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07/03/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006945716

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre commerciale, 07 mars 2005, JURITEXT000006945716


EXPOSE DES FAITS-PROCEDURE-OBJET DU RECOURS

La SARL JMD a régulièrement interjeté appel d'un jugement rendu le 27 février 2004 par le Tribunal de Commerce de Vannes qui a :

- décerné acte à la Société LABORATOIRES YVES ROCHER de ce qu'elle n'a pas de moyen opposant à ce que le Tribunal constate que la SARL JMD est propriétaire de son fonds de commerce et de la clientèle y afférent ;

- débouté la SARL JMD de toutes ses demandes fins et conclusions ;

- dit que l'action de la SARL JMD ne constitue pas une procédure abusive au sens de l'article 32-1

du Nouveau Code de Procédure Civile et en conséquence rejeté la demande de condamnation...

EXPOSE DES FAITS-PROCEDURE-OBJET DU RECOURS

La SARL JMD a régulièrement interjeté appel d'un jugement rendu le 27 février 2004 par le Tribunal de Commerce de Vannes qui a :

- décerné acte à la Société LABORATOIRES YVES ROCHER de ce qu'elle n'a pas de moyen opposant à ce que le Tribunal constate que la SARL JMD est propriétaire de son fonds de commerce et de la clientèle y afférent ;

- débouté la SARL JMD de toutes ses demandes fins et conclusions ;

- dit que l'action de la SARL JMD ne constitue pas une procédure abusive au sens de l'article 32-1 du Nouveau Code de Procédure Civile et en conséquence rejeté la demande de condamnation présentée par les LABORATOIRES YVES ROCHER ;

- condamné la SARL JMD à payer à la société LABORATOIRES YVES ROCHER la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles;

Elle demande à la Cour, aux termes de ses conclusions récapitulatives signifiées le 5 janvier 2006 , de débouter la LABORATOIRES YVES ROCHER de son exception d'irrecevabilité de l'appel ;

Sur le fond :

- d'infirmer le jugement déféré , de constater que la société LABORATOIRES YVES ROCHER n'a pas exécuté loyalement et de bonne foi les conventions signées avec JMD et plus particulièrement qu'elle a abusé de son droit d'agrément ;

- de constater que la société LABORATOIRES YVES ROCHER a refusé de restituer le dossier clients de la SARL JMD ;

- de dire et juger que ces agissements sont fautifs et ouvrent droit à réparation au bénéfice de JMD ;

- en conséquence de condamner la société LABORATOIRES YVES ROCHER à lui payer à titre de dommages et intérêts Représentant le préjudice subi suite à la cession du fonds la somme de 72 078 euros ;

- de condamner enfin la société LABORATOIRES YVES ROCHER à lui payer

la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Dans ses conclusions récapitulatives déposées et signifiées le 10 janvier 2006 après report à cette date de l'ordonnance de clôture, la société LABORATOIRES YVES ROCHER demande à la Cour :

- qu'il lui soit décerné acte de ce qu'elle ne se prévaut plus de l'irrecevabilité de l'appel tardif formé par la société J.M.D. ;

- de déclarer , en vertu de l'article 117 du Nouveau Code de Procédure Civile irrecevable cet appel formé par la SARL JMD alors que cette société était en liquidation amiable et ne pouvait être représentée que par son liquidateur et alors que le siège social ne se trouvait pas à l'endroit indiqué ;

A titre subsidiaire de voir la Cour décerner acte à la SARL JMD de ce qu'elle a abandonné son argumentation concernant la requalification du contrat de franchise en contrat d'agent commercial ;

De confirmer en tous points le jugement entrepris et de débouter la SARL JMD de l'ensemble de ses demandes ;

De condamner la même au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel irrecevable et abusif outre 3000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Pour un plus ample exposé des faits , de la procédure et des prétentions des parties la Cour se réfère à la décision attaquée, et aux écritures des parties régulièrement signifiées ;

MOTIFS DE LA COUR

Sur la recevabilité de l'appel

Considérant qu'il sera décerné acte à la société LABORATOIRES YVES ROCHER de ce qu'elle renonce à sa demande d'irrecevabilité de l'appel pour tardiveté ;

Qu'elle maintient toutefois sa demande relative à la qualité pour

agir de la SARL JMD qui fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire amiable et n'avait plus de ce fait le pouvoir de faire appel du jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Vannes ;

Qu'elle fait valoir également que l'adresse indiquée dans l'acte d'appel comme étant celle de la SARL JMD n'était pas la bonne en réalité ;

Considérant que cette irrégularité constitue une irrégularité de forme qui doit être soulevée avant toute défense au fond ce que ne fait pas la société LABORATOIRES YVES ROCHER dans ses premières conclusions devant la Cour en date du 18 janvier 2005;

Que cette demande de nullité sera en conséquence rejetée;

Considérant par ailleurs qu'aux termes de l'article 117 du Nouveau Code de Procédure Civile , constitue une irrégularité de fond, pouvant être soulevée à tout moment de la procédure, la déclaration d'appel formée par le représentant légal d'une société après mise en liquidation des biens de celle-ci;

Considérant en l'espèce qu'il résulte de l'extrait du Registre du Commerce et des Sociétés en date du 6 décembre 2005 qu'à la date de la déclaration d'appel soit le 15 juin 2004 la SARL JMD avait fait l'objet d'une dissolution anticipée à la date du 28 avril précédent , Madame X... Y... qui était la gérante de la SARL ayant été désignée en qualité de liquidateur;

Considérant ainsi que la SARL JMD était valablement représentée dans l'acte d'appel, quand bien même celui-ci a été régularisé au nom de la société désignée sous sa raison sociale;

AU FOND

Considérant que suivant acte au rapport de Maître MARCAIS, notaire à LA LOUPE ( Eure et Loire ) la SARL JMD a acquis le 4 novembre 1992 un fonds de commerce Centre de Beauté Yves Rocher sis 33 Grande Rue à

Châteauneuf-sur-Loire;

Que le 4 mai 1993 cette même société représentée par sa gérante Danielle X... signait avec la société Yves ROCHER un contrat de franchise avec effet à compter du 20 novembre 1992, pour une durée de cinq ans;

Qu'a la suite de travaux de mise aux normes imposés par les LABORATOIRES YVES ROCHER les mêmes parties signaient les 11 et 24 mars 1998 un nouveau contrat de franchise pour une durée de cinq ans avec effet à compter du 22 novembre 1997;

Que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 5 avril 2000 Danielle X... informait la société LABORATOIRES YVES ROCHER de son intention de vendre son fonds de commerce en proposant un acquéreur;

Considérant qu'aucun repreneur potentiel n'ayant été agréé par YVES ROCHER, la SARL JMD cédait son fond de commerce le 22 novembre 2002 à la SARL DOUCEUR C LINE pour un prix sensiblement identique à son prix d'achat;

Considérant que la SARL JMD estime ainsi que les refus d'agréments successifs de la société LABORATOIRES YVES ROCHER étaient abusifs ; que cette société a eu un comportement déloyal à son égard, lui causant un grave préjudice en détournant une clientèle créée et entretenue par la SARL JMD;

Considérant que la SARL JMD reproche en particulier à la société LABORATOIRES YVES ROCHER de ne pas avoir fourni de critères précis d'agrément, de n'avoir pas motivé de façon précise les causes des refus opposés aux candidates proposées par le SARL JMD et de n'avoir en définitive proposé aucun acquéreur;

Considérant que la SARL JMD reproche encore au franchiseur de ne pas lui avoir restitué son fichier clients après la résiliation du contrat de franchise;

Considérant que la société LABORATOIRES YVES ROCHER estime au contraire que ses refus d'agrément étaient parfaitement justifiés; qu'elle fait valoir par ailleurs que la clientèle

ne peut faire l'objet d'aucune appropriation;

Considérant que le contrat de franchise signé entre la SARL JMD et la société LABORATOIRES YVES ROCHER comporte une clause d'agrément qui stipule : " Le contrat de franchise est signé avec le franchisé intuitu personae et aucun élément de cette franchise ne peut être cédé ou transféré sans l'accord écrit préalable de la Société ";

Que l'article 12-2 du même contrat précise toutefois que la société s'engage à ne pas refuser sans motif grave une telle cession ou un tel transfert à une personne offrant les mêmes garanties professionnelles morales et financières que le franchisé ;

Que cependant cette clause ne faisait aucune obligation à la société YVES ROCHER d'agréer en qualité de franchisé n'importe quel acquéreur du fonds de commerce cédé compte tenu d'un intuitu personae particulièrement important dans ce type de contrat ;

Considérant en l'espèce que la société LABORATOIRES YVES ROCHER a refusé successivement les trois candidates à la reprise du fonds de commerce de la SARL JMD ;

Qu'elle s'explique devant la Cour sur les raisons de ce refus en faisant valoir qu'aucune des candidates présentées par la SARL JMD n'avait les qualités personnelles et professionnelles nécessaires pour intégrer le réseau Yves ROCHER ;

Qu'il appartient à la SARL JMD d'apporter la preuve contraire ce qu'elle ne fait pas ;

Considérant par ailleurs que le fait que la quatrième candidate, qui avait l'aval du franchiseur, n'ait finalement pas donné suite à son projet ne peut être imputé à faute à la société LABORATOIRES YVES

ROCHER dans la mesure où le prix qu'elle offrait pour le fonds de commerce ne correspondait pas aux attentes de la gérante de la SARL JMD Madame X... ;

Considérant que toute société est libre de choisir sa politique commerciale et de soumettre son accord à la signature d'un contrat de franchise aux conditions qui lui paraissent les plus compatibles avec ses propres intérêts ;

Que le Tribunal a sur ce point justement retenu que l'évolution des conditions de la franchise et en particulier de l'aménagement et la présentation des Centres de Beauté était inscrite dans les clauses du contrat ;

Considérant en ce qui concerne le fichier-clients que nul n'est propriétaire de sa clientèle ;

Que rien n'oblige la société LABORATOIRES YVES ROCHER à restituer à son ancienne franchisée la liste des clients attachés à la marque Yves ROCHER, étant observé que la SARL JMD avait tout loisir au cours de ses années d'exploitation de la clientèle de se constituer son propre fichier ;

Considérant qu'il convient en conséquence de confirmer la décision déférée ;

Considérant que la société LABORATOIRES YVES ROCHER, qui ne démontre pas l'existence d'un préjudice consécutif à la présente procédure sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimée les frais irrépétibles qu'il a exposés en cause d'appel et qu'il y a lieu en conséquence de condamner la SARL JMD à payer à la société LABORATOIRES YVES ROCHER la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant que succombant en son recours la SARL JMD sera condamnées aux dépens de première instance et d'appel.

DECISION

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Décerne acte à la société LABORATOIRES YVES ROCHER de ce qu'elle ne se prévaut plus de l'irrecevabilité de l'appel tardif formé par la SARL JMD ;

Dit recevable l'appel formé par cette société;

Confirme le jugement déféré;

Déboute la société LABORATOIRES YVES ROCHER de sa demande de dommages et intérêts;

Condamne la SARL JMD à payer à la société LABORATOIRES YVES ROCHER la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne la SARL JMD aux dépens de première instance et d'appel, ceux-ci pouvant être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006945716
Date de la décision : 07/03/2005
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONTRATS DE DISTRIBUTION

Le contrat de franchise prévoyant d'une part, un accord intuitu personae avec le franchisé, et d'autre part, que la société concédante s'engage à ne pas refuser sans motif grave une cession ou un transfert à une personne offrant les mêmes garanties professionnelles morales et financières que le franchisé, ladite société ne commet cependant pas un abus dans l'usage de son droit d'agrément en refusant successivement par trois fois les candidats proposés par le franchisé à la reprise du fonds de commerce, étant remarqué en premier lieu, que toute société est libre de choisir sa politique commerciale et de soumettre son accord à la signature d'un contrat de franchise aux conditions qui lui paraissent les plus compatibles avec ses propres intérêts, et qu'en second lieu, la clause litigieuse ne faisait pas obligation au franchiseur d'agréer n'importe quel acquéreur du fonds de commerce cédé, et ce compte tenu d'un intuitu personae particulièrement important dans ce type de contrat.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2005-03-07;juritext000006945716 ?
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