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26/10/2006 | FRANCE | N°480

France | France, Cour d'appel de Rennes, Ct0015, 26 octobre 2006, 480


I - Exposé du litige:Les époux X... sont propriétaires depuis 1993 d'une maison ... dans laquelle ils ont fait réaliser des travaux d'extension et de réaménagement des espaces intérieurs avec pour objectif la création d'une chambre supplémentaire au premier étage, la création d'un coin repas attenant à la cuisine, la transformation d'une pièce mezzanine à l'étage ouverte au-dessus du salon en bureau fermé.La conception de ce projet a été confié à Madame Y... architecte d'intérieur à compter du mois de janvier 2000 et un contrat oral a finalement été conclu avec cette de

rnière aux termes duquel :- l'enveloppe financière des travaux confiés ...

I - Exposé du litige:Les époux X... sont propriétaires depuis 1993 d'une maison ... dans laquelle ils ont fait réaliser des travaux d'extension et de réaménagement des espaces intérieurs avec pour objectif la création d'une chambre supplémentaire au premier étage, la création d'un coin repas attenant à la cuisine, la transformation d'une pièce mezzanine à l'étage ouverte au-dessus du salon en bureau fermé.La conception de ce projet a été confié à Madame Y... architecte d'intérieur à compter du mois de janvier 2000 et un contrat oral a finalement été conclu avec cette dernière aux termes duquel :- l'enveloppe financière des travaux confiés à l'architecte a été chiffrée à 300 000 F TTC hors honoraires d'architecte,- les maîtres de l'ouvrage se sont réservés les travaux d'électricité, chauffage, plomberie, confiés à Monsieur LE Z..., frère de Madame X... outre les lots aménagement de la salle de bains, carrelage, crépis intérieurs, peinture et tapisserie, pose du parquet flottant de l'étage.Les époux X... ont exposé que l'absence de contrat écrit s'expliquait par le fait que Madame Y... n'avait jamais proposé de contrat d'architécte à la signature des maître de l'ouvrage.Un permis de construire a été obtenu le 31 octobre 2001 et le chantier a démarré le 8 avril 2002, sans devis signé, les travaux étant confiés à :- Monsieur A... pour les lots démolition, maçonnerie, couverture,- la SARL BATIBOIS PEN AR BED pour les lots charpente, bardage bois et menuiserie bois extérieure,- Monsieur B... pour les menuiseries intérieures, ébénisterie et escalier central,- Monsieur C... pour les plâtres.Madame Y... avait annoncé un délai d'exécution de cinq semaines et prétendu que les occupants n'étaient pas obligés de déménager durant le chantier. Les époux X... ont néanmoins préféré déménager pendant les travaux, le mobilier restant en place, et escomptaient un emménagement début juillet 2002, soit au terme d'un délai de trois mois.Les travaux

n'ont finalement jamais été achevés et les requérants ont exposé que de multiples malfaçons les avaient rendus non réceptionnables.Madame Y..., arrêtée pour raison de maladie à compter du 8 août 2002, a fait savoir par courrier du 13 septembre 2002 qu'elle cessait d'assurer le suivi de chantier, décision qui a fait l'objet d'une protestation des époux X....Par assignation en date du 25 septembre 2002, Monsieur et Madame X... ont sollicité une mesure d'expertise qu'ils ont obtenue par ordonnancede référé en date du 15 octobre 2002 désignant Monsieur D... en qualité d' expert. Celui-ci a déposé son rapport le 30 juin2004 au vu duquel les époux X... ont sollicité en référé des provisions à valoir sur les travaux de reprise et les préjudices subis.Par ordonnance de référé en date du 23 novembre 2004, le Juge des référés s'est déclaré incompétent et a renvoyé l'affaire au fond devant le Tribunal de grande instance de Morlaix.Par jugement en date du 9 février 2005, le Tribunal de grande instance de Morlaix a notamment:- mis hors de cause les Mutuelles du Mans es qualités d'assureur de Monsieur B...,- condamné in solidum Madame Y... et la SARL BATIBOIS PEN AR BED à payer aux époux X... au titre des désordres de structure une provision sur travaux de 38 500 ;ç et une provision de 1913,60 ç en dédommagement des frais et honoraires du bureau d'études Structure Logiciel,- condamné in solidum Madame Y... et Monsieur B... à payer à Monsieur et Madame X... une provision sur travaux de 27 500 ç au titre des désordres des ouvrages de menuiserie intérieure,- condamné in solidum Madame Y..., la SARL BATIBOIS PEN AR BED à leur payer une somme de 20 500 ç à valoir sur les préjudices induits par les malfaçons ainsi que 2000 ç au titre des frais irrépétibles,- condamné la MAF à garantir son assurée Madame Y... des condamnations pécuniaires prononcées à son encontre à l'exception de celle relative aux désordres de structure et des frais du bureau d'études, ordonné l'exécution provisoire,- donné acte aux

requérants de ce qu'ils saisiront ultérieurement le juge compétent d'une demande indemnitaire au titre des préjudices annexes mais dit n'y avoir lieu pour l'heure à statuer de ce chef,- débouté les parties de leurs autres demandes.La MAF a régulièrement interjeté appel de cette décision le 30 mars 2005.Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées le 12 juin 2006 pour la MAF, le 20 juin 2006 pour Monsieur B..., le 19 juin 2006 pour Madame Y..., le 19 juin 2006 pour la SARL BATIBOIS PEN AR BED et le 21 avril 2006 pour Monsieur et Madame X....II - Motifs:Sur la nullité du rapport d'expertise :La Cour adopte expressément les motifs exacts en fait et en droit du Premier Juge et répondant en tous points aux conclusions des parties, étant rappeléque le principe du contradictoire a été respecté (l'entreprise B..., régulièrement convoquée, n'ayant pas daigné être présente aux réunions, pages 8, 9,10 et 46 du rapport) et que le juge n'est pas lié par le rapport de l'expert. De surcroît, c'est avec prudence que Monsieur D... a fait part de son avis sur les responsabilités en indiquant "il convient, selon nous, de réfléchir sur un partage de responsabilité ou sur la responsabilité de ...", cet avis supplémentaire, s'il ne lui était pas expressément demandé en l'espèce, étant généralement indiqué dans les rapports des experts de la construction mais ne constituant jamais un préjugement comme il l'est faussement soutenu.Sur les désordres constatés et les responsabilités :Les époux X... concluent à la confirmation du jugement.Monsieur B... sollicite de débouter les époux X... de leurs demandes et de condamner la SARL BATIBOIS PEN AR BED à lui rembourser la somme de 7 500 ç versée au titre de l' exécution provisoire.Madame Y... demande de dire irrecevables et mal fondées les demandes des époux X... et subsidiairement de condamner la MAF

à la garantir de tous les travaux d'aménagement au titre de la garantie souscrite en vertu de l'article L 113-9 du Code des assurances.La SARL BATIBOIS PEN AR BED conclut au débouté des demandes de Monsieur et Madame X... et au remboursement de la somme de 40 413,60ç qu'elle a réglée au titre de l'exécution provisoire, subsidiairement demande de condamner Madame Y... et la MAF à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.Monsieur D... a constaté les désordres suivants (pages 20 et 21, 47 et 48 ):- erreur de cotation et/ou d'implantation : décalage de la trémie de l'escalier, - insuffisance de la reprise de la structure après transformation,- désordres liés à l'insuffisance de la reprise de la structure - désordres liés à des non-finitions,- inesthétique et désordres des travaux de menuiserie intérieures, - inesthétique et désordres de meubles intégrés.Au terme d'une analyse technique complète, c'est pertinemment que l'expert conclut en page 48 de son rapport que ces désordres sont dus à des erreurs de conception et de suivi de chantier de l'architecte, à une erreur d'appréciation de la SARL BATIBOIS PEN AR BED (insuffisance de calculs) et à de nombreuses maladresses de mise en oeuvre du menuisier.S'agissant des responsabilités de chacun de ces trois constructeurs et des contestations qu'ils élèvent, la Cour adopte expressément les motifs pertinents, exacts en fait et en droit du Premier Juge étant de plus observé :- qu'il ressort des factures d'honoraires de Madame Y..., qui soutient enl'absence de tout contrat écrit, n'avoir qu'une mission d'architecte d'intérieur et n'avoir en conséquence pas à se soucier d'établir un plan de structure, qu'elle a au contraire accepté une mission complète de maître d'oeuvre pour la "rénovation d'habitation principale", et non simplement un aménagement intérieur nouveau, avec avant-projets sommaire et définitif (APS, APD), plan d'exécution des ouvrages (PEO), spécification technique détaillée

(STD), inexistante en l'espèce (page 37 du rapport), dossier de consultation des entreprises (DCE), assistance marché de travaux (AMT), contrôle général des travaux (CGT) dont elle réclamera le paiement, puis réception des travaux (RDT) et dossier des ouvrages exécutés (DOE) qui n'auront pas lieu du fait des désordres constatés. En effet, les missions notamment de PEO, DCE, AMT, et CGT impliquaient que Madame Y... dresse des plans d'exécution de tous les travaux envisagés, s'inquiète de leur faisabilité, notamment au regard de la structure ce qui incluait la demande d'une étude technique spécifique, et supervise leur bonne exécution, étant observé que c'est elle qui a proposé aux maîtres de l'ouvrage les entreprises intervenantes sur le chantier (rapport page 16) que Monsieur D... qualifie de réhabilitation lourde et en profondeur de l'habitation. Par ailleurs, la condamnation in solidum au titre des désordres de menuiserie est justifiée dès lors qu'il existe une erreur de cotations de la trémie dans les plans d'architecte et qu'ayant comme mission le contrôle des travaux, elle n'a pas signalé les nombreuses erreurs de Monsieur B... qui rendaient ses ouvrages non réceptionnables alors que "le maître d'oeuvre envisageait des réceptions" (rapport page 19). Enfin, l'immixtion des maîtres de l'ouvrage notoirement compétents n'est pas démontrée dès lors qu'il est constant que ceux-ci signent les marchés avec les entreprises seulement proposées par le maître d'oeuvre, que le fait qu'ils se soient réservés certains travaux ne démontre pas leur immixtion et compétence dans les travaux à l'origine des désordres et que le frère de Madame X... qui, selon l'expert, a lui-même appelé Madame Y... pour lui faire état de problèmes graves qui ne trouveraient pas de solution hors sa présence, n'est pas maître de l'ouvrage,- que l'absence de suivi de chantier de l'architecte n'empêchait pas Monsieur B..., même "simple menuisier" comme il est dit dans ses

écritures, de travailler dans les règles de son art, ce qui n'a pas été le cas au vu des constatations ci-dessus, et qu'il sera débouté de ses demandes notamment de remboursement,- que le travail "bien fait" allégué par la SARL BATIBOIS PEN AR BED n'est pas suffisant en soi mais qu'il doit aussi être efficace ce qui doit amener l'homme de l'art à s'interroger sur ce point et à tenir compte du support sur lequel il travaille; que de plus, celui-ci ne peut être ainsi qu'il l'indique "l'exécutant servile d'un plan et d'un projet ignorés" alors qu'il incombait à l'entrepreneur de se renseigner auprès de l'architecte de la nature exacte des travaux qu'elle entendait voir réaliser.Le jugement sera confirmé sur les responsabilités des trois intervenants, la solidarité ayant été parfaitement précisée par le premier juge.Sur les préjudices :Les préjudices pertinemment analysés par Monsieur D... ont été retenus à juste titre par le premier juge dont les motifs sont adoptés expressément par la Cour. Ils seront confirmés, tout en relevant, pour répondre à la SARL BATIBOIS PEN AR BED qui soutient que le fait que les époux X..., aient dû se loger ailleurs n'avait aucun rapport avec le risque d'effondrement, que Monsieur D... précise en page 44 de son rapport qu'au vu du risque d'effondrement et alors que les époux ont décidé d'habiter leur maison à partir de juin 2003, si on lui avait demandé l'autorisation de réintégrer la maison, sa réponse aurait été NON.Sur la garantie de la MAF :La MAF demande sa mise hors de cause et oppose à Madame Y... une non-garantie en raison d'une activité et d'un risque non couvert par l'assurance puisqu'elle est couverte pour le seul risque d'architecte d'intérieur alors qu'elle a agi en qualité d'architecte DPLG avec mission complète, sans en avoir le titre. Elle expose que la non-garantie n'est pas liée à une déclaration incomplète du risque mais à un risque généré par l'activité de l'assuré hors champ contractuel. Elle ajoute qu'il n'y a pas dualité

de fonctions exercées par Madame Y... mais une seule et unique mission qui n'entre pas dans le champ d'application de la garantie.Subsidiairement elle sollicite de réformer le montant des dommages et intérêts mis à sa charge et de juger irrecevable la demande en garantie de la SARL BATIBOIS PEN AR BED à son encontre en application de l'article 564 du nouveau Code de procédure civile.Il ressort des constatations ci-dessus que Madame Y... avait une mission complète d'architecte-maître d' oeuvre et pas seulement celle d'architecte d'intérieur. Elle a cependant exercé cette dernière mission ainsi que le rapporte Monsieur D... en pages 17, 37 et 49, qui peut être distinguée de la mission d'un architecte-maître d'oeuvre laquelle ne comprend pas l'architecture d'intérieur. Il importe peu que la rémunération de Madame Y... ait été globale, ce d'autant plus que Monsieur D... expose à juste titre que le pourcentage élevé réclamé (18 %) inclut les deux missions.Seuls sont garantis les travaux afférents au secteur d'activité professionnelle de l'assuré et les risques exactement déclarés par celui-ci. Madame Y... est assurée, selon les conditions particulières du contrat n 369535/U/OS au titre de son activité d'architecture d'intérieur c'est-à-dire aménagement et équipement des espaces intérieurs des constructions. La MAF ne doit en conséquence sa garantie qu' au regard de cette activité. Madame Y... fait état de l'application de l'article L 113-9 du Code des assurances inapplicable en l'espèce dès lors qu'il ne s'agit pas de risques non déclarés mais d'une activité professionnelle non déclarée.Cependant, contrairement à ce que soutient la MAF, Madame Y... a bien exercé deux fonctions cumulées et la dualité de ces fonctions n'empêche pas la garantie au titre de l'activité déclarée auprès de l'assureur. Néanmoins, il n'est pas soutenu par la MAF que la part de responsabilité de Madame Y... en qualité d'architecte d'intérieur n'était pas prépondérante dans les

désordres. Dans ces conditions, elle doit sa garantie pour les désordres relatifs aux travaux d'aménagement et équipement des espaces intérieurs, ainsi que l'a jugé le tribunal.Les préjudices induits ne sont pas dus qu'aux désordres de structure mais également aux désordres dans l'exécution du lot de Monsieur B... (menuiseries intérieures), rendant les ouvrages non réceptionnables. C'est à juste titre que le premier juge a condamné la MAF à garantir Madame Y... du montant de ces préjudices.Dès lors que le jugement est confirmé, les demandes de remboursement sont sans objet ainsi que la demande de garantie formée par la SARL BATIBOIS PEN AR BED à l'encontre de la MAF.Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur et Madame X... les frais irrépétibles qu' ils ont engagés pour faire valoir leurs droits. Madame Y..., Monsieur B... et la SARL BATIBOIS PEN AR BED seront condamnés in solidum à leur payer la somme de 2 000 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.Ils seront également condamnés in solidum aux dépens.La MAF garantira Madame Y... de ces condamnations.- Par ces motifs :LA COUR:Confirme le jugement déféré,Y ajoutant Condamne in solidum Madame Y..., la SARL BATIBOIS PEN AR BED et Monsieur B... à payer à Monsieur et Madame X... la somme de 2 000,E en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile Déboute les parties de leurs autres demandes Condamne Madame Y..., la SARL BATIBOIS PEN AR BED et Monsieur B... aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile Condamne la MAF à garantir Madame Y... de ces condamnations.Le Greffier,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Ct0015
Numéro d'arrêt : 480
Date de la décision : 26/10/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : M. Moignard, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2006-10-26;480 ?
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