FAITS ET PROCÉDURE
Dans le cadre de son activité la SAS "Clear Channel France", exerçant sous l'enseigne "Dauphin Affichage", a implanté différents panneaux publicitaires sur le territoire de la commune de Saint Malo.
Par deux arrêtés du 14 septembre 19991e Maire de la ville de Saint Malo, en application de la loi du 29 décembre 1979 portant réglementation de la publicité des enseignes et préenseignes, mit en demeure la société "Dauphin Affichage" de déposer 9 panneaux publicitaires implantés en violation du règlement local, dans un délai de 15 jours et sous peine d'une astreinte de 519,60 francs par jour et par dispositif considéré.
La société Clear Channel France saisit le Tribunal administratif lequel, par ordonnance du 14 octobre 1999, rejeta sa demande tendant à ce que soit ordonnée la suspension des astreintes dont étaient assortis les deux arrêtés municipaux du 14 septembre 1999.
Les 26 octobre et 2 décembre 19991e maire de Saint Malo émit des titres exécutoires correspondant aux astreintes ayant couru, puis les 11 septembre 2001 et 6 novembre 2002 elle délivra des commandements de payer.
Par arrêt du 11 juin 2003 la Cour administrative d'appel de Nantes rejeta le recours formée par la société Clear Channel France contre l'ordonnance du Tribunal administratif du 14 octobre 1999.
La Société Clear Channel France saisit alors le Tribunal administratif aux fins de voir annuler les états exécutoires émis par le maire de Saint Malo et déclarer sans fondement les commandements de payer qui lui avaient été délivrés.
Par jugement du 18 janvier 2005, confirmé par un arrêt de la Cour d'appel administrative de Nantes, le Tribunal administratif de Rennes se déclara incompétent pour statuer sur la régularité formelle des commandements de payer et des titres exécutoires et rejeta sa demande tendant à voir constater l'illégalité des mises en demeure.
Par acte du 17 mars 2005 la société Clear Channel France assigna la ville de Saint Malo devant le Tribunal de grande instance aux fins de voir déclarer nuls et non avenus les titres exécutoires émis par le maire de cette commune.
Par jugement du 5 avril 2006 le Tribunal de grande instance de Saint Malo:
déclara valable et régulière l'assignation du 17 mars 2005 et débouta la ville de Saint Malo de sa demande en annulation de cet acte,
rejeta la demande en annulation des titres de recettes,
condamna la société Clear Channel France aux dépens et au paiement d'une somme de 2000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La SAS Clear Channel France forma appel de ce jugement.
POSITION DES PARTIES
* LA SOCIÉTÉ CLEAR CHANNEL FRANCE
Dans ses dernières conclusions en date du 21 mai 2007 la société Clear Channel France demande à la Cour:
de la déclarer recevable en son appel et infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
de déclarer nuls et non avenus les titres de perception émis par la commune de Saint Malo, avec toutes conséquences de droit,
de condamner la ville de Saint Malo aux dépens et au paiement d'une somme de 4000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par conclusions de procédure du 12 juin 2007 la société Clear Channel France demande à voir rejeter des débats la pièce nº 12 communiquée par la partie adverse postérieurement à l'ordonnance de clôture.
* LA VILLE DE SAINT MALO
Dans ses dernières écritures en date du 29 mai 2007 la ville de Saint Malo demande à la Cour:
d'annuler le jugement en ce qu'il a reconnu la validité de l'assignation et débouter la société Clear Channel France de toutes ses demandes,
à titre subsidiaire, de déclarer mal fondé l'appel et confirmer le jugement,
de condamner la société Clear Channel France aux dépens et au paiement d'une somme de 4000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par conclusions de procédure du 11 juin 2007 la ville de Saint Malo sollicite le rabat de l'ordonnance de clôture et son report au 20 juin 2007.
MOTIFS DE LA DÉCISION
* SUR LA DEMANDE DE REJET DE PIÈCE
Aux termes des articles 783 et 784 du nouveau code de procédure civile l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue et, après la clôture, aucune conclusion ne peut être déposée, ni aucune pièce produite.
La pièce nº 12 étant un arrêté municipal en date du 23 septembre 2002, rien ne justifie au regard de l'ancienneté de ce document, qu'elle ait été communiquée postérieurement à l'ordonnance de clôture. Dès lors, en l'absence de toute cause grave avérée, il ne sera pas fait droit à la demande de révocation de l'ordonnance de clôture et cette pièce sera écartée des débats.
* SUR LA RÉGULARITÉ DE L'ASSIGNATION
Aux termes de l'article L 311-12 devenu l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion'de l'exécution forcée.
En application de ce texte le juge de l'exécution ne peut être saisi des difficultés relatives aux titres exécutoires qu'à l'occasion de contestations portant sur des mesures d'exécution forcées engagées ou opérées sur le fondement de ce titre.
Dans le cas présent la ville de Saint Malo conclut à l'irrecevabilité de l'assignation au motif qu'elle ne répond pas aux exigences des articles 11 et suivants du décret du 31 juillet 1992 relatifs à la procédure s'appliquant devant le juge de l'exécution.
Toutefois si la société Clear Channel France conteste les titres exécutoires émis par la Ville de Saint Malo, aucune mesure d'exécution forcée n'a été engagée à ce jour. Le juge de l'exécution n'avait donc pas compétence pour connaître de cette demande.
Dès lors seul le Tribunal de grande instance était compétent et l'assignation n'avait pas à respecter les dispositions du décret du 31 juillet 1992.
C'est donc à juste titre que le premier juge a déclaré régulière l'assignation en date du 17 mars 2005.
* SUR LA VALIDITÉ DES TITRES EXÉCUTOIRES
- sur la signature de l'ordonnateur
Les titres exécutoires émis par les collectivités territoriales ne sont soumis à aucun formalisme particulier et l'instruction budgétaire et comptable M14, applicable en la cause précise " "les titres de recettes n'ont pas à être revêtus de la signature de l'ordonnateur".
En conséquence la société Clear Channel France n'est pas fondée à soutenir que les titres émis par la ville de Saint Malo seraient entachés d'illégalité pour ne pas être revêtus de la signature du maire de cette commune. Elle n'est pas davantage fondée à se prévaloir des dispositions de la loi du 12 avril 2000 dès lors que, les titres litigieux ayant été émis antérieurement à l'entrée en application de cette loi, soit les 26 octobre et 2 décembre 1999, celles-ci ne pouvaient leur être applicables.
- sur les bases de la liquidation
Aux termes du 1" alinéa de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique "tout ordre de recettes doit indiquer les bases de la liquidation".
Ce texte ayant pour objectif de permettre au débiteur de discuter utilement des bases de la liquidation, le titre doit les mentionner à moins qu'elles n'aient été préalablement portées à sa connaissance.
En l'espèce la société Clear Channel France a eu connaissance du mode de calcul de la dette par les arrêtés du 14 septembre 1999 qui lui avaient été régulièrement notifiés et qui fixaient à 519,60 francs par jour et par panneau publicitaire les bases de calcul.
La société Clear Channel France était donc en mesure de discuter utilement le montant qui lui était réclamé et ne prétend d'ailleurs pas qu'un élément lui aurait manqué ou lui serait apparu incompréhensible et l'aurait ainsi mise dans l'impossibilité de contester la dette.
Dès lors c'est à juste titre que le premier juge a débouté la société Clear Channel France de sa demande tendant à voir annuler les titres litigieux pour défaut de motivation.
* SUR LES DÉPENS
Les dépens seront supportés par la société Clear Channel France qui succombe en son appel.
La société Clear Channel France sera déboutée de sa demande formée en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et condamnée à payer, à ce titre, à la ville de Saint Malo, une somme de 1500 €, somme qui s'ajoutera à celle déjà accordée par le premier juge sur le même fondement.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Dit n'y avoir lui à rabat de l'ordonnance de clôture.
Ecarte des débats la pièce nº 12 communiquée par la ville de Saint Malo postérieurement à l'ordonnance de clôture.
Confirme en toutes ses dispositions le jugement en date du 5 avril 2006 rendu par le Tribunal de grande instance de Saint Malo.
Y ajoutant,
Déboute la S.A.S. Clear Channel France de sa demande formée en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Condamne la société Clear Channel France à payer à la ville de Saint Malo une somme de mille cinq cents euros ( 1500,00 €) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, somme qui s'ajoutera à celle déjà accordée par le premier juge sur le même fondement.
Condamne la société Clear Channel France aux dépens qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT