ORDONNANCE N°16
du : 1er juin 2023
N° RG 23/00422
N° Portalis DBVQ-V-B7H-FJWR
Mme [M] [E]
C/
Me [V] [H]
Formule exécutoire + CCC
le 1er juin 2023
COUR D'APPEL DE REIMS
CONTENTIEUX DES TAXES
Recours contre honoraires avocat
ORDONNANCE DU 1er JUIN 2023
A l'audience publique de la cour d'appel de Reims, où était présent et siégeait Madame Christel Magnard, conseiller à la cour, magistrat spécialement désigné par ordonnance de Monsieur le premier président, assistée de Madame Balestre, greffier,
a été rendue l'ordonnance suivante :
Entre :
Mme [M] [E]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Comparante en personne
Demanderesse au recours à l'encontre d'une décision rendue le 26 janvier 2023 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats de REIMS (RG T90756)
Et :
Me [V] [H]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Valérie-Anne JANSSENS, avocat au barreau de Reims
Défendeur
Régulièrement convoqués pour l'audience du 4 mai 2023 par lettres recommandées en date du 3 mars 2023, avec demande d'avis de réception,
A ladite audience, tenue publiquement, Madame Magnard, conseiller à la cour, magistrat délégué du premier président, assisté de Madame Balestre, greffier, a entendu les parties en leurs explication puis l'affaire a été mise en délibéré au 1er juin 2023,
Et ce jour, 1er juin 2023, a été rendue l'ordonnance suivante, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signée par Madame Magnard, conseiller à la cour, déléguée du premier président, et par Madame Balestre, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par requête en date du 6 octobre 2022, Mme [V] [H], avocat, a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats de Reims en fixation des honoraires qui lui seraient dus par Mme [M] [E].
Elle exposait avoir assisté Mme [E] dans le cadre d'une procédure de naturalisation, qu'une convention d'honoraires avait été régularisée entre les parties, fixant un taux horaire de 240 euros TTC et produisait une facture d'honoraires pour 840 euros TTC en date du 18 février 2022 puis une mise en demeure en date du 6 juillet 2022, incluant 40 euros de frais de retard de paiement.
Le bâtonnier a sollicité les observations de la cliente par pli recommandé, l'accusé de réception ayant été réceptionné le 31 octobre 2022. Il n'a été fait aucune observation.
Par ordonnance du 26 janvier 2023, le bâtonnier de l'ordre des avocats de Reims a fixé les honoraires dus par Mme [E] à Mme [H] à la somme de 880 euros TTC, et a ordonné à Mme [E] de régler cette somme au conseil.
Par courrier déposé au greffe le 22 février 2023, Mme [E] a formé un recours contre cette décision.
A l'audience devant la cour, Mme [E] conteste devoir une quelconque somme au conseil, arguant avoir déjà réglé une somme de 1 200 euros et que son dossier de demande de naturalisation n'a jamais été déposé.
Mme [H], se référant aux conclusions déposées, demande de confirmer l'ordonnance du bâtonnier fixant les honoraire dus à la somme de 880 euros, et, y ajoutant, de condamner Mme [E] à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, comprenant les frais de taxation réglés à l'ordre des avocats de 16,08 euros.
Sur ce,
Il est essentiel de rappeler, en préliminaire, qu'il résulte des articles 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, que la procédure en fixation des honoraires d'avocat n'a pas pour objet d'examiner les griefs qui peuvent être faits par le client quant à la qualité ou à la bonne ou mauvaise exécution des prestations de l'avocat.
Cette question est du ressort du tribunal judiciaire lequel peut, le cas échéant, être saisi d'une action en dommages-intérêts à cette fin en cas de préjudice.
Le conseiller délégué doit seulement fixer les honoraires en considération des diligences effectivement accomplies, et sur la base des stipulations contractuelles, en écartant celles revêtant un caractère manifestement inutile.
Mme [E] a conclu avec son conseil une convention d'honoraires, en date du 24 février 2020, qui constitue la loi des parties, et qui prévoyait, pour l'essentiel, un honoraire de base à un taux horaire de 200 euros HT soit 240 euros TTC.
Une première demande de provision a été émise le jour même, 24 février 2020, pour une somme de 1 200 euros correspondant à une durée prévisible de 5 heures. Cette somme a été réglée par Mme [E].
La facture querellée correspond à celle du 18 février 2022, remplacée ensuite par la facture pour solde des honoraires pour un montant de 840 euros pour 3 h 30 de travail, outre frais de relance de 40 euros.
Mme [E] conteste devoir toute somme complémentaire, aux motifs que son dossier a été refait plusieurs fois, sans qu'il soit jamais déposé, que jamais il ne lui a été dit qu'il manquait 'telle ou telle chose', que lorsqu'elle téléphonait il lui était indiqué qu'il n'y avait pas de difficultés et que les choses suivaient leur cours, que le conseil, une fois dessaisi, a refusé de lui restituer son dossier, aux motifs précisément qu'elle n'avait pas réglé le solde de la facture (indiquant toutefois que son dossier lui a finalement été restitué la semaine avant l'audience).
Toutefois, Mme [H] justifie des diligences nombreuses accomplies dans le cadre de sa mission, entre le 29 janvier 2020 et le 7 avril 2022 (dessaisissement). Elle justifie notamment de ce que la première provision émise lors de la signature de la convention n'a été réglée complètement qu'en mars 2021, ce qui a entraîné des reports du traitement du dossier.
Surtout, le conseil produit au dossier l'ensemble des correspondances échangées avec sa cliente, ayant pour objet la communication des multiples documents nécessaires à la complétude du dossier de naturalisation. A la lecture de ces pièces, il s'agit de demandes des nombreuses, précises, réitérées, qui ont manifestement nécessité un examen détaillé des pièces communiquées, parfois incomplètes ou périmées, devant être réactualisées. Le nombre des échanges témoignent d'un examen minutieux, et justifie d'un temps passé qui correspond au nombre d'heures facturées (soit 8 h 30 au total). Mme [E] ne conteste pas non plus la réalité des rendez-vous téléphoniques ou en présentiel évoqués.
Dans ces conditions et au vu des multiples pièces communiquées par le conseil justifiant des diligences accomplies, et quand bien même le dossier n'aurait en définitive pas été finalisé, la facturation adressée est conforme aux usages, notamment ce qui concerne le taux horaire pratiqué, et le temps passé est manifestement en corrélation.
Dans ces conditions, la décision du bâtonnier est confirmée.
Aucune considération d'équité ne commande toutefois de faire droit à la demande en frais irrépétibles formée par Mme [H].
Les frais de taxation réclamés à hauteur de 16,08 euros ne sont prévus par aucune disposition légale ou réglementaire, de sorte que la demande est également rejetée. La présente procédure est par ailleurs sans dépens.
PAR CES MOTIFS,
Confirme l'ordonnance rendue le 26 janvier 2023 par le bâtonnier de l'ordre des avocats de Reims,
Y ajoutant,
Déboute Mme [H] du surplus de ses prétentions,
Rappelle que la procédure est sans dépens.
Le greffier Le conseiller délégué