité des siennes et l'a condamné à payer à la société BRIT AIR 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Appel de cette décision a été interjeté par l'EURL Atelier d'architecture Philippe X... et M X....

Ils soutiennent que la demande de la société, devenue SAS Atelier Philippe X..., est recevable dès lors que M X... lui a fait apport de ses droits patrimoniaux et qu'elle est titulaire du second contrat de maîtrise d'oeuvre.

Ils expliquent que la construction initiale et la première extension ont été réalisées selon le concept d'Analogon, créé par M X... et que l'originalité de l'oeuvre, qui porte tant sur le parti urbain et architectural d'ensemble que sur la conception même des bâtiments, est attestée par une notice descriptive et qu'elle doit être reconnue nonobstant son caractère utilitaire.

Ils prétendent que la seconde extension altère cette oeuvre dès lors qu'elle a été réalisée sans respecter le principe de l'atrium qui était l'accroche des extensions, en ajoutant qu'elle aboutit à un doublement de la surface et masque toute la partie ouest et nord.

Ils concluent à la réformation du jugement et à la condamnation de la société BRIT AIR:

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- à titre principal,

*à faire procéder à la remise en état,

*à payer à M X... 10 000 € pour atteinte à ses droits moraux,

*à la SAS Atelier Philippe X... 5 000 € pour atteinte à ses droits patrimoniaux,

ou à titre subsidiaire,

* à payer à la SAS Atelier Philippe X... et à MMADEC 2 500 € chacun pour atteinte à leurs droits patrimoniaux

- à titre subsidiaire,

*à payer à M X... 50 000 € pour atteinte à ses droits moraux,

* à payer à la SAS Atelier Philippe X... 30 000 € pour atteinte à ses droits patrimoniaux,

ou, à titre subsidiaire,

*à payer à la SAS Atelier Philippe X... et à MMADEC 15 000 € chacun pour atteinte à leurs droits patrimoniaux.

La SA BRIT AIR conclut à la confirmation du jugement, sauf à se voir allouer 3 000 € en remboursement de ses frais irrépétibles.

Elle soulève l'irrecevabilité de la demande du Cabinet X..., faute pour lui de démontrer être titulaire de droits patrimoniaux.

Elle conteste l'originalité de l'oeuvre, à vocation exclusivement utilitaire, et soutient qu'en tout état de cause, l'extension réalisée avec le concours de M JAVIER Y... en 1999, c'est à dire dix ans plus tard, qui répondait à des besoins économiques impératifs, ne l'a pas altérée.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures en date des 18 Octobre et 1" Mars 2007.

DISCUSSION

Attendu que les appelants produisent aux débats un extrait du registre du commerce et des sociétés justifiant de l'immatriculation de la SAS Atelier Philippe X..., présidée par M X..., sous le numéro 403 174 592, le 17 Janvier 1996 ;

Attendu que si l'acte d'engagement des 31 et 5 Août 1996 a été signé par M X... pour le compte d'une EURL Atelier d'architecture Philippe X..., il précise que cette société est immatriculée sous le même numéro B 403 174 592 ;

Attendu que l'existence de cette EURL n'est pas plus démontrée en appel qu'en instance ; que l'on doit considérer que la signataire de ce marché était la SAS Atelier Philippe X... ;

t,

Attendu que les droits d'auteur ne pouvant naître que sur la tête d'une personne physique et n'étant justifié d'aucune cession, le jugement sera complété en ce qu'il a déclaré l'EURL Atelier d'architecture Philippe X... irrecevable en sa demande et la SAS Atelier Philippe X... le sera déclarée également, faute d'intérêt à agir ;

Attendu, au fond, qu'il résulte de la notice descriptive 01 établie par M X... au mois d'octobre 1996 pour le dossier de permis de construire de la première extension, que celui-ci a conservé le parti de plan masse de la première phase, le principe étant que plutôt que d'installer sur le site de l'aéroport un bâtiment supplémentaire et de grande échelle, de travailler avec des volumes de plus petite taille et d'aspect différent articulés ensemble autour de lieux publics intérieurs ; qu'ainsi, après travaux, le centre de formation aéronautique serait composé de sept lieux, générant une petite urbanité, mélangeant espaces publics et espaces de travail intérieurs et extérieurs : quatre bâtiments, deux halls et un jardin intérieur ; que les bâtiments et le hall nouveaux seraient réalisés, comme les existants, en matériaux différents et qu'en cas d'extension future, le plan continuerait à croître vers l'ouest, selon la même procédure, s'approchant de la croissance organique de la ville traditionnelle ; que le parti paysager était d'apporter sur ce site une présence végétale jusqu'alors un peu absente ; que le parti architectural reprenait celui de la première phase, à savoir une conception de bâtiments d'aspect différent, tant par leur dimension que par les matériaux qui les composent, le bâtiment E étant en bardage ardoise et menuiseries aluminium gris sombre coloré, le bâtiment F étant en bardage à ondes verticales de couleur corail, le nouveau hall étant en béton peint ;

Attendu que la maquette et les photographies versées aux débats permettent de constater que les bâtiments réalisés par M X..., qui sont de volume et d'aspect différents, sont reliés entre eux par deux halls alors que ceux réalisés par M Y..., qui ne possèdent pas d'identité propre, sont reliés à la construction initiale par un couloir ; que par ailleurs, ces derniers sont volumineux et occultent partiellement la vue des bâtiments initiaux ;

Attendu que s'il n'est pas évident que les bâtiments conçus par M X... soient l'application du concept d' Analogon dont il est l'auteur, comme il le soutient, il n'en demeure pas moins que leur conception a procédé d'un choix esthétique spécifique traduisant sa personnalité ; que du reste, M Y... ne s'y était pas mépris puisqu'il a écrit dans des conclusions déposées dans une autre instance avoir invité la société BRIT AIR à aviser son confrère de la nature et de l'importance des travaux mis en oeuvre dans le cadre de la seconde extension dont il était chargé, ce que celle-ci ne dément pas ;

Attendu que si la société BRIT AIR fait valoir, ce qui est exact, que l'extension, prévue, répondait à la nécessité d'adapter les locaux à des

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besoins nouveaux et légitimes, cette nécessité ne l'autorisait pas à passer outre aux droits de M X... et à porter atteinte à son oeuvre ;

Attendu que M X..., qui ne justifie pas avoir exploité celle-ci pendant les dix années où son intégrité a été respectée, ne peut sérieusement soutenir être victime, aujourd'hui, d'un préjudice patrimonial ;

Attendu en revanche, qu'en sa qualité d'auteur et eu égard à sa notoriété attestée par les documents qu'il produit aux débats, il est fondé à se prévaloir d'un préjudice moral lequel sera suffisamment réparé par l'allocation de la somme de 10 000 € ;

Attendu que l'équité commande d'allouer à M X... 2 000 € en remboursement de ses frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS, La Cour,

Confirme le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes d'Atelier d'architecture Philippe X... EURL,

Réformant et ajoutant,

Déclare irrecevables les demandes de la SAS Atelier Philippe X...,

Dit que la société BRIT AIR a porté atteinte au droit moral d'auteur de M X...,

En réparation, la condamne à lui payer 10 000 € à titre de dommages et intérêts,

Condamne la société BRIT AIR à payer à M X... 2 000 € en remboursement de ses frais irrépétibles,

La condamne aux entiers dépens et dit que ces derniers seront recouvrés par la SCP BOURGES conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER-LE PRESIDENT.-


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 06/01921
Date de la décision : 22/01/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Morlaix


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-01-22;06.01921 ?
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