Septième Chambre R.G : 04/00759 Mme Madeleine X.... Sébastien Y... M. Jean François Y... Z.../ FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE confirmation partielle Expertise RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 01 DECEMBRE 2004 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
: Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président de Chambre, Monsieur Patrick GARREC, Conseiller, Madame Agnès LAFAY, Conseiller, GREFFIER : Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 20 Octobre 2004 ARRÊT : Contradictoire, prononcé par Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président de Chambre, à l'audience publique du 01 Décembre 2004, date indiquée à l'issue des débats.
DEMANDEURS Madame Madeleine Y... 7 impasse du Colombier 44210 SAINTE MARIE SUR MER Me Michel LEDOUX, avocat Monsieur Sébastien Y... 80 rue de la Jaunaie 44410 LA CHAPELLE DES MARAIS Me Michel LEDOUX, avocat Monsieur Jean François Y... A... 44160 CROSSAC Me Michel LEDOUX, avocat
AYANTS DROIT de Gilbert Y...
M. Gilbert Y..., né le 4 novembre 1941, a été atteint d'un cancer broncho-pulmonaire diagnostiqué le 17 mai 1999 dont il est décédé le 2 septembre 1999 à l'âge de 57 ans.
La Caisse nationale d'assurance maladie a reconnu le caractère professionnel de la pathologie présentée par M. Y... qui avait été exposé à l'amiante à compter de 1955.
Ses ayants droit ont demandé au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) l'indemnisation de leur préjudice personnel et du préjudice successoral.
Le FIVA leur a fait une offre d'indemnisation au titre de l'action successorale et de leur préjudice moral qu'ils ont régulièrement contestée.
Mme Y... née Madeleine B..., veuve de la victime et MM Sébastien et Jean-François Y..., ses fils, demandent quant à l'action successorale, l'attribution d'une somme au titre de la tierce personne. Ils soutiennent que cette demande est recevable devant la cour dès lors que les formulaires de demande ne permettent pas de préciser le montant de l'indemnisation sollicitée ni même les chefs de préjudice dont la réparation est demandée.
Ils demandent en outre une augmentation des divers postes de préjudice reconnus par le FIVA tant au titre de l'action successorale que de leur préjudice moral.
Le FIVA conclut que, n'ayant pas été mis en demeure de notifier une offre, la demande au titre de la tierce personne est irrecevable par application de l'article 53-V de la loi du 23 décembre 2000.
Il offre 1
800 euros pour le préjudice esthétique et conclut pour le surplus à la confirmation de son offre.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens, la cour renvoie aux dernières écritures déposées le 20 octobre par les consorts Y... et le 19 octobre par le FIVA que les parties ont développées à l'audience.
SUR CE
Considérant que l'une des spécificités des atteintes dues à l'amiante tient à l'existence d'un préjudice moral singulier ;
Sur l'action successorale
Sur le préjudice patrimonial
Considérant que l'article 53-V de la loi du 23 décembre 2000 énonce que le demandeur ne dispose du droit d'action en justice que si sa demande d'indemnisation a été rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans le délai mentionné au premier alinéa du paragraphe IV ou s'il n'a pas accepté l'offre qui lui a été faite ;
Que le FIVA ne peut se prévaloir de la jurisprudence relative au fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles (FITH) devenu fonds d'indemnisation des victimes contaminées ; qu'en effet les textes relatifs au FIVA n'imposent au demandeur que de justifier de l'exposition à l'amiante et de l'atteinte à l'état de santé de la victime alors que l'article 1er du décret 92-183 du 26 février 1992 devenu article R.
3122-1 du code de la santé publique relatif au FITH
prévoit expressément que le demandeur doit justifier des préjudices ; Qu'au demeurant le FIVA a fait une offre d'indemnisation alors que les consorts Y... n'avaient formé aucune demande d'indemnisation d'un préjudice particulier ; que devant la cour il conclut en outre à l'allocation d'une somme au titre du préjudice esthétique alors qu'il n'avait rien offert de ce chef auparavant ;
Que le modèle de formulaire de demande d'indemnisation approuvé par le conseil d'administration du FIVA ne porte que sur les identités, le caractère professionnel ou non de la maladie, les circonstances de l'exposition à l'amiante, l'existence d'une action en justice et précise les pièces médicales ou d'identité à joindre à la demande ; que ce formulaire ne laisse aucune possibilité d'indiquer le montant de l'indemnité demandée ni même les différents chefs de préjudices dont la réparation est demandée ;
Que dans ces conditions la demande formée par les consorts Y... devant la cour est parfaitement recevable, étant au surplus remarqué que l'attestation de Mme Y... datée du 13 août 2002 faisait état de difficultés à s'habiller, se laver, se déplacer ;
Considérant qu'il paraît résulter des pièces versées aux débats qu'une partie au moins des frais de tierce personne consistent en la présence de l'épouse auprès de son mari pour tenter d'atténuer sa peur ; qu'une garde-malade n'aurait pu remplir ce rôle intimement lié à la proximité affective
;
Qu'il est cependant certain que M. Y... avait besoin de l'aide
de tiers pour les actes de la vie courante ;
Qu'il y a lieu d'ordonner une expertise pour quantifier le nombre d'heures de tierce personne qui lui ont été nécessaires ;
Sur le préjudice extra-patrimonial
Sur les douleurs morales
Considérant que le FIVA reconnaît que les victimes de l'amiante ont des douleurs morales tenant notamment, au stade de maladie de M. Y..., à la perspective de la mort à court terme ; qu'il offre une somme de 75
000 euros, qui tient compte de l'âge de la victime au moment de la découverte de la maladie, en indemnisation de ce préjudice ;
Qu'il y a lieu de dire cette offre satisfaisante ;
Les douleurs physiques
Considérant qu'outre les douleurs respiratoires, M. Y... a dû subir des séances de chimiothérapie qui ont entraîné de grands malaises ;
Que l'offre de 22
500 euros doit être entérinée comme indemnisant suffisamment ce préjudice dont partie entre dans le préjudice patrimonial ;
Sur le préjudice d'agrément
Considérant que M. Y... a nécessairement été privé des joies usuelles de l'existence pendant sa maladie ; qu'il ne pouvait notamment plus faire de jardinage, de marche à pied et de vélo ; que le FIVA propose d'indemniser ce préjudice par l'allocation d'une somme de 22
500 euros qui sera acceptée comme largement supérieure aux sommes habituellement allouées au titre du préjudice d'agrément ; Sur le préjudice esthétique
Considérant qu'il a consisté notamment en un amaigrissement important ; que la somme de 1 800 euros offerte par le FIVA indemnise correctement ce préjudice ;
Sur les préjudices des ayants droits
Sur le préjudice de l'épouse
Considérant que la somme de 30 000 euros offerte par le FIVA indemnise correctement ce préjudice ;
Sur le préjudice des enfants
Considérant que les fils de M. Y... ne vivaient plus chez leurs parents ; que la somme de 8
000 euros offerte par le FIVA indemnise justement leur préjudice ;
PAR CES MOTIFS Statuant publiquement et contradictoirement, Confirme
l'offre du FIVA sur le préjudice personnel des ayants droits. Les déboute de leurs demandes. Confirme l'offre du FIVA sur le préjudice extrapatrimonial de 120
000 euros dû au titre de l'action successorale. Y ajoutant fixe à 1
800 euros la somme due au titre du préjudice esthétique. Dit recevable la demande faite au titre de la tierce personne. Avant dire droit ordonne une expertise confiée au Dr Renaud Clément C... de médecine légale 3 allée de l'Ile Gloriette 44 000 Nantes F 02.40.41.28.33 avec mission, après s'être fait communiquer les pièces médicales et témoignages utiles, et avoir entendu le cas échéant tous sachants, de : 1- Décrire les actes de la vie courante pour lesquels l'état de santé de M. Gérard Y... nécessitait la présence d'une tierce personne ; 2- Donner toutes indications utiles sur le nombre d'heures de tierce personne dont la victime a dû disposer lors de sa maladie. Fixe à 350 euros le montant de la provision à valoir sur les honoraires de l'expert qui sera versé par le FIVA au greffe de la cour (7ème chambre) au plus tard le 15 janvier 2005. Dit qu'à défaut pour le FIVA de consigner cette somme à la date indiquée, il sera fait application des dispositions de l'article 271 du Code de Procédure Civile. Dit que l'expert déposera un rapport de ses travaux dans les trois mois du versement de la consignation. Réserve les frais et dépens. LE GREFFIER
LE PRESIDENT DEFENDEUR FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE 36 avenue du Général de Gaulle Gallieni II 93175 BAGNOLET CEDEX Me Claude-Noùl TREHET, avocat