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05/10/2006 | FRANCE | N°422

France | France, Cour d'appel de Rennes, Ct0015, 05 octobre 2006, 422


I - Exposé préalable : Courant 1990 la SCI Ty Douar, sur une dommages-ouvrage souscrite auprès de la compagnie Cigna, a fait construire à Quimper un local commercial, sous la maîtrise d'oeuvre de la SA Cobi Engineering, la SA Personnic étant chargée du gros oeuvre, le contrôle technique revenant à la Socotec. Ces trois sociétés étaient assurées en responsabilité décennale auprès de la SMABTP.Le local a été vendu à la SCI Marti Quimper et, dans la nuit du 6 au 7 février 1996, alors qu'il était inoccupé, lors d'une tempête, le mur coupe-feu en parpaings côté sud-est s'ef

fondrait sur 33 mètres. Le bâtiment était ensuite vandalisé par des inco...

I - Exposé préalable : Courant 1990 la SCI Ty Douar, sur une dommages-ouvrage souscrite auprès de la compagnie Cigna, a fait construire à Quimper un local commercial, sous la maîtrise d'oeuvre de la SA Cobi Engineering, la SA Personnic étant chargée du gros oeuvre, le contrôle technique revenant à la Socotec. Ces trois sociétés étaient assurées en responsabilité décennale auprès de la SMABTP.Le local a été vendu à la SCI Marti Quimper et, dans la nuit du 6 au 7 février 1996, alors qu'il était inoccupé, lors d'une tempête, le mur coupe-feu en parpaings côté sud-est s'effondrait sur 33 mètres. Le bâtiment était ensuite vandalisé par des inconnus.L'expert de la compagnie GAN, assureur dommages aux biens garantie tempête, indiquait que le sinistre devait être déclaré à l'assureur dommages ouvrage, ce qui fut fait.L'expert de la compagnie Cigna, dans un rapport du 13 juin 1996, imputait le sinistre aux effets du vent violent de cette nuit de tempête.A requête de la SCI Marti Quimper, par ordonnance de référé du 2 avril 1997, au contradictoire du GAN, de Gigna, de Cobi Engineering et de la SCI Ty Douar, M. X... était désigné en qualité d'expert.Ces opérations ont été rendues communes aux AGF, à la société Personnic et à la Socotec.L'expert a procédé à ses opérations et a déposé son rapport le 12 février1998.Par actes des 26 février et 2 mars 1998, la SCI Marti Quimper a fait assigner en référé le GAN, Cobi Engineering, la SCI Ty Douar et Gigna Assurances en complément d'expertise sur le sinistre résultant de dégradations et vols. Gigna Assurances y appelait la Socotec, la SMABTP, la SA Personnic et le GAN. Le rapport sur ce complément d'expertise a été déposé le 7 décembre 1998 et Gigna Assurances, assureur dommages-ouvrage réglait à son assuré une somme de 196.593,39 francs.Par ordonnance de référé du 1 e septembre

1999, la société DM Engineering venant aux droits de Cobi

Engineering, la Société Personnic, la Socotec et la SMABTP étaient condamnées in solidum à verser à Cigna une provision de 196.593,39 francs.Par actes des 3 et 7 décembre 1999, la SCI Marti Quimper a fait assigner la SA DM Engineering, la SCI Ty Douar, le cabinet Heux es qualité d'agent général de Gigna Assurances, le GAN Assurances et la SA Personnic en réparation de son préjudice.La SA ACE Insurance, nouvelle dénomination de Gigna Assurances, a appelé en garantie la Socotec et la SMABTP, assureur décennal de la Socotec, de Personnic et de DM Engineering.La SCI Marti Quimper a elle aussi fait assigner la Socotec et la SMABTP, assureur décennal de la Socotec, de Personnic et de DM Engineering, puis était appelé à la cause Me Y..., administrateur provisoire des sociétés DM Engineering et Ty Douar.Par jugement du 3 septembre 2003 le cabinet Heux était mis hors de cause, il était donné acte à la compagnie Ace Insurance de son intervention et il était ordonné une nouvelle mesure d'expertise, confiée à M. Z.... L'expert a procédé à ses opérations et a déposé son rapport le 11 février 2003, relevant les mêmes insuffisances de construction que M. X... et constatant que, conçu initialement comme un simple mur coupe feu entre deux bâtiments, il s'est trouvé remplir le rôle de mur extérieur du fait de l'abandon de la suite du programme, notamment du bâtiment jumeau, incriminant le fait de n'avoir pas pris en conséquence la réalisation de la moitié seulement du bâtiment.La SCI Ty Douar était placée en liquidation judiciaire le 30 mars 2004 et Me Laurent liquidateur était appelé à la cause.Par jugement du 14 décembre 2004 le Tribunal de Grande Instance de Quimper a :- Condamné in solidum la SA ACE Insurance, la société DM Ingineering, la SA Personnic, la Socotec et la SMABTP à payer à la SCI Marti Quimper les sommes de : * 1. 006,16 çréévaluée entre le 1 "janvier 1998 et le jugement au titre du poste des lanterneaux,* 38.480, 93 ç réévaluée entre le 1 "janvier 1998 et le

jugement au titre des dommages matériels intérieurs,* 125. 496, 03 çau titre du préjudice de jouissance,* 9.146, 94 ç au titre des honoraires de montage du dossier d'exploitation commerciale ;- Dit qu'entre les constructeurs la responsabilité sera partagée de la manière suivante :* la SA DM engineering: * la SA Personnic :* la Socotec :et les a condamné en tant que de besoin à se garantir dans60%, 30 50%, 10%, ces proportions ;- Condamné in solidum la SMABTP, la société DM Ingineering, la SA Personnic, et la Socotec à garantir la SA ACE Insurance de toutes les condamnations prononcées à son encontre sur justificatifs du paiement;- Condamné la SMABTP à garantir la société DM Ingineering, la SA Personnic et la Socotec de l'ensemble des condamnations ;-Ordonné l'exécution provisoire à hauteur de 80.000 ç;- Prononcé la mise hors de cause du GAN et débouté la SA Personnic et la SMABTP de leur demande de garantie à son encontre ;- Déclaré irrecevable toutes les demandes présentées à l'encontre de la SCI Ty Douar et débouté la Socotec et la société Personnic de leur demande de garantie à l'encontre d'Ace Insurance en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur;- Condamné la SCI Marti Quimper à payer au GAN la somme de 1. 000 çsur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;- Condamné in solidum la DM Ingineering, la SA Personnic, la Socotec et la SMABTP à payer à la SCI Marti Quimper la somme de 3. 000 çsur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;- Débouté les parties du surplus de leurs demandes,- Condamné in solidum la DM Ingineering, la SA Personnic, la Socotec et la SMABTP aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise, à l'exclusion des frais de mise en cause du GAN qui resteront à la charge de la SCI Marti Quimper.La SCI Marti Quimper a déclaré appel de ce jugement le 18 janvier 2005 et s'est désistée le 2 septembre suivant contre les sociétés DM Engineering et Ty Douar.Sur la procédure :Me Y...,

administrateur judiciaire de la société DM Engineering, sollicite que soient écartées des débats les conclusions déposées par la SCI MartiQuimper le 29 mai 2006, soit la veille de la date prévue pour la clôture.La clôture de la mise en état a été reportée au 2 juin 2006 et Me Y... n'explicite pas en quoi les conclusions de la SCI Marti-Quimper, reprenant pour l'essentiel les termes de précédentes écritures du 18 mai 2005 et quasiment identiques à des conclusions déposées le 16 mai 2006, aient nécessité une étude approfondie l'ayant mis dans l'impossibilité d'en prendre connaissance utilement ou d'y répondre.Le contradictoire étant assuré, il n'y a pas lieu d'écarter ces écritures déposées quatre jours avant l'ordonnance de clôture.Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des prétentions et des moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées :- le 6 septembre 2005 pour Maître Sophie Y..., administrateur judiciaire provisoire de la société DM Ingineering, anciennement Cobi Engineering;- le 12 octobre 2005 pour la SMABTP ; - le 3 mai 2006 pour la SA Socotec ;- le 9 mai 2006 pour la société de droit anglais ACE European Group Limited ; - le 15 mai 2006 pour la SA Personnic ;- le 29 mai 2006 pour la SCI Marti Quimper. L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 juin 2006.II - Motifs:1 Sur les responsabilités :Il n'est pas discuté du caractère décennal de l'effondrement d'un mur extérieur d'un bâtiment mais invoqué un changement de destination. En effet, il est constant qu'il s'agissait d'un mur séparatif entre deux bâtiments, mais il est resté comme mur extérieur du fait d'un abandon du bâtiment suivant par le promoteur la SCI Ty Douar et ce sera la SCI Marti-Quimper qui fera poser un bardage après l'acquisition, pour en assurer l'étanchéité.Or, tant la maîtrise d'oeuvre que l'entreprise de gros-oeuvre et le bureau de contrôle avaient une parfaite connaissance du problème puisque les

entreprises avaient signé des marchés pour la première moitié du bâtiment figurant aux plans et ont accepté une réception alors que l'ouvrage n'était pas achevé selon ces plans puisqu'il en manquait la moitié.Lors de la signature du procès-verbal du 23 mai 1990 sans réserve, le vice n'était pas apparent pour un profane mais était évident pour les professionnels qui se devaient de conseiller utilement celui-ci sur les risques de construire ainsi ou de laisser l'ouvrage en état et qui auraient dû proposer des travaux d'adaptation.La Cour adopte donc expressément les motifs exacts en fait et en droit du premier juge et répondant en tous points aux conclusions des parties, pour retenir la responsabilité de Cobi/DM Engineering, maître d'oeuvre, de la société Personnic, locateur d'ouvrage chargé de la construction du mur et du bureau de contrôle la Socotec et pour partager entre eux les responsabilités en fonction de leurs interventions et négligences respectives :* le maître d'oeuvre Cobi/DM Engineering, qui a conçu un bâtiment jumelé et qui a accepté sans modification technique la construction puis la livraison d'un bâtiment unique et qui n'a fait aucune proposition quant à ce mur de refend qui changeait de destination : 60 %,* l'entreprise de gros-oeuvre Personnic qui n'a fait aucune réserve quant à ce mur de refend qui devenait de fait un mur extérieur, usage pour lequel il n'était pas conçu: 30 %,* le bureau de contrôle Socotec qui, chargé d'une mission concernant la solidité des ouvrages de clos et de couvert, n'a fait aucune observation technique quant à la nécessité d'une adaptation en cas de non-réalisation de l'ensemble des bâtiments jumeaux :10 %.Le jugement sera confirmé de ce chef.2 Sur le préjudice :a) le préjudice matériel :- en ce qui concerne la reconstruction du mur, il est admis que la SCI Marti Quimper récupère la TVA et seul est discuté le coût de reprise de deux lanterneaux dont il est prétendu qu'il est la conséquence du vandalisme et non

de l'effondrement, mais la preuve de ce que ces ouvrages aient été affectés par des actes de vandalisme n'est pas rapportée alors que l'effondrement est constant. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.- pour les travaux provisoires, deux factures A... ont déjà été prises en compte par l'expert et le tribunal a très exactement apprécié ce qui relève de la situation du bâtiment en 1996 et ce qui est en relation causale directe avec l'effondrement du mur.- pour les dégâts intérieurs, alors qu'il a fallu 20 jours pour poser une barrière et trois mois pour installer un bardage métallique, le premier juge a très exactement apprécié ce qui relevait des entrées d'eaux subséquentes au sinistre et ce qui relevait d'un manque de diligences du propriétaire et le jugement sera confirmé de ce chef.b) le préjudice immatériel :- en ce qui concerne le préjudice de jouissance, il a été constaté que le local était vide depuis 15 mois (octobre 1994) lors du sinistre et était situé dans une zone finalement peu attractive sur le plan commercial avec un "turn-over" des locataires qui n'y restaient que quelques années. Une simple lettre d'intention sans date certaine ne peut établir l'existence d'un bail en février 1996 et il est constant qu'un magasin n'ouvrira qu'en 2002 alors que le préfinancement était acquis en août 1998. Les travaux de reprise devant durer trois mois, la période à retenir commence après mars 1996 et se termine en novembre 1998, soit environ 30 mois, c'est donc à juste titre et par des motifs pertinents que le premier juge a retenu l'indemnisation d'une perte de chance et le jugement sera confirmé de ce chef.- pour le montage du dossier d'exploitation commerciale, la SCI fait état de deux demandes refusées avant celle de mars 2002 pour prétendre à des frais plus importants que ceux retenus par le tribunal mais seule la facture BC Conseil Service du 19 avril 2002 d'un montant de 6.111,44 ç TTC est versée aux débats et il n'est pas établi que d'autre frais aient été

facturés, d'autant que la présentation du cas à la commission en 2002 si elle indique que Vogica a quitté les lieux à la suite de l'effondrement du mur, ce qui est manifestement inexact, ne mentionne pas de précédentes demandes. Le jugement sera confirmé sur ce point.- quant à la perte de valeur, ce bâtiment, réparé et en exploitation avec l'autorisation CDEC, n'est pas à usage d'entrepôt, hypothèse retenue par l'expert X... pour un tel préjudice et la Cour adopte donc expressément les motifs exacts en fait et en droit du premier juge et répondant en tous points aux conclusions des parties quant à une déspécialisation préjudiciable, puisque la location à un cuisiniste n'était plus en cours lors du sinistre et qu'il n'y a pas de relation directe de cause à effet entre celui-ci et une autre activité commerciale moins rémunératrice dans les lieux plusieurs années après.Le jugement sera donc confirmé sur le préjudice immatériel, y compris en ce qu'il a été constaté que, compte tenu du montant de celui-ci, 134.642,97 ç, le débat sur les plafonds de garantie (182-93 8,82 ç pour chacun des trois contrats dela SMABTP et 304.898,03 ç pour ACE) est sans objet. Par contre, il sera dit que la SMABTP peut opposer ses franchises contractuelles prévues à l'article 8-4 des conditions particulières des trois contrats.3 La demande contre l'assureur dommages-ouvrage :La SMABTP recherche la responsabilité de la compagnie ACE, assureur dommages-ouvrage, pour faute en lui reprochant de n'avoir pas préfinancé rapidement les reprises, mais au constat de ce que les constructeurs et leur assureur pouvaient assumer eux aussi les conséquences de leurs responsabilités, la Cour adopte expressément les motifs exacts en fait et en droit du premier juge et répondant de ce chef en tous points aux conclusions des parties, pour débouter l'assureur de l'entreprise de gros-oeuvre de cette prétention, étant observé que l'assurance dommages-ouvrage a préfinancé les reprises dès le dépôt

du premier rapport d'expertise.Il serait inéquitable de laisser à la charge de Me Y... es qualité la totalité des frais irrépétibles engagés à l'occasion de cet appel et la SCI Marti Quimper sera condamnée à lui payer de ce chef la somme de 2.000 ç.Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société ACE Européan Group Ldt totalité des frais irrépétibles engagés à l'occasion de cet appel et la SCI Marti-Quimper sera condamnée à lui payer de ce chef la somme de 2.000 ç.Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Personnic la totalité des frais irrépétibles engagés à l'occasion de cet appel et la SCI Marti-Quimper sera condamnée à lui payer de ce chef la somme de 2.000:E.Par ces motifs La Cour:- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;-Y ajoutant:- Dit qu'en ce qui concerne le préjudice immatériel la SMABTP peut opposer ses franchises contractuelles prévues à l'article 8-4 des conditions particulières ;- Condamne la SCI Marti-Quimper à payer à Maître Sophie Y..., liquidateur provisoire de la société DM Engineering, la somme de DEUX MILLE EUROS (2.000 ç) en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;- Condamne la SCI Marti-Quimper à payer à la société d'assurances ACE Européan Group Ldt la somme de DEUX MILLE EUROS (2.000 ç) en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;- Condamne la SCI Marti-Quimper à payer à la SA Personnic la somme de DEUX MILLE EUROS (2.000,E) en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;- Déboute les parties de leurs autres fins et prétentions ;- Condamne la SCI Marti-Quimper aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.Le Greffier,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Ct0015
Numéro d'arrêt : 422
Date de la décision : 05/10/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : M. Moignard, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2006-10-05;422 ?
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