Cinquième Chamb Prud'Hom
ARRÊT No
R.G : 06/06404
M. Mickaël X...
C/
S.A. FOURNIER AUTOMOBILES
POURVOI No 70/07 DU 15.11.17
Réf Cour Cassation:
J0744840
Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2007
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Louis-Marc PLOUX, Président de Chambre,
Madame Simone CITRAY, Conseiller,
Madame Catherine LEGEARD, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Guyonne DANIELLOU, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 11 Juin 2007
devant Monsieur Louis-Marc PLOUX, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé par Monsieur Louis-Marc PLOUX, Président de Chambre, à l'audience publique du 18 Septembre 2007, date indiquée à l'issue des débats.
****
APPELANT :
Monsieur Mickaël X...
...
22000 SAINT-BRIEUC
représenté par Me GEANTY, avocat au barreau de SAINT BRIEUC substitué par la SCPA ELGHOZI-GEANTY, avocats au barreau de SAINT BRIEUC
INTIMEE :
S.A. FOURNIER AUTOMOBILES
14 rue des Landes
22360 LANGUEUX
représentée par Me Sophie DELMAS, avocat au barreau de l'Essonne.
------------------------
Par acte du 2 octobre 2006, Monsieur Mickael X... interjetait appel d'un jugement rendu le 14 septembre 2006 par le Conseil de Prud'hommes de Saint-Brieuc qui, dans le litige l'opposant à la société SA FOURNIER Automobiles, déclarait que la démission du salarié ne devait pas être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, et condamnait l'employeur à lui verser une indemnité de préavis
L'appelant, au soutien de son recours, fait valoir que sa démission est justifiée par la faute de l'employeur, qui a modifié sans son accord sa rémunération, il conteste avoir commis une faute grave au cours du préavis et demande à la Cour de faire droit à l'ensemble de ses prétentions , dont celle de 41 000 euros au titre de son préjudice
La société Fournier sollicite la confirmation du jugement sur la démission , mais demande à la Cour de dire que le licenciement en cours de préavis de Monsieur DESLANDES est fondé sur une faute grave et de le débouter de toutes ses demandes .Elle réclame la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
Pour un exposé plus complet de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère au jugement déféré et aux conclusions régulièrement communiquées à l'adversaire qui ont été déposées et développées à l'audience des plaidoiries du 11 juin 2007 puis versées dans les pièces de procédure à l'issue des débats
MOTIFS DE LA DÉCISION
Rappel sommaire des faits
Monsieur X..., embauché le 29 janvier 2001 par la société SA ROSE Automobiles , concessionnaire de la marque BMW, en qualité de collaborateur service Vente, devenait conseiller des ventes à compter du mois de décembre 2001 au sein de Fournier Automobiles SA qui venait de racheter cette concession. .Invoquant une modification de sa rémunération au mois d'avril 2005, n'ayant pas été convaincu par les explications de l'employeur, il présentait sa démission par lettre recommandée du 14 septembre 2005 puis saisissait le 22 septembre 2005 le Conseil de Prud'hommes de Saint-Brieuc pour obtenir de la société le versement d'une somme de 2 591 euros au titre de commissions et celle de 41 000 euros pour rupture abusive de son contrat de travail .En cours de préavis, qui était de trois mois , l'employeur , le 29 septembre 2005, mettait fin au contrat de travail pour faute grave.
Sur la rupture du contrat de travail:
Considérant qu'il n'est pas contesté que Monsieur X..., par courrier du 14 septembre 2005, a donné sa démission en invoquant une modification de son mode de rémunération, il lui appartient de rapporter la preuve que les faits qu'il invoque à l'encontre de son employeur, pour justifier sa décision , sont réels et sérieux, et constituent une faute suffisamment grave pour imputer à la société Fournier Automobiles cette rupture avec toutes les conséquences de droit.
Considérant que, selon les dispositions de son contrat de travail du 29 janvier 2001, qui n'ont pas été changées lorsqu'il a été promu Conseiller des ventes le 1 juillet 2003 , Monsieur X... doit percevoir une rémunération mensuelle composée d'une partie fixe d'un montant de 717.78 euros, qui sera portée à compter du 1 juillet 2003 à la somme de 1 700 euros, et d'une partie variable constituée de primes calculées sur le montant des ventes réalisées selon les modalités du service commercial, le salaire annuel garanti étant au minimum égal à celui fixé par la Convention Collective Nationale.
Considérant que, dans un courrier du 12 juillet 2005, répondant aux réclamations du salarié, la société Fournier, reconnaît que la conjoncture économique du secteur automobile et l'augmentation des marges négatives liées au rachat des véhicules d'occasion ne permet plus de dégager une marge positive génératrice d'une commission : de fait, avant avril 2005, toutes les ventes de véhicules neufs et reventes de véhicules d'occasion, lorsqu'elles dégageaient une marge positive, entraînaient pour le vendeur la perception de deux primes distinctes , la reprise du véhicule d'occasion et sa revente à perte n'ayant aucune incidence sur la commission sur la vente du véhicule neuf;
en revanche, à compter d'avril 2005, la marge négative résultant de la revente à perte du véhicule d'occasion était déduite de la marge positive résultant de la vente du véhicule neuf ( cf ventes GRISOT) ce qui entraîne nécessairement une perte de revenu.
Considérant qu'il en résulte que le mode de rémunération de la partie variable du salaire de Monsieur X... a bien été modifiée par l'employeur sans que le salarié en soit averti et sans qu'il ait donné son accord , ce que reconnaît la société dans un courrier du 12 juillet 2005:
" jusqu'à présent, nous vous avons toujours rémunéré sur la marge restante calculée sur une base de 10 % de la marge restante sur facture quelle soit positive ou négative "
or, si la société, pour des raisons économiques, entrant dans les prévisions de l'article L 321-1-2 du code du travail, entendait modifier le mode de rémunération de Monsieur X..., elle devait d'abord respecter la procédure prévue: informer le salarié par lettre recommandée avec AR du changement et lui donner un délai d'un mois pour faire connaître son refus,
et, en cas de refus, en tirer les conséquences en prenant l'initiative de le licencier , ce qui n'a pas été fait et permet d'imputer la rupture du contrat de travail du salarié à la faute de l'employeur, la démission doit être requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Considérant que la société sera condamnée à verser l' indemnité légale de rupture, un rappel de commissions d'un montant de 2 591, 62 euros et les congés correspondants;
que, s'agissant d'évaluer son préjudice du fait de la rupture, compte tenu de son ancienneté dans l'entreprise , 3 ans 11 mois et 15 jours et du fait qu'il a immédiatement retrouvé un emploi similaire chez un concessionnaire Mercedes, il lui sera accordé la somme de 22 000 euros.
Sur la rupture de la période de préavis:
Considérant qu'en cours de préavis, qui était de trois mois à compter du 14 septembre 2005, l'employeur invoquant une faute grave de Monsieur X..., sans respecter la procédure de l'entretien préalable prévu à l'article L 122-41 du code du travail, a rompu immédiatement le 28 septembre 2005 le contrat de travail, pour n'avoir pas respecté la procédure à suivre en matière de vente d'un véhicule neuf , octroyé à l'acquéreur une garantie de 24 mois au lieu de 18 mois et donné de fausses indications au service financier, ce qui n'a pas permis d'obtenir immédiatement une carte grise au nom du client et pour avoir livré le véhicule sans avoir obtenu le financement du crédit ,
Considérant que, si Monsieur X... justifie que l'autorisation de crédit a été obtenue le 28 septembre 2005 vers 18 heures, par contre il ne conteste pas s'être trompé en donnant des indications erronées aux services financiers de la société sur le type de vente ce qui a engendré un surcoût de 434 euros correspondant à la délivrance d'une carte grise provisoire; cependant, contrairement à ce qui est affirmé dans la lettre de rupture, l'employeur ne justifie pas que ces erreurs lui aient causé un préjudice plus important , la faute grave ne peut être retenue.
Considérant que la société, qui a agi avec précipitation et sans discernement, sera condamnée à verser la totalité du préavis; sur ce point, le jugement sera confirmé et il sera accordé à Monsieur X... au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile la somme de 1800 euros pour l'ensemble de la procédure.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement,
Infirme le jugement du 14 septembre 2006
Dit que la démission en date du 14 septembre 2005 de Monsieur X... doit être requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse
Condamne la société SA FOURNIER Automobiles à verser à Monsieur X... les sommes suivantes:
- rappel de commissions : 2 591, 62 euros et 259,16 euros
- indemnité compensatrice de préavis: 8 438 euros et 843, 80 euros
- indemnité de licenciement: 3 937,74 euros
- dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail: 22 000 euros
- au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile pour l'ensemble de la procédure de première instance et d'appel: 1 800 euros
Condamne la société SA FOURNIER Automobiles aux dépens.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT