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06/11/2003 | FRANCE | N°03/01141

France | France, Cour d'appel de Rennes, 06 novembre 2003, 03/01141


Huitième Chambre Prud'Hom ARRÊT R.G : 03/01141 S.A. STEVE INGENIERIE C/ M. Claude LE X... Réformation RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM Y... PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT Y... 06 NOVEMBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS Y... DÉLIBÉRÉ

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Mme Francine SEGONDAT, Président, Mme Marie-Hélène L'HENORET, Conseiller, Monsieur François PATTE, Conseiller, GREFFIER : M. Philippe Z..., lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 03 Octobre 2003 devant Mme Francine SEGONDAT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des r

eprésentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial ARRÊ...

Huitième Chambre Prud'Hom ARRÊT R.G : 03/01141 S.A. STEVE INGENIERIE C/ M. Claude LE X... Réformation RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM Y... PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT Y... 06 NOVEMBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS Y... DÉLIBÉRÉ

:

Mme Francine SEGONDAT, Président, Mme Marie-Hélène L'HENORET, Conseiller, Monsieur François PATTE, Conseiller, GREFFIER : M. Philippe Z..., lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 03 Octobre 2003 devant Mme Francine SEGONDAT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial ARRÊT : Contradictoire, prononcé par l'un des magistrats ayant participé au délibéré, à l'audience du 06 Novembre 2003, date indiquée à l'issue des débats

APPELANTE et intimée à titre incident : La S.A. STEVE INGENIERIE prise en la personne de ses représentants légaux 101, allée des Vergers Parc d'Activités du Hoquet 76360 BARENTIN représentée par Me Caroline SIMON substituant à l'audience Me Cédric FISCHER, Avocats au Barreau de PARIS INTIMÉ et appelant à titre incident : Monsieur Claude LE X... 16, rue Mellier 44100 NANTES représenté par Me Bernard MORAND, Avocat au Barreau de NANTES

I - FAITS ET PROCEDURE

Fondateur de la société STEVE INGENIERIE dont il a été Président du Conseil d'Administration jusqu'au 29 juin 2000, date à laquelle il a été nommé Directeur Général, Monsieur Claude LE X... a signé parallèlement en octobre 2000 un contrat de travail daté du 20 juin 2000, en qualité de Directeur Général.

Le 22 juin 2001, il était révoqué de ses fonctions de Directeur Général par le Conseil d'Administration et le 3 septembre 2001, licencié pour les motifs suivants :

- les résultats de STEVE Ingénierie (...)sont catastrophiques et très éloignés des business plan et du budget que vous avez présentés,

- vos notes de frais n'étaient pas toutes accompagnées de justificatifs (...)

- il en est de même pour les dépenses de caisse

- il n'existe pas de comptabilité sur la filiale canadienne

- vous avez validé des honoraires d'avocats qui intervenaient dans la gestion de vos intérêts propres

- vous avez utilisé le titre de PDG alors que vous êtes DG de la société STEVE

- vous ne portez aucun intérêt à la gestion économique de l'entreprise

- vous n'avez pas respecté vos engagements et vous avez gravement manqué à vos obligations.

Contestant tant la décision de révocation que le licenciement, il a d'une part saisi le Tribunal de Commerce de NANTES qui, par jugement frappé d'appel rendu le 25 novembre 2002 a constaté la révocation abusive de Monsieur LE X... de son poste de Directeur Général de la société STEVE INGENIERIE et d'autre part le Conseil des Prud'hommes de NANTES qui, par jugement rendu le 13 décembre 2002, s'est déclaré compétent pour traiter de la rupture du contrat de travail, a dit que

cette rupture ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et condamné la société STEVE INGENIERIE à lui payer 5.400 euros au titre de l'article L 122-14-5 du Code du Travail et 1.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La société STEVE INGENIERIE a, le 9 janvier 2003, relevé appel de ce jugement et Monsieur Claude LE X... en a ultérieurement relevé appel incident. II - MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Au soutien de son appel, la société STEVE INGENIERIE fait valoir par conclusions déposées le 28 juillet oralement reprises à la barre :

1°) que le contrat de travail est nul et d'une nullité absolue, n'était nullement distinct du mandat social et ne plaçait pas Monsieur LE X... dans des liens de subordination de sorte que la juridiction prud'homale est incompétente pour connaître de ses demandes.

2°) subsidiairement que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement constituent chacun une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Aussi conclut-elle à la confirmation du jugement en ce qu'il a considéré qu'antérieurement au 22 juin 2001, Monsieur LE X... n'était pas lié à la société STEVE INGENIERIE par un contrat de travail, à l'infirmation en ce qu'il a considéré qu'à compter du 22 juin 2001, il était lié par un contrat de travail, à l'incompétence du Conseil des Prud'hommes de NANTES pour connaître des demandes de Monsieur LE X... et au renvoi de l'affaire devant la juridiction commerciale et subsidiairement au bien fondé du licenciement, à l'absence de préjudice et à la condamnation de Monsieur LE X... à lui payer 4.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

* * *

En réponse, Monsieur Claude LE X... fait valoir par conclusions déposées le 29 septembre 2003 oralement soutenues à l'audience :

1°) que son contrat de travail n'a pas été établi en méconnaissance des dispositions de l'article L. 255-44 du Code de Commerce puisqu'il n'a été en réalité établi que le 24 octobre 2000, postérieurement à sa démission de son mandat d'administrateur du 29 juin 2000.

2°) que les parties pouvaient renouveler leur accord ou maintenir leur commune volonté d'établir un rapport salarial lorsque la cause de nullité a disparu.

3°) que la société STEVE INGENIERIE ne rapporte pas la preuve du caractère fictif du contrat de travail alors que lui-même prouve qu'il était bien sous la subordination du PDG ou de la DRH du groupe. 4°) qu'à la date de la rupture il n'était plus investi d'aucun mandat social depuis plus de 2 mois et qu'il ne pouvait exercer ses fonctions que dans le cadre d'un rapport salarié.

5°) que les griefs invoqués sont prescrits et ont, pour 4 d'entre eux été invoqués à l'appui de la révocation du mandat social.

Aussi prie-t-il la Cour de rejeter l'exception d'incompétence, de débouter la société STEVE INGENIERIE de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer 135.832,07 euros en réparation de son préjudice outre 2.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. III - MOTIFS

Considérant que les parties versent aux débats un contrat de travail écrit daté du 20 juin 2000 mais rédigé en octobre 2000 aux termes duquel la société STEVE INGENIERIE emploiera Monsieur LE X... à compter du 21 juin 2000 en qualité de Directeur Général sous la

responsabilité hiérarchique de Philippe LE MAITRE, Président du Conseil d'Administration ;

Considérant qu'en présence d'un tel écrit, il appartient à la société STEVE INGENIERIE qui se prévaut de la nullité et de la fictivité du contrat de travail et, partant de l'incompétence de la juridiction prud'homale, d'en rapporter la preuve ;

Considérant que le moyen de nullité tiré du fait que Monsieur LE X... était encore administrateur à la date d'effet du contrat de travail n'est pas opérant puisque, contrairement à ce qu'indique le contrat de travail, celui-ci n'a pris effet que le 1er juillet 2000, date à laquelle Monsieur LE X... n'était plus administrateur puisqu'il a démissionné de cette fonction le 29 juin 2000 et date à partir de laquelle il a été rémunéré comme Directeur Général ;

Qu'en revanche le moyen tiré de l'indifférenciation des fonctions découlant de la décision du Conseil d'administration de nommer Monsieur LE X... en qualité de Directeur Général pour la durée des fonctions du Président afin de l'assister dans ses fonctions et des fonctions de Directeur Général telles qu'elles résultent du contrat de travail est parfaitement fondé ;

Qu'en effet aucune distinction n'existe entre ces 2 fonctions qui s'exercent toutes deux en collaboration avec le Président du Conseil d'Administration que le Directeur Général assiste dans les deux cas ; Qu'il résulte des pièces versées aux débats que Monsieur LE X... n'exerçait aucune fonction technique et dirigeait la société qu'il gérait en étroite relation avec le Président du Conseil d'Administration et avec la DRH ;

Considérant que le caractère fictif du contrat de travail destiné en réalité à permettre à Monsieur LE X... de bénéficier du régime d'assurance chômage des ASSEDIC, a été implicitement reconnu par

celui-ci lors de la réunion du Conseil d'Administration du 29 juin 2000 au cours de laquelle il a déclaré accepter le mandat de Directeur Général à condition qu'il soit sans conséquence sur la validité du contrat de travail et sous réserve de pouvoir bénéficier de ce régime ;

Qu'il est encore démontré par la similitude des motifs de révocation du mandat de Directeur Général et de licenciement des fonctions de Directeur Général ;

Qu'eu égard à la stricte identité des fonctions de direction générale exercée dans ces 2 cadres, la société STEVE INGENIERIE est fondée à arguer de l'impossibilité pour Monsieur LE X... de se prévaloir d'un contrat de travail, nonobstant la rémunération, les bulletins de salaire et la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement ;

Considérant en ce qui concerne la période postérieure à la révocation du mandat de Directeur Général survenue le 22 juin 2001 que la société STEVE INGENIERIE soutient que Monsieur Claude LE X... a cessé en fait de tenir une quelconque fonction dans la société à compter de ce jour tandis que Monsieur LE X... prétend qu'il a poursuivi son activité après sa révocation ;

Considérant qu'aucune pièce de nature à établir la poursuite d'une quelconque activité au sein de l'entreprise par Monsieur LE X... après la révocation du mandat social n'est versée aux débats ;

Que d'ailleurs la lettre de licenciement ne vise aucun fait commis après le 22 juin 2001 ;

Qu'ainsi, nonobstant l'existence d'un contrat de travail écrit au demeurant dépourvu de toute fiabilité puisque portant la date du 20 juin 2000 avec prise d'effet le 21 juin 2000 alors qu'il a donné lieu à versement d'une rémunération à compter du 1er juillet 2000 et qu'il n'a été rédigé qu'en octobre 2000 et nonobstant le paiement d'un salaire destiné à permettre à Monsieur LE X... de bénéficier du régime

d'assurance chômage, la preuve n'est pas rapportée de l'existence d'une relation de travail existant à partir du 22 juin 2001 ;

Que dès lors le jugement sera réformé en ce qu'il a statué sur la rupture d'un contrat de travail fictif et Monsieur LE X... débouté de toutes ses demandes ;

Considérant que l'équité ne commande pas de faire au profit de la société STEVE INGENIERIE application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

DECISION

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Réforme le jugement déféré en ce qu'il a jugé Monsieur LE X... lié à la société STEVE INGENIERIE à compter du 22 juin 2001 par un contrat de travail.

Déboute Monsieur LE X... de toutes ses demandes.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamne Monsieur LE X... aux dépens. LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 03/01141
Date de la décision : 06/11/2003

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Condition de validité

En droit, celui qui se prévaut de la nullité et de la fictivité du contrat de travail doit en rapporter la preuve. En l'espèce, est rapportée la preuve du caractère fictif du contrat de travail conclu entre la société et son Directeur Général dans la mesure où d'une part, est fondée l'indifférenciation des fonctions découlant de la décision du Conseil d'administration de nommer l'intimé en qualité de Directeur Général pour la durée des fonctions du Président et des fonctions de Directeur Général telles qu'elles découlent du contrat de travail, ces deux fonctions s'exerçant en collaboration avec le Président, où d'autre part, l'intimé n'exerçait aucune fonction technique, où de plus, le contrat de travail était destiné en réalité à lui permettre de bénéficier du régime d'assurance chômage et où enfin, est relevée la similitude des motifs de révocation du mandat de Directeur Général et de licenciement des fonctions de Directeur Général, d'autant plus que, en ce qui concerne la période postérieure à la révocation du mandat de Directeur Général, il a cessé de tenir toute fonction au sein de la société.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2003-11-06;03.01141 ?
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