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13/11/2003 | FRANCE | N°02/06434

France | France, Cour d'appel de Rennes, 13 novembre 2003, 02/06434


Huitième Chambre Prud'Hom ARRÊT R.G : 02/06434 S.A.R.L. ETS HELLIO S.A. SOFIQUEM C/ Mme Geneviève X... épouse LE Y... Réformation partielle RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

: Madame Francine SEGONDAT, Président, Madame Marie-Hélène L'HENORET, Conseiller, Monsieur François PATTE, Conseiller, GREFFIER : Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 25 Septembre 2003 ARRÊT : Contradictoire, prononcé par

l'un des magistrats ayant participé au délibéré, à l'audience publique d...

Huitième Chambre Prud'Hom ARRÊT R.G : 02/06434 S.A.R.L. ETS HELLIO S.A. SOFIQUEM C/ Mme Geneviève X... épouse LE Y... Réformation partielle RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

: Madame Francine SEGONDAT, Président, Madame Marie-Hélène L'HENORET, Conseiller, Monsieur François PATTE, Conseiller, GREFFIER : Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 25 Septembre 2003 ARRÊT : Contradictoire, prononcé par l'un des magistrats ayant participé au délibéré, à l'audience publique du 13 novembre 2003, date à laquelle a été prorogé le délibéré initialement fixé au 30 octobre 2003

APPELANTES et intimées à titre incident : La S.A.R.L. ETS HELLIO prise en la personne de son représentant légal 16, Avenue Alain Le Lay 29900 CONCARNEAU représentée par Me Henry POUPON, Avocat au Barreau de GUINGAMP La S.A. SOFIQUEM prise en la personne de ses représentants légaux 56, Avenue de la Gare 29900 CONCARNEAU représentée par Me Patrice COUETOUX DU TERTRE, Avocat au Barreau de RENNES INTIMÉE et appelante à titre incident : Madame Geneviève X... épouse LE Y... Lambell - 13 Ter Garenne Ar Louatez 29910 TREGUNC

représentée par Me Marie Alice LAUTRIDOU, Avocat au Barreau de QUIMPER

Statuant sur l'appel régulièrement interjeté par la S.A.R.L. ETABLISSEMENTS HELLIO et par la société SOFIQUEM d'un jugement rendu le 11 septembre 2002 par le Conseil de Prud'hommes de QUIMPER. FAITS ET PROCEDURE

Madame Geneviève LE Y... a été engagée le 2 janvier 1975 par la société HELLIO en qualité de secrétaire comptable.

Par acte sous seing privé en date du 16 février 2001 la société HELLIO a cédé à la société SOFIQUEM le fonds de commerce de négoce de fioul et produits pétroliers.

Le 23 février 2001 Madame LE Y... a été convoquée à un entretien préalable en vue de son licenciement qui lui a été notifié le 10 mars 2001 pour le motif économique suivant :

suppression de son poste de travail en raison de la disparition de vente de fioul depuis le 1er mars 2001 et de l'insuffisance de l'activité résiduelle de vente de cadeaux.

Contestant le bien fondé de son licenciement et estimant ne pas avoir été remplie de l'intégralité de ses droits, Madame LE Y... a saisi le Conseil de Prud'hommes de QUIMPER pour obtenir d'une part la condamnation in solidum des sociétés HELLIO et SOFIQUEM au paiement de la somme de 30.000 euros pour violation des dispositions de l'article L 122-12 du Code du Travail et d'autre part la condamnation de la société HELLIO au paiement d'un rappel de salaire sur la base du coefficient 190 de la Convention Collective et d'une prime d'ancienneté.

Par jugement en date du 11 septembre 2002 le Conseil de Prud'hommes de QUIMPER a fait droit pour l'essentiel aux demandes de Madame LE Y..., à l'exception du rappel de salaire.

La société HELLIO et la société SOFIQUEM ont chacune interjeté appel de ce jugement. OBJET DES APPELS ET MOYENS DES PARTIES

La société HELLIO conclut à la réformation de la décision déférée, au rejet des demandes formées par Madame LE Y... à son encontre et sollicite la restitution des sommes réglées au titre de l'exécution provisoire ainsi qu'une indemnité de 1.200 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A titre subsidiaire elle sollicite la garantie de la société SOFIQUEM de toutes les condamnations prononcées contre elle ou dans la proportion que la Cour déterminera.

Elle fait valoir :

- que les dispositions de l'article L 122-12 du Code du Travail étaient applicables en l'espèce dans la mesure où Madame LE Y... était affectée à 80 % à l'activité fioul qui constituait une entité économique autonome et qui a été cédée à la société SOFIQUEM,

- qu'elle a d'ailleurs demandé à cette dernière la reprise des contrats de travail des salariés concernés et que seul le contrat de travail du chauffeur, Monsieur LALLAISON a été transféré,

- que la société SOFIQUEM est seule responsable de cette situation,

- qu'au moment de son départ Madame LE Y... a signé un reçu pour solde de tout compte clairement détaillé qu'elle n'a pas dénoncé dans les détails requis et que ses demandes sont irrecevables,

- que le poste occupé par la salariée correspondait au coefficient 160 qui lui a été attribué et non au coefficient 180 qu'elle revendique désormais devant la Cour,

- que la société SOFIQUEM avait une parfaite connaissance des caractéristiques du poste de Madame LE Y..., que des pourparlers ont bien eu lieu en vue de la reprise du contrat de travail de l'intéressée et que le licenciement de cette dernière n'est intervenu qu'en raison du refus de la société SOFIQUEM de poursuivre le dit

contrat,

- que la société SOFIQUEM doit en conséquence être tenue à garantie pour l'ensemble des condamnations ou en tout état de cause à concurrence d'une certaine proportion qui sera déterminée par la Cour,

- que le Conseil de Prud'hommes a omis de prendre en compte les sommes perçues annuellement par madame LE Y... au titre de la prime d'ancienneté et qui s'élèvent à 1.093,07 euros.

La société SOFIQUEM conclut également à la réformation du jugement, au rejet des prétentions de la salariée dirigées contre elle et de la demande en garantie et sollicite une somme de 1.200 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle soutient :

- qu'elle n'a jamais entendu se soustraire aux dispositions de l'article L 122-12 du Code du Travail puisqu'elle a repris le chauffeur mais que Madame LE Y... n'était pas concernée par ces dispositions dans la mesure où elle exerçait une activité polyvalente et ne faisait pas partie de l'entité économique, objet du transfert, - que contrairement à ce qui est allégué, la société HELLIO ne lui a jamais demandé de reprendre Madame LE Y... et que le Cabinet GORIOUX dont il est fait état n'a jamais été associé aux négociations,

- qu'elle n'a commis aucune faute à l'encontre de la salariée et qu'aucune condamnation in solidum ne peut intervenir dès lors que cette dernière a opté pour la réparation de son préjudice, demande qui ne peut être dirigée que contre l'employeur qui a pris l'initiative de la rupture,

- que les réclamations à caractère salarial sont relatives à des périodes antérieures à la cession et ne la concernent pas

Madame Geneviève LE Y... conclut à la confirmation du jugement mais à

titre incident demande que le montant des dommages intérêts qui lui ont été accordés par le Conseil de Prud'hommes soit porté à la somme de 20.000 euros et sollicite un rappel de salaire de 4.493,68 euros outre les congés payés y afférents sur la base du coefficient 180 ainsi qu'une indemnité de 1.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A titre subsidiaire, elle demande que la société HELLIO soit condamnée à lui verser 20.000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Elle maintient :

- que les dispositions de l'article L 122-12 du code du travail avaient vocation à s'appliquer en l'espèce et que les sociétés HELLIO et SOFIQUEM se sont entendues pour écarter sciemment ces dispositions ce qui justifie leur condamnation solidaire,

- qu'en tout état de cause son licenciement est abusif et qu'aucune proposition de reclassement ne lui a été faite,

- que les fonctions qu'elle exerçait relevaient du coefficient 180 de la Convention Collective, à savoir agent administratif assurant l'administration et le suivi des ventes.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties la Cour se réfère expressément aux conclusions déposées et développées oralement à l'audience. DISCUSSION

Sur la rupture du contrat de travail

Considérant que selon les indications de madame LE Y... elle-même, les tâches qui lui étaient confiées consistaient :

- à vendre quelques cadeaux et surtout gérer les listes de mariage,

- à répondre au téléphone, à faxer ou poster les listes, réserver les cadeaux et accuser réception du règlement,

- à s'occuper également des ventes et livraisons de gaz et à prendre des rendez-vous pour les entretiens des chaudières,

- à s'occuper de la facturation du gaz et des dépannages,

- à faire les devis, les saisies de tous les mouvements de trésorerie,

- à comptabiliser chaque jour les cadeaux et autres ventes...

Considérant que s'il est incontestable que l'activité de négoce de fioul et de produits pétroliers qui a été cédée à la société SOFIQUEM constituait une entité économique autonome qui a conservé son identité, force est de constater qu'à la différence du chauffeur qui ne faisait qu'assurer les livraisons de fioul et de gaz et qui était donc affecté à cette entité, Madame LE Y... avait en charge le secrétariat général de la société HELLIO et assumait les diverses tâches telles qu'elles se présentaient en fonction notamment des périodes de l'année (fioul pendant l'hiver, cadeaux au moment des fêtes, listes de mariage au printemps...) Sans pour autant être affectée plus particulièrement à l'activité fioul ;

Que ces attributions polyvalentes qui étaient le reflet de l'activité, elle même polyvalente, de la société HELLIO ne permettaient pas de la rattacher à l'entité cédée et que dès lors les dispositions de l'article L 122-12 du Code du Travail n'étaient pas applicables à son égard ;

Qu'il s'en suit que la responsabilité de la société SOFIQUEM ne peut en aucune façon être recherchée ;

Considérant que Madame LE Y... a été licenciée en raison de la suppression de son poste consécutive à la disparition de la vente de fioul et à l'insuffisance de l'activité résiduelle de vente de cadeaux ;

Que quelque soit le bien fondé de ce motif économique, la société HELLIO ne justifie nullement des démarches qu'elle a pu entreprendre pour tenter de procéder au reclassement de la salariée, ne serait-ce que par le biais d'une modification du contrat de travail portant sur

une réduction d'horaires ;

Qu'à ce titre le licenciement se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse et que Madame LE Y... est fondée à prétendre à des dommages intérêts dont le montant sera porté à la somme de 20.000 euros eu égard au préjudice subi par l'intéressée qui avait 26 ans d'ancienneté ;

Considérant qu'en tout état de cause il convient d'observer à supposer même que les dispositions de l'article L 122-12 du Code du Travail aient vocation à s'appliquer :

- que Madame LE Y... avait le choix entre soit demander au cessionnaire la société SOFIQUEM, de poursuivre son contrat de travail, ce qu'elle ne sollicite pas, soit de demander à l'instigateur du licenciement, la société HELLIO, la réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la perte de son emploi,

- que ni la demande en garantie formée par la société HELLIO, ni la condamnation solidaire sollicitée ne peuvent valablement prospérer dans la mesure où il n'est pas démontré que la société HELLIO ait demandé à la société SOFIQUEM de reprendre Madame LE Y..., que cette société ait été mise au courant de la situation de l'intéressée et ait expressément refusé de la reprendre au sein de ses effectifs ni que les sociétés HELLIO et SOFIQUEM aient agi de concert et avec collusion pour se soustraire aux dispositions de l'article L 122-12 du Code du Travail.

Sur les demandes à caractère salarial

Considérant qu'il est désormais admis que la signature d'un reçu pour solde de tout compte ne peut priver un salarié de la possibilité de présenter des réclamations tant au titre de l'exécution du contrat de travail que de la rupture et que les demandes de Madame LE Y... à ce titre sont parfaitement recevables, étant précisé qu'elles ne concernent que la société HELLIO ;

Considérant que le rappel de prime d'ancienneté n'est pas remis en cause en tant que tel par la société HELLIO, sauf à réduire la somme de 1.093,07 euros perçues à ce titre par Madame LE Y... qui ne le conteste pas ;

Considérant enfin que Madame LE Y... ne rapporte pas la preuve que les fonctions qu'elle exerçait relevaient du coefficient 180, la rémunération qu'elle a perçue correspondant à une classification d'employée commerciale et administrative qualifiée / secrétaire ce qui était son cas ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame LE Y... les frais irrépétibles non inclus dans les dépens ; qu'il lui sera alloué une indemnité de 1.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de la société SOFIQUEM ;

Que la société HELLIO qui succombe supportera ses propres frais irrépétibles et les dépens.

DECISION

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Réforme partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau.

Condamne la société HELLIO à verser à Madame LE Y...:

- 9.112,64 euros + 911,26 euros au titre de la prime d'ancienneté dont il conviendra de déduire la somme de 1.093,07 euros perçue par la salariée au cours de l'exécution de son contrat de travail.

- 20.000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement abusif, - 500 euros + 1.000 euros au titre de ses frais irrépétibles de

première instance et d'appel.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Condamne la société HELLIO aux dépens. LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 02/06434
Date de la décision : 13/11/2003

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause

Ne sont pas applicables les dispositions de l'article L. 122-12 du Code du Travail à l'encontre d'une salariée licenciée dans la mesure où celle-ci, ayant en charge le secrétariat général de la société et des attributions polyvalentes, ne peut être rattachée à la cession de l'activité de négoce de fioul et de produits pétroliers constituant une entité économique autonome qui a conservé son identité. Est néanmoins dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à son encontre dans la mesure où, même si le licenciement a été prononcé en raison de la suppression de poste consécutive à la disparition de la vente de fioul et à l'insuffisance de l'activité résiduelle de vente de cadeaux, l'employeur n'a pas tenté de procéder au reclassement de la salariée.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2003-11-13;02.06434 ?
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