ARRÊT No 252 DU 18/05/06 - 4ème CHAMBRE - RG 04/3664 X... c/ Y... I - Exposé préalable :
Préalablement à l'acquisition d'une maison sise à Plouigneau, 12 bis rue de la Libération, Madame Catherine X... a fait appel à Monsieur Eric Y..., architecte, pour établissement d'un certificat de conformité aux normes de surface et d'habitabilité et pour une estimation du coût des travaux à réaliser.
Monsieur Y... a établi le certificat le 3 mars 2000 et a fait en date du 8 mars 2000 une évaluation des travaux de rénovation à 316.500 francs, estimation variable selon l'importance des démolitions éventuelles et selon la nouvelle distribution intérieure. Madame X... a signé le compromis le 15 mars 2000 et l'acte authentique a été régularisé en date du 28 août 2000 alors que l'acquéreur s'était rendu compte dès juillet de l'existence de nombreux trous dans les poutres et bois de charpente, les planchers, les cloisons et les supports de portes.
Le 29 août 2000, l'entreprise Santé Bois, ayant diagnostiqué la présence de vrillettes, a fourni un devis de traitement curatif d'un montant de 33.105,90 francs (5.046,96 ç).
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 septembre 2000 Madame X... a indiqué à Monsieur Y... qu'elle engageait sa responsabilité contractuelle pour manquement à son obligation de conseil et lui réclamait à titre provisionnel une somme de 90.000 francs à valoir sur le coût des travaux et les préjudices subis.
Cette lettre est restée sans réponse et après que la présence de vrillette ait été constatée par huissier le 27 octobre 2000, Madame X... a fait procéder par l'entreprise Santé Bois aux traitements et travaux nécessaires pour un coût de 32.397,57 francs (4.938,98 ç) selon facture du 27 novembre 2000.
Par acte du 2 mai 2002 Madame Catherine X... a fait assigner Monsieur Eric Y... en responsabilité et paiement de la somme de 15.244,90 ç.
Par jugement du 15 octobre 2003 le Tribunal de Grande Instance de Morlaix a débouté Madame Catherine X... de sa demande de dommages et intérêts et l'a condamné à payer à Monsieur Eric Y... la somme de 850 ç pour les frais irrépétibles, outre les dépens.
Madame Catherine X... a déclaré appel de ce jugement le 17 mai 2004.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des prétentions et des moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées : - le 20 février 2006 pour Monsieur Eric Y... ; - le 8 mars 2006 pour Madame Catherine X....
L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 mars 2006. [***] I - Motifs :
1o Sur la responsabilité :
Si Monsieur Y... n'a pas été chargé d'une mission de maîtrise d'oeuvre ni d'un état parasitaire, il devait rédiger le certificat de conformité aux normes de surface et d'habitabilité et l'estimatif sommaire après une évaluation de l'état de l'immeuble.
Il a d'ailleurs indiqué à la rubrique "état de l'immeuble" :
couverture, bon.
Il a préconisé et chiffré des travaux éventuellement nécessaires à la mise aux normes du logement : réfection générale électricité, reprise en plomberie, isolation des rampants en toiture et façade, redistribution du logement, cloisonnement, menuiseries extérieures, chauffage. Ces travaux comprenaient notamment un poste de 16.000 francs HT de travaux en toiture pour des Vélux.
Ce faisant, Monsieur Y... n'a pas relevé les dégâts causés par la vrillette, notamment sur les poutres apparentes et la charpente, et
qui, bien que constatés non contradictoirement par un constat d'huissier le 27 octobre 2000, sont incontestables et préexistaient à la visite des lieux par ce professionnel.
Mais Madame X... dit avoir découvert dès juillet 2000 que les parties en bois, poutres, charpentes, lattes de planchers ou encadrements de portes étaient rongées, s'effritaient et présentaient de nombreux trous. Elle a demandé conseil tout d'abord à un charpentier, puis s'est adressé à la SA Santé Bois à une date ignorée, mais avant la réitération par acte authentique le 28 août 2000 puisque le devis Santé Bois est daté du 29 août 2000 et n'a évidemment pas été dressé immédiatement. Elle ne peut donc reprocher à Monsieur Y... de lui avoir laissé acquérir l'immeuble dans l'ignorance de la présence de la vrillette.
Il y a seulement maladresse de Monsieur Y... qui a failli dans son devoir de conseil quant à la nature et l'importance des travaux prévisibles. [***] 2o Sur le préjudice :
Le défaut de conseil de M. Y... n'a pas eu pour conséquence la nécessité des travaux supplémentaires mais seulement une mauvaise information sur le montant approximatif des travaux de réhabilitation nécessaires.
Le devis Santé Bois est de 3.065,49 ç (20.108,30 francs) TTC et le coût allégué des reprises et traitement de la vrillette : 5.046,96 à 5.510,73 ç, est à comparer avec les 48.250,11 ç (316.500 francs) TTC de travaux estimés par M. Y... en mars.
Alors que le prix d'achat de l'immeuble était de 35.825,52 ç, il apparaît que le surcoût est de 6 à 11 % des travaux et de 2,7 à 6,5% du budget total. Or, s'agissant d'une maison ancienne à rénover, il y avait nécessairement des aléas et l'estimation du coût des travaux à prévoir était d'ailleurs sommaire.
Le surcoût induit par le défaut de conseil n'est pas significatif et,
en l'absence de préjudice, ne peut ouvrir droit à dommages et intérêts.
Par ailleurs, l'impossibilité d'habiter dès août ne résulte pas du problème de la vrillette mais des travaux projetés de gros oeuvre, de menuiseries intérieures, doublages, isolations, cloisonnement, escalier, ouvertures Vélux, installation électrique, plomberie et revêtements de sols. Ceci devant être réalisé avant toutes peintures ou autres embellissements.
En effet, les travaux de réhabilitation ont duré de novembre 2000, date d'achèvement des reprises dues à la présence de la vrillette, à fin mai 2001 (factures des 10 avril 2001 : matériaux pour cloisons, 23 avril 2001 : polystyrène et laine de roche pour isolation, 5 mai 2001 : fenêtres, 7 mai 2001 : menuiserie-escalier, 17 mai :
menuiserie-solde escalier, 21 mai 2001 : placo, voliges lattes, 31 mai 2001 : placo et laine de roche, ciment, sabot solive, quart de rond en pin, bois de charpente et pré-linteaux), soit au minimum six mois.
Le seul retard résulterait des mois d'août à novembre et résulte du choix de faire les travaux curatifs à ce moment là. Il n'est donc pas en relation directe avec le défaut de conseil de M. Y...
En ce qui concerne les prêts, Madame X... en a souscrit quatre en 2000-2001 :
- Crédit Mutuel 1er août 2000 : 11.459,14 ç, - Sofinco 30 août 2000 :
1.524,49 ç, - Crédit Mutuel1er septembre 2000 : 22.918,12 ç, - Crédit Mutuel :1er mai 2001 : 15.244,90 ç, soit au total 51.146,65 ç à comparer avec les 35.825,52 + 48.250,11 = 84.075,63 ç de dépenses prévues.
Dès lors, il n'est pas établi de lien entre les 3.065,49 à 5.510,73 çde travaux supplémentaires résultant de la présence de vrillette et la nécessité de l'ultime prêt de 15.244,90 ç du 1er mai 2001.
Enfin, un syndrome dépressif en décembre 2004 ou la rupture du couple
ne peuvent être mis en lien direct avec la négligence d'un architecte n'ayant pas vu des trous de vrillette et des dépenses supérieures de 2,7 à 6,5% à ce qui était prévu.
La perturbation causée aux projets de Madame X... par le défaut de conseil de M. Y... sera donc réparée par une unique somme de 1.000 ç, toutes causes de préjudice confondues. [***]
Il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame X... la totalité des frais irrépétibles engagés à l'occasion de cette instance et Monsieur Y... sera condamné à lui payer de ce chef la somme de 1.000 ç. [***] Par ces motifs, La Cour :
- Infirme le jugement entrepris et, statuant à nouveau :