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08/10/2003 | FRANCE | N°02/05230

France | France, Cour d'appel de Rennes, Septième chambre, 08 octobre 2003, 02/05230


Septième Chambre ARRÊT N° R. G : 02 / 05230 Mme Nicole X... C / M. Jacques Y... CPAM DU NORD FINISTERE Confirmation RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 08 OCTOBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président, Monsieur Patrick GARREC, Conseiller, Madame Agnès LAFAY, Conseiller,

GREFFIER : Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 30 Juin 2003 devant Madame Marie-Gabrielle LAURENT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audienc

e, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délib...

Septième Chambre ARRÊT N° R. G : 02 / 05230 Mme Nicole X... C / M. Jacques Y... CPAM DU NORD FINISTERE Confirmation RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 08 OCTOBRE 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président, Monsieur Patrick GARREC, Conseiller, Madame Agnès LAFAY, Conseiller,

GREFFIER : Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 30 Juin 2003 devant Madame Marie-Gabrielle LAURENT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial ARRÊT : Réputé contradictoire, prononcé par Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président, à l'audience publique du 08 Octobre 2003, date indiquée à l'issue des débats.

APPELANTE : Madame Nicole X... ... 29490 GUIPAVAS représentée par la SCP GUILLOU et amp ; RENAUDIN, avoués assistée de Me Dominique CARTRON, avocat

INTIMES : Monsieur Jacques Y... Chirurgien vasculaire clinique Pasteur Brest 32 rue Auguste Kervern 29200 BREST représenté par Me Yvonnick GAUTIER, avoué assisté de la SCP GOSSELIN PANAGET PIERRE SINQUIN DEPASSE GOSSELIN F, avocats CPAM DU NORD FINISTERE, régulièrement assignée à personne habilitée n'ayant pas constitué avoué Rue de Savoie 29282 BREST CEDEX défaillante

Mme Nicole X... a été opérée le 20 février 1998 à la clinique Pasteur à Brest par M. Jacques Y..., chirurgien vasculaire, qui a notamment procédé sur la jambe gauche de la patiente à un éveinage en raison de varices. Le 21 février 1998 Mme X... a été victime d'un malaise dû à une embolie pulmonaire qui s'est compliquée d'un accident cérébral ayant entraîné une hémiplégie droite.
Par jugement du 20 juin 2002 le tribunal de grande instance de Brest, statuant après expertise ordonnée par le juge des référés, a notamment débouté Mme X... de ses demandes formées à l'encontre du chirurgien aux motifs que celui-ci n'a pas commis de faute et que le défaut d'information sur les risques de l'intervention n'a pas entraîné de perte de chance. Mme X... a fait appel de ce jugement. Elle fait valoir que la loi du 4 mars 2002 n'est pas applicable à l'espèce. Elle soutient en outre que l'accident vasculaire cérébral dont elle a été victime est exclusivement lié au geste chirurgical et est étranger au diagnostic de varices importantes et récidivantes du membre inférieur gauche ; que le médecin est donc tenu à une obligation de résultat dès lors que le dommage causé au patient par un acte médical nécessaire au traitement est sans rapport avec l'état initial de celui-ci ou l'évolution prévisible de son état. Elle estime enfin que l'expertise établit une faute du médecin qui a négligé de mettre en place une héparinisation préventive ; que l'absence de recherche de troubles de la coagulation n'a en outre pas permis de prévenir les risques d'embolie. Elle considère donc que la responsabilité du médecin est engagée et demande la réparation de son préjudice. Subsidiairement elle soutient qu'elle n'a pas été informée des risques présentés par l'opération et qu'elle n'a donc pas eu la possibilité de la refuser et d'en éviter ainsi les conséquences gravement dommageables. M. Jacques Y... soutient qu'il n'est tenu d'aucune obligation de sécurité en matière d'aléa thérapeutique. Il estime qu'aucune faute ne peut être retenue contre lui dans la conduite des soins. Enfin il fait valoir que Mme X... ne démontre pas qu'elle aurait refusé l'opération si elle avait été informée des risques qu'elle présentait. La caisse primaire d'assurance maladie du Nord Finistère n'a pas constitué mais a fait connaître le montant de ses débours. Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens, la cour renvoie aux dernières écritures déposées le 6 juin 2003 par l'appelante et le 25 juin 2003 par l'intimé.

SUR CE Considérant que l'expertise établit qu'à la suite de l'opération une thrombose s'est constituée très vraisemblablement au niveau de la veine fémorale commune et a entraîné une embolie pulmonaire massive ; qu'en raison de l'existence d'un foramen ovale inter auriculaire (anomalie cardiaque banale et très difficilement détectable) qui a été forcé, les caillots ont cheminé de l'oreillette droite vers l'oreillette gauche et ont atteint le cerveau, causant par embolie dite paradoxale l'accident cérébral vasculaire ; Considérant que la loi du 4 mars 2002 est étrangère à l'intervention prodiguée le 2 février 1998 par l'effet de la loi du 30 décembre 2002 qui dispose en son article 3 qu'elle s'applique aux accidents médicaux consécutifs à des activités de soins réalisées à compter du 5 septembre 2001 ; Considérant que le chirurgien n'est tenu d'une obligation de sécurité de résultat qu'en cas d'infection nosocomiale ou d'utilisation d'un matériel défectueux ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; Considérant que Mme X... présentait une thrombose veineuse superficielle qui devait être opérée sans retard pour éviter une phlébite ascendante ; que le geste chirurgical a été conduit conformément aux règles de l'art ; Que l'expert s'est interrogé sur l'absence d'héparinisation préventive en per et post opératoire en raison des risques présentés par la patiente (obésité et antécédents de phlébite superficielle) mais indique qu'il n'y a pas de consensus franc en ce sens dans la communauté médicale et au sein des équipes chirurgicales très entraînées à la pratique d'éveinage et que les héparines de bas poids moléculaires telles qu'elles ont été faites à la clinique correspondent aux bonnes pratiques médicales actuelles ; Considérant qu'il n'est pas établi que l'absence éventuelle de recherches de troubles de la coagulation soit intervenue dans la réalisation de l'accident ; Considérant que c'est à raison que le premier juge a dit que la responsabilité de M. Y... ne peut être recherchée sur le fondement de la faute ; Considérant que l'accident vasculaire constitue en fait un aléa thérapeutique dont la réparation n'entre pas dans le champ des obligations dont un médecin est contractuellement tenu à l'égard de son patient ; Considérant en revanche que le médecin est tenu de donner au patient une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves afférents aux soins proposés ; qu'il appartient cependant à Mme X... d'établir que, si elle avait été exactement informée des risques, elle avait la possibilité de refuser l'intervention chirurgicale ; Que M. Y... ne prétend pas avoir informé Mme X... des risques d'embolie ; Qu'il est cependant prouvé que la pathologie dont souffrait Mme X... l'exposait à développer une phlébite ascendante ; que la gravité d'une phlébite tient à la possibilité d'un déplacement du caillot qui peut migrer jusqu'au coeur et venir ensuite obstruer une artère des poumons, occasionnant ainsi une embolie pulmonaire et, dans le cas d'une anomalie congénitale telle que présentée par Mme X..., une embolie dite paradoxale avec accident vasculaire cérébral ; Qu'il est évident que Mme X..., exposée à un risque grave de survenue d'une embolie en cas d'absence d'intervention, n'aurait pas refusé celle-ci si elle avait été correctement informée du risque mineur de la même affection occasionné par ladite intervention ; Que c'est à raison que le premier juge a rejeté la demande de Mme X... fondée sur la perte de chance ; Considérant que Mme X... qui succombe en ses prétentions sera condamnée aux dépens et à payer à M. Y... la somme de 1 300 euros à titre d'indemnité de procédure ;

PAR CES MOTIFS Statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire Confirme le jugement. Condamne Mme X... à payer à M. Y... la somme de 1 300 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La condamne aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Septième chambre
Numéro d'arrêt : 02/05230
Date de la décision : 08/10/2003

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin chirurgien - Responsabilité contractuelle - Dommage - Intervention chirurgicale - Risque inhérent - Défaut d'information - Risque réalisé - Dommage moindre que celui afférent au refus de l'intervention - Préjudice (non) -

Un accident vasculaire constitue un aléa thérapeutique dont la réparation n'entre pas dans le champ des obligations dont un médecin est contractuellement tenu à l'égard de son patient. Cependant, ce dernier est tenu de donner au patient une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves afférents aux soins proposés. Toutefois, le manquement à cette obligation ne peut donner lieu à réparation, même sur le fondement de la perte de chance, dès lors qu'il est évident que ce patient, exposé à un risque grave de survenue d'une embolie en cas d'absence d'intervention, n'aurait pas refusé celle-ci si il avait été correctement informé du risque mineur de la même affection occasionné par ladite intervention


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Brest, 20 juin 2002

1ère Civ., 4 février 2003, Bull. 2003, I, n° 40 (1), p. 32 (rejet)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2003-10-08;02.05230 ?
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