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20/01/2005 | FRANCE | N°03/03385

France | France, Cour d'appel de Rennes, 20 janvier 2005, 03/03385


ArrLt n° 33 20 janvier 2005 RG: 03/03385 SA NV ISOCAB c/ SA LES VIVIERS DU DIBEN 1-Exposé du litige:

La SARL Les Viviers du Diben a fait exécuter en 1995 et 1996 des travaux d'agrandissement et de mise aux normes de son installation au Port du Diben B Plougasnou.

La maîtrise d'oeuvre a été confiée B la société BATIM, adjudicataire du gros oeuvre. Le lot plafonds-cloisons isothermes a été attribué B la société SMI, actuellement en liquidation judiciaire, qui a commandé les panneaux auprPs des société ISOCAB FRANCE et SA NV ISOCAB, société de droit belge.
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ArrLt n° 33 20 janvier 2005 RG: 03/03385 SA NV ISOCAB c/ SA LES VIVIERS DU DIBEN 1-Exposé du litige:

La SARL Les Viviers du Diben a fait exécuter en 1995 et 1996 des travaux d'agrandissement et de mise aux normes de son installation au Port du Diben B Plougasnou.

La maîtrise d'oeuvre a été confiée B la société BATIM, adjudicataire du gros oeuvre. Le lot plafonds-cloisons isothermes a été attribué B la société SMI, actuellement en liquidation judiciaire, qui a commandé les panneaux auprPs des société ISOCAB FRANCE et SA NV ISOCAB, société de droit belge.

Des désordres étant apparus, la SARL Les Viviers du Diben a fait assigner la société ISOCAB FRANCE aux fins d'expertise. A la suite du dépôt du rapport de l'expert, la SARL Les Viviers du Diben a sollicité au fond la condamnation de la société ISOCAB FRANCE et de la SA NV ISOCAB.

Sur appel, cette Cour a constaté que la société ISOCAB FRANCE n'avait rien livré de sorte qu'elle devait Ltre mise hors de cause mais que la société belge n'ayant pas été attraite B la cause, le rapport d'expertise lui était inopposable.

La SARL Les Viviers du Diben a fait assigner en référé la SA NV ISOCAB devant le Président du Tribunal de grande instance de Morlaix qui s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de commerce.

Par ordonnance en date du 25 avril 2003, le Juge des référés du Tribunal de commerce de Morlaix a ordonné une expertise confiée B Monsieur X... avec une mission classique.

La SA NV ISOCAB a réguliPrement interjeté appel de cette décision le 9 mai 2003.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des

prétentions et moyens des parties, la Cour se réfPre aux énonciations de la décision attaquée et aux derniPres conclusions déposées le 9 novembre 2004 pour la SA NV ISOCAB et le 2 juillet 2004 pour la SARL Les Viviers du Diben .

*** II - Motifs :

Sur la loi applicable et la prescription soulevée :

La SA NV ISOCAB soulPve l'inapplicabilité de la loi française au profit du droit belge soutenant que l'article 3 de la Convention de La Haye du 15 juin 1955 ratifiée par la France et la Belgique relative aux ventes B caractPre international des objets mobiliers corporels dispose que la loi applicable est celle de l'état sur le territoire duquel est établi le vendeur au moment où il a reçu la commande. Elle expose que de ce fait, c'est l'ensemble des dispositions applicables en Belgique qui s'appliquent donc la convention de La Haye du 1er juillet 1964 et en l'espPce son article 39 alinéa 1 aux termes duquel : "l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité, s'il n'a pas réclamé au vendeur dans un bref délai".

En l'espPce, le litige opposant deux sociétés commerciales de droit privé, l'une de nationalité française et l'autre de nationalité belge, il convient d'appliquer la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 applicable aux Etats membres de l'Union Européenne en matiPre civile et commerciale ainsi que le protocole de Luxembourg du 3 juin 1971 donnant compétence B la Cour de Justice des Communautés Européennes concernant l'interprétation de ladite convention. .

Aux termes des dispositions de l'article 5 de la convention de Bruxelles : "Le défendeur domicilié sur le territoire d'un Etat contractant peut Ltre attrait dans un autre état contractant : 1° En matiPre contractuelle devant le tribunal du lieu oj l'obligation qui sert de base B la demande a été ou doit Ltre exécutée... 3° En matiPre délictuelle ou quasi délictuelle , devant le tribunal du lieu oj le fait dommageable s'est produit."

Il est constant que la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) a jugé que l'article 5 1° doit Ltre interprété en ce sens qu'il ne s'applique pas, faute d'un engagement librement assumé d'une partie envers l'autre, B un litige opposant le sous-acquéreur d'une chose au fabricant, qui n'est pas le vendeur, en raison de défauts de la chose ou de l'impropriété de celle-ci B l'usage auquel elle était destinée.

Il est également constant que, selon la CJCE, la notion de matiPre délictuelle ou quasi-délictuelle est une notion autonome (B ne pas interpréter comme un simple renvoi au droit interne de l'un ou l'autre état concerné) et que cette notion comprend toute demande qui vise B mettre en jeu la responsabilité d'un défendeur et qui ne se rattache pas B la "matière contractuelle" au sens de l'article 5 1° . Il convient également de rappeler que la compétence de l'article 5 3° est fondée sur l'existence d'un lien de rattachement étroit entre la contestation et la juridiction qui peut Ltre amenée B en connaître en vue de l'organisation utile du procPs.

En l'espPce, il n'existe pas de lien contractuel librement assumé au sens de l'article 5 1° entre la SA NV ISOCAB et la SARL Les Viviers du Diben . Les sociétés ISOCAB FRANCE et SA NV ISOCAB sont les fournisseurs des panneaux isolants posés par la société SMI, entrepreneur principal chargé de la fourniture et de la pose de ces éléments en plafond et sur les murs de l'établissement.

Il ressort du rapport d'expertise de Monsieur Y... que les panneaux se sont révélés défectueux et que leur remplacement s'impose. Il en résulte que la SA NV ISOCAB est susceptible de voir engager sa responsabilité. Le lieu du dommage est le lieu oj la SARL Les Viviers du Diben a fait exécuter les travaux soit au Port du Diben B PLOUGASNOU. Enfin, la procédure et notamment les opérations d'expertise déjB réalisées qui ont réuni les diverses parties, B l'exception de la SA NV ISOCAB qui fait en conséquence l'objet d'une nouvelle demande d'expertise, se sont déroulées dans la juridiction du domicile de la SARL Les Viviers du Diben , demanderesse, et il apparaît d'une bonne administration de la justice que la SA NV ISOCAB soit attraite devant la juridiction ayant déjB eu B connaître du litige. En conséquence, il convient de faire application de l'article 5 - 3° de la convention de Bruxelles et de déclarer compétente la juridiction du lieu oj le fait dommageable s'est produit soit la juridiction de Morlaix et en appel, la présente Cour. La demande de la SA NV ISOCAB sera rejetée.

Sur la demande d'expertise :

L'article 145 du nouveau Code de procédure civile dispose que s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procPs la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution du litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent Ltre ordonnées B la demande de tout intéressé, sur requLte ou en référé.

L'absence d'urgence dont il est fait état par la SA NV ISOCAB n'est pas un préalable aux opérations d'expertise. Par ailleurs, il ressort du rapport d'expertise de Monsieur Y... que les plafonds livrés sont défectueux, ne répondant pas aux critPres d'isolation thermique suffisants. La SA NV ISOCAB soutient qu'il existe une contestation sérieuse au fond. Cependant, l'existence de contestations sérieuses

ne constituent pas un obstacle B la mise en oeuvre des dispositions de l'article 145 du nouveau Code de procédure civile, l'application de ce texte n'impliquant aucun préjugé sur la responsabilité des personnes appelées comme parties B la procédure ni sur les chances de succPs du procPs susceptible d'Ltre ultérieurement engagé. Il convient en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée.

[*

Il serait inéquitable de laisser B la charge de la SARL Les Viviers du Diben les frais irrépétibles qu'elle a engagés pour faire valoir ses droits. La SA NV ISOCAB sera condamnée B lui payer la somme de 800 en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle sera également condamnée aux dépens.

*] - Par ces motifs :

LA COUR : Reçoit l'appel régulier en la forme,

Constate la compétence de la juridiction de Morlaix et de la présente Cour en cause d'appel pour connaître du litige,

Confirme l'ordonnance déférée,

Y ajoutant,

Condamne la SA NV ISOCAB B payer B la SARL Les Viviers du Diben la

somme de HUIT CENTS EUROS (800 ) en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne la SA NV ISOCAB aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément B l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Le Greffier,

Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 03/03385
Date de la décision : 20/01/2005

Analyses

CONFLIT DE LOIS.

1.2 Conventions internationales Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 Matière contractuelle/ Compétence du tribunal du lieu où l'obligation doit être exécutée 1.3 Conventions internationales Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 Matière délictuelle ou quasi-délictuelle/ Compétence du tribunal du lieu où le fait dommageable s'est produit 1.4 Conventions internationales Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 Article 5.1° Existence d'un lien contractuel entre les parties 1.5 Conventions internationales Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 Article 5.3° Conditions Existence d'un lien de rattachement étroit entre la contestation et la juridiction amenée à en connaître Aux termes des dispositions de l'article 5 de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 applicable aux Etats membres de l'Union Européenne en matière civile et commerciale, "le défendeur domicilié sur le territoire d'un Etat contractant peut être attrait dans un autre Etat contractant, 1° En matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée... 3° En matière délictuelle ou quasi-délictuelle, devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s'est produit". Il résulte de l'interprétation de la convention par la CJCE que l'article 5 1° ne s'applique pas faute d'un engagement librement assumé d'une partie envers l'autre à un litige opposant le sous-acquéreur d'une chose au fabricant qui n'est pas le vendeur, en raison de défauts de la chose ou de l'impropriété de celle-ci à l'usage auquel elle était destinée. Il est également constant que

selon la CJCE, la notion de matière délictuelle ou quasi-délictuelle est une notion "autonome", ne s'interprétant pas comme un simple renvoi au droit interne des Etats concernés, qui comprend toute demande qui vise à mettre en jeu la responsabilité d'un défendeur et qui ne se rattache pas à la "matière contractuelle" au sens de l'article 5 1° et que la compétence de l'article 5 3° est fondée sur l'existence d'un lien de rattachement étroit entre la contestation et la juridiction amenée à en connaître en vue de l'organisation utile du procès. 2 Conventions internationales* Accords et conventions divers* Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968* Article 5.3°* Matière délictuelle ou quasi-délictuelle* Lieu où le fait dommageable s'est produit/ Compétence des tribunaux français* Litige relatif à des panneaux isolants défectueux* Conditions* Absence de lien contractuel librement assumé entre le fabricant belge et le sous-acquéreur français* Responsabilité du fabricant* Opérations d'expertise déroulées en France* Organisation utile du procès 2 En l'espèce, est applicable au litige concernant le caractère défectueux de panneaux isolants, l'article 5 3° de la convention de Bruxelles donnant compétence à la juridiction du lieu où le fait dommageable s'est produit dès lors qu'il n'existe aucun lien contractuel librement assumé au sens de l'article 5 1° de la convention entre le fabricant des panneaux de nationalité belge dont la responsabilité est susceptible d'être engagée, et le sous-acquéreur français, et dans la mesure où les opérations d'expertise réalisées, s'étant déroulées dans la juridiction du domicile du sous-acquéreur français, il apparaît d'une bonne administration de la justice que le fabricant belge soit attrait devant la juridiction française qui a déjà eu à connaître du litige. 3 Référé* Sauvegarde d'éléments de preuve avant tout procès/ Article 145 du nouveau Code de procédure civile* Application* Urgence non exigée* Indifférence de l'existence de

contestations sérieuses au fond 3 L'application de l'article 145 du nouveau Code de procédure civile n'impliquant aucun préjugé sur la responsabilité des personnes appelées comme parties à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d'être ultérieurement engagé, l'absence d'urgence et l'existence de contestations sérieuses au fond ne constituent pas des obstacles à sa mise en oeuvre.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2005-01-20;03.03385 ?
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