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14/06/2022 | FRANCE | N°21/02274

France | France, Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section jex, 14 juin 2022, 21/02274


ARRÊT N°

du 14 juin 2022







(B. P.)

















N° RG 21/02274

N° Portalis

DBVQ-V-B7F-FDDA







- M. [O] [U]

- M. [G] [U]



C/



S.A. FRANFINANCE





































Formule exécutoire + CCC

le 14 juin 2022

à :

- la SCP DELGENES VAUCOIS JUSTINE DELGENES

- la SCP LIEG

EOIS





COUR D'APPEL DE REIMS



CHAMBRE CIVILE



CONTENTIEUX DE L'EXÉCUTION



ARRÊT DU 14 JUIN 2022





Appelant :

d'un jugement rendu par le Juge de l'exécution de CHARLEVILLE-MEZIERES le 8 décembre 2021



- Monsieur [O] [U]

[Adresse 3]

[Localité 1]



Comparant, concluant par la SCP DELGENES VAUCOIS JUSTINE DELGENES, avocats au...

ARRÊT N°

du 14 juin 2022

(B. P.)

N° RG 21/02274

N° Portalis

DBVQ-V-B7F-FDDA

- M. [O] [U]

- M. [G] [U]

C/

S.A. FRANFINANCE

Formule exécutoire + CCC

le 14 juin 2022

à :

- la SCP DELGENES VAUCOIS JUSTINE DELGENES

- la SCP LIEGEOIS

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE

CONTENTIEUX DE L'EXÉCUTION

ARRÊT DU 14 JUIN 2022

Appelant :

d'un jugement rendu par le Juge de l'exécution de CHARLEVILLE-MEZIERES le 8 décembre 2021

- Monsieur [O] [U]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Comparant, concluant par la SCP DELGENES VAUCOIS JUSTINE DELGENES, avocats au barreau des ARDENNES

Intervenant volontaire :

- Monsieur [G] [U]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Comparant, concluant par la SCP DELGENES VAUCOIS JUSTINE DELGENES, avocats au barreau des ARDENNES

Intimée :

S.A. FRANFINANCE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal,

[Adresse 5]

[Localité 6]

Comparant, concluant par la SCP LIEGEOIS, avocats au barreau des ARDENNES

DÉBATS :

A l'audience publique du 10 mai 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 juin 2022, sans opposition de la part des conseils des parties et en application de l'article 786 du code de procédure civile, M. Benoît PETY, Président de chambre a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la cour dans son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Benoît PETY, Président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, Conseiller

Madame Christel MAGNARD, Conseiller

GREFFIER lors des débats et du prononcé

Mme Sophie BALESTRE, Greffier

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour le 14 juin 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par M. Benoît PETY, Président de chambre, et Mme Sophie BALESTRE, Greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Exposé du litige, de la procédure et des prétentions des parties :

Par procès-verbal dressé le 21 avril 2021 par le ministère de Me [X] [L], huissier de justice associé à [Localité 7], la SA Franfinance Contentieux National FAE, venant aux droits de la Société Générale, a fait procéder à une saisie-vente à l'encontre de M. [O] [U] en vertu d'un jugement prononcé le 29 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières et aux fins de recouvrement d'une créance d'un montant de 28 250,07 euros. Cette voie d'exécution a été dénoncée le 29 avril suivant au débiteur saisi.

Par acte d'huissier du 26 mai 2021, M. [U] a fait assigner la SA Franfinance, venant aux droits de la Société Générale, devant le juge de l'exécution au tribunal judiciaire de Charleville-Mézières à l'audience du 10 juin 2021 aux fins de voir annuler cette saisie-vente.

M. [O] [U], et M. [G] [U], intervenant volontaire, sollicitaient du juge de l'exécution qu'il :

- A titre principal, déclare recevable l'intervention volontaire de M. [G] [U] et prononce l'annulation de la saisie-vente pratiquée le 21 avril 2021,

- A titre subsidiaire, prononce l'insaisissabilité du bien saisi,

- Ordonne la distraction de la saisie contestée de l'ensemble des meubles meublants appartenant à M. [G] [U],

- En tout état de cause, condamne la SA Franfinance à payer à M. [O] [U] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- Condamne la SA Franfinance à payer à M. [O] [U] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la SA Franfinance aux dépens.

La personne morale défenderesse demandait pour sa part au magistrat de :

- Débouter M. [O] [U] de sa demande,

- Condamner ce dernier à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner M. [U] aux dépens.

Par jugement du 8 décembre 2021, le juge de l'exécution au tribunal judiciaire de Charleville-Mézières a notamment :

- déclaré irrecevable l'intervention volontaire de M. [G] [U],

- débouté M. [O] [U] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné M. [O] [U] à payer à la SA Franfinance la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [U] aux dépens.

MM. [O] et [G] [U] ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 21 décembre 2021, leur recours portant sur l'entier dispositif de la décision attaquée.

En l'état de leurs dernières écritures signifiées par RPVA le 11 avril 2022, les appelants demandent par voie d'infirmation à la cour de :

- Constater l'intervention volontaire de M. [G] [U],

- Prononcer la nullité de la saisie-vente réalisée à l'initiative de la SA Franfinance à l'égard de M. [O] [U],

A défaut,

- Prononcer l'insaisissabilité du bien saisi,

- Distraire de la saisie contestée l'ensemble des biens meubles meublants et appartenant à M. [G] [U],

En toute hypothèse,

- Condamner la SA Franfinance à payer à M. [O] [U] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- Condamner la SA Franfinance à verser à M. [O] [U] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de leurs prétentions, les parties appelantes exposent que :

1. La société Franfinance a agi en l'absence de titre exécutoire définitif. En effet, il a été relevé appel du jugement du juge des contentieux de la protection du 29 janvier 2021. Or, cette décision n'est pas revêtue de l'exécution provisoire, la décision ne le mentionnant pas, et alors que cette exécution provisoire ne peut être de droit, le nouvel article 514 n'étant pas applicable à l'instance puisque l'assignation initiale a été délivrée avant le 1er janvier 2020, date d'entrée en vigueur de ce nouveau texte.

2. Le bien saisi était insaisissable puisqu'il a été saisi dans un logement propriété des parents de M. [U] et qu'il n'appartenait pas à ce dernier. Le logement occupé par M. [O] [U] au [Adresse 3] est un meublé, les objets meublants s'y trouvant étant par définition loués avec le local.

3. La procédure de saisie-vente n'est pas régulière en ce que l'huissier instrumentaire a réalisé la voie d'exécution en l'absence de M. [U] et du tiers, en se contentant de regarder dans l'habitation par la fenêtre et depuis la rue.

4. La saisie-vente contestée est dénuée de sens et totalement abusive. Cela doit être sanctionné par la fixation en faveur du débiteur saisi de dommages et intérêts.

* * * *

La SA Franfinance pour sa part sollicite de la juridiction du second degré qu'elle déboute MM. [O] et [G] [U] de leurs prétentions et confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré. Y ajoutant, elle forme une demande de condamnation des consorts [U] à lui verser la somme de 2 000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile, et de les condamner sous la même solidarité en tous les dépens.

La personne morale intimée énonce en effet que :

1. L'huissier de justice qu'elle a mandaté a bien agi en vertu d'un titre exécutoire, l'exécution provisoire s'attachant de plein droit à la décision du 29 janvier 2021 conformément à l'article 514 du code de procédure civile. Il n'était en aucun cas nécessaire que le juge des contentieux de la protection assortisse sa décision de l'exécution provisoire puisqu'elle est de droit. Si le magistrat avait eu l'intention de l'écarter, il l'aurait dit explicitement.

2. Le 'petit canapé saisi depuis la rue' était parfaitement saisissable. L'adresse de M. [O] [U] mentionnée sur le jugement est celle à laquelle la signification de la décision a été réalisée et c'est aussi en ce lieu que se domicilie le débiteur. Il ne s'agit donc pas du domicile d'un tiers. L'attestation de son père est par ailleurs sujette à caution. Quand bien même ce logement serait la propriété de M. [G] [U], les biens meublants qui s'y trouvent sont présumés appartenir à l'occupant. Rien n'établit en l'état le contraire.

3. La saisie-vente est régulière. Rien n'interdit à l'huissier instrumentaire, en l'absence du débiteur saisi, de saisir des biens vus par la fenêtre.

* * * *

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 26 avril 2022.

* * * *

Motifs de la décision :

- Sur l'intervention volontaire de M. [G] [U] :

Attendu que M. [G] [U] conteste l'irrecevabilité de son intervention volontaire telle qu'appréciée par le premier juge, l'appelant faisant état de ce qu'il est propriétaire des lieux occupés par son fils [O] ainsi que de tous les biens meubles s'y trouvant, son fils ne possédant strictement rien, le logement étant par surcroît un meublé ;

Que l'intéressé produit devant la cour comme en première instance une attestation rédigée de sa main le 21 septembre 2021 mais qui n'a de fait aucune valeur probante s'agissant d'un document établi par la partie qui s'en prévaut en justice ;

Que M. [G] [U] ne communique du reste aucun contrat de bail écrit conclu avec son fils et dont il résulterait que le logement du [Adresse 3] est effectivement un meublé de sorte que la présomption selon laquelle 'en fait de meubles, possession vaut titre' n'est nullement renversée par l'intéressé, M. [O] [U] étant réputé propriétaire des meubles meublants se trouvant dans son logement, dont le canapé objet de la saisie ;

Qu'en définitive, M. [G] [U] ne justifie d'aucun intérêt à intervenir à l'instance de sorte que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il déclare irrecevable l'intervention volontaire du père du saisi ;

- Sur l'absence de titre exécutoire :

Attendu que la lecture des mentions du procès-verbal de saisie-vente du 21 avril 2021 enseigne que l'huissier instrumentaire vise 'la grosse dûment en forme exécutoire d'un jugement du tribunal judiciaire de Charleville-Mézières en date du 29 janvier 2021, statuant contradictoirement et en premier ressort précédemment signifié et à ce jour définitif' ;

Que la lecture de ce jugement révèle que le juge des contentieux de la protection au tribunal judiciaire de Charleville-Mézières a notamment condamné M. [O] [U] à payer à la SA Franfinance la somme principale de 27 292,99 euros au titre du solde débiteur d'un compte de dépôt, avec intérêts au taux légal à compter de la décision, outre aux dépens et au versement d'une indemnité de procédure de 200 euros ;

Qu'aucune mention relative à l'exécution provisoire n'apparaît dans cette décision, ni au dispositif ni dans les motifs ;

Qu'il est justifié par la partie appelante de ce qu'elle a aussi relevé appel de ce jugement du 29 janvier 2021 par déclaration du 26 février 2021, son recours portant sur l'entier dispositif du jugement ;

Que la société Franfinance ne peut être suivie en ses développements consistant à soutenir que le juge des contentieux de la protection n'avait pas à assortir sa décision de l'exécution provisoire, celle-ci étant de droit au sens de l'article 514 du code de procédure civile ;

Qu'en effet, si cet article pose le principe d'une exécution provisoire de droit pour toutes les décisions de première instance à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement, encore faut-il que ce nouvel article s'applique bien en l'occurrence ;

Que cet article est issu du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, plus précisément de l'article 3 du décret, lequel précise en son article 55-II que l'article 3 s'applique aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020 ;

Qu'il n'est pas discuté que l'instance engagée par la SA Franfinance et qui a donné lieu au prononcé du jugement précédemment visé du 29 janvier 2021 a été introduite par acte d'huissier délivré le 8 novembre 2019 à M. [O] [U] de sorte que l'article 514 du code de procédure issu du décret du 11 décembre 2019 ne s'applique pas à ladite cause ;

Que la question de l'exécution provisoire relevait donc de l'ancien article 514 qui énonce que l'exécution provisoire ne peut pas être poursuivie sans avoir été ordonnée si ce n'est pour les décisions qui en bénéficient de plein droit ;

Que le jugement du 29 janvier 2021 n'étant pas explicitement assorti de l'exécution provisoire et la société Franfinance n'expliquant pas en quoi cette décision serait revêtue de l'exécution provisoire de droit au sens de l'ancien article 514 du code de procédure civile, force est de considérer qu'à la date du procès-verbal de saisie-vente, soit le 21 avril 2021, le titre visé dans l'acte d'huissier contesté n'était aucunement exécutoire et pas davantage définitif, aucune décision de la cour n'ayant à cette date été prononcée ;

Qu'il s'ensuit que la saisie-vente est irrégulière faute de viser un titre effectivement exécutoire et que le procès-verbal du 21 avril 2012 doit être annulé ;

Que le jugement déféré doit ainsi être infirmé en ce qu'il déboute M. [O] [U] de toutes ses demandes ;

- Sur les dommages et intérêts sollicités par M. [O] [U] :

Attendu que l'appréciation erronée qu'une partie peut faire de ses droits ne caractérise pas la mauvaise foi ni l'intention de nuire ni même une erreur grossière équipollente au dol ;

Que c'est donc à raison que le premier juge a débouté M. [O] [U] de sa demande de dommages et intérêts dirigée contre la SA Franfinance, la décision dont appel étant à cet égard confirmée ;

- Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Attendu que l'issue de l'instance devant la cour et le sens du présent arrêt conduisent à mettre à la charge de la personne morale poursuivante les dépens d'appel comme ceux de première instance, le jugement entrepris étant en cela infirmé ;

Que l'équité ne peut justifier l'indemnité de procédure arrêtée par le premier juge au profit de la société Franfinance, laquelle est déboutée de sa demande à ce titre et la décision querellée infirmée ;

Que cette même considération commande à hauteur de cour d'arrêter en faveur de M. [O] [U] une indemnité pour frais irrépétibles de 1 500 euros, la société débitrice de cette somme étant déboutée de sa prétention indemnitaire à cette même fin ;

* * * *

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

- Confirme le jugement déféré en ses dispositions déclarant M. [G] [U] irrecevable en son intervention volontaire et déboutant M. [O] [U] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- Infirme pour le surplus ;

Prononçant à nouveau,

- Annule le procès-verbal de saisie-vente établi le 21 avril 2021 par Me [X] [L], huissier de justice à [Localité 7], à la demande de la SA Franfinance et à l'encontre de M. [O] [U] ;

- Condamne la SA Franfinance aux entiers dépens tant d'appel que de première instance ;

- Condamne la SA Franfinance à verser à hauteur de cour à M. [O] [U] la somme de 1 500 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile, la personne morale débitrice de cette somme étant elle-même déboutée de sa demande indemnitaire exprimée au même visa tant en cause d'appel qu'en première instance ;

- Dit que la SCP Delgenes-Vaucois-Justine-Delgenes, conseils de M. [O] [U], pourra recouvrer directement contre la partie adverse les dépens dont elle aura fait l'avance sans avoir préalablement reçu de provision, et ce conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier. Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : 1ère chambre section jex
Numéro d'arrêt : 21/02274
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;21.02274 ?
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