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22/11/2007 | FRANCE | N°06/03375

France | France, Cour d'appel de Rennes, 22 novembre 2007, 06/03375


Première Chambre B





ARRÊT No



R.G : 06/03375













S.A. LE CONTINENT IARD

Société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT



C/



S.A. GRAPHI CENTRE

S.A.S. ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS

Société d'assurance SMABTP

Compagnie ACE EUROPEAN GROUP LIMITED

S.A.R.L. VPI

S.A.R.L. ETABLISSEMENTS DERVAUX

Compagnie LE FINISTERE

S.A. GENERALI ASSURANCES IARD

Société EURO CHIMIE INDUSTRIE

Société FABRICATION C

HIMIQUE DU HAINAUT







POURVOI G0811723 du 13/02/2008 (nos réf CA RENNES : pourvoi 10/2008 B1)













réformation partielle















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE...

Première Chambre B

ARRÊT No

R.G : 06/03375

S.A. LE CONTINENT IARD

Société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT

C/

S.A. GRAPHI CENTRE

S.A.S. ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS

Société d'assurance SMABTP

Compagnie ACE EUROPEAN GROUP LIMITED

S.A.R.L. VPI

S.A.R.L. ETABLISSEMENTS DERVAUX

Compagnie LE FINISTERE

S.A. GENERALI ASSURANCES IARD

Société EURO CHIMIE INDUSTRIE

Société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT

POURVOI G0811723 du 13/02/2008 (nos réf CA RENNES : pourvoi 10/2008 B1)

réformation partielle

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2007

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Françoise SIMONNOT, Président,

Mme Rosine NIVELLE, Conseiller,

Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Conseiller,

GREFFIER :

Patricia IBARA, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 18 Septembre 2007, Mme Rosine NIVELLE, Conseiller, entendue en son rapport.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 22 Novembre 2007, après prorogation de la date du délibéré, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats.

****

APPELANTES & INTIMÉES :

Société LE CONTINENT IARD devenue LA CIE GENERALI FRANCE, société anonyme à conseil d'administration,

7 boulevard Haussmann

75009 PARIS

représentée par la SCP BAZILLE J.J. & GENICON S., avoués

assistée de la SELARL OLIVE - AZINCOURT, avocats

Société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT

140 avenue Jules Guesde

59124 ESCAUDAIN

représentée par la SCP GAUTIER-LHERMITTE, avoués

assistée de Mes BERTHAULT-COSNARD, avocats

INTIMÉES :

S.A. GRAPHI CENTRE

ZAC de la Guénaudière

35300 FOUGERES

représentée par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués

assistée de Me HEBERT, avocat

S.A.S. PINTO ET FILS (ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE)

ZAC de la Guénaudière

20 rue des Français Libres

35300 FOUGERES

représentée par la SCP GAUVAIN & DEMIDOFF, avoués

assistée de Me GABOREL, avocat

Société SMABTP Société Mutuelle d'assurance

6 & 8 allée du Batiment

35016 RENNES CEDEX

représentée par la SCP GAUVAIN & DEMIDOFF, avoués

assistée de Me GABOREL, avocat

Compagnie ACE EUROPEAN GROUP LIMITED

8 avenue de l'Arche

Le Colisée

92419 COURBEVOIE CEDEX

représentée par la SCP CASTRES, COLLEU, PEROT & LE COULS-BOUVET, avoués

assistée de Me CHAUCHARD, avocat

S.A.R.L. VPI

10 rue Bad Munstereifel

35300 FOUGERES

représentée par la SCP GUILLOU & RENAUDIN, avoués

assistée de Me MASSART, avocat

S.A.R.L. ETABLISSEMENTS DERVAUX

Assignée selon procès-verbal de recherches du 12 octobre 2006 au :

80, Rue Carnot

35260 CANCALE,

et à personne par exploit du 6 octobre 2006 signifié à :

S.A.R.L. VERNIS PEINTURE INDUSTRIE, VPI, venant aux droits de ETABLISSEMENTS DERVAUX

10 rue Bad Munstereifel

35300 FOUGERES

cette dernière étant représentée par la SCP GUILLOU & RENAUDIN, avoués

et assistée de Me MASSART, avocat

Cie LE FINISTERE, Société d'Assurance

3 rue de Kervilou

29000 QUIMPER

représentée par la SCP D'ABOVILLE DE MONCUIT SAINT-HILAIRE & LE CALLONNEC, avoués

assistée de la SELARL ARMEN, avocats

S.A. GENERALI ASSURANCES IARD venant aux droits de la compagnie LE CONTINENT

5 rue de Londres

75456 PARIS CEDEX 09

la compagnie LE CONTINENT devenue LA CIE GENERALI FRANCE, société anonyme à conseil d'administration,

7 boulevard Haussmann

75009 PARIS

cette dernière étant représentée par la SCP BAZILLE J.J. & GENICON S., avoués

assistée de la SELARL OLIVE - AZINCOURT, avocats

(Intimée & Appelante)

Société EURO CHIMIE INDUSTRIE

1 et 3 rue du Général de Gaulle

59273 PERONNE EN MELANTOIS

représentée par la SCP JEAN LOUP BOURGES & LUC BOURGES, avoués

assistée de Me HASCOET, HASCOET & ASSOCIES, association d'avocats

(Intimée & appelante incidente)

Société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT

140 avenue Jules Guesde

59124 ESCAUDAIN

représentée par la SCP GAUTIER-LHERMITTE, avoués

assistée de Mes BERTHAULT-COSNARD, avocats

(Intimée & Appelante)

EXPOSE DES FAITS-PROCÉDURE-OBJET DU RECOURS

La S.A. GRAPHI CENTRE, qui a pour activité l'imprimerie, ayant souhaité rénover les sols de son atelier de production, a passé commande de travaux à la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS suivant devis accepté du 19 novembre 2002 ; celle-ci a alors passé commande des produits nécessaires, et notamment de DECACIM, produit décapant, à la société DERVAUX devenue VPI ;

Le décapage a été effectué les 23 et 24 décembre 2002 ;

A la réouverture des locaux la société GRAPHI CENTRE constatait que trois presses offset MAN ROLLAND étaient rougies ;

A la demande de la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS une expertise était ordonnée suivant ordonnance du Président du Tribunal de Commerce de Rennes en date du 28 février 2003 et confiée à Monsieur G... ;

Sur le fondement des conclusions de ce rapport, la S.A. GRAPHI CENTRE a fait délivrer assignation les 28 février, 1er et 2 mars 2005 à la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS et à sa compagnie d'assurance la SMABTP, ainsi qu'à la Compagnie d'Assurance ACE EUROPE FRANCE, son assureur au titre d'une police multirisques industrielle "bris de machines", d'avoir à comparaître devant le Tribunal de Commerce de Rennes pour avoir paiement notamment de la somme de 831 162 euros à titre de dommages et intérêts ;

Suivant assignation en date du 30 mars 2005 la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS a fait intervenir à la cause :

- la S.A.R.L. VPI et son assureur la Compagnie d'Assurance LE CONTINENT IARD (devenue GENERALI FRANCE) ;

- la S.A.R.L. ETABLISSEMENTS DERVAUX représentée par son liquidateur amiable Gérard DERVAUX qui a été assignée à Mairie ;

- la Compagnie d'Assurance LE FINISTERE, assureur des Etablissements DERVAUX ;

- la Société EURO CHIMIE INDUSTRIE

- la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT ;

Par jugement en date du 30 mars 2006 le Tribunal de Commerce de Rennes a :

- débouté la Compagnie d'Assurance ACE EUROPE FRANCE de sa demande de disjonction d'instance ;

- condamné in solidum les sociétés PINTO ET FILS et SMABTP à payer à la Compagnie d'Assurance ACE EUROPE FRANCE la somme de 448 538 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2005, outre 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- condamné in solidum les sociétés PINTO et SMABTP à payer à GRAPHI CENTRE une somme de 561 294 euros, outre 10 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- débouté la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS de sa demande reconventionnelle à l'encontre de la S.A. GRAPHI CENTRE ;

- déclaré recevable mais non fondée la demande des sociétés PINTO et SMABTP contre la Compagnie d'Assurance LE FINISTERE ;

- condamné in solidum les Sociétés ETABLISSEMENTS DERVAUX, VPI, GENERALI FRANCE, EURO CHIMIE INDUSTRIE et FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT à payer à la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS et à la S.A. SMABTP la somme de 757 374 euros, outre 5000 euros au titre des frais irrépétibles ;

- assorti ces condamnations de l'exécution provisoire ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;

Par déclaration au greffe de la Cour d'Appel en date du 26 mai 2006 la Société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT a interjeté appel de cette décision ;

Elle demande à la Cour, aux termes de ses conclusions récapitulatives en date du 17 juillet 2007, de débouter la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS de toutes ses demandes dirigées à son encontre ;

Subsidiairement de réduire à de plus justes proportions l'indemnisation sollicitée par les demandeurs et de fixer le point de départ des intérêts légaux dus aux demandeurs à la date du jugement ayant retenu la responsabilité de PINTO ;

En tout état de cause, de condamner la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS à lui payer la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Le même jour la Compagnie d'Assurance LE CONTINENT IARD, devenue GENERALI FRANCE, a également interjeté appel du jugement rendu le 30 mars 2006 par le Tribunal de Commerce de Rennes ;

Aux termes de ses conclusions récapitulatives en date du 12 septembre 2007, elle demande à la Cour en sa qualité d'assureur de la S.A.R.L. VPI, de :

- dire que la garantie de GENERALI FRANCE, venant aux droits de la Compagnie d'Assurance LE CONTINENT IARD, n'est pas acquise au bénéfice de la S.A.R.L. VPI ;

- réformer en conséquence le jugement en ce qu'il a retenu cette garantie et condamné GENERALI FRANCE in solidum à indemniser la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS et la S.A. SMABTP ;

A titre subsidiaire et au cas où la garantie de GENERALI FRANCE serait confirmée, de constater l'absence de toute responsabilité de la S.A.R.L. VPI dans la survenance des désordres constatés et de réformer sur ce point le jugement déféré ;

En tout état de cause de dire que la S.A.R.L. VPI sera garantie de toutes les condamnations prononcées à son égard par les sociétés EURO CHIMIE INDUSTRIE et FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT ;

De dire que GENERALI FRANCE ne pourra, quoi qu'il en soit, être tenue qu'à hauteur de la somme de 762 245 euros au titre du contrat souscrit par VPI ;

Dans tous les cas de condamner la partie succombante à lui payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

La SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS et la SMABTP, dans leurs conclusions récapitulatives du 29 juin 2007, demandent à la Cour, réformant la décision entreprise, de :

- renvoyer la S.A. GRAPHI CENTRE à justifier de ses préjudices réels en fonction de l'option qu'elle dit avoir mise en oeuvre ;

- la débouter de toute demande d'indemnisation fondée sur des simulations ;

- la condamner à lui payer la somme de 11 808,14 euros ;

- ordonner la compensation de cette somme et de toutes créances indemnitaires qui viendrait à être consacrée au profit de GRAPHI CENTRE ;

- dire que la condamnation prononcée au profit de la société ACE ne pourra produire d'intérêts au taux légal, à défaut de réformation, qu'à compter du prononcé du jugement ;

- condamner la S.A.R.L. VPI, les établissements DERVAUX, la Compagnie d'Assurance LE FINISTERE, GENERALI FRANCE, la société EURO CHIMIE INDUSTRIE, et la FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT, in solidum ou les uns à défaut des autres à la garantir de toutes les condamnations qui viendraient à être prononcées contres elles ;

- les condamner en outre au paiement de la somme de 7 600 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

La S.A.R.L. VPI demande à la Cour, aux termes de ses conclusions récapitulatives en date du 6 SEPTEMBRE 2007, réformant la décision déférée, de :

- dire que la cause du sinistre dont se plaint la S.A. GRAPHI CENTRE n'est pas l'emploi du produit DECACIM mais la non-protection des parties métalliques des machines se trouvant à l'intérieur de l'usine lors de la pulvérisation du produit, ce que la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS, en sa qualité de professionnelle ne pouvait ignorer ;

- dire que sa responsabilité ne peut être engagée en raison d'une préconisation dont la société DERVAUX est à l'origine ;

A titre subsidiaire, de condamner la société EURO CHIMIE INDUSTRIE à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre et relative au produit DECACIM ;

De confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la GENERALI FRANCE doit garantir la S.A.R.L. VPI de toutes condamnations prononcées à son encontre ;

De condamner la partie qui succombera à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

La Compagnie d'Assurance LE FINISTERE, assureur de la société DERVAUX demande à la Cour de dire que les conditions d'application de sa garantie ne sont pas remplies ; et de débouter en conséquence toutes les parties de leurs demandes dirigées contre elle ;

Subsidiairement de dire et juger que la société DERVAUX et la S.A.R.L. VPI n'ont commis aucune faute ;

En conséquence, de dire que les sociétés EURO CHIMIE INDUSTRIE et FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT devront solidairement les garantir de toutes condamnations qui pourrait intervenir contre elles ;

De condamner au principal la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS et subsidiairement les sociétés EURO CHIMIE INDUSTRIE et FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre ;

La société EURO CHIMIE INDUSTRIE, aux termes de ses conclusions récapitulatives en date du 4 septembre 2007, demande à la Cour de constater que la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS a bénéficié d'une information suffisante quant à l'utilisation du produit DECACIM et que la société EURO CHIMIE INDUSTRIE n'a pas manqué à son devoir d'information ;

De débouter en conséquence la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS de l'ensemble des ses demandes dirigées contre elle ;

A titre subsidiaire de condamner in solidum les sociétés VPI, GENERALI, et FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT à la relever et garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;

En tout état de cause de condamner la partie succombante au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

La S.A. GRAPHI CENTRE, aux termes de ses conclusions en date du 22 février 2007, demande à la Cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de condamner in solidum la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS et son assureur la S.A. SMABTP ou la partie qui succombera en cause d'appel à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

La Compagnie d'Assurance ACE EUROPE FRANCE, assureur de la S.A. GRAPHI CENTRE, dans ses conclusions en date du 27 avril 2007, demande à la Cour de confirmer en tous points le jugement dont appel sauf en ce qui concerne les intérêts sur les sommes allouées à GRAPHI CENTRE ;

Sur ce point elle demande que ces intérêts soient exigibles non pas à compter du 2 mars 2005, date de l'assignation, mais à compter du 16 janvier 2004 ;

Y additant, elle demande la condamnation in solidum de la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT, de la Compagnie d'Assurance LE CONTINENT IARD, de la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS et de la S.A. SMABTP ou de toute partie succombante à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties la Cour se réfère à la décision attaquée, et aux écritures des parties régulièrement signifiées ;

La société VPI a été assignée par acte du 6 octobre 2006 remis à personne habilitée comme venant aux droits de la société DERVAUX à l'initiative de la compagnie GENERALI FRANCE ;

La société DERVAUX a ensuite été assignée par acte du 12 octobre 2006 à la requête de la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT. L'huissier qui s'est rendu au dernier domicile connu de la société DERVAUX a appris que cette société avait été reprise par la société VPI ;

La société VPI se présentant sur son papier commercial comme "VPI ex DERVAUX", il y a lieu de considérer qu'elle vient effectivement aux droits de la société DERVAUX ;

La société VPI ayant constitué avoué, le présent arrêt sera contradictoire ;

MOTIFS DE LA COUR

Vu les conclusions des parties,

Sur les demandes à l'encontre de la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS et de la S.A. SMABTP

Considérant qu'il n'est pas contesté qu'à la fin du mois de décembre 2002 la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS a effectué dans les locaux de la S.A. GRAPHI CENTRE des opérations de décapage des sols avec un produit conçu à cet effet, le DECACIM ; que ce produit, qui a été appliqué le 23 décembre, s'est révélé corrosif pour les machines présentes dans les ateliers ;

Considérant qu'il résulte de l'expertise ordonnée à l'initiative même de la société PINTO que le produit DECACIM est très corrosif quelle que soit sa dilution à l'eau et le procédé d'application ; qu'il ne pouvait pas être utilisé dans une atmosphère au contact avec les machines ; que l'utilisation dans de telles conditions nécessitait une protection des machines étanche à l'air ;

Considérant qu'il appartenait à la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS, professionnel reconnu, d'assurer cette protection ; qu'il incombe effectivement à un professionnel de la peinture d'anticiper sur les dommages que peut causer un produit que l'on sait très corrosif sur les objets présents dans le local où il est utilisé ; que la protection des machines apparaît comme une précaution élémentaire ;

Considérant au surplus que l'expert a encore noté que la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS a utilisé le DECACIM avec un dosage double de celui qui était préconisé sur la notice ;

Considérant que c'est donc à bon droit que le Tribunal de Commerce de Rennes a retenu sa responsabilité sur le fondement de l'article 1147 du Code Civil ;

Considérant que les machines endommagées sont des presses offset de marque "MAN ROLLAND" ;

Que, sur l'évaluation du préjudice de la S.A. GRAPHI CENTRE, l'expert avait envisagé trois hypothèses :

* la réparation de l'ensemble de ces presses,

* le remplacement de la presse 705 et la réparation des presses 702 et 704 ;

* le remplacement de l'ensemble des presses ;

Que la S.A. GRAPHI CENTRE a opté pour cette dernière solution ; qu'elle justifie son choix en faisant valoir que la réparation des machines ne présenterait pas de garanties suffisantes ; qu'elle craint en effet que les effets de la corrosion se propagent sur des pièces internes non encore affectées ;

Considérant qu'il suffit que la victime d'un dommage justifie du montant de ce dommage ; qu'elle n'a pas besoin de justifier de sa réparation effective ; qu'elle est seule juge du moment où elle effectuera la remise en état de ses biens ;

Considérant par ailleurs que l'expert a chiffré la perte d'exploitation de l'entreprise en se fondant sur les pièces comptables sur lesquelles la société n'a formé aucune réserve lors des opérations d'expertise ;

Considérant que le Tribunal a chiffré à la somme de 1 279 700 euros le montant du préjudice subi par S.A. GRAPHI CENTRE, comprenant le coût effectif de remplacement des presses augmenté de la perte d'exploitation correspondant au temps nécessaire à leur remplacement ; que de cette somme a été déduite la vétusté pour un montant de 269 868 euros ; que le montant total de l'indemnisation est fixé à 1 009 832 euros ;

Que ce chiffre n'est pas remis en cause par la S.A. GRAPHI CENTRE qui ne conteste pas avoir été indemnisées à hauteur de 448 538 euros par son assureur la Compagnie d'Assurance ACE EUROPE FRANCE ; qu'elle est fondée à réclamer la différence soit 561 294 euros à la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS et à son assureur la S.A. SMABTP ;

Considérant que la décision critiquée sera en conséquence confirmée sur ce point ;

Considérant que la Compagnie d'Assurance ACE EUROPE FRANCE demande que les intérêts sur les sommes dues à elle par la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS (448 538 euros) soient décomptés non pas à la date de l'assignation du 2 mars 2005 mais à compter de la date à laquelle elle a indemnisé son assuré, soit le 16 janvier 2004 ; que seule une mise en demeure peut faire courir les intérêts ; que l'assignation valant mise en demeure, les intérêts courent au taux légal à partir du 2 mars 2005, le jugement étant confirmé sur ce chef ;

Considérant que la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS forme une demande reconventionnelle en faisant valoir que son intervention auprès de la S.A. GRAPHI CENTRE n'a fait l'objet d'aucun paiement ; que si l'ensemble des travaux prévus au devis n'a pas été réalisé, elle produit au dossier de la Cour une facture d'un montant 10 160,80 euros HT correspondant à la pulvérisation de DECACIM, au rinçage et à la pose de 2 couches de Mosulit ;

Considérant que cette facture est la contrepartie d'un travail effectif dont la mauvaise qualité a été indemnisée par l'octroi de dommages et intérêts ;

Que la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS est donc fondée à réclamer cette somme au paiement de laquelle la S.A. GRAPHI CENTRE sera condamnée ;

Sur les appels en garantie

Considérant que la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS et son assureur la S.A. SMABTP ont fait assigner en garantie :

- les sociétés DERVAUX et VPI qui ont préconisé le produit DECACIM ainsi que leurs assureurs la Compagnie d'Assurance LE FINISTERE et GENERALI FRANCE qui vient aux droits de la Compagnie d'Assurance LE CONTINENT IARD ;

- la société EURO CHIMIE INDUSTRIE en tant que grossiste distributeur du produit ;

- la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT en tant que fabricant du DECACIM ;

Considérant que le produit DECACIM a été préconisé à la société PINTO par la société DERVAUX avant que celle-ci ne soit reprise par la S.A.R.L. VPI le 2 décembre 2002 ; que sur les 70 litres de produit livrés à PINTO, 65 litres l'ont été par VPI ; que ces deux sociétés ont eu des relations contractuelles avec PINTO, ont manqué à leur obligation de conseil et ont toutes deux contribué au dommage, qu'elles seront en conséquence tenues de garantir la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS de toutes les condamnations prononcées contre elle ;

Considérant que le DECACIM était par ailleurs commercialisé par la société EURO CHIMIE INDUSTRIE ;

Que la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS reproche à ces deux sociétés un défaut d'information et de conseil compte tenu de la nature particulièrement toxique du produit ;

Considérant qu'il résulte des dires de l'expert non-contredits par la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS que celle-ci a été destinataire d'une fiche technique qui lui a été remise par la S.A.R.L. VPI, intitulée "Information sur les produits/services" précisant le caractère toxique et corrosif de DECACIM ; que le paragraphe "Précautions" de cette fiche précise : "Assurer la protection des supports oxydables" ; qu'il était conseillé en outre de procéder à des essais avant usage ;

Considérant que l'expert a également procédé à l'examen des étiquettes apposées sur 3 bidons de DECACIM fournis par PINTO, VPI et FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT, fabricant du produit ;

Que toutes trois font mention du caractère corrosif du produit ;

Que deux d'entre elles, celle de PINTO et celle de FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT et certainement aussi celle de VPI (l'étiquette étant partiellement masquée), précisent que DECACIM "contient un inhibiteur de corrosion ce qui permet au métal de garder un aspect neuf lors de l'action du dérouillement" ;

Considérant que les étiquettes apposées sur les bidons précisent également que DECACIM s'applique à l'état pur ;

Considérant que de telles mentions laissent penser que le produit est inoffensif pour les métaux ; qu'elles sont en contradiction avec les précautions d'emploi préconisées par la fiche technique ; qu'une telle confusion dans les informations sur l'utilisation d'un produit que chacun s'accorde à considérer comme dangereux constitue à la charge des fournisseurs et du fabricant, un manquement à leur devoir de conseil qui a indiscutablement contribué à la négligence dont a fait preuve la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS ;

Considérant qu'il sera fait observer in fine que la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT, qui est le fabriquant du produit et le rédacteur des étiquettes et de la fiche technique, était particulièrement bien placée pour opérer les mises en garde nécessaires tant à l'égard de ses distributeurs qu'à l'égard des utilisateurs, fussent-ils professionnels, les informations confuses ne pouvant que s'interpréter en faveur de l'utilisateur, même professionnel ;

Considérant qu'il convient en conséquence de confirmer sur ce point la décision critiquée en ce qu'elle a estimé les quatre intervenants (DERVAUX, S.A.R.L. VPI, EURO CHIMIE INDUSTRIE et FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT) responsables solidairement du dommage causé à PINTO ;

Considérant que la fiche technique et les étiquettes apposées sur les bidons ont été établis par EURO CHIMIE INDUSTRIE ;

Que cette société aurait dû alerter VPI et DERVAUX sur les conditions particulières de l'utilisation du DECACIM dont les vapeurs étaient nocives pour le métal ;

Qu'elle sera donc condamnée à garantir la S.A.R.L. VPI et les établissements DERVAUX de toutes condamnations prononcées contre eux ;

Considérant que la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT fabrique, conditionne et étiquette le DECACIM qu'elle commercialise directement ou par le biais d'intermédiaires depuis le début de l'année 1998 comme en témoignent des factures en date de février 1998 ;

Que l'article 1386-5 issu de la loi du 19 mai 1998 n'est pas applicable en l'espèce dans la mesure où le produit lui-même n'a jamais été considéré comme défectueux ;

Considérant qu'il pèse sur le fabriquant une obligation d'information à l'égard de ses co-contractants comme à l'égard des utilisateurs finaux ; que la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT a laissé commercialiser un produit corrosif avec des étiquettes prêtant à confusion ; qu'il lui appartenait d'informer tous ses clients des problèmes liés à l'utilisation du DECACIM et des précautions à prendre ce qu'elle n'a pas fait ;

Qu'elle sera en conséquence condamnée à garantir la société EURO CHIMIE INDUSTRIE de toutes les condamnations prononcées à son égard ;

Sur l'assurance des Etablissements DERVAUX par la Compagnie d'Assurance LE FINISTERE

Considérant que les établissements DERVAUX étaient assurés auprès de la Compagnie d'Assurance LE FINISTERE au titre de leur responsabilité civile exploitation ; que cette assurance ne couvrait pas les produits après livraison ;

Mais considérant en l'espèce que d'une part il ne s'agit pas du produit lui-même mais des conditions de son utilisation qui sont en cause ; qu'il n'est pas contesté que ce sont bien les établissements DERVAUX qui sont à l'origine de la préconisation de DECACIM ;

Que la Compagnie d'Assurance LE FINISTERE doit donc bien être condamnée à indemniser les établissements DERVAUX, le jugement étant infirmé de ce chef ;

Sur l'assurance de la S.A.R.L. VPI par GENERALI FRANCE

Considérant que la S.A.R.L. VPI a souscrit un contrat d'assurance "RESPONSABILITÉ CIVILE DES ENTREPRISES" police no 528 531 429 signé par les parties le 23 janvier 2003 auprès de la Compagnie d'Assurance LE CONTINENT IARD aux droits de laquelle vient GENERALI FRANCE ;

Que ce contrat avait pour objet de garantir la S.A.R.L. VPI pour ses activités déclarées par elle à savoir : "Négoce de peintures, vernis industriels uniquement fabriqués en France" ;

Considérant que GENERALI FRANCE estime ainsi que le décapage chimique n'est pas un négoce et n'entre pas dans le champ des activités assurées ;

Mais considérant que le négoce de peintures et vernis ne peut s'entendre au sens strict mais inclut obligatoirement tout ce qui est l'accessoire des peintures et vernis et en particulier la vente et la pose de décapant étant observé que la S.A.R.L. VPI fait justement remarquer que la prime d'assurance est calculée sur l'ensemble du chiffre d'affaires et pas uniquement sur celui afférent à la vente de peinture ;

Considérant qu'il convient en conséquence de confirmer également sur ce point la décision déférée ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés les frais irrépétibles qu'ils ont exposés en cause d'appel et qu'il y a lieu en conséquence de condamner la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT et GENERALI FRANCE à payer à la S.A. GRAPHI CENTRE et à sa Compagnie d'Assurance ACE EUROPE FRANCE, à la S.A.R.L. VPI et à la société EURO CHIMIE INDUSTRIE la somme de 2000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant que succombant en appel la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT et GENERALI FRANCE supporteront les dépens d'appel à l'exception de ceux de la Compagnie d'Assurance LE FINISTERE, également succombante en ce qui la concerne et qui conservera ses propres dépens de première instance et d'appel ;

DÉCISION

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Réformant partiellement le jugement déféré,

Condamne la S.A. GRAPHI CENTRE à payer à la SAS ENTREPRISE DE PEINTURE ET VITRERIE PINTO ET FILS la somme de 10 160,80 euros H.T.,

Ordonne la compensation avec les sommes dues à la S.A. GRAPHI CENTRE à titre de réparation,

Condamne la Compagnie d'Assurance LE FINISTERE à garantir les Etablissements DERVAUX de toutes les condamnations prononcées à son encontre,

Condamne la société EURO CHIMIE INDUSTRIE à garantir la S.A.R.L. VPI et les établissements DERVAUX de toutes condamnations prononcées à leur encontre,

Condamne la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT à garantir la société EURO CHIMIE INDUSTRIE de toute condamnation prononcée à son encontre,

Confirme pour le surplus le jugement critiqué,

Condamne la société FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT et GENERALI FRANCE à payer à la société Etablissements DERVAUX, à la S.A.R.L. VPI, à la Société EURO CHIMIE INDUSTRIE, à la S.A. GRAPHI CENTRE et à la Compagnie d'Assurance ACE EUROPE FRANCE la somme de 2000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne la FABRICATION CHIMIQUE DU HAINAUT et GENERALI FRANCE aux dépens d'appel, ceux-ci pouvant être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Dit que la Compagnie d'Assurance LE FINISTERE conservera ses propres dépens de première instance et d'appel ceux-ci pouvant être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 06/03375
Date de la décision : 22/11/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Rennes


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-11-22;06.03375 ?
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