La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/03/2004 | FRANCE | N°02/05248

France | France, Cour d'appel de Rennes, 04 mars 2004, 02/05248


Première Chambre B ARRÊT R.G : 02/05248 S.A. AXA FRANCE VIE C/ M. Roger X... Mme Ghislaine X... épouse Y... Infirmation RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM Z... PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT Z... 04 MARS 2004 COMPOSITION DE LA COUR LORS Z... DÉLIBÉRÉ

: Madame Monique BOIVIN, Président, Madame Rosine NIVELLE, Conseiller, Monsieur Jean-Malo BOHUON, conseiller, GREFFIER : Patricia IBARA, lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 27 Novembre 2003 devant Madame Monique BOIVIN, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des r

eprésentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collé...

Première Chambre B ARRÊT R.G : 02/05248 S.A. AXA FRANCE VIE C/ M. Roger X... Mme Ghislaine X... épouse Y... Infirmation RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM Z... PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT Z... 04 MARS 2004 COMPOSITION DE LA COUR LORS Z... DÉLIBÉRÉ

: Madame Monique BOIVIN, Président, Madame Rosine NIVELLE, Conseiller, Monsieur Jean-Malo BOHUON, conseiller, GREFFIER : Patricia IBARA, lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 27 Novembre 2003 devant Madame Monique BOIVIN, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Madame Monique BOIVIN, Président, à l'audience publique du 04 Mars 2004.

APPELANTE : S.A. AXA FRANCE VIE, venant aux droits de AXA CONSEIL VIE venant elle-même aux droits de UAP VIE 370 rue Saint Honoré 75001 PARIS représentée par Me Yvonnick GAUTIER, avoué assistée de Me LEHUEDE, avocat , entendu en sa plaidoirie,

INTIMÉS : Monsieur Roger X... 21 bis, rue des Ajoncs 56130 PEAULE représenté par la SCP GUILLOU etamp; RENAUDIN, avoués assisté de Me OMNES, avocat , entendu en sa plaidoirie,

Madame Ghislaine X... épouse Y... 4 avenue du Maréchal Leclerc 35310 MORDELLES représentée par la SCP GAUVAIN etamp; DEMIDOFF, avoués assistée de Me BOULANGER, avocat , entendu en sa plaidoirie,

Roger X... a souscrit auprès de la compagnie UAP VIE :

- le 25 avril 1996 un contrat d'assurance vie "Modul Plan" sur la base d'un versement initial de la somme de 2 000 F complété par des versements annuels de 8 000 F.

- le 16 novembre 1998 un contrat d'assurance vie "Cadentiel" sur la base d'un versement unique de 300 000 F, assorti d'un rachat mensuel de 1 000 F par mois à compter du 1er janvier 1999.

Madame Ghislaine X... épouse Y... étant désignée comme bénéficiaire de ces contrats a informé la société AXA, par courrier en date du 17 mars 1999, de son acceptation de la stipulation à son profit, avec la précision qu'elle acceptait que Monsieur X... , souscripteur continue de percevoir les retraits programmés de 1 000 F par mois, conformément à la demande de rachat partiel faite par son père.

Le 4 juin 1999 Monsieur X... a sollicité le rachat de ses contrats. La compagnie AXA CONSEIL, venant aux droits de l'UAP ASSURANCES a répondu à Monsieur X... que le rachat du MODUL PLAN N°81039844 et du CADENTIEL n°81306774 ne pouvait s'effectuer sans l'accord de Madame Y... dans la mesure où elle avait accepté le bénéfice des contrats.

Le 28 juin 2000 Monsieur X... a assigné la compagnie AXA CONSEIL VIE en responsabilité, à titre subsidiaire en annulation des contrats sur le fondement du dol.

La compagnie AXA CONSEIL a appelé à la cause Madame Y... pour qu'elle fasse connaître sa position, et à toutes fin en garantie des condamnations qui seraient prononcées à son encontre.

Par jugement du 4 juin 2002 le tribunal de grande instance de VANNES a condamné la société AXA à payer à Roger X... la somme de 45 000 euros à titre de dommages-intérêts, débouté la société AXA de son appel en garantie, débouté Madame Y... de sa demande de

dommages-intérêts, condamné la société AXA au paiement de 1500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à Monsieur X... d'une part, à Madame Y... d'autre part.

La société AXA FRANCE VIE intervenant aux lieu et place de la société AXA CONSEIL VIE a interjeté appel .

Elle sollicite la réformation du jugement, l'autorisation d'aquiescer la demande de rachat formée par Monsieur X... le 4 juin 1999, en conséquence le débouté des demandes de ce dernier.

A titre subsidiaire elle conclut à l'absence de responsabilité, au débouté de toutes demandes de Monsieur X..., des demandes de Madame Y..., sollicite leur condamnation au paiement d'une indemnité de 1500 euros au titre des frais irrépétibles.

Se prévalant de la jurisprudence de la Cour d'Appel de PARIS du 27 mai 2003 la société AXA soutient que sa vie durant, le souscripteur conserve ses droits à rachat, droit conféré par une loi d'ordre public l'article 132.21 du code des assurances, les dispositions de l'article L 132.9 du code des assurances ne rendant irrévocable que la désignation des bénéficiaires l'ayant accepté, ce qui rend sans intérêt l'examen de l'action en responsabilité. Quant à l'appel en la cause de Madame Y... il était nécessaire, le préalable à toute action en responsabilité compte tenu de son opposition à la demande de rachat formée par Monsieur X....

A titre subsidiaire la société AXA FRANCE VIE fait valoir que le contrat d'assurance-vie est un contrat encadré sur le plan législatif avec des mentions obligatoires, parmi lesquelles ne figurent pas les conséquences de l'acceptation du contrat par le bénéficiaire désigné, qu'au contraire une réponse ministérielle du 11 juillet 1996 a précisé qu'il n'était pas nécessaire de mettre à la charge des assureurs une nouvelle obligation d'information de ce type ; il ne peut être reproché à la compagnie AXA d'avoir omis de procéder à une

telle information.

Il ne saurait lui être reproché d'avoir indiqué dans ces contrats que la valeur de rachat pouvait être versée en tout ou partie sur simple demande, que l'épargne était disponible à tout moment, mentions qui ne sont que l'application du principe posé par l'article L 132.21 du code des assurances.

Elle ajoute que Monsieur X... ne démontre pas qu'il n'aurait accepté les contrats d'assurance qu'en étant persuadé d'y mettre fin à tout moment, alors qu'il avait opté dans les deux contrats pour l'option "VIE", notion qui exclut la décision de placement, mais s'inscrit dans la perspective de constitution d'un capital pour sa fille, exonéré de droits de succession.

Elle réplique que les retraits partiels de 1 000 F ont été effectués par virement sur compte postal de Monsieur X..., avec un rattrapage de 1 840 euros, de novembre 1999 à octobre 2000, et depuis cette date sont régulièrement payés.

Elle ajoute que la nullité pour dol ne peut utilement prospérer.

Monsieur X... conclut à la confirmation du jugement, mais sur appel incident sollicite condamnation au paiement de la somme de 66 000 euros à titre de dommages intérêts compensatoires et moratoires ; à titre subsidiaire il demande l'annulation des deux contrats sur le fondement du dol, la condamnation de la société AXA CONSEIL à lui rembourser la somme de 50 917,97 euros, montant des sommes investies dans les deux contrats depuis la souscription, au paiement d'une indemnité de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts en application de l'article 1382 du code civil, outre 2 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il fait grief à la société AXA d'avoir manqué à son obligation de conseil en le persuadant de la possibilité de racheter les contrats à

tout moment, à son obligation d'information en ne l'informant pas des conséquences de l'acceptation du bénéficiaire du contrat sur la disponibilité de son épargne, l'empêchant ainsi de disposer de son épargne pendant sa retraite.

Il précise que cette attitude de l'assureur s'apparente à des manoeuvres ou réticences visant à le tromper sur l'une des qualités essentielles de l'opération à savoir la faculté de rachat des contrats, élément déterminant du consentement ; cette réticence dolosive a entraîné une erreur qui a vicié son consentement.

Madame Y... conclut au débouté de toutes les demandes de la société AXA, à la condamnation de la société AXA FRANCE VIE au paiement de la somme de 2 500 F à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, et 4 500 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle invoque les dispositions de l'article L312.9 du code des assurances, l'acceptation du bénéficiaire qui rend parfaite la stipulation pour autrui ce qui crée un droit immédiat et direct au profit du bénéficiaire et paralyse le droit de révocation, du souscripteur ; quant à la faculté de rachat de l'article L 132.21 du code des assurances elle disparait avec l'acceptation.

Elle ajoute que l'arrêt de la Cour d'Appel du 27 mai 2003 ne saurait recevoir application en l'espèce le souscripteur ayant clairement manifesté son intention de conserver ses droits de rachat pour subvenir à ses besoins financiers courants, ce qui n'est pas le cas d'espèce.

Elle s'estime bénéficiaire du contrat, n'ayant pas entendu renoncé au bénéfice de la stipulation faite en sa faveur, Madame Y... fait valoir qu'elle a acquis son droit contre l'assureur dès le jour du contrat, la société AXA ne pouvait ignorer qu'une telle acceptation interdisait l'exercice du rachat ; elle doit alors répondre de ses facultés vis à vis de son co-contractant sans remettre en cause les

droits du bénéficiaire.

Elle ajoute que sa mise en cause n'était pas nécessaire la société AXA savait dès le 15 juillet 1999 qu'elle n'entendait pas renoncer aux stipulations consenties à son profit ; son assignation n'avait d'autre but que d'obtenir sa condamnation en garantie fondée sur une prétendue faute non intentionnelle. DISCUSSION :

Attendu que le contrat d'assurance vie MODUL PLAN avec option VIE et le contrat CADENTIEL avec option VIE, et désignation d'u n bénéficiaire en cas de décès ont pour objet la constitution d'un capital par valorisation des versements et un placement sous forme d'assurance vie, mais ne pouvaient être qualifiés de contrats de capitalisation ;

Qu'il est spécifié au contrat "MODUL PLAN" que la valeur de rachat pouvait être versée en tout ou partie sur simple demande, et sur le contrat "CADENTIEL" que l'épargne étant disponible à tout moment, mentions qui ne peuvent être reprochées à tort à la société AXA dans la mesure où elles ne sont que la transposition du principe d'ordre public posé par l'article L 132.21 du code des assurances ;

Attendu que l'article L 132.9 du code des assurances dispose que la stipulation en vertu de laquelle le bénéfice de l'assurance est attribué à un bénéficiaire déterminé devient irrévocable par l'acceptation expresse ou tacite du bénéficiaire ;

Qu'il s'en déduit que l'acceptation du bénéficiaire ne permet plus au souscripteur de modifier ou remplacer la désignation du bénéficiaire, mais dans la mesure où droit de créance de ce dernier est limité au montant de la prestation assurée, elle n'affecte pas le droit au rachat du souscripteur, correspondant aux primes versées en sus de celles contractuellement convenues ;

Que les droits de Madame Y... n'ayant été stipulés qu'en cas de décès, Monsieur X... souscripteur du contrat d'assurance a entendu se réserver le libre exercice du droit de retrait des fonds, notamment sa faculté de rachat sans que l'acceptation de Madame Y... bénéficiaire des contrats en cas de décès de l'assuré , puisse avoir pour effet d'y faire obstacle ;

Attendu que superfétatoirement il convient de relever que le législateur n'a pas estimé utile de modifier l'article L 132.9 du code des assurances ni de mettre à la charge des assureurs une nouvelle obligation d'information du souscripteur des conséquences l'acceptation du bénéficiaire sur ses propres droits ;

Qu'en l'espèce Monsieur X... ne peut soutenir que la libre disposition de son épargne alors que le contrat MODUL PLAN était conclu pour 11 ans, que le contrat CADENTIEL ne comprenait que le seul versement d'une prime de 300 000 F constituait un élément substantiel de son consentement à l'opération d'assurance ;

Attendu qu'il convient donc de dire que Monsieur X... est bien fondé à exercer le rachat de ces deux contrats MODUL PLAN et CADENTIEL ;

Attendu que l'appel en la cause de Madame Y..., compte tenu de l'acceptation des contrats en qualité de bénéficiaire était nécessaire ; qu'il ne saurait être fait droit à sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ; qu'il n'est pas inéquitable de laisser à sa charge ses frais irrépétibles ; qu'il n'est pas inéquitable de laisser à chacune des parties ses frais irrépétibles et d'opérer un partage des dépens entre Monsieur X... et la cie AXA compte tenu de l'évolution de ses demandes en cours de procédure ; PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement du 4 juin 2002 ;

Dit que Monsieur X... est bien fondé à exercer le rachat des deux contrats d'assurance MODUL PLAN et CADENTIEL, nonobstant le refus opposé de Madame Y... bénéficiaire ayant accepté les contrats;

Déboute Monsieur X... et Madame Y... de leurs demandes ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Fait masse des dépens qui seront supportés pour moitié par Monsieur X... et la compagnie AXA FRANCE VIE et recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 02/05248
Date de la décision : 04/03/2004

Analyses

ASSURANCE DE PERSONNES - Assurance-vie

Selon l'article L. 132-9 du Code des assurances, dans la mesure où la stipulation en vertu de laquelle le bénéfice de l'assurance est attribué à un bénéficiaire déterminé, devient irrévocable par l'acceptation expresse ou tacite du bénéficiaire, le souscripteur ne peut plus modifier ou remplacer la désignation du bénéficiaire mais conserve son droit au rachat de ses contrats d'assurance conformément au principe d'ordre public posé par l'article L. 132-21 du Code des assurances d'autant plus qu'en l'espèce, le droit de créance du bénéficiaire limité au montant de la prestation assurée, n'a été stipulé qu'en cas de décès du souscripteur et que les contrats d'assurance-vie comportent des mentions relatives à la valeur de rachat et à la libre disposition de l'épargne


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2004-03-04;02.05248 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award