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25/09/2007 | FRANCE | N°06/04643

France | France, Cour d'appel de Rennes, 25 septembre 2007, 06/04643


Cinquième Chamb Prud'Hom





ARRÊT No 395 et 396



R.G : 06/04643 et 06/05246













CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MALADIE DE BRETAGNE



C/



M. Christophe X...


MADAME LA PREFETE DE LA REGION BRETAGNE PREFETE D'ILLE ET VILAINE





POURVOI No 74/07 DU 23.11.07

Réf Cour de Cassation No

P 0745005







Jonction et

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au

recours















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2007







COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU...

Cinquième Chamb Prud'Hom

ARRÊT No 395 et 396

R.G : 06/04643 et 06/05246

CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MALADIE DE BRETAGNE

C/

M. Christophe X...

MADAME LA PREFETE DE LA REGION BRETAGNE PREFETE D'ILLE ET VILAINE

POURVOI No 74/07 DU 23.11.07

Réf Cour de Cassation No

P 0745005

Jonction et

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2007

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Louis-Marc PLOUX, Président de Chambre,

Madame Simone CITRAY, Conseiller,

Madame Catherine LEGEARD, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Guyonne DANIELLOU, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 12 Juin 2007

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé par l'un des magistrats ayant participé au délibéré, à l'audience publique du 25 Septembre 2007; date indiquée à l'issue des débats: 18 septembre 2007.

****

APPELANTE :

CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MALADIE DE BRETAGNE

236 rue de Chateaugiron

35030 RENNES CEDEX

Incidemment intimée;

représentée par Me Alain BERTHAULT, avocat au barreau de RENNES

INTIMES :

Monsieur Christophe X...

1 allée de la Prairie Neuve

35200 RENNES

Appelant incident,

comparant en personne

MADAME LA PREFETE DE LA REGION BRETAGNE PREFETE D'ILLE ET VILAINE

Direction Régionale des Affaires Sanitaires et Sociales

20 rue d'Isly

35000 RENNES

non comparante bien que régulièrement convoquée;

INTERVENANTE :

ASSEDIC DE BRETAGNE

Service juridique

36 rue de Léon

35053 RENNES CEDEX 09

non comparante bien que régulièrement convoquée.

-------------------------

Par actes des 11 juillet 2006 et 24 juillet 2006, la Caisse Régionale d'Assurance de Bretagne (CRAM) et Monsieur Christophe X... interjetaient appel d'un jugement rendu le 19 juin 2006 par le Conseil de Prud'hommes de Rennes qui, dans le litige les opposant, déclarait que son licenciement n'était pas fondé sur une cause réelle et sérieuse et condamnait l'employeur à lui verser : des dommages et intérêts pour harcèlement moral, des dommages et intérêts pour licenciement abusif et non respect de la procédure et un complément d' indemnité conventionnelle de licenciement.

La CRAM de Bretagne maintient que Monsieur X..., malgré l'aide constante qui lui a été prodiguée dans les différents services où il a été affecté, n'a jamais su s'adapter à ses fonctions. Ayant fait preuve d'un manque de motivation et d'implication, refusant d'obéir aux ordres de ses supérieurs, ayant une attitude insolente à l'égard du personnel, ses difficultés relationnelles ne permettaient plus de le conserver au sein de la CRAM et de lui confier la moindre mission.

L'employeur conteste que Monsieur X... ait fait l'objet d'un harcèlement moral et que son état de santé, qui s'est dégradé en 2004, en soit la cause. Il est demandé à la Cour d'infirmer le jugement et de débouter le salarié de toutes ses demandes. A titre subsidiaire, si le jugement était confirmé, de réduire dans des proportions importantes les droits du salarié.

Monsieur X... conclut à la confirmation du jugement dans son principe, mais demande à la Cour de réévaluer ses préjudices résultant de la rupture abusive de son contrat et du harcèlement moral dont il a été victime. Il réclame les sommes suivantes:

-à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel, moral et physique: 60 000 euros

-à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif: 130 000 euros

-complément d'indemnité de licenciement: 762 euros

-à titre de dommages et intérêts au titre de l'article 1382 du code civil pour faute de l'employeur: 150 000 euros

- article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile: 4000 euros

Madame le Préfet de la Région Bretagne , Préfet d'Ille et Vilaine, représentée par la DRASS régulièrement convoquée à comparaître à l'audience du 12 juin 2007, n'a pas comparu et ne s'est pas faite représenter.

Pour un exposé plus complet de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère au jugement déféré et aux conclusions régulièrement communiquées à l'adversaire qui ont été déposées et développées à l'audience des plaidoiries du 12 juin 2006 puis versées dans les pièces de procédure à l'issue des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Rappel sommaire des faits

Recruté le 25 juillet 1991 par la Caisse Régionale d'Assurance Maladie de Bretagne en qualité de cadre affecté au service de l'action sanitaire et sociale, Monsieur X... était titularisé dans ce poste le 25 janvier 1992 jusqu'au 2 janvier 1996 , date à laquelle il était affecté au service juridique. A compter de l'année 2001, il rencontrait d'importantes difficultés relationnelles avec ses collègues et sa supérieure hiérarchique, ce qui amené le CHSCT à provoquer une expertise confiée au cabinet Alpha Conseil sur l'organisation du travail dans ce service juridique , son rapport était déposé le 12 septembre 2005. Le 25 octobre 2004, Monsieur X... était licencié pour: insuffisances professionnelles et troubles causés par votre comportement

refus d'un changement d'emploi et de service

Le 4 juillet 2005, Monsieur X... saisissait le Conseil de Prud'hommes de Rennes pour obtenir réparation du préjudice qu'il estime avoir subi.

Sur la procédure de licenciement

Considérant que la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale, qui s'applique au personnel de la CRAM, dispose que les sanctions disciplinaires, suspension temporaire sans traitement, rétrogradation et licenciement avec ou sans indemnité, ne peuvent être infligées, "en tout état de cause avant que le Conseil de Discipline ne se soit prononcé sur la proposition faite par le directeur, le délai total de la procédure ne pouvant excéder un mois à compter de la date de l'entretien "

Considérant qu'en ne respectant pas cette disposition, alors que le licenciement a bien un caractère disciplinaire, la CRAM a privé Monsieur X... d'une instance, le Conseil de Discipline, devant lequel il aurait pu s'expliquer et d'une possibilité de se voir infliger une sanction moins grave qu'un licenciement; en réparation de ce manquement qui a entraîné un préjudice , il sera accordé au salarié la somme de 1500 euros

Sur le licenciement

Considérant que le licenciement de Monsieur X... ayant été prononcé le 25 octobre 2004 pour un motif disciplinaire ( propos agressifs, attitude irresponsable, laxisme, refus d'accepter un poste dans une autre région ), pour justifier cette décision l'employeur ne peut évoquer des faits antérieurs datant de plusieurs années parfois même de 10 ans qui sont largement prescrits et n'ont donné lieu en leur temps à aucun avertissement ou autre sanction; seuls ne peuvent être examinés que les éventuels manquements du salarié ,contemporains de la rupture du contrat de travail, c'est à dire datant des années 2003 et 2004, lorsqu'il était affecté au service juridique dirigé à l'époque par Madame B....

Considérant qu'en 2003 et 2004 l'employeur n'a pas cru utile d'effectuer un entretien d'évaluation, il ne peut donc soutenir que Monsieur X... était incapable de remplir sa fonction et aurait fait preuve d'insuffisance professionnelle, d'autant que pendant cette période, il a été en arrêt de maladie pendant au mois trois mois et demi et que la CRAM de Bretagne qui venait d'engager la procédure de licenciement le 12 octobre 2004, s'était engagée par courrier du 4 octobre à lui proposer un poste adapté à ses formations et compétences et écrivait le 25 octobre 2004 à l'inspecteur du travail, jour où était notifié le licenciement , qu'il proposait à Monsieur X... un poste niveau 6 dans un autre service , ce qui est pour le moins très curieux.

Considérant qu'en réalité , compte tenu des problèmes existants au sein du personnel du service juridique et du conflit ouvert qui existait entre la responsable de ce service et Monsieur HENRY qui entendait , sans doute de manière maladroite et rigide, exercer pleinement sa fonction et supportait difficilement "la mise à l'épreuve" permanente dont il était l'objet , la CRAM a décidé de se séparer de cet agent, mais elle ne rapporte pas la preuve des griefs qu'elle invoque pour justifier le licenciement.

Sur le harcèlement moral

Considérant que l' article L 122-49 du travail dispose:

"Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel"

l'article 122-51 du même code ajoute:

" Il appartient au chef d'entreprise de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements visées à l'article L 122 49"

Considérant que Monsieur X... à qui il appartient de rapporter la preuve par des faits objectifs vérifiables qu'il a été l'objet d'un harcèlement moral de la part de son supérieur hiérarchique, justifie que d'autres agents affectés avant lui dans le service juridique dirigé par Madame B..., ont eu à souffrir du comportement très autoritaire de cette responsable et ont démissionné;

que, par application des dispositions de l'article L 236-9 du code du travail, il a été demandé au mois de décembre 2003 par le secrétaire du CHSCT qui avait constaté que " le système de gestion des personnels du service juridique avait pour effet de dégrader la santé de ses salariés "de provoquer une expertise " pour risque grave dans l'entreprise " laquelle, en raison de l'opposition de la direction, n'a été ordonnée par le Président du Tribunal de Grande Instance de Rennes qu'un an plus tard et confiée au cabinet Alpha Conseil.

Considérant qu'il résulte des constations d' Alpha Conseil que l'ancienne responsable du service juridique, à l'égard de certains agents et principalement envers Monsieur X..., avait des attitudes humiliantes et méprisantes , un management déstabilisateur et dangereux pendant plusieurs années, caractérisés par la réduction des attributions et responsabilités de cet agent qui n'a plus eu la charge de représenter la CRAM devant les juridictions , la modification sans son accord de la configuration de son bureau, une mise en quarantaine dès le mois d'avril 2003, une impossibilité de pouvoir prendre tous ses congés annuels et une véritable" mise au placard " le privant de toutes initiatives :

relégation dans un bureau isolé à l'étage, sans contact avec les autres salariés, impossibilité de téléphoner à l'extérieur, interdiction de signer ses courriers , suppression de l'imprimante pour matérialiser le travail fait, absence de chaises pour recevoir les assurées, absence de travail à faire.

Considérant que Monsieur X... justifie qu'à la suite du comportement de la responsable du service juridique, il a été dans l'obligation de consulter un médecin psychiatre qui a constaté que ce salarié avait des tendances suicidaires et le médecin du travail qui a recommandé un changement de poste pour inaptitude à occuper un poste au service juridique;

qu'enfin, au mois de septembre 2003, un arrêt de travail de trois mois et demi a été prescrit à ce salarié qui a eu recours à un soutien psychologique pendant sept mois et à un médecin spécialisé jusqu'au mois de juin 2004.

Considérant que ces faits qui ont été constatés par l'inspection du travail, qui s'est déplacée à deux reprises dans l'entreprise dont le 26 octobre 2004 , soit le lendemain du licenciement, constituent bien un harcèlement moral au sens de la loi; c'est par une exacte analyse des faits que le Conseil de Prud'hommes a dit que Monsieur X... a souffert pendant plusieurs années dans les services où il a été affecté d'un harcèlement moral qui a eu pour effet de nuire à sa santé et lui a porté préjudice sur le plan professionnel, alors qu'il pouvait espérer, si ses conditions de travail avaient été meilleures , poursuivre au sein de la CRAM ou d'un des établissements de la Sécurité Sociale une carrière honorable, compte tenu des ses capacités intellectuelles; sur ce point, le jugement sera confirmé.

Sur les droits de Monsieur X...

Considérant que les demandes de Monsieur X... au titre de ses différents préjudices d'un montant total de plus de 340 000 euros, ce qui équivaut à 9 ans de salaire, sont particulièrement excessives et non justifiées, la Cour ne peut que s'en tenir à l'évaluation faite par les premiers juges qui correspond au préjudice réel subi par le salarié;

il lui sera accordé au titre des frais irrépétibles pour l'ensemble de la procédure la somme de 1800 euros

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire

Prononce la jonction des procédures no 4653/06 et no 5246/06;

Confirme le jugement du 19 juin 2006 dans toutes ses dispositions

Y ajoutant

Déclare le présent arrêt opposable à L' ASSEDIC de Bretagne

Condamne la CRAM de Bretagne à verser à Monsieur X... au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile pour l'ensemble de la procédure de première instance et d'appel la somme de 1 800 euros

et aux dépens

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 06/04643
Date de la décision : 25/09/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Rennes


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-09-25;06.04643 ?
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