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19/02/2003 | FRANCE | N°02/01310

France | France, Cour d'appel de Rennes, 19 février 2003, 02/01310


Septième Chambre ARRÊT R.G : 02/01310 M. Jean Claude X... CRAMA DE BRETAGNE GROUPAMA BRETAGNE Y.../ M. Patrick Z... Mme Z... UNION DES MUTUELLES ACCIDENTS ELEVES UMAE MUTUELLES DU MANS CPAM DES COTES D'ARMOR A... partielle RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 19 FEVRIER 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

: Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président, Monsieur Patrick GARREC, Conseiller, Madame Agnès LAFAY, Conseiller, GREFFIER : Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé DÉBATS :

A l'aud

ience publique du 08 Janvier 2003 ARRÊT : Contradictoire, prononcé par M...

Septième Chambre ARRÊT R.G : 02/01310 M. Jean Claude X... CRAMA DE BRETAGNE GROUPAMA BRETAGNE Y.../ M. Patrick Z... Mme Z... UNION DES MUTUELLES ACCIDENTS ELEVES UMAE MUTUELLES DU MANS CPAM DES COTES D'ARMOR A... partielle RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 19 FEVRIER 2003 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

: Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président, Monsieur Patrick GARREC, Conseiller, Madame Agnès LAFAY, Conseiller, GREFFIER : Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Janvier 2003 ARRÊT : Contradictoire, prononcé par Madame Agnès LAFAY, Conseiller, à l'audience publique du 19 Février 2003, date indiquée à l'issue des débats

APPELANTS : Monsieur Jean Claude X... B... 22290 LE FAOUET représenté par la SCP D'ABOVILLE, DE MONCUIT etamp; LE CALLONNEC, avoués assisté de Me Jean-Pierre DOUCET, avocat CRAMA DE BRETAGNE GROUPAMA BRETAGNEagissant en la personne de son Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège 23 Bd Solférino 35000 RENNES représentée par la SCP D'ABOVILLE, DE MONCUIT etamp; LE CALLONNEC, avoués assistée de Me Jean-Pierre DOUCET, avocat INTIMES : Monsieur Patrick Z... es-qualité de représentant légal de son fils mineur Kévin né le 14 Juillet 1993 11 Lotissement Saint Judoce 22930 YVIAS représenté par la SCP GAUVAIN etamp; DEMIDOFF, avoués assisté de Me Claude LARZUL, avocat Madame Z... es-qualité de représentante légale de son fils mineur Kévin né le 14 juillet 1993 11 Lotissement Saint

Judoce 22930 YVIAS représentée par la SCP GAUVAIN etamp; DEMIDOFF, avoués assistée de Me Claude LARZUL, avocat UNION DES MUTUELLES ACCIDENTS ELEVES UMAE 62 rue Louis Bouilhet 76044 ROUEN CEDEX représentée par la SCP GAUVAIN etamp; DEMIDOFF, avoués assistée de Me Claude LARZUL, avocat MUTUELLES DU MANSprise en la personne de ses représentants légaux 19 - 21 rue Chanzy 72030 LE MANS CEDEX représentée par la SCP CHAUDET etamp; BREBION, avoués assistée de la SCP GOSSELIN PANAGET ET ASSOCIES, avocats CPAM DES COTES D'ARMORprise en la personne de ses représentants légaux 106 Boulevard Hoche 22023 SAINT BRIEUC représentée par Me Jean-Loup BOURGES, avoué

Le 6 mai 1998, M. et Mme Z... , accompagnés de leurs enfants Karine et Kévin, ce dernier alors âgé de 5 ans , se sont rendus chez M. Jean Claude X... qui les avait convié à découvrir des animaux, en l'espèce des daims, qui se trouvaient dans un enclos derrière sa maison d'habitation.

Au cours de cette visite, Kévin, qui s'intéressait à un moulin à pommes situé dans le jardin, a eu la main droite sérieusement endommagée au moment où sa soeur Karine maniait la manivelle de l'engin.

Par acte du 23 Septembre 1999, M. et Mme Z... agissant es qualités d'administrateurs légaux de leur fils Kévin et l'union des mutuelles accidents élèves (dite UMAE) ont assigné M. Jean Claude X... et GROUPAMA BRETAGNE pour demander réparation du préjudice subi par l'enfant pour les premiers et remboursement de ses débours pour la seconde.

La CPAM a elle aussi demandé remboursement des prestations versées.

Par acte du 21 Avril 2000, M. X... et GROUPAMA ont attrait en la cause la Cie Les Mutuelles du Mans, assureur responsabilité civile de M. et Mme Z....

Par jugement du 20 Novembre 2001, le Tribunal de Grande Instance de

Saint Brieuc a déclaré M. X... responsable de l'accident survenu le 6 mai 1998 et l'a condamné avec GROUPAMA à réparer le préjudice subi. M. X... et GROUPAMA BRETAGNE ont relevé appel de cette décision.

Ils demandent à la COUR à titre principal de débouter les époux Z..., l'UMAE et la CPAM des Cotes d'Armor de leurs demandes et à titre subsidiaire de dire que la faute de la victime exonère M. X... dans une large proportion et de condamner M. et Mme Z... solidairement par application des articles 1382, 1383 et 1384 al.4 avec les Mutuelles du Mans à les garantir de toutes condamnations prononcées à leur encontre.

Ils soutiennent : - que M. X... a perdu involontairement la garde du moulin à pommes dès lors que Karine Z... s'en est approchée et a actionné le mécanisme qui a provoqué l'accident, sans permission de son propriétaire. - que le jeune Kévin a commis une faute en s'approchant de l'appareil sans la permission de ses parents ou du propriétaire et en introduisant la main dans le mécanisme. - que M. et Mme Z... ont commis une faute en laissant leurs enfants jouer librement sans les surveiller. - que M. et Mme Z... sont responsables des agissements de leur fille Karine sur le fondement de l'article 1384 alinéa 5. - que les Mutuelles du Mans doivent garantir M. et Mme Z... en raison de l'extension de garantie prévue au paragraphe B.7 du contrat et concernant les dommages corporels causés aux membres de la famille, mettant en cause la responsabilité de l'assuré, mais exclusivement en cas de recours d'une personne ayant la qualité de tiers. - que les époux Z... es qualités ne peuvent solliciter une augmentation des sommes allouées alors qu'il a été fait droit intégralement à leurs demandes en première instance.

M. et Mme Z... et L'UMAE concluent à la confirmation de la décision quant à la responsabilité de M. X... et, formant appel incident,

sollicitent une augmentation des sommes allouées et la fixation du point de départ des intérêts au 28 Juillet 1999 date du dépôt du rapport d'expertise et subsidiairement au 24 avril 2001, date des premières conclusions après expertise.

Ils font valoir: - que M. X... , propriétaire du moulin à pommes, en a à ce titre la garde qu'il n'a pu transférer à l'enfant Karine, ce qui aurait supposé qu'elle soit informée des risques impliqués par la manipulation de l'engin. - que les agissements de Karine et Kévin ne revêtent pas les caractères de la force majeure. - que M. X... est dépourvu d'intérêt à invoquer la prétendue responsabilité de M. et Mme Z... sur le fondement de l'article 1384 al.4 du Code Civil, n'étant pas victime du dommage. - qu'aucune faute ne peut être reprochée à Kévin.

La Société MMA conclut à titre principal à l'irrecevabilité des demandes formulées à son encontre et à titre subsidiaire à la confirmation de la décision.

Elle estime : - que M. X... et GROUPAMA n'ont pas d'intérêt à agir l'objet de l'assurance responsabilité civile des époux Z... auprès de MMA étant de la garantie contre les conséquences de leur propre responsabilité en raison des dommages subis par autrui, les bénéficiaires de la garantie étant les victimes susceptibles d'engager la responsabilité civile des assurés. - que sont exclus de la garantie les dommages causés à toute personne ayant la qualité d'assuré. - que M. X... a commis une faute. - qu'aucune faute n'est caractérisée à l'encontre de Kévin. - que la garde n'a pas été transférée à Karine Z...

La CPAM des Côtes d'Armor conclut à la confirmation de la décision.

La Cour se réfère aux conclusions du 7 janvier 2003 pour M. X... et GROUPAMA , du 2 décembre 2002 pour les époux Z... et l'UMAE du 17 décembre 2002 pour la Sté MMA et du 7 mars 2002 pour la CPAM des

Côtes d'Armor pour plus ample exposé des moyens et arguments des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la responsabilité

Considérant qu'aux termes de l'article 1384 al.1 du Code Civil, on est responsable non seulement du dommage que l'on cause, par son propre fait mais encore de celui qui est causé par le fait des choses dont on a la garde;

Que M. X..., propriétaire du moulin à pommes est présumé gardien de cet engin et qu'il lui appartient d'établir qu'il a perdu cette garde comportant l'usage et les pouvoirs de direction et de contrôle;

Qu'il n'est pas contesté que la jeune Karine a manoeuvré la roue du moulin;

Que ce simple geste est manifestement insuffisant à démontrer qu'elle avait les attributs du gardien et plus particulièrement le pouvoir de contrôle lui permettant de prévenir le préjudice qu'elle pouvait causer, n'ayant pas été avertie du danger potentiel de l'utilisation de cet objet de décoration;

Considérant que le gardien peut s'exonérer en établissant que la victime a commis une faute;

Que les circonstances exactes de l'accident ne sont pas connues;

Que plus particulièrement, la COUR ignore, si lorsque Kévin s'est approché du moulin, la roue était déjà actionnée par sa soeur;

Qu'il ne peut être reproché à ce garçon d'avoir posé la main sur un objet qui était placé au centre du jardin d'agrément qu'il visitait, invité par M. X... qui n'avait donné aucune instruction particulière;

Sur les appels en garantie

Considérant que le Premier Juge a pertinemment relevé qu'aucune faute ne pouvait être mise à la charge de M. et Mme Z..., l'exigence d'une

surveillance normale des enfants dans un jardin clôturé, où les daims se trouvaient dans un enclos ne pouvant porter raisonnablement sur l'éventuelle dangerosité d'un objet décoratif;

Considérant que le gardien d'une chose qui a été l'instrument du dommage ne peut recourir que contre le tiers qui a concouru à la production du dommage;

Considérant que M. X... ne peut demander à être garanti par les parents de Karine sur le fondement de l'article 1384 al.4 du Code Civil;

Sur le préjudice

Considérant que les époux Z... ont succombé partiellement en première instance et sont donc recevables à former appel incident sur l'évaluation globale du préjudice;

Considérant que n'est pas nouvelle la demande majorant en cause d'appel la somme réclamée en première instance, cette prétention ne différant que par son montant de celle dont avait été originairement saisi les Premiers Juges;

Considérant que Kévin a été atteint d'un traumatisme complexe de la main droite par écrasement et arrachement des 2è, 3è, 4è et 5è doigts;

Qu'il a subi trois opérations les 8, 12 et 16 mai 1998 et a été amputé des 2è, 3è et 4è doigts;

Qu'avant l'accident, il était latéralisé à droite;

Considérant que l'expert a fixé la date de consolidation le 23 Juillet 1999;

Qu'il convient de fixer le préjudice subi ainsi qu'il suit :

* Préjudice soumis à recours - frais médicaux , pharmaceutiques et d'hospitalisation:

créance CPAM

7.344,87 euros

créance UMAE

535,39 euros - I.T.T. pendant 45 jours

762,25 euros - I.P.P. 20%

45.000,00 euros - préjudice professionnel

9.000,00 euros lié à la restriction dans le choix professionnel, les activités pour lesquelles l'habileté et l'usage des deux mains sont nécessaires lui étant interdites.

--------------- 62.642,51 euros à déduire créance CPAM

7.344,87 euros créance UMAE

535,39 euros --------------- 54.762,25 euros

Considérant que l'UMAE a versé à M. et Mme Patrick Z... , selon quittance subrogative, la somme de 7.622,45 euros ( 50.000 F) en règlement du capital invalidité calculé conformément aux statuts de la Caisse Autonome de l'union des MAE, société mutualiste;

Considérant qu'aux termes de l'article 29-5 de la loi du 5 Juillet 1985 les prestations d'invalidité versées par les groupements mutualistes régis par le Code de la Mutualité ouvrent droit à un recours contre la personne tenue à réparation ou son assureur;

Que doit être déduite des sommes allouées celle de 7.622,45 euros;

Qu'il reste du au titre du préjudice soumis à recours la somme de 47.139,80 euros.

* préjudice personnel - pretium doloris (3,5/7)

5.600 euros - préjudice esthétique (3,5/7)

6.000 euros - préjudice d'agrément

6.000 euros

-----------

17.600 euros

Considérant qu'en application de l'article 1153-1 du Code Civil, les intérêts sont dûs à compter du jugement;

Considérant que l'action subrogatoire dirigée contre la Sté Mutuelle du Mans Assurances IARD assureur, responsabilité civile de M. et Mme Z..., est recevable;

Que cependant, compte tenu du fait que la responsabilité de M. et Mme Z... n'est retenue à aucun titre, la Cie d'Assurances ne peut être condamnée à garantir M. X... et GROUPAMA;

Considérant que l'équité commande d'allouer - à M. et Mme Z... et

l'UMAE la somme de 1.500 euros - à la Sté Mutuelle du Mans la somme de 1.200 euros - à la CPAM des Côtes d'Armor la somme de 304,90 euros pour leur frais irrépétibles à hauteur de première instance et d'appel. PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement,

- Confirme la décision déférée sur la responsabilité de l'accident et la fixation du point de départ des intérêts.

- L'infirmant et statuant à nouveau.

- Condamne in solidum M. X... et GROUPAMA à payer : à l'UMAE la somme de HUIT MILLE CENT CINQUANTE SEPT EUROS QUATRE VINGT QUATRE CENTIMES (8.157,84 euros) au titre des prestations versées. [* à M. et Mme Z... es qualités d'administrateurs légaux de leur fils Kévin la somme de QUARANTE SEPT MILLE CENT TRENTE NEUF EUROS QUATRE VINGTS CENTIMES (47.139,80 euros) au titre du préjudice soumis à recours et celle de DIX SEPT MILLE SIX CENTS EUROS (17.600 euros) au titre du préjudice personnel.

- Condamne in solidum M. X... et GROUPAMA à verser : *] à Monsieur et Madame Z... es qualités et à l'UMAE la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 EUROS). à la CPAM des Côtes d'Armor la somme de TROIS CENT QUATRE EUROS QUATRE VINGT DIX CENTIMES (304,90 euros) pour leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel. - Condamne M. X... et GROUPAMA aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 02/01310
Date de la décision : 19/02/2003

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Choses dont on a la garde - Garde - Gardien - Propriétaire.

Le propriétaire d'un moulin à pommes ne perd pas la garde de celui-ci du seul fait qu'un enfant, convié avec ses parents à son domicile, en a actionné le mécanisme, occasionnant ainsi le dommage

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Choses dont on a la garde - Exonération - Fait de la victime.

N'est pas exonéré de sa responsabilité le propriétaire d'un moulin à pommes actionné par un enfant, blessant ainsi un autre enfant à la main, dès lors que la jeune victime n'a pas commis de faute en introduisant la main dans le mécanisme du moulin

APPEL EN GARANTIE - Applications diverses.

Le responsable du dommage ne peut exercer un recours contre le tiers qui, par sa faute, a concouru à la réalisation du dommage. En l'espèce, le gardien de la chose instrument du dommage ne peut obtenir, sur le fondement de l'article 1384, alinéa 4, du Code civil, la garantie des parents de l'enfant ayant actionné la chose, en l'absence de défaut de surveillance de ceux-ci


Références :

N1 N2 Code civil, article 1384, alinéa 1er
N3 Code civil, article 1384, alinéa 4

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2003-02-19;02.01310 ?
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