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09/04/2024 | FRANCE | N°23/01777

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section jex, 09 avril 2024, 23/01777


ARRÊT N°

du 9 avril 2024







(B.D.)

















N° RG 23/01777

N° Portalis

DBVQ-V-B7H-FNDY







S.A.R.L. PAKENKO



C/



M. [P]























Formule exécutoire + CCC

le 9 avril 2024

à :

- Me Stéphane Blareau





COUR D'APPEL DE REIMS



CHAMBRE CIVILE



CONTENTIEUX DE L'EXÉCUTION
r>

ARRÊT DU 9 AVRIL 2024



Appelant :

d'un jugement rendu par le Juge de l'exécution de Troyes le 9 novembre 2021



S.A.R.L. PAKENKO

[Adresse 4]

[Localité 3]



Comparant, concluant par Me Stéphane Blareau, avocat au barreau de Reims



Intimé :



M. [L] [P]

[Adresse 2]

[Localité 1]



N'ayant pas constitué avocat, bien que ré...

ARRÊT N°

du 9 avril 2024

(B.D.)

N° RG 23/01777

N° Portalis

DBVQ-V-B7H-FNDY

S.A.R.L. PAKENKO

C/

M. [P]

Formule exécutoire + CCC

le 9 avril 2024

à :

- Me Stéphane Blareau

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE

CONTENTIEUX DE L'EXÉCUTION

ARRÊT DU 9 AVRIL 2024

Appelant :

d'un jugement rendu par le Juge de l'exécution de Troyes le 9 novembre 2021

S.A.R.L. PAKENKO

[Adresse 4]

[Localité 3]

Comparant, concluant par Me Stéphane Blareau, avocat au barreau de Reims

Intimé :

M. [L] [P]

[Adresse 2]

[Localité 1]

N'ayant pas constitué avocat, bien que régulièrement assigné par dépôt de l'acte d'huissier à étude le 22 novembre 2023,

DÉBATS :

A l'audience publique du 12 mars 2024, tenue en présence de Mme Wendy Nicart, greffier stagiaire et de Mme [F] [W], juriste assistante, où l'affaire a été mise en délibéré au 9 avril 2024, sans opposition de la part des conseils des parties et en application de l'article 805 du code de procédure civile, M. Bertrand Duez, Président de chambre, a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la cour dans son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Bertrand Duez, Président de chambre

Mme Christel Magnard, Conseiller

Mme Claire Herlet, Conseiller

GREFFIER lors des débats et du prononcé

Mme Sophie Balestre, Greffier

ARRÊT :

Par défaut, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour le 9 avril 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par M. Bertrand Duez, Président de chambre, et Mme Sophie Balestre, Greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige :

Par jugement rendu le 28 juillet 2011, le juge d'instance de Troyes a ordonné la saisie des rémunérations de monsieur [L] [P], ayant pour employeur la société par actions simplifiées Rakon saisie sollicitée par la SARL Pakenco (ci-après société Pakenco), à hauteur des sommes suivantes et pour les titres exécutoires ci-après mentionnés :

4 100 € suivant ordonnance du 2 mai 2013 (RG 2012/A540)

21 098, 55 € suivant ordonnance du 19 décembre 2013 (RG 2013/A406)

37 279,25 € suivant ordonnance d'intervention du 10 novembre 2015 (RG 2013/A406)

L'exécution de cette saisie a régulièrement fonctionné, l'employeur adressant mensuellement à la société Pakenco des chèques correspondant à la quotité saisissable du salaire de M. [P].

M. [P] a saisi le juge de l'exécution du tribunal judiciaire Troyes par assignation du 5 mars 2021, délivrée au siège social de la société Pakenco, aux fins de :

Dire que la dette de la SARL Pakenco à l'encontre de M. [P] est intégralement réglée

Constater que la SARL Pakenco a eu un trop perçu de 26 344, 76 euros

Condamner la SARL Pakenco à régler à M. [P] la somme de 26 344, 76 euros

A titre subsidiaire,

Dire que les sommes réglées par M. [P] le seront en priorité sur le principal

Statuer ce que de droit sur les dépens

Par décision du 9 novembre 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Troyes a :

Déclaré irrecevable la note en délibéré de la société Pakenco en date du 21 septembre 2021 ;

Déclaré la société Pakenco irrecevable en ses demandes au titre des notes d'audience et de l'exclusion des débats des propos d'audience ;

Débouté la société Pakenco de sa demande de communication de pièces avant dire droit ;

Reçu M. [P] en sa contestation de la saisie des rémunérations mise en oeuvre à son encontre à l'initiative de la société Pakenco ;

Dit que la créance en principal dont la société Pakenco est fondée à poursuivre le recouvrement est de 5 993,12 € ;

Dit que cette créance sera réduite de la somme de 1 128, 50€ à la date du 28 juillet 2011 ;

Dit que les intérêts au taux légal de la dette de 5 993,12 € dont le recouvrement est poursuivi par le biais d'une saisie des rémunérations sont prescrits pour la période antérieure au 7 août 2008 ;

Dit que les intérêts au taux conventionnel sur la somme de 5 693,12 € sont prescrits pour la période antérieure au 7 août 2011 ;

Dit que la capitalisation des intérêts conventionnels sur la somme de 5 693,12 € est due pour la période du 1er novembre 1998 au 1er novembre 2010 ;

Dit que les règlements postérieurs au présent jugement seront imputés en priorité sur le capital ;

Condamné la société Pakenco à payer la somme de 900 € à M. [P] au titre des frais irrépétibles ;

Condamné la société Pakenco aux entiers dépens de l'instance ;

Rappelé que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire.

Par acte du 8 novembre 2023, la société Pakenco a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.

Par avis en date du 13 novembre 2023, l'affaire a été fixée à bref délai en application de l'article 904-1 du code de procédure civile.

M. [P] n'ayant pas constitué avocat en cause d'appel, la déclaration d'appel et les premières conclusions de l'appelante lui ont été signifiées par commissaire de Justice le 22 novembre 2023 (signification à l'Etude).

Dans ses dernières conclusions d'appelante déposées au greffe de la cour d'appel de Reims le 19 février 2024, la société Pakenco sollicite à titre principal l'annulation du jugement du 9 novembre 2021 et, à titre subsidiaire, statuant de nouveau de :

Déclarer nul et nuls d'effets les chefs suivants du dispositif pour ne pas être des décisions valides, pour ne pas statuer sur des demandes recevables, et pour être prononcés extra petita :

DIT que la créance en principal dont la société PAKENCO est fondée à poursuivre le recouvrement est de 5.993,12 € :

DIT que cette créance sera réduite de la somme de 1.128,50 € à la date du 28 juillet 2011

DIT que les intérêts au taux légal de la dette de 5.993,12 € dont le recouvrement est poursuivi par le biais d'une saisie des rémunérations sont prescrits pour la période antérieure au 7 août 2008

DIT que les intérêts au taux conventionnel sur la somme de 5.693,12 € sont prescrits pour la période antérieure au 7 août 2011

DIT que la capitalisation des intérêts conventionnels sur la somme de 5.693,12 € est due pour la période du 1er novembre 1998 au 1er novembre 2010 ;

DIT que les règlements postérieurs au présent jugement seront imputés en priorité sur le capital.

CONDAMNE la société PAKENCO à payer la somme de 900 € à Monsieur [P] au titre des frais irrépétibles.

A titre plus subsidiaire, la société Pakenco sollicite l'infirmation du jugement du 9 novembre 2021 en toutes ses dispositions, et statuant de nouveau de :

Avant dire-droit,

Ordonner à M. [P] la communication aux débats d'une copie de tous ses bulletins de salaire depuis le 1er avril 2017, sous astreinte de 10 i par jour de retard et par document manquant ;

Ordonner à M. [P] la communication aux débats des justificatifs, au moins annuels, des personnes à sa charge depuis le 1er décembre 2013, sous astreinte de 10 € par jour de retard et par document manquant ;

Au fond,

Déclarer prescrite l'action en contestation de la saisie des rémunérations mise en place par acte de saisie du 2 mai 2013 ;

Déclarer prescrite l'action en contestation de la saisie des rémunérations mise en place par acte de saisie du 19 décembre 2013 ;

Déclarer prescrite l'action en contestation de l'intervention à la saisie des rémunérations mise en place par acte du 24 novembre 2015 ;

Déclarer irrecevable comme fondement de l'action de l'intimé, la fin de non-recevoir tirée de la prescription des intérêts

A titre subsidiaire, en cas de confirmation partielle ou totale du jugement du 9 novembre 2021:

Rectifier le jugement du 9 novembre 2021 des 23 erreurs et/ou omissions matérielles telles que décrites aux moyens, et énoncées dans les points A à N des conclusions de l'appelante ;

A titre plus subsidiaire, à défaut de rectification :

Déclarer inexactes les mentions en gras suivantes du jugement du 9 novembre 2021 :

A - page 2 : 'Le juge d'instance de TROYES a ordonné la saisie des rémunérations de Monsieur [L] [P]'

B - page 2 : ' à hauteur de :

- 4.100 € suivant ordonnance du 2 mai 2013 (RG 2012/A540).

- 21.098,55 € suivant ordonnance du 19 décembre 2013 (R02013/A406).

- 37.279,25 € suivant ordonnance d'intervention du 10 novembre 2015 (RG 2013/A406)

C - page 2 : ' La mise en oeuvre de cette saisie a régulièrement fonctionné, l'employeur adressant mensuellement à la société PAKENCO, des chèques correspondant à la quotité saisissable du salaire de Monsieur [P].'

D - page 2 : ' Par assignation du 05 mars 2021 délivrée au siège social de la SARL PAKENCO.

Monsieur [L] [P] a demandé au juge de l'exécution que (sic) :

.../

- Condamner la SARL PAKENCO a (sic) régler à Monsieur [P] la somme de 26.344,76 euros,'

E - page 2 : 'Monsieur [P] représenté par son conseil a l'audience a développé oralement les termes de ses écritures du 21 septembre 2021 aux termes desquelles il maintient ses demandes initiales à savoir :

.../

- Condamner la SARL PAKENCO a (sic) régler à Monsieur [P] la somme de 26 344.76 euros.'

F - page 2 : 'Il déduit des règlements effectués qu'il existe un trop perçu de la somme de 26.344.76 € que la SARL PAKENCO doit être condamnée à lui restituer.'

H - en page 4 : 'Dans le cas présent, si la société PAKENCO a cru pouvoir, après l'audience adresser une correspondance au juge, alors même qu'à l'audience, il lui avait déjà été répondu par la négative cette correspondance qui s'analyse en une note en délibéré irrecevable pour ne pas avoir été préalablement autorisée.

La note en délibéré du 21 septembre 2021 adressée par la société PAKENCO sera en conséquence rejetée, le juge ne se fondant que sur la teneur des débats à l'audience et des conclusions régulièrement échangées.'

I - page 4: '....allant jusqu'à prétendre qu'il serait de l'intérêt même du débiteur d'augmenter le montant de la quotité saisissable pour apurer sa dette plus rapidement.'

J - page 5 : 'la société PAKENCO a entrepris l'exécution de titres résultant d'un jugement du tribunal de grande instance de FONTAINEBLEAU le 3 décembre 2003 et un arrêt de cour d'appel de PARIS du 3 décembre 2003.'

Déclarer omises dans le jugement déféré, et ainsi recevables en appel les prétentions suivantes de la société Pakenco :

DÉCLARER prescrite l'action en contestation de la saisie des rémunérations mise en place par acte de saisie du 2 mai 2013.

DÉCLARER prescrite l'action en contestation de la saisie des rémunérations mise en place par acte de saisie du 19 décembre 2013.

DÉCLARER prescrite l'action en contestation de l'intervention à la saisie des rémunérations mise en place par acte du 24 novembre 2015.

DÉCLARER irrecevable comme fondement de son action, la fin de non-recevoir tirée de la prescription des intérêts par le demandeur.

DÉCLARER non prescrits les intérêts faisant l'objet des saisies 2012/A540, 2013/A406 et de l'intervention du 23 octobre 2015.

DÉCLARER que les intérêts ayant fait l'objet d'une capitalisation en application des titres exécutoires ne sont pas prescrits et qu'ils sont soumis au délai d'exécution de 10 ans de l'article L111-4 du Code des Procédures Civiles d'Exécution.

DÉBOUTER Monsieur [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

En tout état de cause :

Déclarer non prescrits les intérêts faisant l'objet des saisies 2012/A540, 2013/A406 et de l'intervention du 23 octobre 2015 ;

Déclarer que les intérêts capitalisés en application des titres exécutoires ne sont pas prescrits et sont soumis au délai d'exécution de 10 ans de l'article L111-4 du code des procédures civiles d'exécution ;

Débouter M. [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner M. [P] au paiement d'une somme de 1 200 € pour procédure abusive ;

Condamner M. [P] au paiement d'une somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance ;

Condamner le Trésor public au paiement d'une somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles d'appel, et subsidiairement M. [P] ;

Condamner M. [P] aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de ses prétentions, la société Pakenco fait valoir la nullité du jugement du 9 novembre 2021 en considérant que le premier juge a excédé ses pouvoirs en statuant sur des prétentions inexistantes et en prononçant des chefs du dispositif non demandés par les parties.

Sur la prescription de l'action en contestation des actes d'exécution de M.[P] par assignation du 5 mars 2021, la société Pakenco relève qu'à la date de l'assignation plus de 5 années s'étaient écoulées depuis le 2 mai 2013, 19 décembre 2013 et 24 novembre 2015 et que toute action en contestation de ces actes était prescrite au plus tard depuis le 24 novembre 2020.

L'appelante fait valoir que le premier juge a considéré que les dispositions relatives à la prescription de droit commun ne s'appliquent pas en matière de voies d'exécution. Elle soulève qu'aucune disposition légale ne fonde un tel principe, l'article 2224 du code civil ne faisant pas d'exception pour les actions engagées pour contester une mesure d'exécution.

Enfin, la société Pakenco soutient que les intérêts simples ayant fait l'objet des saisies et interventions et que les intérêts capitalisés ne sont pas prescrits et sont soumis au délai dexécution de 10 ans de l'article L.111-4 du code des procédures civiles d'exécution. L'appelante relève que la prescription de 5 ans dont se prévaut M. [P] ne peut concerner la période antérieure à l'existence de l'article 2224 du code civil et qu'elle ne peut pas non plus concerner ni les intérêts déjà échus à la date du prononcé des condamnations le 03 décembre 2003 ni les intérêts postérieurs annuellement capitalisés en vertu du dispositif des titres exécutoires.

Pour le surplus des moyens et arguments de la société Pakenco il sera renvoyé à ses conclusions du 19 février 2024 conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 20 février 2024 et la procédure plaidée à l'audience du 12 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

De manière liminaire il sera fait référence à l'article 472 du code de procédure civile qui prescrit qu'en l'absence de comparution du défendeur, le juge ne fait droit aux demandes que dans la mesure où il les estime bien fondées.

La notification de la décision du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Troyes du 9 novembre 2021 a été faite par LRAR et par les soins du greffe le 9 novembre 2023 mais n'a pas été retirée par la S.A.R.L. Pakenco et aucun acte de signification par exploit de commissaire de Justice n'est produit de sorte que l'appel est recevable au sens de l'article R. 121-20 du code des procédures civiles d'exécution.

1/ Sur les demandes d'annulation du jugement du 9 novembre 2021

Il ressort de l'article 458 du code de procédure civile que l'annulation d'une décision de justice ne peut être prononcée qu'en sanction d'une règle de forme prévue par les articles 447, 451, 454, 455 et 456 du même code, ou pour une violation grave du principe du contradictoire, des limites de la saisine de la juridiction ou du principe d'impartialité du tribunal.

En l'espèce, dans la mesure où M. [P] a saisi le juge de l'exécution d'une demande tendant à dire que la créance cause des saisies des rémunérations dont il faisait l'objet était éteinte, il entrait dans les limites de compétence du juge de l'exécution de statuer sur le montant de cette créance en principal, frais et intérêts.

Dans ce cadre le juge de l'exécution n'a pas excédé les limites de sa saisine en statuant sur la prescription des intérêts légaux et conventionnels qu'il a fixé respectivement aux dates des 07/08/2008 et 07/08/2011.

Dans ce même cadre le juge de l'exécution a également pu statuer sur la capitalisation des intérêts conventionnels et user du pouvoir souverain qu'il tire de l'article 1343-5 du code civil pour ordonner que les versements postérieurs au jugement s'imputeront en priorité sur le capital.

Il s'ensuit que le reproche fait au premier juge par l'appelant d'avoir statué sur ces points au-delà de sa saisine (ultra petita) n'est pas fondé.

En conséquence, la demande d'annulation de la décision déférée sera rejetée.

2/ Sur la demande avant dire droit d'injonction à M. [P] de communiquer ses bulletins de salaires et la liste des personnes à charge

Cette demande déjà présentée par la société Pakenco devant le juge de l'exécution a été rejetée par le premier juge aux motifs qu'elle avait pour objet la contestation du calcul de la quotité saisissable du salaire de M. [P] par le créancier saisissant et se trouvait de ce fait étrangère à la saisine du juge de l'exécution.

Le débiteur ou le créancier qui constate une irrégularité, tant au niveau de la procédure de saisie des rémunérations que sur le montant légalement saisissable peut formuler une contestation auprès du juge de l'exécution du tribunal judiciaire.

La société Pakenco a engagé plusieurs procédures de saisie des rémunérations de M. [P] devant le tribunal d'instance de Troyes les 11 septembre 2010 puis le 19 août 2013, lesquelles ont été mises en oeuvre sans que la société Pakenco ne conteste la quotité saisissable des salaires de son débiteur.

Il s'ensuit que la demande reconventionnelle présentée par la société Pakenco, aux fins de contrôle de la quotité saisissable lors de l'instance ouverte devant le juge de l'exécution par le débiteur était irrecevable comme ne se rattachant pas aux prétentions originaires par un lien suffisant au sens de l'article 70 du code de procédure civile.

En conséquence, le rejet de cette demande avant dire droit sera confirmé.

3/ Sur les demandes de rectification des 'erreurs matérielles' du jugement déféré

Il ressort des articles 462 et 463 du code de procédure civile que ne constituent des 'erreurs matérielles' que des divergences entre les motifs et le dispositif d'une décision de Justice s'expliquant par une erreur de frappe, de calcul ou de plume. L'interprétation erronée d'un document ne relève pas de la procédure de rectification des erreurs matérielles. (Civ 2ème 9 juin 2005 n° 03-14.205P)

Il ressort également de ces textes qu'une partie ne saurait sous le prétexte d'erreur matérielle remettre en cause la décision rendue.

Sont seules rectifiables les erreurs matérielles commises par le juge. Si l'erreur provient d'une partie, il lui appartient d'exercer les voies de recours que la loi met à sa disposition.

N'ont pas été considérées comme réparables par voie de rectification d'erreur matérielle notamment les erreurs d'ordre 'intellectuel', les appréciations inexactes d'un fait, d'une responsabilité, d'une preuve ou de tout autre 'élément de la cause', les erreurs d'ordre juridique concernant l'application ou même le visa d'une règle de droit, ou encore la confusion sur la personne d'une partie.

Dans ces cas, seule une voie de recours peut offrir la possibilité d'une rectification.

(In dictionnaire juridique Serge Braudo)

En l'espèce, l'ensemble des prétentions soutenues par la société Pakenco dans ses conclusions à compter du point n°13 (page 21/30) jusqu'au point n°14 (page 25/30) relèvent de la critique des positions adoptées par le magistrat tant en ce qui concerne son appréciation des faits, des procédures ou des décisions antérieures qu'en ce qui concerne son appréciation juridique de la situation des parties.

Il s'ensuit qu'il ne saurait être fait droit aux prétentions de la société Pakenco sur le fondement des articles 462 et suivants du code de procédure civile.

4/ Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de M. [P]

Il ressort de l'article 2224 du code civil que : 'Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.'

L'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution dispose quant à lui : 'L'exécution des titres exécutoires mentionnés aux 1 à 3 de l'article L. 111 3 ne peut être poursuivie que pendant dix ans, sauf si les actions en recouvrement des créances qui y sont constatées se prescrivent par un délai plus long.'

Enfin, l'article R. 3252 29 du code du travail prévoit que : 'La mainlevée de la saisie (des rémunérations) résulte soit d'un accord des créanciers, soit de la constatation par le juge de l'extinction de la dette. Elle est notifiée à l'employeur dans les huit jours.'

Il se déduit de l'articulation de ces textes que si la mise en recouvrement d'un titre exécutoire se prescrit par les dix années de l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, l'action inverse, en main-levée d'une voie d'exécution d'un titre exécutoire, doit également doit suivre la prescription spéciale de l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution.

Toutefois, l'action qui consiste a solliciter le remboursement d'un trop-perçu est nécessairement fondée sur les dispositions des articles 1302 ou 1303 du code civil relatifs au paiement de l'indu ou de l'enrichissement injustifié. Cette action se trouve soumise à la prescription de droit commun de cinq ans prévue par l'article 2224 du code civil.

En l'espèce, aux termes de son assignation du 5 mars 2021 saisissant le juge de l'exécution, M. [P] sollicitait à titre principal :

39. La main-levée des saisies des rémunérations

40. La 'constatation' de l'existence d'un trop-perçu par la société Pakenco à compter du 1er juillet 2013.

Par l'effet dévolutif de l'appel la cour se trouve saisie des demandes originellement introduites par M. [P] devant le juge de l'exécution en son assignation du 5 mars 2021.

Il s'en suit :

Que sur le fondement de la demande de main-levée des saisies des rémunérations des 2 mai 2013, 19 décembre 2013 et 24 novembre 2015, son action en justice, soumise à la prescription de dix années de l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution n'est pas prescrite.

Que cependant, sur le fondement de la demande de répétition de l'indu, et même si le premier juge a considéré que la demande de 'constatation' ne valait pas prétention au sens de l'article 70 du code de procédure civile, l'action de M. [P] est prescrite par cinq années, courant, soit à compter du 1er juillet 2013, soit au plus tard à compter de l'engagement des saisies des rémunérations des 02/05/2013, 19/12/2013 ou 24/11/2015.

5/ Sur la demande de main-levée des saisies des rémunérations.

Cette demande n'est pas prescrite de sorte que la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle reçoit M. [P] en sa contestation de la saisie des rémunérations mise en oeuvre à son encontre par la société Pakenco.

Pour autant, le premier juge a maintenu la saisie des rémunérations en estimant que la créance de la société Pakenco n'était pas soldée en totalité mais M. [P] n'a pas constitué en appel pour faire valoir par le biais d'un appel incident sa prétention d'origine.

En conséquence, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a maintenu la saisie des rémunérations de M. [P] au bénéfice de la société Pakenco.

6/ Sur les prétentions relatives au remboursement de sommes par la société Pakenco

Cette action est prescrite comme ci dessus motivé de sorte que M. [P] sera déclaré irrecevable en cette demande.

C'est pour répondre à cette demande que le premier juge a fixé la créance de la société Pakenco en principal frais et intérêts dans sa décision du 9 novembre 2021.

Dès lors, par suite de l'irrecevabilité de la prétention de M. [P] sur ce point, le premier juge n'était pas tenu au regard des prétentions des parties circonscrivant sa saisine, de statuer sur le montant de la créance restant due.

Les dispositions du jugement déférées qui statuent sur la créance en principal et intérêts, seront donc infirmées et statuant à nouveau, il sera dit n'y avoir lieu à fixer la créance restant due à la suite des saisies des rémunérations.

7/ Sur les demandes annexes, les dépens de la première instance et de l'appel et les frais irrépétibles de procédure

A) Demande de dommages-intérêts pour procédure abusive :

En premier lieu il sera relevé que l'appel est le fait de la société Pakenco et non de M. [P] de sorte que l'appelant ne peut solliciter le bénéfice de dommages-intérêts pour la procédure d'appel.

L'assignation de première instance ne caractérise pas un abus du droit d'agir en Justice au sens de l'article 32-1 du code de procédure civile de sorte que la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a rejeté cette demande de la société Pakenco.

B) Dépens de première instance et d'appel :

Il ressort des articles 696 et 700 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens et que, sauf considération d'équité, la partie tenue aux dépens doit supporter les frais irrépétibles de procédure exposés par l'autre partie.

Le sens de la présente décision accueillant partiellement mais sur des points essentiels les prétentions de la société Pakenco conduit à infirmer la décision déférée en ce qu'elle a mis les dépens de première instance à la charge de la société Pakenco.

Les dépens de première instance seront mis à la charge de M. [P].

M. [P] succombant à l'appel se verra également imputer les dépens de l'appel.

C) Frais irrépétibles de procédure (instance et appel) :

Le sens de la présente décision mettant à la charge de M. [P] les dépens de la première instance impose d'infirmer la condamnation de la société Pakenco à payer à M. [P] la somme de 900 € au titre des frais irrépétibles de procédure de première instance.

Statuant par voie d'infirmation, il sera jugé que chacune des parties conservera la charge de ses propres frais irrépétibles de première instance.

Les prétentions d'appel, telles que formulées par la société Pakenco sont à ce point absconses que l'équité impose de ne pas faire droit à la demande présentée par l'appelante au titre des frais irrépétibles de procédure de procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par décision de défaut,

Rejette la demande d'annulation du jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Troyes en date du 9 novembre 2021.

Rejette la demande de la société Pakenco en rectification des 'erreurs matérielles' du jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Troyes en date du 9 novembre 2021.

Confirme la décision du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Troyes en date du 9 novembre 2021en ses dispositions qui ont :

Rejeté la demande avant dire droit de la société Pakenco tendant à enjoindre l'intimé de produire ses bulletins de salaires et la liste des personnes à charge.

Reçu M. [P] en sa contestation de la saisie des rémunérations mise en oeuvre à son encontre par la société Pakenco.

Débouté la société Pakenco en sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Infirme le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Troyes en date du 9 novembre 2021 en ses dispositions ayant déclaré recevable M. [P] en sa demande de répétition de l'indu, fixé par voie de conséquence le reliquat de créance de la société Pakenco en principal intérêts et frais à 1.128,50 € à la date du 28 juillet 2011 et dit que :

Les intérêts au taux légal de la dette de 5.993,12 € dont le recouvrement est poursuivi par le biais d'une saisie des rémunérations sont prescrits pour la période antérieure au 7 août 2008 ; `

Les intérêts au taux conventionnel sur la somme de 5.693. 12 € sont prescrits pour la période antérieure au 7 août 2011 ;

La capitalisation des intérêts conventionnels sur la somme de 5693.12 € est due pour la période du 1er novembre 1998 au 1er novembre 2010 ;

Les règlements postérieurs au présent jugement seront imputés en priorité sur le capital ;

Statuant de nouveau sur ces dispositions :

Déclare prescrite l'action en répétition de l'indu diligentée par M. [P].

Dit en conséquence n'y avoir lieu à fixer le solde de sommes restant dues au titre du principal et intérêts à la suite de la saisie des rémunérations.

Infirme le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Troyes en date du 9 novembre 2021 en ses dispositions ayant condamné la société Pakenco aux dépens de la première instance et à payer à M. [P] la somme de 900 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de procédure de première instance.

Statuant de nouveau sur ces dispositions :

Condamne M. [L] [P] aux dépens de la première instance.

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses frais irrépétibles de première instance.

Y ajoutant :

Condamne M. [L] [P] aux dépens de l'appel.

Rejette la demande présentée par la société Pakenco au titre des frais irrépétibles de procédure d'appel.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ère chambre section jex
Numéro d'arrêt : 23/01777
Date de la décision : 09/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-09;23.01777 ?
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