N° RG : 20/00778
N° Portalis :
DBVQ-V-B7E-E3BK
ARRÊT N°
du : 24 mars 2023
Ch. M.
Mme [F] [N]
épouse [O]
C/
M. [Y] [N]
M. [A] [N]
Formule exécutoire le :
à :
Me Florence Six
Me Isabelle Baisieux
COUR D'APPEL DE REIMS
1ère CHAMBRE CIVILE - SECTION II
ARRÊT DU 24 MARS 2023
APPELANTE :
d'un jugement rendu le 19 février 2020 par le tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne (RG 19/00729)
Mme [F] [N] épouse [O]
[Adresse 2]
[Localité 13]
Comparant et concluant par Me Florence Six, membre de la SCP Inter-Barreaux Hermine avocats associés, avocat postulant au barreau de Reims, et plaidant par Me Fabrice Lepeu, membre de KLP avocats AARPI, avocat au barreau de Paris
INTIMÉS :
1°] - M. [Y] [N]
[Adresse 3]
[Localité 18]
2°] - M. [A] [N]
[Adresse 8]
[Localité 5]
Comparant, concluant et plaidant par Me Isabelle Baisieux, avocat au barreau de Reims
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Pety, président de chambre
Mme Lefèvre, conseiller
Mme Magnard, conseiller
GREFFIER D'AUDIENCE :
Mme Roullet, greffier, lors des débats et du prononcé
DÉBATS :
À l'audience publique du 23 février 2023, le rapport entendu, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 mars 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par M. Pety, président de chambre, et par Mme Roullet, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
- 2 -
M. [Y] [N], M. [A] [N] et Mme [F] [N] épouse [O] sont propriétaires indivis de plusieurs biens immobiliers sis, d'une part, à [Localité 19] ([Adresse 21]) et, d'autre part, d'appartements et garages sis à [Adresse 14] et [Adresse 17], suite aux décès de leur mère, Mme [R] [U], survenu le 25 novembre 1984, de leur grand-mère maternelle, Mme [Z] [V], survenu le 11 novembre 1987, et de leur père, M. [J] [N], survenu le 14 avril 2017.
Par jugement réputé contradictoire en date du 19 février 2020, rendu sur saisine de MM. [Y] et [A] [N] (Mme [F] [N] épouse [O] n'ayant pas constitué avocat), le tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne a, notamment :
- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des successions de Mme [R] [U], décédée le 25 novembre 1984, Mme [Z] [V], décédée le 11 novembre 1987, et de M. [J] [N], décédé le 14 avril 2017,
- désigné pour procéder à ces opérations maître [B] [K], notaire à [Localité 15], qui fera rapport en cas de difficulté,
- désigné la vice-présidente ou le juge du tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne chargé de la chambre civile pour surveiller ces opérations,
- dit qu'en cas d'empêchement du notaire ou du juge ainsi désigné, il pourra être pourvu à leur remplacement sur simple requête,
- dit que le notaire liquidateur établira les masses actives et passives, les droits des parties et leurs éventuelles créances sur l'indivision, la composition des lots à retenir et d'une manière générale l'acte liquidatif,
- dit qu'en cas de difficultés, il sera procédé conformément aux dispositions des articles 1365 à 1381 du code de procédure civile et notamment qu'il appartiendra au notaire présentement désigné de dresser procès-verbal des points litigieux afin de saisine du juge chargé de surveiller lesdites opérations,
- rappelé aux parties que la procédure judiciaire ne fait pas obstacle à ce qu'un partage amiable soit établi même partiellement en application des dispositions de l'article 842 du code civil, le juge constatant la clôture de la procédure en cas de partage intégral des biens de la succession,
- ordonné la vente par licitation des biens ci-après désignés, aux mises à prix définies :
* une villa sise à [Adresse 21], cadastrée section B n°[Cadastre 9] «[Localité 20]» pour 12 ares 60, section B n°[Cadastre 10] «[Localité 20]» pour 13 ares 35 (nouvelle référence cadastrale = BP75), pour la mise à prix de 1 070 000 euros,
* une villa sise à [Adresse 21], cadastrée section B n°[Cadastre 6], lieudit [Localité 20], pour une mise à prix de 856 000 euros,
* dans un immeuble sis [Adresse 14] cadastré parcelle AZ [Cadastre 4] :
. lot 2 : appartement F3 de 78 m2 situé au rez-de-chaussée gauche représentant 61/1000ème des parties communes actuellement loué pour une mise à prix de 55 000 euros,
. lot 3 : appartement F4 de 99 m² situé au 1er étage droite représentant 85/1000ème des parties communes actuellement loué pour une mise à prix de 55 000 euros,
- 3 -
. lot 4 : appartement F2 de 44 m² situé au 1er étage centre représentant 38/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 25 000 euros,
. lot 5 : appartement F4 de 99 m² situé au 1er étage gauche représentant 85/1000ème des parties communes actuellement loué pour une mise à prix de 55 000 euros,
. lot 6 : appartement F4 de 99 m² situé au 2ème étage droite représentant 85/1000ème des parties communes actuellement loué pour une mise à prix de 75 000 euros,
. lot 7 : appartement F2 de 44 m² situé au 2ème étage centre représentant 38/1000ème des parties communes actuellement loué pour une mise à prix de 45 000 euros,
. lot 8 : appartement F4 de 99 m² situé au 2ème étage gauche représentant 85/1000ème des parties communes vide pour une mise à prix de 75 000 euros,
. lot 9 : appartement F4 de 99 m² situé au 3ème étage droite représentant 85/1000ème des parties communes actuellement loué pour une mise à prix de 60 000 euros,
. lot 10 : appartement F2 de 44 m² situé au 3ème étage centre représentant 38/1000ème des parties communes actuellement vide pour une mise à prix de 45 000 euros,
. lot 11 : appartement F4 de 99 m² situé au 3ème étage gauche représentant 85/1000ème des parties communes actuellement loué pour une mise à prix de 60 000 euros,
. lot 12 : appartement F4 de 75 m² situé au 4ème étage droite représentant 88/1000ème des parties communes vide pour une mise à prix de 65 000 euros,
. lot 13 : appartement F5 de 105 m² situé au 4ème étage gauche représentant 88/100ème des parties communes vide pour une mise à prix de 85 000 euros,
. lot 14 : cave portant le numéro 1 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 15 : cave portant le numéro 2 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 16 : cave portant le numéro 3 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 17 : cave portant le numéro 4 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 18 : cave portant le numéro 5 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 19 : cave portant le numéro 6 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 20 : cave portant le numéro 7 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 21 : cave portant le numéro 8 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 22 : cave portant le numéro 9 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 23 : cave portant le numéro 10 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 24 : cave portant le numéro 11 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 25 : cave portant le numéro 12 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
. lot 26 : cave portant le numéro 13 représentant 2/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 500 euros,
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. lot 27 : un garage portant le numéro 1 représentant 5/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 3 000 euros,
. lot 28 : un garage portant le numéro 2 représentant 5/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 3 000 euros,
. lot 29 : un garage portant le numéro 3 représentant 5/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 3 000 euros,
. lot 30 : un garage portant le numéro 4 représentant 5/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 3 000 euros,
. lot 31 : un garage portant le numéro 5 représentant 5/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 3 000 euros,
. lot 32 : un garage portant le numéro 6 représentant 5/1000ème des parties communes pour une mise à prix de 3 000 euros,
* 4 garages dépendant d'un immeuble en copropriété sis à [Adresse 17], cadastré section BS [Cadastre 11], les lots 16, 25, 26 et 27 portant les numéros 1, 10, 11 et 12 représentant chacun 4/188ème des parties communes, pour la mise à prix de 3 000 euros pour chaque garage,
- commis Me [B] [K], aux fins de procéder auxdites ventes par licitation,
- dit que le notaire commis aura pour mission de dresser le cahier des charges prévu à l'article 1275 du code de procédure civile,
- précisé que le cahier des charges et des conditions de vente comportera une clause d'attribution, permettant à l'un des colicitants de déclarer, dans l'acte d'adjudication, qu'il offre d'acquérir le bien indivis au prix proposé dans le cadre du partage définitif sous déduction de sa part dans l'indivision et sous réserve des droits des créanciers, cette déclaration valant engagement de sa part de se voir attribuer l'immeuble, et de la part des autres colicitants de le lui attribuer, dans le partage définitif pour la somme indiquée au jugement d'adjudication et d'en faire remonter les effets au jour fixé pour l'entrée en jouissance,
- fixé à la somme de 2 500 euros par mois, depuis juillet 2012, et ce jusqu'à licitation du bien, l'indemnité d'occupation due par Mme [F] [N] épouse [O] à l'indivision dans le cadre des opérations de liquidation de l'immeuble indivis à usage d'habitation sis à [Adresse 21],
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- rejeté les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté les demandes de condamnation aux dépens et de distraction formées par les parties,
- dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens, lesquels seront employés en frais privilégiés de partage,
- ordonné l'exécution provisoire.
Mme [F] [N] épouse [O] a régulièrement interjeté appel de cette décision, par déclaration du 9 juin 2020, dans les termes suivants :
«Appel total aux fins d'annulation et d'infirmation du jugement du chef de l'ouverture des opérations successorales avec toutes conséquences de droit (désignation d'un juge pour surveiller lesdites opérations, mission du notaire commis y compris en cas de difficultés), de la désignation de Me [K] pour y procéder, de la vente par licitation de la villa de [Localité 19] sur la mise à prix de 1 070 000 euros, de celle de la villa de [Localité 19] sur la mise à prix de 856 000 euros, de celle des lots de l'immeuble de [Localité 15] pour leurs mises à prix respectives telles qu'indiquées au dispositif et de celle des quatre garages pour la mise à prix
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de 3 000 euros pour chacun, de la nomination de maître [K] pour procéder auxdites ventes par licitation avec la mission prévue au dispositif, de la fixation à 2 500 euros par mois depuis juillet 2012 et jusqu'à licitation du bien de l'indemnité d'occupation due par Madame [O] à l'indivision dans le cadre des opérations de liquidation de l'immeuble sis à [Localité 19], ainsi que de la charge des dépens, le tout sous bénéfice de l'exécution provisoire et au vu des pièces qui seront produites devant la cour».
Par ordonnance du 18 décembre 2020, le conseiller de la mise en état a ordonné une médiation, laquelle n'a pas abouti.
Par ordonnance du 21 janvier 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné une expertise de la maison [Adresse 21] confiée à Technoparc Epsilon avec pour mission de :
1) Visiter l'immeuble litigieux, dénommé « [Adresse 21] », cadastré Section BP n° [Cadastre 7], situé [Adresse 12], en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées et se faire communiquer tant par les parties que par des tiers toutes pièces qu'il jugera utiles ;
2) Décrire le bien litigieux en donnant toutes précisions relatives à la qualité de la construction, l'état du gros oeuvre et des huisseries, comme des agencements et aménagements intérieurs et extérieurs tels que sols, revêtements muraux, installations électriques, dispositifs de chauffage, d'adduction d'eau et d'évacuation des eaux usées;
3) Décrire succinctement les travaux financés par Mme [F] [N] épouse [O] et M. [Y] [N], en préciser le coût et dire si ces travaux constituent des travaux d'amélioration au sens des dispositions de l'article 815-13 du code civil ;
4) Donner son avis motivé sur la plus-value générée à ce jour à l'immeuble dénommé «[Adresse 21]» cadastré Section BP n° [Cadastre 7], situé [Adresse 12], par les travaux d'amélioration financés par Mme [F] [N] et par M. [Y] [N] ;
5) Déterminer la superficie habitable de la maison ;
6) Déterminer la valeur locative du bien.
Dit que l'expertise s'effectuera aux frais avancés de Mme [F] [N] épouse [O] qui devra consigner, avant le 4 mars 2022, la somme provisionnelle de 2 000 euros,
L'expert a remis son rapport le 24 novembre 2022.
Aux termes de ses conclusions du 2 février 2023, Mme [F] [N] épouse [O] demande à la cour d'infirmer le jugement rendu le 19 février 2020 par le tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne en ce qu'il a fixé à la somme de 2 500 euros par mois depuis juillet 2012 et ce jusqu'à licitation du bien, l'indemnité d'occupation due par elle à l'indivision dans le cadre des opérations de liquidation de l'immeuble indivis à usage d'habitation sis à [Adresse 21], et en ce qu'il a ordonné la vente sur licitation de cette villa [Adresse 21], pour une mise à prix de 856 000 euros, ainsi que sur les dépens, et statuant à nouveau :
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Sur l'occupation de [Adresse 21],
- juger qu'elle n'est redevable d'aucune indemnité faute d'une jouissance privative de la maison [Adresse 21],
Subsidiairement, fixer à la somme maximale de 650 euros par mois, depuis l'été 2014 et sur la base de 3 semaines par an et ce jusqu'à licitation du bien, l'indemnité d'occupation due par elle à l'indivision dans le cadre des opérations de liquidation de l'immeuble indivis à usage d'habitation sis à [Adresse 21],
Sur les travaux de conservation et d'amélioration de [Adresse 21],
- juger qu'elle est créancière envers l'indivision d'une indemnité au titre des travaux d'amélioration réalisés dans la maison [Adresse 21], sur le fondement des dispositions de l'article 815-13 du code civil dont le montant sera égal au profit subsistant, soit la somme de 112 000 euros, ou si elle est plus importante, à la dépense faite, soit la somme de 89 600 euros,
- juger qu'elle est créancière envers l'indivision d'une indemnité :
* au titre du paiement des sommes dues dans le cadre du redressement fiscal de 1991, dont le montant sera égal à 18,47% de la valeur de la maison [Adresse 21] au jour du partage,
* au titre des dépenses de conservation réalisées dans la maison [Adresse 21], sur le fondement des dispositions de l'article 815-13 du code civil, dont le montant sera égal au profit subsistant au jour du partage, sans pouvoir être inférieur à 79 628 euros,
Sur les indemnités d'occupation dues par [Y] et [A] [N],
- fixer à la somme de 3 805 euros par mois, l'indemnité d'occupation due par M. [Y] [N] dans le cadre des opérations de liquidation de l'immeuble indivis à usage d'habitation sis à [Adresse 12], au titre de son occupation entre le 9 juin 2015 et le 26 mars 2017, sur le fondement des dispositions de l'article 815-9, al. 2 du code civil,
- fixer à la somme de 3 805 euros par mois, l'indemnité d'occupation due par MM. [A] et [Y] [N] à l'indivision dans le cadre des opérations de liquidation de l'immeuble indivis [Adresse 22], au titre de leur occupation entre le 15 avril 2017 et la date du partage, sur le fondement des dispositions de l'article 815-9, al. 2 du code civil,
- fixer à la somme de 440 euros par mois, l'indemnité d'occupation due par M. [Y] [N] à l'indivision dans le cadre des opérations de liquidation de l'appartement indivis à usage d'habitation sis [Adresse 14] au titre de son occupation, depuis le 1er septembre 2016 et jusqu'à la date du partage, sur le fondement des dispositions de l'article 815-9, al. 2 du code civil,
Sur l'attribution de la maison [Adresse 21],
- ordonner l'attribution préférentielle à Mme [F] [N] épouse [O] de la maison [Adresse 21],
- juger que la valeur de la maison [Adresse 21] sera fixée à 740 000 euros, telle que retenue par l'expert judiciaire, pour les opérations de comptes et liquidation,
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- limiter le montant de la «récompense» à l'égard de l'indivision de M. [Y] [N] au titre des travaux de la maison [Adresse 21] à la somme de 9 300 euros,
Sur les dépens et les frais irrépétibles,
- condamner MM. [A] et [Y] [N] à lui verser la somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise,
- les débouter de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
* * * *
Suivant conclusions du 30 janvier 2023, MM. [Y] et [A] [N] demandent à la cour de confirmer ladite décision en ce qu'elle a :
- dit qu'il sera, par le ministère de Me [B] [K] membre de l'office notarial de l'Arquebuse sis [Adresse 1], qu'il plaira de désigner à cet effet sous la surveillance de l'un des juges du siège, procédé aux opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre eux, et préalablement auxdites opérations et pour y parvenir,
- ordonné qu'il sera procédé par devant Me [B] [K], Notaire à Châlons-en-Champagne, membre de l'office notarial de l'Arquebuse sis à [Adresse 16] sur le cahier des charges dressé par ledit notaire, formalités judiciaires préalablement remplies par Me Isabelle Baisieux, avocat, qu'il plaira de désigner à cet effet à la vente sur licitation des immeubles ci-après désignés (cf. liste ci-dessus),
- dit qu'en cas d'empêchement des juges et notaires commis, il sera procédé à leur remplacement par ordonnance du président du tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne rendu sur requête de la partie la plus diligente.
Pour le surplus, ils demandent d'infirmer la décision et, statuant à nouveau, de :
- dire que Mme [F] [N] épouse [O] est redevable auprès de l'indivision, d'une indemnité d'occupation (villa [Adresse 21]) d'un montant de
4 500 euros par mois depuis le 14 février 2014 et ce jusqu'à licitation du bien, - la débouter de sa demande de fixation d'une indemnité d'occupation à l'encontre de M. [A] [N] et ses ayants droit,
- la débouter de sa demande d'indemnité d'occupation à l'encontre de M. [Y] [N] pour la maison [Adresse 21],
- fixer à la somme de 440 par mois le montant de l'indemnité d'occupation due par M. [Y] [N] pour l'appartement sis à [Localité 15] et ce à compter d'avril 2017,
- fixer l'indemnité de gestion mensuelle due par l'indivision à M. [Y] [N] à la somme de 358,27 euros à compter d'avril 2017,
- fixer le montant des dépenses de conservation de M. [Y] [N] à la somme de 9 600 euros,
- débouter Mme [F] [N] épouse [O] de toutes ses demandes,
- la condamner à leur régler la somme de 5 000 euros chacun en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, en ce compris le rapport d'expertise, et autoriser Me [C] [D] à les recouvrer directement, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
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L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 février 2023.
* * * *
Motifs de la décision :
I- Observations procédurales préliminaires :
Par application de l'article 910-4 alinéa 1 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès leurs premières conclusions, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'alinéa 2 de l'article 910-4 prévoit que demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqué, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger des questions nées postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Il doit être observé que les dernières écritures de l'appelante contiennent plusieurs demandes qui ne figuraient pas dans ses écritures initiales du 8 septembre 2020, à savoir :
- la demande au titre d'une indemnité en lien avec le redressement fiscal de 1991,
- la demande d'attribution préférentielle de la maison [Adresse 21],
- la demande tendant à fixer la valeur de la villa [Adresse 21] à 740 000 euros telle que retenue par l'expert,
- diverses demandes au titre des dépenses de conservation.
Toutefois, il est constant qu'en matière de partage, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l'établissement de l'actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse.
Sont donc recevables, en application de l'alinéa 2 de l'article 910-4 du code de procédure civile, les demandes formulées après le dépôt des premières conclusions d'appel (Civ, 1ère, 9 juin 2022).
Il s'ensuit que l'ensemble des demandes portées au dispositif des écritures de Mme [F] [N] épouse [O] sont recevables au sens de l'article 910-4 susvisé.
II- Sur les demandes relatives à la maison [Adresse 21] :
A) Sur la demande d'indemnité d'occupation à la charge de Mme [F] [N] épouse [O] :
Par application de l'article 815-9 du code civil, l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.
Une telle indemnité peut être due même si l'occupation n'est pas continue.
La jouissance privative résulte de l'impossibilité de fait ou de droit, pour les autres coïndivisaires, d'user de la chose. Aucune indemnité n'est due si l'occupation de l'immeuble par un indivisaire n'exclut pas la même utilisation par ses coïndivisaires.
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Il appartient à l'indivisaire qui poursuit le paiement d'une indemnité d'occupation de rapporter la preuve de ce qu'il a été empêché de jouir personnellement du bien.
Le premier juge a mis à la charge de Mme [F] [N] épouse [O] une indemnité d'occupation de 2 500 euros par mois depuis le mois de juillet 2012 et jusqu'à licitation du bien, au titre de son occupation privative de la villa [Adresse 21]. Mme [F] [N] épouse [O] n'a pas comparu en première instance, de sorte qu'elle n'a fait aucune observation sur la demande présentée. Le juge s'est fondé sur l'avis de valeur produit alors par les demandeurs et sur l'état dudit bien.
MM. [Y] et [A] [N] sollicitaient, en première instance, que cette indemnité soit fixée à 6 000 euros par mois à compter du mois de juillet 2012.
À hauteur de cour, ils sollicitent dorénavant que cette indemnité soit fixée à la somme de 4 500 euros par mois, à compter du 14 février 2014, reconnaissant ainsi que Mme [F] [N] épouse [O] soulève, à bon droit, le fait qu'une telle indemnité d'occupation -qu'elle conteste formellement en son principe- ne pourrait en tout état de cause courir qu'à compter du 14 février 2014 en raison de la prescription quinquennale tirée de l'article 2224 du code civil, ses frères ayant saisi la juridiction par une assignation du 14 février 2019.
À l'appui de leur demande, MM. [Y] et [A] [N] font valoir que Mme [F] [N] épouse [O] occupe, plusieurs mois par an, la maison [Adresse 21] de façon privative, en tout état de cause pendant les vacances scolaires, et qu'elle n'aurait pas dépensé les sommes «astronomiques qu'elle prétend» pour faire une piscine, aménager le garage en chambre, clôturer le terrain, changer le portail, poser des graviers en marbre blancs, etc. si elle n'y passait que trois semaines par an. Ils soutiennent n'avoir eux-mêmes aucun accès à cette villa.
Ils se réfèrent sur ce point, à deux pièces :
- d'une part, un courrier du 23 juin 2018 dans lequel Mme [F] [N] épouse [O] indiquerait : «suite au départ de mon frère [Y], j'occupe cette maison et paye depuis 2012 l'intégralité des dépenses» (il n'est pas contesté que, jusqu'en 2012 cette maison constituait la résidence principale de M. [Y] [N]). Toutefois, aucun courrier du 23 juin 2018 n'est visé au bordereau,
- d'autre part, au fait que dans la déclaration relative à la construction de la piscine produite en pièce n°44, elle se désigne comme seule propriétaire du bien, sans préciser qu'il est en indivision.
Ces éléments renseignent toutefois peu sur la réalité de l'occupation de Mme [F] [N] épouse [O], ni sur le caractère privatif et exclusif de cette occupation.
S'agissant des attestations de divers membres de la famille communiquées, si elles renseignent sur le fait que Mme [O] passait des vacances à [Adresse 21], elles n'explicitent pas utilement le point de savoir si les coïndivisaires étaient, ou non, empêchés d'y séjourner. MM. [Y] et [A] [N] ne produisent par ailleurs aucun courrier, mail ou SMS qu'ils auraient adressé à leur soeur faisant part de leur souhait de pouvoir, eux aussi, passer des séjours de vacances à [Adresse 21].
- 10 -
Il est constant, et au demeurant non contesté, que l'appelante réside à [Localité 13], comme l'attestent les multiples pièces qu'elle produit : avis de taxe foncière et d'habitation, certificats de scolarité de ses enfants, Kbis de la société de son époux dont le siège est fixé à leur adresse, notamment. C'est au cours du mois d'août essentiellement et en quelques occasions au cours des petites vacances scolaires qu'elle occupe avec sa famille la maison [Adresse 21]. L'appelante insiste sur le fait qu'elle ne s'est nullement réservé la jouissance privative de la maison, que ses frères en ont les clefs, et qu'ils ont toute liberté pour y séjourner, mais qu'ils préfèrent séjourner à la villa La Poulido située en face, plus grande et plus confortable. Elle précise que les serrures de la [Adresse 21] n'ont jamais été changées et les parties ont un discours contradictoire relativement à la possession desdites clefs. S'agissant des travaux que l'appelante a effectués, elle indique avoir voulu rendre la maison plus confortable et valoriser le patrimoine de l'indivision.
Au vu de ces éléments, il s'avère que l'occupation de la maison par Mme [F] [N] épouse [O] était en tout état de cause très ponctuelle, mais surtout, qu'il n'est pas établi que ses frères aient été empêchés d'y séjourner à leur tour, ni même qu'ils en aient émis le souhait, aucune pièce ne permettant de tirer une quelconque conclusion en ce sens.
Il s'ensuit que le jugement doit être infirmé en ses dispositions ayant mis une indemnité d'occupation à la charge de Mme [F] [N] épouse [O].
B) Sur la demande de Mme [F] [N] épouse [O] au titre des travaux d'amélioration :
Par application de l'article 815-13 du code civil, lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation.
Il est constant que ces dépenses d'amélioration sont indemnisées en tenant compte de la plus-value du bien au jour où l'indivision prend fin, et que l'indivisaire créancier de l'indivision peut réclamer une indemnité égale à la plus forte des deux sommes représentant respectivement la dépense faite et le profit subsistant.
L'appelante fait valoir un grand nombre de travaux d'amélioration apportés par elle à la villa [Adresse 21], réglés par ses seuls soins, dont elle demande l'indemnisation.
Les intimés sont relativement taisants et à tout le moins contradictoires sur cette demande, disant tout à la fois que Mme [N] épouse [O] ne justifierait aucunement des travaux effectués, ni de leur valeur, ni de la plus-value apportée, ajoutant néanmoins qu'elle a communiqué dans le cadre de l'expertise lesdits justificatifs, dont l'expert déduit une plus-value de 89 600 euros, et que, même s'ils contestent le principe d'une plus-value apportée par une piscine au lieu d'une pinède, ils entendent s'en remettre à l'avis de l'expert sur ce point et qu'il conviendra donc de retenir cette somme, alors que le dispositif de leurs écritures se borne à solliciter le débouté de Mme [F] [N] épouse [O] de toutes ses demandes.
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Il est indéniable, au vu des multiples éléments produits par Mme [F] [N] épouse [O], tant devant la cour que devant l'expert, que celle-ci a financé des travaux majeurs, non sérieusement contestables, et, notamment :
. la création d'une piscine et d'une «plage»,
. des clôtures côtés sud et ouest,
. une allée dallée,
. un allée gravillonnée,
. création de 2 terrasses.
L'expert chiffre ces travaux à la somme de 89 600 euros.
Mme [F] [N] épouse [O] sollicite, à titre principal, que soit retenue non pas la dépense faite, soit 89 600 euros, mais le profit subsistant qui serait supérieur et qu'elle évalue à 112 000 euros, soit la somme dont la valeur de la maison serait augmentée à raison desdits travaux.
Toutefois, les calculs qu'elle propose, au vu d'estimations moyennes de l'évolution des prix de l'immobilier, prise de façon nationale et globale, renseignent peu sur le bien spécifique dont il s'agit, et dont l'expert a relevé qu'il s'agissait d'une «villa de 118 m² entièrement à rénover, quand bien même elle est située dans un quartier coté».
Il y donc lieu de retenir la proposition subsidiaire de l'appelante, qui correspond au chiffrage de l'expert, et de dire qu'elle est créancière envers l'indivision d'une somme de 89 600 euros au titre des dépenses d'amélioration de la villa [Adresse 21].
Le jugement est amendé en ce sens.
C) Sur la demande de Mme [F] [N] épouse [O] au titre des dépenses de conservation :
Par application de l'article 815-13 alinéa 2 du code civil, il doit être tenu compte à l'indivisaire des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation des biens indivis, encore qu'elles ne les aient point améliorés.
Il a été déterminé ci-dessus que les demandes présentées par Mme [F] [N] en ses dernières écritures au titre des dépenses de conservation sont recevables au sens de l'article 910-4 du code civil.
En revanche, la question de la prescription quinquennale, évoquée par les parties dans le cadre de leur argumentaire relatif à l'indemnité d'occupation, trouve aussi ici à s'appliquer.
En effet, la prescription quinquennale tirée de l'article 2224 du code civil s'applique aux demandes de créances sur une indivision successorale, de sorte que Mme [F] [N] épouse [O], qui a formé sa demande au titre des dépenses de conservation par des premières écritures du 9 septembre 2020, ne peut solliciter la prise en compte des frais par elle engagés antérieurement au 9 septembre 2015.
Les intimés demandent, en leur dispositif, le débouté de toutes demandes de leur soeur et, partant, de sa demande au titre de toutes les dépenses de conservation invoquées.
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Toutefois, en page 20 de leurs écritures, leur propos est tout autre : ils ne contestent en effet nullement le fait que l'ensemble de ces frais ont été supportés par leur soeur. Ils considèrent toutefois que, dès lors qu'elle avait la jouissance exclusive du bien auquel ces dépenses sont rattachées, elle ne peut en solliciter le remboursement, à l'exclusion de la seule taxe foncière.
Toutefois, il a été déterminé ci-dessus que Mme [F] [N] épouse [O] n'avait pas eu la jouissance exclusive et privative de la villa [Adresse 21]. Au demeurant, quand bien même cela aurait été le cas, cette jouissance exclusive se résoudrait par le mécanisme de l'indemnité d'occupation, et non par l'imputation au seul bénéficiaire de la jouissance du bien, de l'ensemble des dépenses de conservation.
Il y a donc lieu d'examiner, dans le détail, les frais au titre desquels il est sollicité que soit fixée une créance sur l'indivision, en retenant les seules dépenses de conservation engagées à compter du 9 septembre 2015.
' Impôts locaux :
S'agissant des impôts locaux, Mme [F] [N] produit les avis de taxes foncières :
. 2015 : 889 euros,
. 2016 : 1 325 euros,
. 2017 : 1 337 euros,
. 2018 : 1 146 euros,
. 2019 : 1 172 euros,
. 2020 : 1 186 euros,
. 2021 : 1 189 euros,
. 2022 : 1 228 euros,
total : 9 472 euros.
Elle produit aussi les avis de taxe d'habitation :
. 2015 : 917 euros,
. 2016 : 1 397 euros,
. 2017 : 1 402 euros,
. 2018 : 1 212 euros,
. 2019 : 1 236 euros,
. 2020 : 1 251 euros,
. 2021 : 1 165 euros,
. 2022 : 1 203 euros,
total : 9 783 euros.
' Frais d'assurance :
S'agissant des frais d'assurance de la maison, l'appelante produit en pièces n°20 et 20 bis les justificatifs du coût de l'assurance habitation entre 2013 et 2020 (décompte non contesté) et les avis d'échéances pour les années 2013 à 2022.
Tenant compte des effets de la prescription quinquennale, il y a lieu de retenir le décompte suivant :
. 2015 : 454,42 euros
. 2016 : 318,15 euros,
. 2017 : 363,01 euros,
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. 2018 : 374,24 euros,
. 2019 : 383,[Cadastre 11] euros,
. 2020 : 392,[Cadastre 11] euros,
. 2021 : 401,03 euros,
. 2022 : 409,29 euros,
soit un total de 3 097,02 euros.
' Charges du lotissement :
S'agissant des charges du lotissement «Les Côteaux de [Localité 20]» au sein duquel se situe la villa [Adresse 21], Mme [N] épouse [O] produit en pièce n°21 les justificatifs afférents (aucune contestation n'est émise sur ces pièces), pour un montant total de 2 490 euros entre 2013 et 2020.
Compte tenu des effets de la prescription quinquennale, il est retenu le décompte suivant :
. 2015 : 159,24 euros,
. 2016 : 173,68 euros,
. 2017 : 173,68 euros,
. 2018 : 174,22 euros,
. 2019 et 2020 : total de 480 euros
soit au total : 1 160,82 euros
' Travaux divers :
Mme [F] [N] évoque un certain nombre de travaux de réparations, en se référant à sa pièce n°15, à laquelle sont annexées un certain nombre de factures. Y figurent notamment des factures des travaux d'amélioration déjà évoqués ci-dessus (la piscine notamment).
Sont dûment justifiées, par les factures afférentes, les dépenses de conservation suivantes engagées à compter du 9 septembre 2015 :
. reprise de l'étanchéité de la piscine suite aux dégâts dus à une tempête courant novembre 2015 : 12 708 euros (facture du 15 juillet 2016),
. remplacement du chauffe-eau 300 litres : 1 125 euros (facture du 19 juillet 2019).
La facture de 659 euros du 19 juillet 2022 invoquée (réparation de fuite dans la cave et changement du ballon de 100 L) n'est pas produite aux débats de sorte que la cour ne peut s'assurer de la réalité de cette dépense. La demande est rejetée.
Il s'ensuit que les dépenses de conservation au titre des réparations de la villa [Adresse 21] s'établissent à un total de 13 833 euros.
' Redressement fiscal :
Mme [F] [N] argue avoir, en 1991, réglé les frais d'un redressement fiscal à hauteur de 156 994 francs.
Sa demande à ce titre est prescrite.
Les postes évoqués ci-dessus (impôt locaux, assurance, charges du lotissement, travaux de réparation) constituent assurément des dépenses de conservation du bien immobilier au sens du texte susvisé.
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Il n'est pas sérieusement contestable que ces dépenses ont été réglées par Mme [F] [N] épouse [O] seule, alors qu'elles relevaient de l'indivision toute entière.
Dans ces conditions, il lui en sera tenu compte, pour un montant total de 37 345,84 euros (9 472 + 9 783 +3 097,02 + 1 160,82 +13 833). La créance de Mme [F] [N] épouse [O] envers l'indivision au titre des dépenses de conservation s'élève donc à cette somme de 37 345,84 euros, le surplus des prétentions à ce titre étant prescrit.
Le jugement est encore amendé en ce sens.
D) Sur la demande de M. [Y] [N] relative aux travaux d'amélioration :
Les parties s'accordent sur le fait qu'il doit être tenu compte à M. [Y] [N] des travaux qu'il a effectués dans la villa [Adresse 21].
M. [Y] [N] forme cette demande sur le fondement des dépenses de conservation (article 815-13 alinéa 2 du code civil), mais, compte tenu de la nature desdites dépenses (voir travaux listés ci-dessous), il s'agit en réalité de dépenses d'amélioration (article 815-13 alinéa 1 du code civil).
M. [Y] [N] demande que sa créance à ce titre soit fixée à la somme de 9 600 euros. Dans le corps de ses écritures, il évoque la somme de 9 400 euros «telle que retenue par l'expert» (conclusions page 21).
Mme [F] [N] épouse [O] demande que cette créance soit fixée à 9 300 euros comme retenue par l'expert.
La lecture des conclusions expertales montre que les travaux réalisés par M. [Y] [N] dans la villa [Adresse 21] (remplacement des fenêtres ou porte-fenêtres de la cuisine, du séjour et d'une chambre et remplacement de la porte du garage) sont chiffrés à 9 300 euros.
Il convient d'entériner cette somme, qui n'est pas autrement et utilement contestée, et de dire que, par application de l'article 815-13 du code civil, M. [Y] [N] est créancier envers l'indivision d'une somme de 9 300 euros.
E) Sur les demandes de Mme [F] [N] en attribution préférentielle et fixation de la valeur de la villa :
Les dernières conclusions d'appel de Mme [F] [N] contiennent, en leur dispositif, deux demandes nouvelles (retenues pour recevables au vu des observations procédurales préliminaires) :
- l'une tendant à ce que soit ordonnée l'attribution préférentielle, à son profit, de la villa [Adresse 21],
- l'autre tendant à ce que la valeur de la villa soit fixée à 740 000 euros telle que retenue par l'expert, pour les opérations de comptes et de liquidation.
Ces demandes ne sont toutefois pas reprises ni explicitées dans le corps des écritures et n'apparaissent qu'au dispositif. Leur fondement juridique, notamment pour ce qui concerne l'attribution préférentielle, n'est pas précisé non plus.
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En tout état de cause, la demande d'attribution préférentielle ne pourrait être fondée que sur les dispositions de l'article 831-2 1° du code civil qui prévoient que l'héritier coproprétaire peut demander l'attribution préférentielle de la propriété qui lui sert effectivement d'habitation s'il y avait sa résidence à l'époque du décès.
Il a été déterminé ci-dessus que Mme [F] [N] épouse [O] résidait à [Localité 13].
Dans ces conditions, la cour ne peut que rejeter la demande.
Il s'ensuit que le jugement est confirmé en ce qu'il ordonne la licitation de la villa [Adresse 21], étant observé que, s'il est prévu une mise à prix de 856 000 euros, le cahier des charges que le notaire devra établir par application de l'article 1275 du code de procédure civile pourra prévoir les conditions de baisse de la mise à prix à défaut d'enchères. En outre, le jugement prévoit expressément que ce cahier des charges comportera une clause d'attribution permettant à l'un des colicitants de faire une offre d'acquisition.
III- Sur les demandes relatives à la maison [Adresse 22] :
Mme [F] [N] épouse [O] demande à la cour de :
- fixer à la somme de 3 805 euros par mois, l'indemnité d'occupation due par M. [Y] [N] dans le cadre des opérations de liquidation de l'immeuble indivis à usage d'habitation sis à [Adresse 12], au titre de son occupation entre le 9 juin 2015 et le 26 mars 2017, sur le fondement des dispositions de l'article 815-9 al. 2 du code civil,
- fixer à la somme de 3 805 euros par mois, l'indemnité d'occupation due par MM. [A] et [Y] [N] à l'indivision dans le cadre des opérations de liquidation de l'immeuble indivis à usage d'habitation sis à [Adresse 12], au titre de leur occupation entre le 15 avril 2017 et la date du partage, sur le fondement des dispositions de l'article 815-9 al. 2 du code civil.
S'agissant de cette seconde demande, formée notamment à l'encontre de [A] [N], il s'évince de l'argumentaire de l'appelante qu'elle est motivée uniquement :
- par le fait que Mme [P] [N], fille de [A] [N], aurait installé son cabinet d'architecte à la villa La Poulido en mars 2017,
- par le fait qu'une autre fille de [A] [N], [T] [N], y aurait séjourné régulièrement pour réaliser des «shootings photos» de la ligne de maillots de bain qu'elle conçoit.
Mme [F] [N] épouse [O] n'argue nullement de ce que son frère [A], seul co-indivisaire (qualité que les enfants de ce dernier n'ont pas), aurait joui privativement de la maison [Adresse 22].
Sa demande à l'égard de M. [A] [N] ne peut donc qu'être rejetée.
S'agissant de la demande formée à l'encontre de M. [Y] [N], l'appelante soutient que la [Adresse 22] a constitué la résidence principale de ce dernier à compter de 2012 et jusqu'en mars 2017. Elle précise toutefois
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former sa demande d'indemnité d'occupation à compter du 9 juin 2015 à raison du fait que sa déclaration d'appel a été formée le 9 juin 2020 et qu'il y a lieu d'appliquer la prescription quinquennale. C'est toutefois à compter des premières écritures de l'appelante contenant cette demande d'indemnité d'occupation qu'il y lieu d'appliquer la prescription. Ses écritures initiales datant du 8 septembre 2020, l'éventuelle indemnité d'occupation ne pourrait courir qu'à compter du 8 septembre 2015.
Mme [F] [N] épouse [O] produit un certain nombre de documents (mandats de vente notamment) datant de 2015 à 2017, dans lesquels M. [Y] [N] se domicilie à la villa La Poulido.
M. [Y] [N] ne conteste pas que cette maison ait effectivement constitué sa résidence principale à compter de juin 2015 et jusqu'à début 2016 (déménagement à [Localité 18] (83), voir conclusions page 17).
Il fait toutefois valoir que cette occupation n'était pas sans contrepartie, en raison d'une convention passée avec son père le 18 juin 2015.
Aux termes de cette convention, produite en pièce °26, il est convenu «entre M. [J] [N], usufruitier de la propriété [Adresse 22], et son fils M. [Y] [N], les dispositions suivantes :
[Y] doit :
. être le gardien de la propriété,
. procéder aux petits entretiens intérieurs,
. entretenir les plantations (arrosage, remplacement si nécessaire),
. règlement de la taxe d'habitation,
. souscrire une assurance comprenant le vol,
d'autre part M. [J] [N] jouirait du rez-de-chaussée comprenant chambre, salle de bains et entrée et procédera aux règlements des taxes foncières et assurances».
L'appelante ne fait aucune observation sur cette convention, qui démontre que la jouissance des lieux, partielle de surcroît, par M. [Y] [N], n'était pas sans contrepartie.
De plus, elle n'argue nullement avoir elle-même été empêchée de séjourner à La Poulido, ni même avoir envisagé de le faire, aucune pièce en ce sens n'étant communiquée.
Il s'ensuit que Mme [F] [N] épouse [O] est déboutée de sa demande au titre d'une indemnité d'occupation de la villa La Poulido par ses frères.
IV- Sur les demandes relatives aux appartements sis [Adresse 14] :
A) Sur la demande au titre d'une indemnité d'occupation à la charge de M. [Y] [N] :
M. [Y] [N] occupe un appartement de deux pièces sis au [Adresse 14] appartenant à l'indivision.
Les parties s'accordent pour que soit mise à sa charge une indemnité d'occupation de 440 euros par mois en application de l'article 815-9 alinéa 2 du code civil.
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Mme [F] [N] épouse [O] demande que cette indemnité coure à compter du 1er septembre 2016, tandis que M. [Y] [N] demande de faire courir cette indemnité à compter du mois d'avril 2017.
Le demanderesse au titre de cette indemnité d'occupation n'étaye par aucun argument ni pièce la date à partir de laquelle elle souhaite faire courir cette indemnité, de sorte que la somme de 440 euros par mois sur laquelle les parties s'accordent courra à compter du 1er avril 2017 comme proposé par M. [Y] [N].
Le jugement est amendé en ce sens.
B) Sur la demande de M. [Y] [N] au titre de la rémunération de la gérance de l'indivision :
Par application de l'article 815-12 du code civil, l'indivisaire qui gère un ou plusieurs biens indivis a droit à la rémunération de son activité, dans des conditions fixées à l'amiable ou, à défaut, par décision de justice.
M. [Y] [N] réclame, à ce titre, une indemnité de gestion mensuelle d'un montant de 358,27 euros à compter du mois d'avril 2017.
Il fait valoir que, depuis le décès de son père en avril 2017, il gère l'immeuble sis [Adresse 14] appartenant à l'indivision, en tant que gardien et gestionnaire du parc locatif. Il soutient que son frère et lui-même ont sollicité Mme [F] [N] épouse [O] pour mettre en place un mandat de gestion à une tierce personne, ce qu'elle aurait refusé.
L'appelante s'oppose à la demande, en faisant valoir que, précisément, un mandat de gestion a bien été mis en place le 13 décembre 2017 au profit de l'étude notariale de l'Arquebuse à [Localité 15].
Elle produit ce document en pièce n°25 ainsi qu'un courrier de ladite étude en date du 13 janvier 2021 (pièce n°26) aux termes duquel il est confirmé que «des mandats de gestion ont été signés par M. [Y] [N] le 13 décembre 2017, M. [A] [N] le 18 janvier 2018 et vous-même (Mme [F] [N] épouse [O]) le 23 janvier 2018. L'office notarial a pour mandat de :
. procéder à la visite, et à l'expertise de la valeur locative du bien à remettre en location,
. constituer le dossier nécessaire,
. faire toute publicité par annonce, affiche, mailing ou autres, et rechercher, tous locataire, renseigner la clientèle, assurer les visites et établir le bail, moyennant un honoraires,
. encaisser le loyer et les charges récupérables et procéder aux régularisation de charges,
. recevoir toutes factures, les régler,
. remplir toute déclaration de sinistre,
. recouvrer les éventuels impayés, en exerçant les poursuites qui sont nécessaires en ayant recours à un huissier,
. demander auprès de toute entreprise, les devis nécessaires pour les travaux qui sont à exécuter étant convenu que l'office notarial pour assurer la gestion aura la possibilité de commander tous travaux qui ne dépasseront pas la somme de 152,45 euros TTC,
. procéder à la restitution de la caution, étant précisé que l'état des lieux sera dressé par l'étude».
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L'affirmation des intimés selon laquelle Mme [F] [N] épouse [O] aurait refusé la délégation de la gestion à un tiers est donc inexacte.
M. [Y] [N] convient, en définitive, que ce mandat de gestion existe, mais soutient que l'office notarial n'est pour autant pas syndic de l'immeuble et compte sur lui au quotidien pour assurer sur place la relation avec les entreprises pour les interventions. Il indique être aussi chargé de sortir les poubelles cinq jours par semaine. Il évoque le fait qu'une association Partage et Travail a, un temps, assuré cette prestation jusqu'au confinement de mars 2020 et vise à cet égard une pièce n°50, laquelle est toutefois sans lien avec cette problématique (il s'agit de la déclaration de construction de la piscine de la villa [Adresse 21] par Mme [F] [N]).
La cour observe de surcroît que M. [Y] [N] n'avait d'ailleurs pas formé cette demande d'indemnité de gestion en première instance, alors qu'il lui eût été loisible de le faire.
Il sera aussi relevé qu'aux termes de ses écritures, M. [Y] [N] se domicilie dans le Var, à [Localité 18], de sorte que la réalité de sa présence constante à [Localité 15] interroge.
En définitive, il s'évince de ces éléments que l'essentiel de la gestion du parc locatif châlonnais du 5/7 allée [L] [G] est assuré par l'office notarial de l'Arquebuse et que l'activité peu étayée prétendument déployée par M. [Y] [N] n'est pas telle qu'elle ouvrirait droit à une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 815-12 précité.
La demande est donc rejetée.
V- Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Le sens du présent arrêt, aux termes duquel chacun obtient pour partie gain de cause, conduit à dire que les parties conserveront la charge de leurs dépens d'appel, les frais d'expertise étant partagés par moitié. Les demandes en frais irrépétibles sont rejetées. La décision entreprise sera par ailleurs confirmée en sa disposition relative aux dépens.
* * * *
Par ces motifs,
- Infirme le jugement rendu le 19 février 2020 par le tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne en ses dispositions ayant fixé à la somme de 2 500 euros par mois depuis juillet 2012 et ce jusqu'à licitation du bien, l'indemnité d'occupation due par Mme [F] [N] épouse [O] à l'indivision au titre de l'occupation de la [Adresse 21] ;
Statuant à nouveau sur ce point,
- Déboute MM. [Y] et [A] [N] de leur demande d'indemnité d'occupation formée à l'encontre de Mme [F] [N] épouse [O] concernant la villa [Adresse 21] ;
- Confirme le jugement pour le surplus ;
Y ajoutant,
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- Dit que, par application de l'article 815-13 alinéa 1 du code civil, Mme [F] [N] épouse [O] est créancière envers l'indivision d'une somme de 89 600 euros au titre des travaux d'amélioration qu'elle a financés dans la villa [Adresse 21] ;
- Dit que, par application de l'article 815-13 alinéa 2 du code civil, Mme [F] [N] épouse [O] est créancière envers l'indivision d'une somme de 37 345,84 euros au titre des dépenses de conservation (impôt locaux, assurances, charges du lotissement, travaux d'entretien et de réparations) qu'elle a engagées relativement à la villa [Adresse 21] ;
- Déclare prescrites les demandes de Mme [F] [N] au titre d'une créance sur l'indivision en lien avec le redressement fiscal de 1991 ainsi que le surplus de ses demandes au titre des dépenses de conservation, à l'exception de la demande afférente à une facture du 19 juillet 2022 d'un montant de 659 euros, demande non prescrite mais rejetée au fond ;
- Dit que, par application de l'article 815-13 alinéa 1 du code civil, M. [Y] [N] est créancier envers l'indivision d'une somme de 9 300 euros au titre des travaux d'amélioration qu'il a pris en charge dans la villa [Adresse 21] ;
- Fixe à la somme de 440 euros par mois le montant de l'indemnité d'occupation due par M. [Y] [N] pour la jouissance privative de l'appartement sis à [Localité 15], et ce à compter du 1er avril 2017 ;
- Déboute M. [Y] [N] de sa demande tendant au bénéfice d'une indemnité de gestion relativement à l'activité de location des appartements sis [Adresse 14] ;
- Déboute Mme [F] [N] épouse [O] de sa demande tendant à voir fixer à la somme de 3 805 euros par mois l'indemnité d'occupation due par [Y] [N] au titre de son occupation de la villa La Poulido entre le 9 juin 2015 et le 26 mars 2017 ;
- Déboute Mme [F] [N] épouse [O] de sa demande tendant à voir fixer à la somme de 3 805 euros par mois l'indemnité d'occupation due par [A] et [Y] [N] à l'indivision, au titre de leur occupation de la villa La Poulido entre le 15 avril 2017 et la date du partage ;
- Déboute Mme [F] [N] de sa demande d'attribution préférentielle de la villa [Adresse 21] et de sa demande tendant à en fixer la valeur à 740 00 euros pour les opérations de comptes et de liquidation ;
- Rejette les demandes en frais irrépétibles ;
- Laisse à chaque partie la charge de ses dépens d'appel, et dit que les frais d'expertise seront partagés par moitié entre, d'une part, Mme [F] [O] épouse [N], et, d'autre part, MM. [Y] et [A] [N].
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT