ARRET No
du 05 février 2019
R.G : No RG 18/01617 - No Portalis DBVQ-V-B7C-EQLU
GIE GIE TEP CHAMPAGNE-ARDENNE
c/
SAS CM CIC LEASING SOLUTIONS
CEL
Formule exécutoire le :
à :
-SELAS FIDAL
-Maître Claire LEPITRECOUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1o SECTION
ARRÊT DU 05 FÉVRIER 2019
APPELANTE :
d'une ordonnance de référé rendue le 20 juin 2018 par le président du tribunal de grande instance de REIMS,
GIE GIE TEP CHAMPAGNE-ARDENNE
[...]
COMPARANT, concluant par la SELAS FIDAL, avocats au barreau de REIMS
INTIMEE :
SAS CM CIC LEASING SOLUTIONS
[...]
[...]
COMPARANT, concluant par Maître Claire LEPITRE, avocat au barreau de REIMS, et ayant pour conseil Maître Mathieu BOLLENGIER-STRAGIER, avocat au barreau de PARIS.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Francis MARTIN, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Cédric LECLER, conseiller
GREFFIER :
Monsieur MUFFAT-GENDET, greffier, lors des débats et Madame NICLOT, greffier, lors du prononcé,
DEBATS :
A l'audience publique du 11 décembre 2018, où l'affaire a été mise en délibéré au 05 février 2019,
ARRET :
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 05 février 2019 et signé par Monsieur MARTIN, président de chambre, et Madame NICLOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
Par contrat en date du 2 juin 2015, le groupement d'intérêt économique Tep Champagne Ardenne (le groupement) a régularisé auprès de la société General Electric Capital Equipement Finance, ultérieurement devenue la société Cm-Cic Leasing Solutions (la société Cm-Cic), un contrat de location d'un tomographe à émission de positons pour une durée irrévocable de 60 mois, pour un loyer mensuel de 34 062,01 euros toutes taxes comprises (ttc).
Le 4 février 2016, le groupement a émis un chèque d'un tel montant aux fins de règlement du loyer échu le 8 février 2016, qui a été encaissé sur un compte à la banque Barclays à Londres.
Le 4 mars 2016, le groupement a émis un chèque d'un tel montant aux fins de règlement du loyer échu le 8 mars 2016, qui a été encaissé sur un compte à la banque Hsbc à Londres.
Le 2 mars 2017, le groupement a déposé plainte auprès des services de police de Reims pour escroquerie.
Par lettres recommandées en date des 16 mars, 27 mars et 5 juillet 2017, la société Cm-Cic a mis en demeure le groupement de régler les sommes afférentes aux loyers des mois de février et mars 2016.
Par acte d'huissier en date du 22 novembre 2017, la société Cm-Cic a attrait le groupement devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Reims aux fins de le voir condamner à lui payer la somme provisionnelle de 68 124,02 euros, outre pénalités de retard conformes à l'article L. 441-6 alinéa 5 du code de commerce à compter du 16 mars 2017, date de présentation de la mise en demeure, ainsi que 3000 euros au titre des frais irrépétibles.
Le groupement a demandé le débouté intégral des prétentions de la société Cm-Cic, et sa condamnation à lui payer la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles.
Par ordonnance contradictoire en date du 20 juin 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Reims a:
- condamné le groupement à payer à la société Cm-Cic la somme de 68 124,02 euros à titre de provision;
- dit n'y avoir pas lieu à pénalités de retard;
- condamné le groupement à payer à la société Cm-Cic la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles.
Le premier juge a considéré que le locataire avait émis les chèques litigieux en paiement du loyer, et que ceux-ci avaient été apparemment détournés dans des conditions non élucidées, de sorte que le paiement des deux loyers n'avait pas été effectué au profit de la société Cm-Cic.
Il a estimé que l'obligation contractuelle de paiement n'avait pas été éteinte par l'encaissement par un tiers non identifié des sommes devant revenir au bailleur, de sorte qu'il n'existait pas de contestation sérieuse sur le non-paiement des loyers.
Le premier juge a estimé que les soupçons de détournement ou d'escroquerie étaient de nature à écarter toute pénalité à l'égard du groupement, payant habituellement ses loyers sans difficultés.
Le 19 juillet 2018, le groupement a relevé appel de cette ordonnance.
Par ordonnance en date du 5 novembre 2018, le président de la chambre civile de la cour de céans a ordonné la clôture de l'instruction de l'affaire.
Appelée initialement à l'audience de la cour du 20 novembre 2018, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 26 novembre 2018 en raison d'un mouvement de grève des avocats.
A l'audience de la cour du 26 novembre 2018, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 11 décembre 2018 en raison d'un mouvement de grève des avocats.
PRETENTIONS ET MOYENS:
Pour plus ample exposé, il sera expressément renvoyé aux écritures déposées par les parties:
- le 20 septembre 2018 par le groupement, appelant;
- le 2 octobre 2018 par la société Cm-Cic, intimée.
Par voie d'infirmation, le groupement demande à la cour de constater l'existence d'une contestation sérieuse, de débouter la société Cm-Cic de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de deux instances et aux dépens des deux instances, dont distraction au profit de son conseil.
Le groupement soutient l'existence d'une contestation sérieuse, en observant que les deux chèques litigieux, libellés au nom de la société General Electric Capital Equipement, ont bien été encaissés au nom de la société GE Capital le créancier, sans que:
- le fait que les chèques afférents aient été débités en livres sterling ne justifie de l'encaissement par un tiers;
- le fait que des plaintes aient été déposées, tant par son bailleur d'abord que par elle-même ensuite et à la demande de celui-ci, ne justifie ni de l'encaissement des chèques par un tiers, ni du détournement de ceux-ci, ni du défaut d'encaissement par la société Cm-Cic.
Elle fait en outre valoir avoir toujours réglé ses factures dans le délai contractuel de 2 mois, en observant que la société bailleresse a imputé sur les factures de février et mars 2016 les paiements respectivement effectués en avril et mai 2016, soit dans un délai de 2 mois, de telle sorte qu'il n'est démontré aucun défaut de paiement au titre des mois de février et mars 2016.
La société Cm-Cic demande la confirmation de l'ordonnance déférée, sauf à réitérer sa demande tendant à voir assortir la condamnation à paiement des intérêts au taux prévu à l'article L. 441-6 alinéa 8 du code de commerce à compter de la mise en demeure du 16 mars 2017, outre 3000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.
Elle observe qu'en vertu de l'article 1239 ancien du code civil, applicable au litige, pour être valable, le paiement doit être fait au créancier ou à une personne ayant reçu un pouvoir de ce dernier, de sorte que le paiement réalisé entre les mains d'un tiers, sans profiter au créancier, n'est pas une cause d'extinction de la dette.
Elle soutient n'avoir pas bénéficié du paiement des chèques litigieux endossés auprès de banques situées au Royaume-Uni.
Elle observe que les chèques litigieux étaient destinés au paiement des loyers de février et mars 2016, de sorte que les loyers afférents sont demeurés impayés à ce jour.
MOTIVATION:
Il est indifférent que les stipulations contractuelles aient prévu paiement des loyers dans un délai de deux mois, et que la société Cm-Cic ait imputé les loyers dus par le groupement au titre des mois de février et mars 2016 sur les chèques émis par celui-ci en avril et mai 2016, alors que les paiements de deux loyers par les chèques émis par le groupement les 4 février et 4 mars 2016 demeurent litigieux.
Toutefois, le groupement démontre s'être suffisamment libéré de sa créance entre les mains du créancier lui-même.
En effet, il résulte du mail du 16 janvier 2017 émanant de la Société Générale, auprès de laquelle le groupement avait ouvert un compte sur lequel étaient débités les chèques en paiement du loyer du tomographe, que les deux chèques litigieux, libellés au nom de GE Capital Equipement Finance, ont tous deux été encaissés par ce bénéficiaire sur des comptes bancaires des deux banques londoniennes susdites.
Il en résulte la démonstration suffisante de ce que les chèques litigieux ont bien été encaissés par la société General Electric Capital Equipement Finance.
C'est dès lors à tort que le premier juge a considéré que ces chèques avaient été encaissés par un tiers inconnu, de sorte que l'obligation de paiement du locataire n'avait pas été éteinte de ce fait.
La circonstance que ces chèques aient été encaissés pour une contre-valeur en livres sterling se trouve sans emport sur la résolution du présent litige.
Surabondamment il conviendra d'observer que la société General Electric Capital Equipement Finance, n'est qu'ultérieurement devenue la société Cm-Cic Leasing Solutions, sans qu'il puisse être considéré qu'à la date de présentation des chèques litigieux à l'encaissement, cette substitution de dénomination soit déjà intervenue.
Le seul dépôt de plainte du groupement, qui a pas été produit par la société Cm-Cic, est insuffisant à établir la matérialité des détournements des chèques litigieux, et ce quand bien même aurait-il été précédé par la même démarche émanant de la société Cm-Cic.
Il en ressort que ce dépôt de plainte ne s'appuie pas sur d'autres éléments extérieurs aux seules déclarations de la société Cm-Cic. Il en résulte qu'il ne peut pas en être déduit un quelconque aveu par le groupement du bien fondé de la créance litigieuse.
La société Cm-Cic sera déboutée de l'intégralité de ses prétentions, et le jugement sera infirmé de ce chef.
* * * * *
Il sera rappellé que le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes allouées en exécution de l'ordonnance déférée.
L'ordonnance déférée sera infirmée en ce qu'elle a statué sur les dépens et frais irrépétibles.
Y ajoutant, la société Cm-Cic sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles des deux instances, et sera condamnée à payer au même titre au groupement la somme de 3000 euros, et sera condamnée aux dépens des deux instances avec distraction au profit du conseil du groupement.
PAR CES MOTIFS:
la cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions;
Statuant à nouveau:
Déboute la société Cm-Cic Leasing Solutions de l'intégralité de ses prétentions;
Rappelle que le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes allouées en exécution de l'ordonnance déférée;
Déboute la société Cm-Cic Leasing Solutions de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel;
Condamne la société Cm-Cic Leasing Solutions à payer au groupement d'intérêt économique Tep Champagne Ardenne la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel;
Condamne la société Cm-Cic Leasing Solutions aux entiers dépens de première instance et d'appel, et ce avec distraction au profit de la Selas Fidal, conseil du groupement d'intérêt économique Tep Champagne Ardenne, de ceux des dépens de première instance et d'appel dont elle a fait l'avance sans en avoir reçu provision.
Le greffier Le président