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17/01/2002 | FRANCE | N°JURITEXT000006939481

France | France, Cour d'appel de Rennes, 17 janvier 2002, JURITEXT000006939481


Quatrième Chambre ARRÊT N° R.G :00/04045 M. Bernard X... Mme Marie-Thérèse Y... épouse X... Z.../ Mutuelles du Mans Assurances IARD Confirmation partielle REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 17 JANVIER 2002 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

: Monsieur Jean Thierry, Président, Monsieur Joùl Christien, Conseiller, Monsieur Philippe Segard, Conseiller, GREFFIER : Mme Agnès A..., lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 14 novembre 2001 ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par M

onsieur Philippe Segard , Conseiller, à l'audience publique du 17 janvier 2002...

Quatrième Chambre ARRÊT N° R.G :00/04045 M. Bernard X... Mme Marie-Thérèse Y... épouse X... Z.../ Mutuelles du Mans Assurances IARD Confirmation partielle REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 17 JANVIER 2002 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

: Monsieur Jean Thierry, Président, Monsieur Joùl Christien, Conseiller, Monsieur Philippe Segard, Conseiller, GREFFIER : Mme Agnès A..., lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 14 novembre 2001 ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Philippe Segard , Conseiller, à l'audience publique du 17 janvier 2002, date indiquée à l'issue des débats.

APPELANT : Monsieur Bernard X... 25 rue Grandchamp 44119 Treillières représentée par Me Gautier, avoué assisté de la SCP Arion et Associés, avocats Madame Marie-Thérèse Y... épouse X... 25 rue Grandchamp 44119 Treillières représentée par Me Gautier, avoué assistée de la SCP Arion et Associés INTIME : Mutuelles du Mans Asssurances IARD 19/21 rue Chanzy 72030 Le Mans cedex représentées par la SCP Chaudet etamp; Brebion, avoués assistées de la SCP Salaun Ruffault Caron, avocats

EXPOSE DU LITIGE

En 1994, les époux X... ont confié à la société Isoraval, assurée par la compagnie Mutuelles du Mans , un marché de travaux portant sur l'application d'un produit dénommé "Fibrocoat" destiné à redonner une coloration et à protéger la couverture en amiante-ciment de leur

habitation.

Se plaignant de l'apparition d'infiltrations au travers de la toiture, les époux X... obtinrent, selon ordonnance de référé en date du 1er février 1996, l'organisation d'une expertise judiciaire.

Après le dépôt du rapport de l'expert B..., ils ont fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance de Nantes Maître Mauras, ès qualités de mandataire liquidateur de la société Isoraval, la compagnie Mutuelles du Mans, ainsi que la société Revalpa, fabricant du produit "Fibrocoat" et son assureur la compagnie AXA, la société Zolpan, venue aux droits de la société Revalpa étant par ailleurs volontairement intervenue à l'instance.

Alléguant une aggravation des désordres, les époux X... obtinrent, par ordonnance du Juge de la Mise en Etat du 2 octobre 1997, un complément d'expertise.

Après le dépôt du second rapport de l'expert B..., le Tribunal a statué en ces termes:

"Déboute Monsieur Bernard X... et Madame Marie-Thérèse C..., son épouse, de leurs demandes dirigées contre les sociétés Revalpa, droits et obligation de laquelle intervient la société Zolpan, Mutuelles du Mans et Axa Global Risks;

Dit la société Isoraval responsable des dommages subis par époux X... et trouvant leur cause dans les travaux exécutés par cette société sur la maison d'habitation desdits époux X...;

Fixe ainsi qu'il suit la créance des époux X... à l'encontre de Maître Mauras, ès qualités de mandataire liquidateur de la société Isoraval: - 60.000 Francs de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel, ladite somme indexée sur indice BT 01, l'indice de départ étant celui en vigueur au 30 avril 1998, l'indice d'arrivée celui d'applicable à la date du présent jugement, - 639,81 Francs de dommages et intérêts complémentaires en réparation du même préjudice,

- 12.000 Francs de dommages et intérêts en réparation du trouble de jouissance, -8.000 Francs en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;

Renvoie les époux X... à produire pour le montant desdites créances entre les mains du mandataire liquidateur susnommé;

Condamne les époux X... à payer: - à la société Zolpan venant aux droits de la société Revalpa, 4.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; - à la société Axa Global Risks, la somme de 500 Francs sur le même fondement;

Condamne les époux X... aux dépens de leur action à l'encontre des sociétés Revalpa, Mutuelles du Mans et Zolpan;

Condamne Maître Mauras, ès qualités de mandataire liquidateur de la société Isoraval, au surplus des dépens qui comprendront le coût des deux expertises confiées à Monsieur René B...;

Accorde à Maître Le Tertre, avocat associé de la société civile professionnelle Jaffre, Toulza, Chaput, Meyer et Le Tertre, le bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile."

Contestant la mise hors de cause de l'assureur de l'entrepreneur, les époux X... ont relevé appel de cette décision en demandant à la Cour de:

"Condamner la compagnie Mutuelles du Mans à payer à Monsieur et Madame X...:

- une indemnité de 71.298,98 Francs correspondant au coût des travaux de reprise de la couverture de leur habitation, ladite étant indexée sur

l'indice BT 01, le premier indice étant celui en vigueur au 30 avril 1998,

le second celui applicable au jour de l'arrêt à intervenir,

- une indemnité de 5.639,26 Francs, outre les intérêts au taux légal,

correspondant au montant des interventions provisoires indispensables pour éviter les entrées d'eau dans l'habitation de Monsieur et Madame X... jusqu'au dépôt du rapport complémentaire de l'expert judiciaire, - une indemnité de 12.000 Francs, outre les intérêts au taux légal, au titre du préjudice de jouissance subi par Monsieur et Madame X..., - une indemnité de 20.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile".

Faisant valoir que les travaux exécutés par la société Isoraval seraient étrangers à ceux garantis par le contrat d'assurance, la compagnie Mutuelles du Mans conclut à la confirmation du jugement attaqué te réclame en outre l'allocation d'une indemnité de 10.000 F en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées pour les époux X... le 16 mai 2001 et pour la compagnie Mutuelles du Mans le 13 février 2001.

EXPOSE DES MOTIFS

Les travaux confiés à la société Isoraval ont consisté en l'application d'un produit, qualifié par sa notice technique de "revêtement de protection pour toiture", assurant un traitement prophylactique en profondeur des couvertures en amiante-ciment à l'effet de leur redonner "une teinte harmonieuse" et de les recouvrir d'un "film protecteur et auto-lavable".

Le produit Fibrocoat n'a donc pas une fonction de nature purement esthétique, mais doit aussi contribuer à la protection durable de la toiture.

La compagnie Mutuelles du Mans soutient par ailleurs à tort que la preuve de l'impropriété de l'immeuble à sa destination ne serait pas établie, alors qu'au terme de son premier rapport, l'expert B... conclut que l'étanchéité de la toiture n'est plus assurée puisque le cloquage du produit et secondairement le collage des ardoises provoquent un phénomène de rétention d'eau conduisant à des infiltrations au travers de la toiture, et que, s'il n'a pas, dans le cadre des secondes opérations d'expertise, personnellement constaté l'existence de nouvelles infiltrations, il les a à juste titre tenues pour avérées dans des conditions météorologiques particulières en se fondant notamment sur les énonciations du constat d'huissier du 18 février 1997 duquel il résulte que le garage, affecté par des infiltrations au travers de sa toiture est ainsi rendu impropre à sa destination.

Dès lors, l'intervention de la société Isoraval, ayant consisté en l'application d'un produit de traitement en profondeur et de protection de la couverture, puis ayant ultérieurement provoqué des dommages, cachés à la réception tacite des travaux, qui ont rendu l'immeuble impropre à sa destination à un point tel qu'il est, selon les conclusions exemptes de critiques de l'expert, nécessaire pour y remédier de procéder à la réfection totale de la toiture, constitue un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil affecté de désordres devant être réparés par l'entrepreneur au titre de sa garantie décennale.

Pour dénier sa garantie, la compagnie Mutuelles du Mans se fonde sur une disposition des conditions particulières de la police souscrite par la société Isoraval, aux termes de laquelle "en matière de responsabilité décennale, celle-ci s'applique sur les produits bénéficiant eux-mêmes de la garantie décennale et agréés par la société d'assurance ou à ce jour les produits Soloflex et Solotherm

de la marque Solor agréés par l'ingénieur des Mutuelles du Mans, le produit Joltec étant à ce jour en cours d'agrément".

Cependant, s'il est de principe que la garantie de l'assureur ne concerne que le secteur d'activité professionnel déclaré par le constructeur, toute police souscrite en vue de satisfaire à l'obligation légale d'assurance des constructeurs n'en doit pas moins comporter des garanties au moins équivalentes à celles figurant à l'annexe I de l'article A 243-1 du code des assurances, aucune stipulation du contrat ne pouvant avoir pour effet d'amoindrir d'une manière quelconque le contenu de ces garanties.

Or, la clause par laquelle l'assureur limite sa garantie aux ouvrages réalisés avec l'emploi de certains produits de ravalement préalablement agréés par lui constitue, fût-ce indirectement, une clause d'exclusion qui est de nature à faire échec aux règles d'ordre public relatives à l'étendue de l'assurance obligatoire des constructeurs et doit, par suite, être réputée non écrite.

La compagnie Mutuelles du Mans soutient encore que l'intervention de la société Isoraval relevait d'une prestation d'étanchéiste, et non des activités "d'isolation, peinture, ravalement" que l'assurée a déclaré exercer lors de la souscription de la police.

Il sera toutefois rappelé que l'application du produit Fibrocoat n'était nullement destinée à assurer l'étanchéité de la couverture, mais seulement, par un traitement en profondeur, de lui redonner une teinte harmonieuse et de la protéger durablement sous un film auto-lavable.

Il résulte en outre des énonciations de la notice technique du produit annexée au rapport de l'expert que ce produit s'applique à la brosse, au rouleau ou au pistolet à peinture après nettoyage de la toiture au jet haute pression et, le cas échéant, traitements fongicide ou antirouille.

Il s'en déduit que la prestation de la société Isoraval, réalisée avec des techniques de bâtiments habituellement mises en oeuvre par les peintres et destinée à améliorer l'aspect de l'immeuble tout en lui conférant une protection supplémentaire, relève des activités de peinture et de ravalement, quand bien même elle portait sur la couverture et non sur les façades.

La compagnie Mutuelles du Mans, qui n'est dès lors pas fondée à dénier sa garantie , sera en conséquence condamnée, après réformation des dispositions du jugement ayant rejeté les demandes formées par les maîtres de l'ouvrage à son encontre, à réparer les dommages dont son assurée a été déclaré responsable.

Les Premiers Juges ont à cet égard, par des motifs pertinents que la Cour adopte, exactement évalué le préjudice subi par les époux X... de la manière suivante: - 60.000 Francs (9.146,94 Euro) de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel, ladite somme indexée sur indice BT 01, l'indice de départ étant celui en vigueur au 30avril 1998, l'indice d'arrivée celui applicable à la date du présent jugement, - 639,81 Francs (97,54 Euro) de dommages et intérêts complémentaires en réparation du même préjudice, - 12.000 Francs (1.829,39 Euro) de dommages et intérêts en raison du trouble de jouissance.

Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge des époux X... l'intégralité des sommes exposées par eux à l'occasion de l'instance d'appel et non comprises dans les dépens, en sorte qu'il leur sera alloué une somme de 1.600 Euro en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR:

Réforme le jugement rendu le 8 février 2000 par le Tribunal de Grande Instance de Nantes en ce qu'il a débouté les époux X... de leurs demandes dirigées contre la compagnie Mutuelles du Mans et condamné

ceux-ci aux dépens de leur action contre la compagnie Mutuelles du Mans;

Condamne la compagnie Mutuelles du Mans à payer aux époux X... les sommes de : - 9.146,94 Euro de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel, ladite somme indexée sur indice BT 01, l'indice de départ étant celui en vigueur au 30 avril 1998, l'indice d'arrivée celui applicable à la date du présent jugement, - 97,54 Euro de dommages et intérêts complémentaires en réparation même préjudice, - 1.829,39 Euro de dommages et intérêts en réparation du trouble de jouissance;

Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions;

Condamne la compagnie Mutuelles du Mans à verser aux époux X... une somme de 1.600 Euro en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;

Déboute les parties de toutes autres demandes contraires ou plus amples;

Condamne la compagnie Mutuelles du Mans as dépens de première instance afférents à l'action exercée par les époux X... à son encontre ainsi qu'aux entiers dépens d'appel;

Accorde à Maître Gautier, avoué, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile;

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006939481
Date de la décision : 17/01/2002

Analyses

ASSURANCE RESPONSABILITE - Caractère obligatoire - Travaux de bâtiment

Des travaux ayant consisté en l'application d'un produit destiné à traiter en profondeur et à protéger par un film auto-lavable une couverture en amiante-ciment à l'effetde lui redonner durablement une teinte harmonieuse, constituent un ouvrage au sens de l'article 1792 du Code civil, de nature à engager la responsabilité décennale de l'entrepreneur dès lors qu'ils sont la cause d'un phénomène de cloquage et de collage des ardoises ayant entraîné des infiltrations


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2002-01-17;juritext000006939481 ?
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