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18/11/2003 | FRANCE | N°02/03181

France | France, Cour d'appel de Rennes, 18 novembre 2003, 02/03181


Cinquième Chamb Prud'Hom R.G: 02/03181 02/03339 ARRET Mme Nadège X... Cl Association ADPEP LA PASSERELLE Y... et Réformation partielle REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D' APPEL DE RENNES ARRET DU 18 NOVEMBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE : Monsieur Louis-Marc PLOUX, Président de Chambre, Madame Simone CITRAY, Conseiller, Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseiller, GREFFIER : Madame Guyonne Z..., lors des débats et lors du prononcé DEBATS : A l'audience publique du 22 Septembre 2003 devant Madame Simone CITRAY , magistrat rapporteur, tenant seul l'audienc

e,sans opposition des représentants des parties, et q...

Cinquième Chamb Prud'Hom R.G: 02/03181 02/03339 ARRET Mme Nadège X... Cl Association ADPEP LA PASSERELLE Y... et Réformation partielle REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D' APPEL DE RENNES ARRET DU 18 NOVEMBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE : Monsieur Louis-Marc PLOUX, Président de Chambre, Madame Simone CITRAY, Conseiller, Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseiller, GREFFIER : Madame Guyonne Z..., lors des débats et lors du prononcé DEBATS : A l'audience publique du 22 Septembre 2003 devant Madame Simone CITRAY , magistrat rapporteur, tenant seul l'audience,sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au delibéré collégial ARRET: Contradictoire, prononcé par Madame Simone CITRAY , Conseiller, à l'audience publique du 18 Novembre 2003; date indiquée a l'issue des débats: 04 Novembre 2003. APPELANTE : Madame Nadège X... 5 rue des Ajoncs d'Or 35720 ST PIERRE DE PLESGUEN Intimée sur appel de L ' ADPEP "La Passerelle" représentée par Me GOBBE, avocat au barreau de RENNES INTIMEE : Association ADPEP LA PASSERELLE 10 rue Jacques II 35400 SAINT MALO Egalement appelante; représentée par Me Sylvain LEBIGRE, avocat au barreau de RENNES.

Engagée le 4 avril 1994 en qualité de monitrice éducatrice par l' Association Départementale des Pupilles de L 'Enseignement Public d'ILLE et VILAINE (A.D.P.E.P.35), Madame X... a le 2 novembre 2000 saisi le Conseil de Prud'Hommes de SAINT-MALO de demandes tendant d'une part à la requalification de la démission qu'elle a notifiée à son employeur le 9 juin 2000 en un licenciement avec toutes les conséquences qui s'y attachent, et d'autre part au paiement d 'un rappel de salaire au titre des heures effectuées pendant la nuit, et d'une indemnité pour frais non répétibles.

Par jugement du 25 avril 2002 dont les deux parties ont relevé appel les 7 et 14 mai 2002, la juridiction prud' homale a: - débouté Madame

X... de sa demande de requalification de sa démission. - condamné L' A.D.P .E.P . 35 à verser a cette dernière au titre des rappels de salaire les sommes de :

[* 4632, 02 euros pour 1996

*] 1425,21 euros pour 1997

[* 3826,77 euros pour 1998

*] 8824, 68 euros pour 1999

[* 1593,53 euros pour 2000

*] 500 euros sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Au soutien de son appel Madame X... fait observer : - que le Conseil de Prud'Hommes a confondu la rétraction d'une démission donnée librement par le salarié et celle qui est matérialisée par une demande de requalification en licenciement fondée sur les agissements fautifs de l'employeur qui correspond à ses prétentions. - que si elle a rompu le contrat de travail le 9 juin 2000 c'est, selon lespropres termes de son courrier en raison des " dégradations" du travail au foyer, des mises en danger au quotidien auxquelles sont confrontés adultes et jeunes et de l' état de santé qui en découlait pour elle-même. - que les diverses attestations qu' elle produit au dossier témoignent des dysfonctionnements du foyer, de l'état d'ébriété quasi quotidien du directeur, des carences graves de celui-ci, des agressions physiques dont était victime l' équipe éducative. - que les comptes rendus du comité d'entreprise sont

édifiants sur les conditions de travail du personnel de l' association ainsi que sur le climat d'insécurité qui régnait au sein du foyer. - qu 'un mouvement de grève a été déclenché pour les 10 et 11 avril 2000. - qu'il ressort de ces différentes pièces que, bien qu'avisée de la situation la direction du foyer n'a pas mis en oeuvre les mesures nécessaires pour assurer la sécurite et protéger la santé du personnel. - qu' elle justifie que son état de santé fragile est directement lié à un état anxieux permanent. - qu' elle est fondée à solliciter le versement des sommes de :

* 40 000 euros à titre de dommages et intérêts.

*3500,59 euros à titre d'indemnité de préavis.

*350,06 euros à titre de congés payés sur préavis.

*6126,03 euros à titre d'indemnité de licenciement.

*2000 euros à titre d'indemnité pour frais non répétibles d'appel et la confirmation pour le restant de la décision déférée en ce qui concerne les rappels de salaire et l'indemnité pour frais non répétibles d'instance.

Au soutien de ses prétentions d'appelante l'association demande à la Cour de débouter la salariée de l' ensemble de ses prétentions, rappelant notamment la jurisprudence la plus récente de la Cour suprême en matière de contentieux concernant le travail de nuit dans les chambres de veille.

Elle a sollicité par ailleurs l'allocation d'une indemnité de 1525 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour déclare se référer expressément aux conclusions qu' elles ont prises et développées oralement devant elles. DISCUSSION

Considérant que dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice il sera procédé à la jonction des procédures enregistrées à la Cour sous les numéros 02-03181 et 02-03339. * Sur la rupture du contrat de travail

Considérant que par lettre du 9 juin 2000, Madame X... a informé son employeur qu' elle se trouvait contrainte de démissionner au vu " des dégradations du travail au foyer La Passerelle, des mises en danger au quotidien auxquelles sont confrontés adultes et jeunes, de son état de santé qui en découle et pour ainsi assurer sa propre sécurite et sa protection".

Considérant qu' il appartient à la salariée de démontrer que malgré les apparences, elle n' a pas démissionné mais impute la rupture à son employeur qui, par son comportement fautif, a rendu impossible la poursuite de l' exécution de son contrat de travail.

Considérant que pour justifier de ses prétentions, Madame X... produit au dossier : - plusieurs témoignages émanant de jeunes en difficulté qui ont été placés au foyer La passerelle et qui vont jusqu'à déclarer que c'est au sein decelui-ci qu'ils ont connu la délinquance... après avoir, sans ambigu'té aucune, précisé que le directeur était fréquemment en état d' ébriété très avancé. - les attestations d'éducateurs qui déplorent le climat insécurisant du foyer, les agressions physiques dont certains ont été victimes, l'absence de soutien de la direction et l'alcoolisme du directeur . - des compte-rendus du comité d'entreprise et des documents relatifs à la grève qui a été déclenchée les 10 et 11 avril 2000 au motif que la direction n' a pas pris que les mesures nécessaires pour assurer la sécurite et protéger la santé des salariés. -le certificat du docteur

BAUDIN, médecin du travail, qui précise avoir reçu en consultation des salariés de "La passerelle" ( dont Madame X...) qui lui ont, en grande majorité, témoigné de leurs difficultés et de leurs craintes compte tenu de l'insécurite qui règne au foyer. - des documents médicaux établissant qu'elle souffre de troubles cardio-vasculaires liés à son état d' anxiété.

Considérant que L' A.D.P .E.P . 35 qui souligne que Madame X... a clairement déclaré qu' elle démissionnait rappelle que les jeunes qui sont confiés au foyer "La passerelle" sont en grande difficulté que la " dangerosite" des conditions de travail invoquée par la salariée est en réalité inhérente à l'objet de l'institution, et qu'elle a mis tout en oeuvre pour obtenir des autorités de tutelle des moyens supplémentaires pour faire face aux problèmes posés par les jeunes placés.

Considérant qu' après avoir examiné les différentes pièces produites au débat la Cour fait observer que si Madame X... dénonce, et établit un certain nombre de dysfonctionnements affectant le foyer "La passerelle", et met à juste raison en cause la personnalité de son directeur dont l' éthylisme n' est guère sérieusement contesté, elle ne formule que des critiques de principe sur sa sécurite au sein de cet établissement qui, il convient de le rappeler, accueille des jeunes en grande difficulté, adressés par les services sociaux et les juges des enfants dans le cadre de placements.

Considérant que si elle démontre que la "philosophie" éducative de la direction peut prêter le flanc à des remarques, elle ne justifie pas pour autant que, par son incurie, cette dernière lui impose de travailler dans des conditions dangereuses au sens de l' article L.231. 8 du Code du Travail.

Considérant qu'après avoir rappelé qu'en intégrant l'équipe éducative de ce foyer, Madame X... n'était pas sans savoir qu' elle aurait

inéluctablement à travailler auprès de jeunes destabilisés dont les réactions s'extériorisent souvent de façon violente, la Cour ne peut, au bénéfice de ces quelques observations, que confirmer sur ce point la décision entreprise en déboutant la salariée de sa demande en requalification de sa démission en licenciement injustifié. * Sur la demande en rappel de salaire

Considérant que les heures de surveillance nocturne en chambre de "veille" ont été rémunérées selon le principe des heures d' équivalence, à savoir, jusqu'a 23 heures, comme un temps de travail effectif, puis de 23 heures à 7 heures le lendemain, à raison de 3 heures de travail effectif.

Considérant que le 26 juin 1999 la Cour de Cassation a precisé qu 'un horaire d' équivalence ne pouvait résulter, en dehors du cas où il est prévu par un décret conformèment aux dispositions de l'article L.212.4 du Code du Travail, que d'une Convention de branche ou d'un accord professionnel ou interprofessionnel étendu ( ce qui n' était pas le cas de la Convention Collective des établissements et services pour personnes handicapées ou inadaptées du 15 mars 1966 applicable au contrat de travail de Madame X...).

Considérant que l'article 29 de la loi du 19 janvier 2000 (LOI AUBRY ll) a validé les paiements intervenus dans le cadre de l'équivalence conventionnelle, dès lors qu'il n'y avait pas eu de decision de justice définitive: que cet article d' application immédiate aux situations passées concerne l' objet du litige mettant en cause une institution sociale et médico sociale.

Considérant que l'arrêt de la Cour suprême en date du 18 mars 2003 a reconnu l'existence d'un motif d'intérêt général à l'intervention du législateur et a validé l'application de l'article 29 de la loi du 19 janvier 2000 aux litiges en cours.

Considérant que Madame X... a introduit sa demande

postérieurement à cette loi : qu' il y a lieu de la débouter de sa demande après avoir considéré qu' elle ne saurait valablement prétendre que ses heures de nuit correspondait à un réel travail effectif.

Considérant que l'équité commande de laisser à la charge de L ' A.D.P .E.P .35 les frais non répétibles par elle engagés dans le cadre de cette procédure. PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt contradictoire,

Ordonne la jonction des procédures numéros 02 /03181 et 02/03339,

Réforme partiellement le jugement déféré, et, statuant à nouveau, déboute Madame X... de l'ensemble de ses demandes,

Y ajoutant,

Déboute les parties de leur demande d'indemnité pour frais non répétibles,

Condamne Madame X... aux dépens.

LE GREFFIER,

LE PRESIDENT ,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 02/03181
Date de la décision : 18/11/2003

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Imputabilité - Rupture non imputable à l'employeur

Doit être déboutée de sa demande en requalification de sa démission en licenciement injustifié fondée sur les agissements fautifs de l'employeur une salariée, ayant intégré l'équipe éducative d'un foyer accueillant des jeunes en grande difficulté, qui ne rapporte pas la preuve de l'imputabilité de la rupture à son employeur dans la mesure où d'une part, si au vu des pièces produites au débat la salariée établit un certain nombre de dysfonctionnements affectant le foyer et met à juste raison en cause la personnalité de son directeur dont l'éthylisme n'est guère sérieusement contesté, elle ne formule que des critiques de principe sur sa sécurité au sein de cet établissement, et où d'autre part, si elle démontre que la "philosophie" éducative de la direction peut prêter le flanc à des remarques, elle ne justifie pas pour autant que, par son incurie, cette dernière lui impose de travailler dans des conditions dangereuses au sens de l'article L.231-8 du Code du Travail.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2003-11-18;02.03181 ?
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