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18/12/2003 | FRANCE | N°03/02069

France | France, Cour d'appel de Rennes, 18 décembre 2003, 03/02069


Huitième Chambre Prud'Hom ARRET

R.G:03/02069 S.A.R.L. CATELIN C/ Monsieur X... RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM Y... PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT Y... 18 DECEMBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS Y... DÉLIBÉRÉ: Mme Francine SEGONDAT, Président, Mme Marie-Hélène L'HENORET, Conseiller, Monsieur François PATTE, Conseiller, ARRÊT:

Vu le jugement rendu le 6 février 2003 par le Conseil de Prud'hommes de NANTES qui, saisi par Monsieur X..., chauffeur routier à la SARL CATELIN du 9 février 1997 au 18 août 2001, date du sa démission, de demandes en paiement d

e repos compensateurs, remboursement d'une formation FCOS, prime de nuit et...

Huitième Chambre Prud'Hom ARRET

R.G:03/02069 S.A.R.L. CATELIN C/ Monsieur X... RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM Y... PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT Y... 18 DECEMBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS Y... DÉLIBÉRÉ: Mme Francine SEGONDAT, Président, Mme Marie-Hélène L'HENORET, Conseiller, Monsieur François PATTE, Conseiller, ARRÊT:

Vu le jugement rendu le 6 février 2003 par le Conseil de Prud'hommes de NANTES qui, saisi par Monsieur X..., chauffeur routier à la SARL CATELIN du 9 février 1997 au 18 août 2001, date du sa démission, de demandes en paiement de repos compensateurs, remboursement d'une formation FCOS, prime de nuit et dommages intérêts pour résistance abusive et d'une demande reconventionnelle de remboursement d'un trop perçu de salaire, a fait droit à certaines demandes et condamné la SARL CATELIN à payer à Monsieur X... : 8.486,69 + 848,67 euros au titre des repos compensateurs et congés payés associés, 371,40 euros en remboursement de la formation FCOS, 1.000 euros à titre de dommages intérêts pour non-respect des dispositions du décret du 26 janvier 1983 et 762,25 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et condamné Monsieur X... à restituer à la SARL CATELIN un trop perçu de 1.096,56 euros.

Vu l'appel formé le 19 mars 2003 par la SARL CATELIN à laquelle le jugement a été notifié le 21 février 2003 et l'appel incident ultérieurement formé par Monsieur X....

Vu les conclusions déposées le 29 octobre 2003 par la SARL TRANSPORTS CATELIN oralement reprises à l'audience tendant à la réformation du jugement, au débouté des demandes en paiement des repos compensateurs et congés payés afférents et subsidiairement à la déduction de la somme de 609,50 euros de la condamnation prononcée, au débouté des demandes au titre de la clause de dédit-formation et du non-respect de l'article 2 du décret du 26 janvier 1983 et à la confirmation du

jugement pour le surplus.

Vu les conclusions déposées le 23octobre 2003 par Monsieur X... oralement soutenues à la barre tendant à la réformation du jugement, à la condamnation de la SARL CATELIN à lui payer 5.633 euros pour non-respect du décret 83/40, 1.500 euros au titre des frais non répétibles, 2.486,40 euros au titre des primes et frais de déplacement de nuit pour la période postérieure au 1er juillet 2000, 248,64 euros au titre des congés payés afférents, subsidiairement 2.486,40 euros et 1.377,86 euros au titre des congés payés pour la période antérieure au 1er juillet 2000 et à la confirmation pour le surplus.

I - Sur les repos compensateurs

Considérant que la SARL CATELIN prétend qu'elle accordait des repos compensateurs à ses salariés et qu'elle a institué un usage consistant à intégrer le paiement des repos compensateurs dans le salaire de base en rémunérant les chauffeurs à un taux horaire supérieur aux minima imposés par la Convention Collective, ce que conforte le fait qu'il est extrêmement rare dans ce secteur d'activité de rémunérer les conducteurs à un tel taux ;

Considérant que pour critiquer le jugement qui a estimé qu'en l'absence de planning de travail et des repos et d'accord écrit des salariés, elle n'avait pas respecté les dispositions d'ordre public de l'article L 212-5-1 du Code du Travail, la SARL CATELIN soutient qu'elle démontre l'accord des salariés par 3 témoignages et par l'esprit de dialogue de l'entreprise et que le système mis en oeuvre était plus favorable aux salariés ;

Mais considérant que les dispositions du Code du Travail relatives au paiement des heures supplémentaires et repos compensateurs sont d'ordre public et s'imposent à l'employeur qui ne peut s'y soustraire par le paiement d'un taux majoré de rémunération même par une clause

de rémunération au demeurant inexistante en l'espèce et hors toute mise en application des dispositions de la Convention Collective ;

Considérant qu'une telle pratique qui ne tient aucun compte du temps de travail réellement effectué, du seuil de déclenchement du repos compensateur, du droit à l'information des salariés sur les droits acquis, de la réalité des heures de repos et des obligations de l'employeur relatives à la rédaction des bulletins de salaire, ne saurait être considérée comme plus favorable aux salariés ;

Qu'en conséquence, la SARL CATELIN n'est pas fondée à se prévaloir d'un système de rémunération intégrant le paiement des repos compensateurs dans le salaire de base dont le Conseil de Prud'hommes a de surcroît à juste titre relevé qu'il n'avait fait l'objet d'aucun accord écrit ;

Considérant qu'elle prétend subsidiairement que les calculs de Monsieur X... sont erronés du fait qu'ils ne tiennent compte ni des jours fériés ni des jours de congés ni des heures d'équivalence ni des décomptes manuscrits versés aux débats ;

Considérant qu'au vu des éléments fournis aux débats par l'employeur et de ceux fournis par le salarié, la Cour est en mesure de se convaincre que la créance de Monsieur X... au titre des repos compensateurs doit être ramenée à 7.877,19 euros auxquels s'ajouteront 787,71 euros au titre des congés payés afférents.

II - Sur la formation FCOS.

Considérant que pour contester le jugement qui a estimé que le caractère obligatoire de la FCOS privait l'employeur de toute possibilité d'en faire supporter le coût au salarié, la SARL CATELIN fait valoir que Monsieur X... a signé une clause de dédit-formation et que les intérêts légitimes de l'employeur commandent de redonner valeur aux engagements écrits pris par le salarié ;

Mais considérant que l'article 13 de la Convention Collective relatif au financement des frais de la FCOS dispose :

Le financement des frais de la formation continue obligatoire de sécurité visée à l'article 11 du présent Accord-cadre est assuré par : -les aides spécifiques de l'Etat ou notamment dans le cadre des contrats d'objectifs de formation professionnelles, celles des collectivités territoriales, - une quote part de la taxe parafiscale pour le développement de la formation, - les dispositions particulières prévues par les conventions de partenariat en matière de prévention des accidents du travail, - Les contributions particulières de 10 salariés et plus au titre du plan de formation, - la contribution mutualisée des entreprises de moins de 10 salariés au titre de la formation professionnelle.

Considérant que c'est par conséquent à bon droit que le Conseil de Prud'hommes a estimé que la SARL CATELIN ne pouvait en demander remboursement au salarié ; que toutefois la somme due sera ramenée à 360,14 euros au vu des pièces justificatives produites.

III Sur la "prime de nuit"

Considérant que Monsieur X... sollicite un différentiel de 11,20 euros par prime de nuit postérieure au 1er juillet 2000 soit un total de 2.486,40 euros pour 222 nuits au motif que cette somme a cessé de lui être payée à compter de cette date alors qu'il s'agissait d'un usage et que le mode de rémunération ne peut être modifié sans l'accord des salariés ;

Considérant que les Premiers Juges l'ont débouté de cette demande au motif qu'il s'agit de frais de déplacement de nuit et non d'une prime ;

Mais considérant que l'indemnité dénommée "frais de déplacement de nuit" d'un montant de 146,90 F par nuit travaillée que touchait systématiquement chaque salarié travaillant de nuit ne correspondait

pas à l'indemnisation des frais de déplacement effectivement engagés par le salarié chaque nuit de travail mais à une prime forfaitaire indemnisant la sujétion particulière du travail de nuit ;

Considérant que cette prime résultait d'un usage puisqu'elle était constante depuis l'embauche, fixe en son montant et générale car servie à tous les chauffeurs faisant le ramassage des volailles ;

Mais considérant qu'elle a été partiellement contractualisée à partir du 1er juillet 2000 puisque ramenée de 146,90 à 76 F par nuit travaillée, la différence étant compensée par une augmentation du taux horaire brut, ce que n'interdit pas l'article 12 du chapitre II de la Convention Collective relatif à la rémunération des ouvriers des transports, s'agissant en réalité d'une prime de nuit et non d'un remboursement de frais ;

Considérant que la dénonciation de l'usage n'était pas nécessaire puisque la dite prime n'a pas disparu mais a été pour partie maintenue et pour partie incorporée au salaire, devenant ainsi pour partie un élément de rémunération ;

Qu'il s'ensuit que Monsieur X... qui a en réalité postérieurement au 1er juillet 2000 continué à percevoir la même somme au titre de la prime pour partie maintenue sous forme de prime et pour partie contractualisée n'est pas fondé en sa demande en paiement d'un rappel de primes postérieur au 1er juillet 2000 ;

Considérant que la demande en paiement de congés payés présentée à titre subsidiaire ne repose sur aucun fondement.

IV - Sur le non-respect de l'article 2 du décret 83-40 du 26 janvier 1983

Considérant que pour critiquer le jugement qui a alloué une indemnisation de 1.000 euros à Monsieur X... à titre de dommages intérêts au motif qu'elle lui a imposé une répartition du temps de travail hebdomadaire sur moins de 5 jours sans accord d'entreprise,

la SARL CATELIN fait valoir que Monsieur X... était délégué du personnel suppléant et a consenti à cette répartition sur laquelle tout le monde était d'accord et qui ne lui a causé aucun préjudice ; Qu'en réponse Monsieur X... sollicite 5.766,39 euros en rémunération des jours de repos qui lui ont été imposés les jours où la SARL CATELIN ne lui a pas fourni de travail ou n'a pas su égaliser le temps de travail sur cinq jours et subsidiairement pour non-application du décret 83/40 et plus subsidiairement pour imposition de repos contre son gré;

Mais considérant que celui-ci ne méconnaît pas sa qualité de délégué du personnel ayant consenti à la répartition du travail sur un nombre de jours inférieur à 5 et ne justifie d'aucun préjudice alors que d'une part l'employeur a tenu compte de ses contingences personnelles dans l'attribution des jours de repos et que d'autre part il a obtenu parallèlement les repos compensateurs sollicités ;

Que le jugement sera en conséquence réformé sur ce point.

V - Sur le trop perçu réclamé par la SARL CATELIN

Considérant que la SARL CATELIN soutient qu'elle a versé des sommes excédentaires à Monsieur X... en 2000 et 2001 correspondant à des heures d'équivalence comprises entre 35 et 37 heures par semaine du fait qu'elle a appliqué dès le mois de janvier 2000 les dispositions du décret du 27 janvier 2000 alors que certaines de ses dispositions ont été annulées par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 30 novembre 2001 ;

Considérant que pour critiquer le jugement qui l'a condamné de ce chef à restituer à l'employeur la somme de 1.096,56 euros outre les intérêts légaux au motif qu'il a été rémunéré à compter du 1er mars 2000 sur la base de 35 heures par semaine sans application des heures d'équivalence Monsieur X... observe qu'il n'a jamais été payé de

ses temps de coupure et de restauration et qu'il n'a jamais été chauffeur grand routier ;

Mais considérant que par arrêt en date du 30 novembre 2001, le Conseil d'Etat a annulé les paragraphes 4ème, 5ème et 6ème de l'article 5 du décret du 26 janvier 1983 dans sa rédaction issue du décret n° 2000-69 du 27 janvier 2000 ainsi que le paragraphe 7ème de l'article 5 du même décret;

Considérant que la SARL CATELIN est donc fondée à solliciter le remboursement des heures d'équivalence qu'elle a versées en trop de février 2000 à juillet 2001 en se fondant sur les textes applicables aux conducteurs courte distance dont faisait partie Monsieur X... dès lors que si le Conseil d'Etat a validé les heures d'équivalence instituées par le décret du 27 janvier 2000, il a annulé les dispositions relatives à leur indemnisation que l'employeur avait en l'espèce appliquées.

VI - Sur les demandes accessoires

Considérant que Monsieur X... ne rapporte la preuve d'aucun préjudice particulier occasionné par l'attitude de l'employeur ;

Considérant que, débiteur des repos compensateurs, celui-ci supportera les dépens ;

Considérant que l'équité commande de faire partiellement droit à la demande de Monsieur X... fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

DECISION

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Réforme le jugement déféré sur le montant des repos compensateurs, du remboursement de la formation et sur la demande en réparation du préjudice pour non-respect du décret 83/40.

Condamne la SARL CATELIN à payer à Monsieur X... :

[* 7.877,19 + 787,71 euros au titre des repos compensateurs et congés payé associés,

*] 360,14 euros au titre du remboursement de la formation FCOS.

Déboute Monsieur X... de sa demande en dommages intérêts pour non-respect du décret 83/40 du 26 janvier 1983.

Confirme pour le surplus le jugement déféré.

Condamne la SARL CATELIN à payer à Monsieur X... 1.000 euros au titre des frais non répétibles d'appel et aux dépens d'appel. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 03/02069
Date de la décision : 18/12/2003

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION - Durée du travail - Heures supplémentaires - Accomplissement - Preuve

Un employeur n'est pas fondé à se prévaloir d'un système de rémunération intégrant le paiement des repos compensateurs dans le salaire de base de ses salariés dans la mesure où d'une part, étant d'ordre public, les dispositions du Code du travail relatives au paiement des heures supplémentaires et repos compensateurs s'imposent à l'employeur qui ne peut s'y soustraire par le paiement d'un taux majoré de rémunération même par une clause de rémunération au demeurant inexistante en l'espèce et hors toute mise en application des dispositions de la Convention Collective, et où d'autre part, une telle pratique qui ne tient aucun compte du temps de travail réellement effectué, du seuil de déclenchement du repos compensateur, du droit à l'information des salariés sur les droits acquis, de la réalité des heures de repos et des obligations de l'employeur relatives à la rédaction des bulletins de salaire, ne saurait être considérée comme plus favorable aux salariés.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2003-12-18;03.02069 ?
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