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15/01/2008 | FRANCE | N°05/06296

France | France, Cour d'appel de Rennes, 15 janvier 2008, 05/06296


Deuxième Chambre Comm.





ARRÊT No



R.G : 05/06296



Pourvoi No : V 0813551

du 07/04/2008









CREDIT MUTUEL DE PONTIVY

S.A.S. HEINEKEN



C/



M. Roland X...


SCP LE DORTZ ET BODELET

Mme Maryvonne Y... épouse X...


S.A.R.L. LP IMMOBILIER

















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours







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Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 JANVIER 2008





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Yves LE GUILLANTON, Président, entendu en...

Deuxième Chambre Comm.

ARRÊT No

R.G : 05/06296

Pourvoi No : V 0813551

du 07/04/2008

CREDIT MUTUEL DE PONTIVY

S.A.S. HEINEKEN

C/

M. Roland X...

SCP LE DORTZ ET BODELET

Mme Maryvonne Y... épouse X...

S.A.R.L. LP IMMOBILIER

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 JANVIER 2008

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves LE GUILLANTON, Président, entendu en son rapport,

Madame Françoise COCCHIELLO, conseiller,

Madame Véronique BOISSELET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Béatrice Z..., lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 20 Novembre 2007

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Yves LE GUILLANTON, Président, à l'audience publique du 15 Janvier 2008, date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTES :

CREDIT MUTUEL DE PONTIVY

...

56300 PONTIVY

représentée par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués

assistée de Me A..., avocat

S.A.S. HEINEKEN intervenant aux droits de la Banque SCALBERT DUPONT ...

...

92565 RUEIL MALMAISONS

représentée par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués

assistée de Me A..., avocat

INTIMÉS :

Monsieur Roland X...

36 place Anne de Bretagne

56500 LOCMINE

représenté par la SCP GUILLOU & RENAUDIN, avoués

SCP LE DORTZ ET BODELET, es qualité de Mandataire liquidateur de la liquidation judiciaire de la SARL MARC'H KENTAN

...

BP 168

56305 PONTIVY CEDEX

représentée par la SCP JACQUELINE BREBION ET JEAN-DAVID CHAUDET, avoués

assistée de Me Sophie B..., avocat

Madame Maryvonne Y... épouse X...

36 place Anne de Bretagne

56500 LOCMINE

représentée par la SCP GUILLOU & RENAUDIN, avoués

S.A.R.L. LP IMMOBILIER

...

35000 RENNES

représentée par la SCP D'ABOVILLE DE MONCUIT SAINT-HILAIRE & LE CALLONNEC, avoués

assistée de Me C..., avocat

EXPOSE DU LITIGE

Le 28 décembre 1998, la SARL MARC'H KENTAN a acquis un fonds de commerce bar-restaurant ... , au prix de

1 400 000 Frs ( 213 428,62 euros) qu'elle a commencé à exploiter au 1er janvier 1999.

Elle a revendu ce fonds par acte sous seing privé du 8 novembre 2001 à Monsieur Richard D..., au prix de 91 469,41 euros ( 600 000 Frs), après trois années d'exploitation catastrophique.

Les résultats d'exploitation énoncés dans l'acte de vente du 8 Novembre 2001 étaient en effet les suivants:

- exercice 199925 718 Frs

- exercice 2000100 000 Frs

- exercice 2001 ( du 1er janvier jusqu'à la vente):200 000 Frs

60% de la valeur du fonds ont donc été perdus en moins de 3 ans d'activité.

L'acte de cession du 8 novembre 2001 fut négocié et rédigé par la SARL L.P. IMMOBILIER, exerçant l'activité d'agent immobilier mandataire

en vente de fonds de commerce.

Par ailleurs, et préalablement à l'acte, la SARL L.P. IMMOBILIER avait négocié avec certains créanciers de la SARL MARC'H KENTAN une répartition amiable du disponible sur le prix de vente, (après paiement des éventuelles dettes fiscales, sociales et autres créances prioritaires, prélèvement des frais de main-levée et radiation des inscriptions) sur la base suivante :

- 82% au CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE de PONTIVY,

- 12% à la banque SCALBERT-DUPONT aux droits de laquelle vient la société HEINEKEN.

- 5% au bailleur Monsieur et Madame X....

- 1% à la SARL FRANCE BOISSONS BOUCICAUD.

Le CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE de PONTIVY et la SA HEINEKEN donnèrent leur accord sur cette répartition par courriers respectifs des 7 novembre et 31 octobre 2001.

Le bailleur, M. et Mme X..., consentirent également à cette répartition dans l'acte de cession du 8 novembre 2001, aux termes duquel ils agréèrent leur nouveau locataire en la personne de Monsieur D....

Postérieurement à l'acte de cession du 8 novembre 2001, l'agence L.P.IMMOBILIER reçut les oppositions suivantes :

- le 21 novembre 2001: avis à tiers détenteurs de la recette principale des Impôts de PONTIVY pour 1 387,74 euros.

- le 7 décembre 2001: opposition de la SARL FRANCE BOISSONS BOUCICAUD pour 3 010,97 euros.

- le 7 décembre 2001: opposition de la SACEM pour 7 818,17 euros.

- le 7 décembre 2001: opposition de l'organisme ORGANIC (recouvrement) pour 1 402,29 euros.

- le 7 décembre 2001: opposition de Monsieur Michel E..., LARMOR PLAGE, pour 1 131,18 euros.

- le 27 décembre 2001: opposition de l'URSSAF du MORBIHAN pour

3 888,12 euros.

- le 8 janvier 2002: opposition de Monsieur et Madame X... pour 12 795,99 euros.

- le 8 février 2002: avis à tiers détenteur de la Trésorerie de PONTIVY pour 814,54 euros.

A la suite de quoi, elle procéda aux paiements suivants :

- le 8 avril 2002: Trésor Public A.T.D. 1387,74 euros

- le 8 avril 2002: Trésor Public A.T.D. 814,54 euros

- le 8 avril 2002: la Caisse de Crédit Mutuel de Bretagne

-inscription de nantissement-71 666,26 euros.

- le 22 avril 2002: Monsieur et Madame X... : 1 466,86 euros

- le 22 avril 2002: Monsieur et Madame X... : 2 388,27 euros.

- le 22 avril 2002: Monsieur et Madame X... : 514,58 euros.

- le 22 avril 2002 : FRANCE BOISSONS BOUCICAUD : 873,94 euros.

- le 22 avril 2002:BANQUE SCALBERT-DUPONT(HEINEKEN)10 487,31 euros.

- le 22 avril 2002 : Provision pour frais de radiation des inscriptions : 1 875,38 euros.

Total 91 468,88 euros.

Par jugement du 26 juillet 2002, le Tribunal de Commerce de LORIENT , sur assignation de l'URSSAF du MORBIHAN, a ouvert une procédure de Liquidation Judiciaire à l'encontre de la SARL MARC'H KENTAN, et fixé provisoirement la date de la cessation des paiements au 25 juin 2002.

Le dirigeant ne s'est jamais présenté, ni au Tribunal , ni au Liquidateur.

Le 3 Juin 2004, le passif était arrêté à la somme de 116 895,27 euros, tandis que l'actif était inexistant.

Par jugement du 2 Juillet 2004, le Tribunal de Commerce de LORIENT estimait devoir reporter la date de la cessation des paiements au 26 janvier 2001, aux motifs notamment:

"- que dans le cadre des opérations de vérification des créances reçues, il apparaît que les charges fiscales et sociales n'étaient plus réglées depuis au moins le dernier trimestre 2000",

"- qu'il est dû des cotisations à l'ORGANIC , la SACEM et la SPRE au titre des années 2000 et 2001, et à l'URSSAF du MORBIHAN au titre de l'année 2000".

" - qu'il reste également due la TVA de janvier à novembre 2001 pour environ 18 650 euros".

" - que par ailleurs face aux difficultés financières, le fonds de commerce a été mis en vente et vendu le 8 novembre 2001 au prix de 91 469,41 euros , prix très inférieur à la valeur de l'achat".

"- que l'agence qui a réalisé cette vente avait négocié, avant la signature de l'acte avec les principaux créanciers (hormis les créanciers fiscaux et sociaux dont l'accord pour la régularisation de l'acte n'était pas indispensable..) afin qu'un accord intervienne sur une répartition amiable du prix de vente.."

"- que cette circonstance confirme que l'état de cessation des paiements de la société était caractérisée bien avant la cession, ce dont les intervenants à la vente avaient parfaitement conscience, puisqu'ils ont agi dans le seul but d'en éviter ou d'en limiter les conséquences à leur égard, au détriment des autres créanciers".

C'est dans ce contexte que suivant exploit des 27 juillet, 30 juillet et 4 août 2004, la S.C.P. LE DORTZ-BODELET ès- qualités de mandataire -liquidateur de la SARL MARC'H KENTAN, a saisi le tribunal de Commerce de LORIENT aux fins de voir :

- constater que l'agence L.P. IMMOBILIER, le CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE de PONTIVY, la Banque SCALBERT-DUPONT, la SARL FRANCE BOISSONS BOUCICAUD et Monsieur et Madame X..., avaient connaissance de l'état de cessation de paiement de la SARL MARC'H KENTAN lors de la réalisation de la vente du fonds de commerce du 8 novembre 2001 et des paiements d'avril 2002.

- annuler les paiements opérés à leur profit en avril 2002 par application de l'article L 621-108 du Code de Commerce.

- ordonner en conséquence la restitution au liquidateur de l'intégralité des sommes qu'ils ont perçues.

- les condamner aux entiers dépens.

Par jugement du 19 août 2005, le Tribunal de Commerce de LORIENT a :

- condamné la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE et la S.A.

HEINEKEN à rembourser à la S.C.P. LE DORTZ-BODELET, mandataire-liquidateur de la SARL MARC'H KENTAN, l'intégralité des sommes qu'elles ont perçues et prélevées sur la vente du fonds de commerce de ladite société en liquidation judiciaire, avec intérêts de droit à compter de l'assignation.

- mis hors de cause Monsieur et Madame Rolland X... , l'agence L.P. IMMOBILIER et la SARL FRANCE BOISSONS BOUCICAUD.

- débouté l'agence L.P. IMMOBILIER de sa demande reconventionnelle.

- condamné la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE et la SA HEINEKEN aux entiers dépens de l'instance.

La CAISSE de CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE et la SA HEINEKEN ont relevé appel de cette décision de même que la S.C.P. le DORTZ-BODELET.

La Caisse de Crédit Mutuel de PONTIVY demande à la Cour de :

Recevoir la Caisse de Crédit Mutuel de PONTIVY en son appel.

Vu l'arrêt en date du 13 FEVRIER 2007.

Réformer le jugement du Tribunal de Commerce de LORIENT du 19 août 2005.

Déclarer irrecevables et mal fondées les demandes formulées par la S.C.P. LE DORTZ-BODELET, ès- qualités de Mandataire Liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL MARCH'H KENTAN.

Les condamner à payer une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Les condamner aux entiers dépens qui seront recouvrés pour ceux d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La SA HEINEKEN conclut de la même manière que la Caisse de Crédit Mutuel de PONTIVY ;

La SCP BERNARD J-M LE DORTZ & GERARD BODELET, es qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL MARC'H KENTAN, formule les prétentions suivantes :

" Recevoir la Société Civile Professionnelle LE DORTZ-BODELET ès- qualités de mandataire liquidateur la SARL MARC'H KENTAN en son appel , le dire bien fondé, y faire droit.

- Confirmer le jugement du Tribunal de Commerce de LORIENT du 19 août 2005, à l'égard de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY et la SA HEINEKEN.

En conséquence:

- Annuler par application de l'article L 621-108 du Code de Commerce, les paiements effectués à leur profit respectivement les 8 avril et 22 avril 2002 provenant de la vente du fonds de commerce de la SARL MARC'H KENTAN.

- Condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY à verser à la S.C.P. Professionnelle LE DORTZ-BODELET ès- qualités la somme de 71 666,26 euros avec intérêts de droit à compter de l'assignation du 27 juillet 2004 et la SA HEINEKEN à lui verser la somme de 10 487,31 euros avec intérêts de droit à compter de l'assignation du 30 juillet 2004.

- Infirmer le jugement du Tribunal de Commerce de LORIENT du 19 août 2005, en ce qu'il a mis hors de cause Monsieur et Madame X... et la SARL L.P. IMMOBILIER.

- Annuler par application de l'article L 621-108 du Code de Commerce les paiements effectués au profit de M. et Mme X... et de la SARL L.P. IMMOBILIER le 22 avril 2002 provenant de la vente du fonds de commerce de la SARL MARC'H KENTAN.

- En conséquence condamner M. et Mme X... à verser à la S.C.P. le DORTZ-BODELET ès-qualités la somme de 4 369,71 euros avec intérêts de droit à compter de l'assignation du 27 juillet 2004 et la SARL L.P. IMMOBILIER à lui verser la somme de 1 875,38 euros avec intérêts de droit à compter de l'assignation du 27 juillet 2004.

- Voir dire et juger que la SARL L.P.IMMOBILIER a commis des fautes dans l'exécution de son mandat ou subsidiairement des fautes délictuelles de nature à engager sa responsabilité sur le fondement des articles 1147 et 1992 ou subsidiairement 1382 et suivants du Code Civil.

- La condamner en conséquence à verser à la S.C.P. le DORTZ-BODELET ès- qualités la somme de 91 469,41 euros à titre de dommages-intérêts correspondant au prix de vente de l'immeuble.

- Débouter la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY, la société HEINEKEN, M. et Mme X..., et la société L.P.IMMOBILIER de toutes leurs demandes, fins et conclusions ni fondées, ni motivées.

- Condamner "in solidum" la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY, la société HEINEKEN, M. et Mme X..., et la Société L.P. IMMOBILIER à verser à la S.C.P. le DORTZ-BODELET ès- qualités la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- Les condamner "in solidum" aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la S.CP J.BREBION- J.D.CHAUDET, Avoués à la Cour, par application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Monsieur et Madame X... sollicitent la Cour de :

" - Confirmer le jugement en date du 19 août 2005 prononcé par le Tribunal de commerce de LORIENT en ce qu'il a mis hors de cause M. et Mme X....

- Débouter la S.C.P. le DORTZ-BODELET de l'intégralité de ses demandes fins et conclusions dirigées à l'encontre des époux X....

- Condamner la S.C.P. le DORTZ-BODELET ès- qualités de mandataire liquidateur de la SARL MARC'H KENTAN à verser à M. et Mme X... la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

- Condamner la même aux entiers dépens qui seront recouvrés par la S.C.P. GUILLOU-RENAUDIN conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile."

La SARL L.P..IMMOBILIER prie la Cour de :

"- Confirmer le jugement du Tribunal de Commerce de LORIENT, du 19 août 2005 en toutes ses dispositions.

- Débouter la S.C.P. le DORTZ-BODELET ès-qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL MARC'H KENTAN de toutes ses demandes, fins et conclusions.

- Condamner la S.C.P. le DORTZ-BODELET ès-qualités à régler une somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- Condamner la S.C.P. le DORTZ-BODELET ès-qualités aux entiers dépens d'instance et d'appel.

Autoriser la S.C.P. D'ABOVILLE DE MONCUIT SAINT HILAIRE -LE CALLONNEC à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile".

Pour un plus ample exposé du litige, il est fait référence à la décision attaquée ainsi qu'aux dernières écritures des parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Considérant que la Société HEINEKEN et la CAISSE DE CREDIT

MUTUEL DE PONTIVY soutiennent que les demandes de la SCP le DORTZ-BODELET telles que dirigées à leur encontre seraient irrecevables, aux motifs que :

- le jugement du Tribunal de Commerce de Lorient du 2 Juillet 2004, reportant la date de la cessation des paiements de la SARL MARC'H KENTAN au 26 janvier 2001 leur serait inopposable, faute de leur avoir notifié.

- leurs créances au passif de la liquidation judiciaire ayant définitivement été admises par le Juge Commissaire, la S.C.P. intimée ne serait plus recevable à leur demander le paiement de ce qu'ils ont perçus dans le cadre de la vente du fonds de commerce;

Que sur le premier point, l'argument selon lequel le jugement du 2 juillet 2004 reportant la date de cessation des paiements au 26 janvier 2001 ne serait pas opposable faute de leur avoir été notifié, est inopérant;

Qu'en effet, les dispositions du Code de Commerce permettant au mandataire liquidateur de solliciter un report de la date de cessation des paiements s'inscrivent dans une procédure engagée à l'encontre d'un débiteur, que c'est lui qui est assigné, que c'est encore lui qui peut exercer une voie de recours.

Qu'aucun texte n'impose donc au liquidateur d'assigner tous les créanciers, ni de leur notifier individuellement la décision de report , sous peine d'inopposabilité;

Qu'au surplus, le jugement reportant la date de cessation des paiements est publié au BODDAC, ce qui assure son opposabilité à tous, qu'en l'espèce, le jugement du 2 juillet 2004 a été publié le 22 juillet 2004, qu'il est donc opposable à la Société HEINEKEN et à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY;

Qu'enfin, les créanciers sont représentés dans la procédure collective par le représentant des créanciers, qui participe à la procédure et veille à leurs intérêts collectifs, qu'en cas de liquidation judiciaire, cette fonction est assurée par le mandataire liquidateur;

Que c'est bien dans l'intérêt de l'ensemble des créanciers qu'une demande de report de la date de cessation des paiements est faite.

Que cependant, force est de constater que l'intérêt de l'ensemble des créanciers est contraire en l'espèce aux intérêts particuliers de la SA HEINEKEN et de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY qui ont cru pouvoir se faire régler avant la masse des autres créanciers;

Que sur le second point, l'autorité de la chose jugée attachée à la décision du Juge Commissaire d'admission des créances de la SA HEINEKEN et de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY, n'est pas remise en cause par la présente procédure;

Qu'il n'est pas contestable qu'avant sa mise en liquidation judiciaire, la SARL MARC'H KENTAN devait des sommes à la SA HEINEKEN et à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL , dans les proportions fixées par décision définitive du Juge Commissaire;

Que la demande du liquidateur devant la Cour ne vise pas à revenir sur cette admission ;

Qu'elle a pour but de voir constater, sur le fondement de l'article L 621-108 du Code de Commerce, que ces deux créanciers sont débiteurs de la liquidation judiciaire de sommes qu'ils ont irrégulièrement et frauduleusement encaissées durant la période suspecte;

Que ce second argument est donc aussi inopérant;

Considérant que la SARL L.P.IMMOBILIER soulève l'irrecevabilité des demandes présentées à son égard par le liquidateur , au motif qu'elle ne serait pas créancière de la SARL MARC'H KENTAN au sens de l'article

L 621-108 du Code de Commerce; qu'elle reprend également le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée des créances admises au passif de la liquidation judiciaire par le Juge Commissaire, moyen sur lequel le liquidateur s'est déjà expliqué;

Qu'elle indique par ailleurs, que, contrairement aux affirmations de la S.C.P. LE DORTZ-BODELET, elle n'aurait jamais personnellement perçu une provision pour frais de radiation des inscriptions de 1 875,38 euros, puisque ce règlement aurait transité sur un compte séquestre, ce qui exclurait l'application de l'article L 621-108 du Code de commerce ;

Que subsidiairement au fond, elle prétend que la preuve de la connaissance qu'elle avait de l'état de cessation des paiements de la SARL

MARC'H KENTAN ne serait pas rapportée, dès lors qu'il lui était permis de penser que ladite société aurait pu avoir d'autres actifs;

Qu'enfin, la liquidation judiciaire serait intervenue plusieurs mois après l'accord de répartition des créanciers et les règlements effectués;

Considérant que la SARL L.P.IMMOBILIER fait preuve d'une méconnaissance de l'article L 621-108 du Code de Commerce lorsqu'elle soutient qu'elle ne serait pas visée par ce texte, faute d'être créancière de la SARL MARC'H KENTAN;

Que l'article L 621-108, dans son ancienne rédaction, ne vise pas , en effet, "les créanciers", mais "ceux qui ont traité avec le débiteur", ce qui est manifestement son cas;

Que tous les tiers , et pas seulement les créanciers, sont visés;

Que prendre en compte que les créanciers conduirait à vider le texte de l'essentiel de sa portée;

Que c'est également en vain qu'elle prétend pourvoir écarter son application au motif qu'elle aurait déposé la provision pour frais sur un compte séquestre, avant de la reverser à un notaire en vue de l'accomplissement des formalités de mainlevée;

Que d'une part, elle ne justifie nullement du versement effectif de cette provision sur un compte séquestre et que d'autre part, le versement originel a bien été effectué à son profit;

Qu'aux termes de l'acte de cession (page 8 et 9), elle avait reçu "tous pouvoirs d'effectuer toutes les formalités relatives à la vente", et notamment "celles prescrites par les articles L 143-1 et suivants du Code de Commerce pour la purge des inscriptions de privilèges de vendeur et nantissements";

Que les fonds lui étaient destinés à cette fin ;

Que par ailleurs, peu importe le choix personnel qu'elle a fait, du compte de dépôt de ce règlement ;

Que ce choix lui est propre et en aucune façon opposable au liquidateur ;

Que peu importe également qu'elle ait ultérieurement mandaté un notaire pour finalement procéder aux mainlevées ;

Qu'elle a, en toute hypothèse, perçu les fonds, pu en disposer, et les a conservé par devers elle durant 10 mois puisqu'elle ne les aurait transmis au notaire qu'en février 2003 ;

Que la jurisprudence qu'elle invoque selon laquelle les paiements effectués par un séquestre sont exclus du champ d'application de l'article

L 621-108 du Code de commerce est inapplicable (CA 25/11/1997) ; que ce qui est en cause en l'espèce, ce n'est pas le versement qu'elle aurait fait en février 2003 au notaire, mais celui qu'elle a reçu 10 mois auparavant en avril 2002 au titre de la provision pour frais de mainlevée des inscriptions ;

Que les moyens d'irrecevabilité soulevés par la SARL L.P. IMMOBILIER seront écartés ;

Considérant qu'au fond, la SARL L.P. IMMOBILIER soutient que rien ne permettrait d'établir qu'elle aurait eu connaissance de la cessation des paiements de la SARL MARC'H KENTAN, lors de la cession du fonds de commerce, de l'accord sur la répartition des fonds entre les créanciers et des paiements effectués en application de cet accord, dès lors qu'elle pouvait légitimement penser que cette société avait d'autres biens et que la liquidation judiciaire est intervenue plusieurs mois plus tard ;

Que cette argumentation est peu sérieuse ;

Que la S.C.P. LE DORTZ-BODELET s'en rapporte justement à la motivation qu'elle a développé au chapitre NULLITE DES PAIEMENTS, et rappelle le courrier que lui a écrit LA SARL L.P. IMMOBILIER le 26 février 2003, lequel est tout à fait explicite sur la connaissance qu'elle avait de la situation de cessation des paiements de la SARL MARC'H KENTAN ;

Que si elle pouvait penser à l'époque que la SARL était détentrice d'autres actifs, elle n'aurait manifestement pas écrit au liquidateur en ces termes plusieurs mois plus tard, et n'aurait pas non plus à l'évidence été mandatée pour trouver un accord avec les créanciers sur une répartition partielle; qu'elle précise bien du reste dans ce courrier que tout le monde a agi "en toute connaissance de cause";

Qu'il importe peu en outre que la procédure collective soit intervenue officiellement plusieurs mois plus tard, puisqu'il est établi qu'au jour des paiements litigieux elle connaissait déjà l'état de cessation des paiements ;

Que ses moyens seront donc rejetés ;

***

Considérant que l'article L 621-108 du Code de Commerce édicte :

" Les paiements pour dettes échues effectués après la date de la cessation des paiements et les actes à titre onéreux accomplis après cette même date peuvent être annulés, si ceux qui ont traité avec le débiteur ont eu connaissance de la cession des paiements";

Qu'ainsi la nullité est encourue aux quatre conditions cumulatives suivantes :

- un paiement,

- un paiement pour dettes échues,

- un paiement postérieur à la date de la cessation des paiements,

- la connaissance par ceux qui ont traité avec le débiteur de la cessation des paiements.

Que ces quatre conditions sont en l'espèce réunies;

Considérant qu'à la suite de la vente du fonds de commerce de la SARL MARC'H KENTAN, l'agence L.P. IMMOBILIER qui a négocié la vente, rédigé l'acte et sequestré les fonds , a également opéré en avril 2002 divers règlements aujourd'hui contestés au profit des personnes, pour les montants suivants :

- Caisse de Crédit Mutuel de Bretagne71 663,26 euros

- Monsieur et Madame X...1 466,86 euros

2 388,27 euros

514,58 euros

- La Banque SCALBERT -DUPONT

(aujourd'hui Sté HEINEKEN)10 487,31 euros

- L'agence L.P. IMMOBILIER

( pour provision sur frais de radiation):1 875,38 euros

Que les pièces comptables du dossier démontrent qu'il s'agit bien de paiements, y compris au profit de l'Agence L.P. IMMOBILIER qui a perçu une provision pour frais de radiation;

Qu'à tort le tribunal a mis hors de cause la Société L.P. IMMOBILIER, aux motifs qu'elle n'aurait pas fait partie des créanciers, au titre de l'article L 621-108 du Code de Commerce, alors qu'elle a effectivement reçu un paiement ;

Que d'ailleurs, malgré la provision qu'elle a perçue, l'agence n' a jamais cru bon devoir procéder aux radiations ;

Considérant que les paiements litigieux effectués correspondaient bien à des dettes échues ;

Que pour la Caisse de Crédit Mutuel de Bretagne, il s'agissait d'un remboursement de prêt contracté pour l'achat et l'exploitation du fonds en 1998 ;

Que concernant M. et Mme X..., il s'agissait du paiement d'un arriéré de loyers ;

Que pour la banque SCALBERT-DUPONT, il s'agissait du non paiement d'un prêt ;

Que pour l'agence L.P. IMMOBILIER, il s'agissait de frais de radiation ;

Que ces dettes étaient manifestement échues, lorsque le paiement est intervenu ;

Qu'en tout état de cause, s'il s'agissait de dettes non échues, le règlement tomberait sous le coup des dispositions de l'article L 621-107 3o) du Code de Commerce, et la nullité serait donc automatique mais non plus facultative ;

Considérant que le paiement a été effectué postérieurement à la date de la cessation des paiements ;

Que la date de cessation des paiements a été fixée par le tribunal de Commerce de LORIENT au 26 janvier 2001, par jugement du 2 juillet 2004 ;

Que cette décision est passée en force de chose jugée ;

Qu'elle est opposable aux créanciers, quand bien même elle ne leur aurait pas été notifiée individuellement ;

Que la date du 26 janvier 2001 est, donc, sans contestation possible antérieure aux paiements litigieux d'avril 2002 ;

Considérant que ceux qui ont traité avec la SARL MARC'H KENTAN, avaient connaissance de l'état de cessation des paiements de cette dernière ;

Que négociatrice et rédactrice de l'acte de cession du fonds , l'agence L.P. IMMOBILIER avait une parfaite connaissance de la situation déficitaire de la société venderesse, puisqu'ayant mentionné dans l'acte les trois résultats déficitaires des exercices comptables précédents, à savoir :

- exercice 1999: 25 718 Frs

- exercice 2000: 100 000 Frs

- exercice 2001 (10 mois) environ 200 000 Frs

Que pour avoir également mentionné dans l'acte (P2) l'origine de propriété du fonds et sa valeur initiale d'1 400 000 Frs, l'agence savait également pertinemment qu'en moins de trois ans, il avait perdu plus de 60% de sa valeur ;

Que l'énonciation des inscriptions en page 3 de l'acte est également de nature à démontrer qu'elle n'ignorait pas l'état des inscriptions prises sur le fonds en 1999 soit deux ans auparavant pour un montant total de 1 563 105,59 Frs, à savoir le double du prix de vente ;

Qu'enfin, la société L.P.IMMOBILIER a expressément reconnu avoir été informée par la société MARC'H KENTAN de la situation de celle-ci et avoir en conséquence agi en toute connaissance de cause ;

Que le 26 février 2003, elle écrivait, en effet, à la S.C.P. LE DORTZ-BODELET " le représentant de la société MARC'H KENTAN était bien au courant de la situation de la société. Aussi, en toute connaissance de cause, il nous a demandé de trouver un acquéreur et de nous rapprocher des créanciers nantis afin qu'ils donnent leur accord à la cession du fonds de commerce de la société MARC'H KENTAN. Comme vous le savez,

l'ensemble des créanciers nantis ont donné leur accord à la cession en toute connaissance des conditions de celle-ci".

Qu'il est constant que la société L.P.IMMOBILIER était parfaitement au fait de l'état de cessation des paiements de la SARL MARC'H KENTAN ;

Qu'il en est de même de Monsieur et Madame X... ;

Qu'intervenus à l'acte de cession du 8 novembre 2001, ils ont eux aussi eu connaissance de l'ensemble des informations qui y étaient énoncées;

Qu'ils déclarent expressément en page 9 "avoir pris parfaite connaissance de ce qui précède";

Que sur la même page, il est prévu qu'une copie de l'acte de cession leur soit adressée ;

Qu'ils savaient donc pertinemment que la SARL MARC'H KENTAN avait une activité déficitaire depuis l'origine de l'exploitation du fonds, que le fonds avait perdu 60% de sa valeur en trois ans, et que le produit de la vente ne suffirait pas à régler tous les créanciers ;

Que c'est d'ailleurs pourquoi ils vont accepter de négocier une répartition amiable, sachant qu'ils ne pouvaient espérer obtenir un paiement total de leur créance ;

Que leur participation à cette négociation constitue un aveu non équivoque de leur connaissance de l'état de cessation de paiement de la SARL MARC'H KENTAN, ce que confirme l'agence L.P.IMMOBILIER dans son courrier du 26 février 2003 ;

Que c'est donc à tort que le Tribunal a estimé que M. et Mme X... ne pouvaient être informés de l'état de cessation des paiements de la SARL MARC'H KENTAN ;

Que le jugement déféré contredit le jugement du Tribunal de Commerce de LORIENT rendu un an auparavant le 2 juillet 2004, aux termes duquel cette juridiction énonçait clairement " que cette circonstance (la négociation sur la répartition du prix de vente du fonds de commerce), confirme que l'état de cessation de paiement de la société était caractérisé bien avant la cession, ce dont les intervenants à la vente avaient parfaitement conscience, puisqu'ils ont agi dans le seul but d'en éviter ou d'en limiter les conséquences à leur égard, au détriment des autres créanciers";

Que réformant le jugement entrepris, la Cour condamnera M. et Mme X..., à l'instar des autres créanciers, à restituer à la liquidation judiciaire de la SARL MARC'H KENTAN l'intégralité des fonds qu'ils ont perçus;

Considérant qu'il ne fait pas plus de doute que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY et la BANQUE SCALBERT-DUPONT, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la SA HEINEKEN, avaient connaissance de l'état de cessation des paiements de leur débitrice quand elles ont négocié et accepté en avril 2002 un paiement partiel de leurs créances ;

Que créanciers nantis, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY et la banque SCALBERT-DUPONT pouvaient parfaitement s'opposer à la vente du fonds de commerce à vil prix, si elles estimaient avoir une quelconque chance de récupérer le règlement de l'intégralité de leurs créances ;

Que cependant à la suite de l'intervention auprès d'elles de l'Agence L.P. IMMOBILIER, qui de son aveu même connaissait l'état de cessation de paiement de la société MARC'H KENTAN , elles ont non seulement accepté la cession, mais aussi donné leur accord sur une répartition amiable des fonds leur procurant un règlement partiel ;

Qu'elles n'ont pu à l'évidence consentir à ces actes qu'en toute connaissance de cause, ce que confirme l'Agence L.P.IMMOBILIER dans son courrier du 26 février 2003 et ce qu'a jugé le Tribunal de Commerce de LORIENT dans sa décision précitée du 2 juillet 2004 ;

Que le jugement du 19 août 2005 sera confirmé sur ce point ;

Considérant que les quatre conditions visées à l'article L 6212-108 du Code de Commerce sont remplies à l'égard de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY, de M. et Mme X..., de la société HEINEKEN et de l'agence L.P.IMMOBILIER ;

Qu'en application de ces dispositions, les paiements que ceux-ci ont reçus seront annulés et qu'ils seront condamnés à restituer à la liquidation judiciaire de la SARL MARC'H KENTAN les sommes qu'ils ont perçues à savoir :

- la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE PONTIVY: 71 666,26 euros avec intérêts de droit à compter de l'assignation du 27 juillet 2004;

- la SA HEINEKEN : 10 487,31 euros avec intérêts de droit à compter de l'assignation du 30 juillet 2004;

- M. et Mme X...: 4 369,71 euros avec intérêts de droit à compter de l'assignation du 27 juillet 2004;

- la SARL L.P.IMMOBILIER: 1 875,38 euros avec intérêts de droit à compter de l'assignation du 27 juillet 2004;

Considérant que la S.C.P. LE DORTZ-BODELET, ès- qualités de mandataire-liquidateur de la SARL MARC'H KENTAN est fondée à engager la responsabilité de la société L.P. IMMOBILIER et à solliciter sa condamnation à lui verser la somme de 91 469,41 euros à titre de dommages-intérêts ;

Que professionnel de la cession des fonds de commerce, l'Agence L.P. IMMOBILIER était parfaitement informée des dispositions légales y afférents et était tenue de les respecter ;

Qu'en méconnaissance manifeste de ces dispositions, elle a, en toute connaissance de l'état de cessation de paiement de la SARL MARC'H KENTAN :

- négocié avec certains de ses créanciers une répartition amiable du prix de vente du fonds de commerce au préjudice des autres créanciers ;

- régularisé l'acte de vente du fonds ;

- réparti le prix de vente selon l'accord litigieux , au préjudice de l'URSSAF

qui avait pourtant régularisé entre ses mains une opposition au prix de vente, ainsi qu'au préjudice des créances fiscales qui pourtant primaient et le bailleur et les créanciers nantis ;

- prélevé sur le prix de vente d'importants frais de mainlevée des inscriptions de nantissement, qu'elle n'a jamais obtenu ni même sollicité ;

Que les fautes de la société L.P.IMMOBILIER dans le cadre de son mandat sont multiples et établies ;

Qu'elles ont occasionné un préjudice à la liquidation judiciaire, équivalent aux fonds qui ont été détournés, à savoir 91 469,41 euros, correspondant au prix de vente de l'immeuble ;

Qu'aux termes de l'article 1149 du Code Civil, les dommages-intérêts dus aux créanciers sont égaux à la perte dont ils ont été affectés et du gain dont ils ont été privés ;

Qu'en l'espèce, la liquidation judiciaire a été privée de l'intégralité du prix du fonds, ce qui représente son préjudice ;

Considérant que par arrêt du 13 février 2007, la Cour a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à s'expliquer sur le point de savoir si les dispositions de l'article L 621-108 du Code de Commerce ont vocation

a être appliquées aux créanciers qui reçoivent leur paiement en contrepartie

de la sûreté ou du privilège dont ils bénéficient, ou à préciser les créanciers qui auraient reçu paiement au détriment des créanciers de rang préférable;

Que la S.C.P. LE DORTZ-BODELET fait observer à juste titre :

" - A la lecture de l'ancien article L 621-108 du Code de Commerce, il est manifeste que la loi ne distingue pas les créanciers, selon qu'ils bénéficient ou non d'une sûreté ou d'un privilège;

- Les dispositions précitées ont donc vocation à s'appliquer à tous les créanciers, qu'ils soient ou non pourvus d'une sûreté ou d'un privilège, dès lors qu'ils ont reçu paiement en période suspecte, en connaissance de la situation de cessation de paiement de leur débiteur;

- A défaut, il faudrait considérer que les créanciers, ayant eu connaissance de l'état de cessation de paiement bénéficiant d'un privilège, seraient exclus de l'annulation des paiements de la période suspecte;

- Or, ni la loi d'ordre public, ni la jurisprudence ne l'ont considéré ainsi;

- Dès lors que les dispositions de l'article L 621-108 du Code de Commerce sanctionnent, non pas l'ordre de paiement, mais le paiement en lui-même fait en période suspecte au profit d'un créancier ayant connaissance de la cessation des paiements du débiteur, elles ont vocation à s'appliquer à toutes créances, y compris celles bénéficiant d'un privilège;

- Implicitement, la question posée par la présente juridiction peut aussi être celle de son intérêt à agir ; les créanciers payés dans le cas de l'espèce en fraude des droits de la procédure collective bénéficiant en effet d'une sûreté ou d'un privilège, il pourrait être considéré qu'ils avaient de toutes façons vocation à primer les autres créanciers et à être prépayés;

- Or d'une part, il convient de rappeler que les dispositions de l'article l 621-108 du Code de Commerce sont d'ordre public : nul ne peut déroger ou s'en accommoder ;

- la S.C.P. LE DORTZ-BODELET , ès- qualités de mandataire liquidateur, est garante du respect de la loi dans le cadre de la procédure collective et représente par ailleurs l'intérêt de tous les créanciers, privilégiés ou chirographaires;

- Ceci constitue en premier lieu son intérêt à agir;

- D'autre part, ainsi qu'il a déjà été dit, les dispositions précitées n'interviennent pas pour sanctionner le non respect de l'ordre des paiements , mais le paiement en lui-même, dès lors qu'il s'est fait en connaissance de l'état de cession des paiements du débiteur;

La S.C.P. LE DORTZ-BODELET a donc là aussi à un second titre intérêt à agir, pour faire constater les paiements frauduleux au sens de la loi, à charge pour elle de répartir ultérieurement les fonds récupérés entre créanciers privilégiés et éventuellement chirographaires."

Considérant que dans ses dernières écritures, la Société L.P. IMMOBILIER s'étonne enfin que la S.C.P. LE DORTZ-BODELET n'ait pas remis en cause les autres paiements que l'agence avait effectués au cours

du mois d'avril 2002 au profit du Trésor Public ;

Que si celle-ci n'a pas remis en cause les paiements effectués au profit du Trésor Public, autre créancier privilégié, le 8 avril 2002 pour 1 387,74 € et 814,54 € , c'est tout simplement parce que, demeuré étranger à l'accord amiable de répartition frauduleux organisé par la Société L.P. IMMOBILIER, le Trésor pouvait difficilement être suspecté d'avoir eu connaissance de l'état de cessation des paiements de la SARL MARC'H KENTAN ;

Considérant qu'il convient, dès lors, de faire droit aux prétentions principales de la SCP LE DORTZ & BODELET, es qualité ;

Que les autres parties, qui succombent principalement, supporteront les dépens ;

Que l'équité commande d'allouer à la SCP LE DORTZ & BODELET, une somme de 2000 euros en compensation des ses frais non répétibles de procédure ;

PAR CES MOTIFS

Confirmant le jugement entrepris,

Annule les paiements provenant de la vente du fonds de commerce de la SARL MARC'H KENTAN effectués au profit de la Caisse de CREDIT MUTUEL de PONTIVY et de la SA HEINEKEN, les 8 et 22 avril 2002 ;

Condamne la Caisse de CREDIT MUTUEL de PONTIVY à payer à la SCP LE DORTZ & BODELET, es qualité, la somme de 71.663,26 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 27 juillet 2004 et la SA HEINEKEN la somme de 10.487,31 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 30 juillet 2004 ;

Infirmant le jugement déféré,

Annule les paiements provenant de la vente du fonds de commerce de la SARL MARC'H KENTAN effectués au profit des époux X... et la SARL L.P. IMMOBILIER le 22 avril 2002 ;

Condamne les époux X... à verser à la SCP LE DORTZ & BODELET, es qualité, la somme de 4.369,71 euros avec intérêts aux taux légal à compter de l'assignation du 27 juillet 2004, et la SARL L.P. IMMOBILIER la somme de 1.875,38 euros avec intérêts au taux légal à compter de la même assignation ;

Condamne la SARL L.P. IMMOBILIER à payer à la SCP LE DORTZ & BODELET, es qualité, la somme de 91.469,41 euros à titre de dommages-intérêts ;

Condamne in solidum la Caisse de CREDIT MUTUEL de PONTIVY, la Société HEINEKEN, les époux X... et la Société L.P. IMMOBILIER à payer à la SCP LE DORTZ & BODELET, es qualité, une somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne les mêmes in solidum aux dépens, qui pour ceux d'appel, seront recouvrés selon les modalités de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ;

Rejette toute prétention autre ou contraire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 05/06296
Date de la décision : 15/01/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lorient


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-01-15;05.06296 ?
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