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03/07/2018 | FRANCE | N°13/03155

France | France, Cour d'appel de Reims, 03 juillet 2018, 13/03155


ARRET No
du 03 juillet 2018


R.G : No RG 13/03155




SCI D2JM


c/


X...
C...


SARL SARL Q...


SA BANQUE POPULAIRE LORRAINE CHAMPAGNE (BPLC)




CL




Formule exécutoire le :
à :


-SCP DELVINCOURT-CAULIER RICHARD


-Maître Pascal GUILLAUME


-SCP BILLION MASSARD RICHARD SIX THIBAULT


-SCP COLOMES MATHIEU ZANCHICOUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1o SECTION
ARRÊT DU 03 JUILLET 2018


APPELANTE :
d'un jugement rendu le 31 octobre 20

13 par le tribunal de grande instance de TROYES,


SCI D2JM SCI
[...]


COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT-CAULIER RICHARD, avocats au barreau de REIMS


INTIMES :


Monsieur Daniel X...
[...]


...

ARRET No
du 03 juillet 2018

R.G : No RG 13/03155

SCI D2JM

c/

X...
C...

SARL SARL Q...

SA BANQUE POPULAIRE LORRAINE CHAMPAGNE (BPLC)

CL

Formule exécutoire le :
à :

-SCP DELVINCOURT-CAULIER RICHARD

-Maître Pascal GUILLAUME

-SCP BILLION MASSARD RICHARD SIX THIBAULT

-SCP COLOMES MATHIEU ZANCHICOUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1o SECTION
ARRÊT DU 03 JUILLET 2018

APPELANTE :
d'un jugement rendu le 31 octobre 2013 par le tribunal de grande instance de TROYES,

SCI D2JM SCI
[...]

COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT-CAULIER RICHARD, avocats au barreau de REIMS

INTIMES :

Monsieur Daniel X...
[...]

Madame Chantal C... épouse X...
[...]

COMPARANT, concluant par Maître Pascal GUILLAUME , avocat au barreau de REIMS, et ayant pour conseil Maître Arnaud HONNET, avocat au barreau de L'AUBE

SARL Q... prise en la personne de son représentant légal domicilié [...] /FRANCE

COMPARANT, concluant par SCP BILLION MASSARD RICHARD SIX THIBAULT, avocat au barreau de L'AUBE

SA BANQUE POPULAIRE LORRAINE CHAMPAGNE (BPLC)
[...]

COMPARANT, concluant par SCP COLOMES MATHIEU ZANCHI , avocats au barreau de L'AUBE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Francis MARTIN, président de chambre
Madame Florence MATHIEU, conseiller
Madame Catherine LEFORT, conseiller

GREFFIER :

Monsieur MUFFAT-GENDET, greffier, lors des débats et lors du prononcé,

DEBATS :

A l'audience publique du 22 mai 2018, où l'affaire a été mise en délibéré au 26 juin 2018, prorogé au 03 juillet 2018

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 03 juillet 2018 et signé par Monsieur MARTIN, président de chambre, et Monsieur MUFFAT-GENDET greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSE DU LITIGE

Selon acte authentique en date du 30 mars 2007, la SCI D2JM a acquis auprès de M. Daniel X... et Mme Chantal C... épouse X... un immeuble situé [...] à la [...] moyennant le prix de 545.000 euros. Cette acquisition a été financée au moyen d'un prêt immobilier souscrit auprès de la Banque Populaire Lorraine Champagne (BPLC).

L'acquisition de cet immeuble par la SCI D2JM avait principalement pour objectif d'aménager des bureaux destinés à héberger l'activité de la société Analys'Home, société spécialisée dans le diagnostic immobilier et dont le gérant M. G... est également gérant associé de la SCI D2JM, et d'autre part l'installation de la compagne de M. G... dans l'appartement du rez-de-chaussée et du 1er étage, la partie restante à savoir un studio, un appartement de type F2 et un appartement de type F4 devant être mise en location.

Plusieurs mois après la régularisation de la vente, la SCI D2JM a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Troyes aux fins d'expertise technique au motif que les travaux réalisés dans l'immeuble auraient révélé des vices cachés.

Selon ordonnance en date du 4 septembre 2007, le juge des référés a ordonné une expertise confiée à M. Jacques H..., architecte à Troyes.

Selon exploit en date des 2 et 3 septembre 2009, la SCI D2JM a assigné au fond les époux X... et la Sarl Sébastien Immobilier qui était intervenue lors de la vente pour avoir mis en relation les vendeurs et la SCI D2JM et sollicité le sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

L'expert a déposé son rapport le 15 décembre 2010. Il conclut notamment qu'il se trouve dans le cas très simple d'un immeuble de 1985 que le précédent propriétaire, M. X..., a fait évoluer au cours des années en y faisant lui-même des travaux, qu'au vu de la date de construction, l'immeuble se situe en dehors du champ de la responsabilité décennale des constructeurs et les désordres mentionnés ne sont plus sous aucune garantie, que le gérant de la SCI D2JM, M. G..., est un professionnel du diagnostic immobilier de sorte qu'il est difficile d'imaginer que tous les défauts qu'il met en avant ont pu lui échapper car, en aucun cas, ils ne constituent des vices cachés. L'expert souligne que l'acte de vente mentionne expressément que l'acquéreur a déclaré parfaitement connaître le bien après l'avoir visité et s'être entouré de tous les éléments d'information nécessaires à tous égards. Il ajoute qu'en tout état de cause, la dangerosité de l'immeuble est à écarter pour l'utilisation des locaux en «bon père de famille», sauf à dire que tous les locaux datant de 1985 sont dangereux. L'expert retient toutefois qu'il y a bien un dysfonctionnement de l'alimentation en eau pour lequel il préconise les travaux prescrits par le sapiteur.

A la suite du dépôt du rapport de l'expertise, la SCI D2JM a sollicité l'annulation de la vente intervenue le 30 mars 2007 sur le fondement de la garantie des vices cachés et la condamnation in solidum de M. et Mme X... ainsi que de la Sarl Sébastien Immobilier à lui restituer la somme de 650.000 euros correspondant au prix de vente et aux frais supportés à cette occasion. A titre subsidiaire, et si le tribunal déclarait bien fondée l'intervention de la banque, elle a sollicité la condamnation in solidum des défendeurs à lui payer les sommes suivantes :
- 38.758,72 euros correspondant aux frais de notaire et aux droits perçus par l'administration fiscale,
- 800 euros au titre des frais de dossier liés au prêt consenti par la BPLC,
- 20.621,51 euros au titre du remboursement des taxes foncières,
- 29.528,60 euros au titre des pertes locatives,
- 2.158,73 euros au titre des travaux entrepris pour remédier au danger avéré,
- 3.342,29 euros au titre des travaux d'entretien auxquels elle a procédé,
- 37.249,43 euros en remboursement des travaux d'aménagement effectués par la SCI D2JM,
- 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et du trouble de jouissance,
soit au total 155.980,24 euros.

A titre infiniment subsidiaire, elle a sollicité l'organisation d'une nouvelle expertise.

Elle a fait valoir que c'est au cours de la réalisation de travaux postérieurs à la vente qu'elle a constaté de nombreux désordres affectant l'immeuble, et a reproché à l'expert de n'avoir accompli sa mission que de manière partielle et partiale.

Les époux X... se sont opposés à l'ensemble des demandes formulées par la SCI D2JM et par la banque, invoquant d'une part la mauvaise foi de M. G..., professionnel du diagnostic immobilier qui a visité les lieux assisté de professionnels de la construction, et d'autre part la clause d'exclusion de la garantie des vices cachés.

La Sarl Sébastien Immobilier a sollicité sa mise hors de cause au motif que la demanderesse ne rapportait ni la preuve d'une faute ni celle d'un quelconque préjudice.

La BPLC est intervenue volontairement à l'instance et a sollicité la condamnation de la SCI D2JM au paiement de la somme de 701.340,72 euros correspondant au montant de sa créance à la suite de la déchéance du terme prononcée pour non paiement des mensualités de remboursement depuis le mois d'octobre 2010. Dans l'hypothèse où le tribunal ferait droit à la demande de résolution de la vente, elle a demandé la condamnation de M. et Mme X..., en leur qualité de vendeurs, à lui restituer le prix, soit 650.000 euros, et celle de la SCI D2JM pour le surplus de sa créance, soit 51.340,72 euros.

Par jugement rendu le 31 octobre 2013, le tribunal a:
Au visa des articles 328 et suivant du code de procédure civile,
- déclaré recevable l'intervention volontaire de la BPLC,
Sur le fond, au visa des articles 246 et suivant du code de procédure civile, des articles 1134 et suivants, 1641 et suivants et 1315 et suivants du code civil,
- débouté la SCI D2JM de sa demande de rejet des conclusions d'expertise judiciaire,
- débouté la SCI D2JM de sa demande en nullité de la vente conclue le 30 mars 2007 pour vices cachés,
- condamné solidairement les époux X... à prendre en charge à hauteur de 100% le montant des travaux de remise en état du système d'installation de l'eau,
- ordonné l'exécution provisoire,
- rejeté les demandes formulées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SCI D2JM aux dépens.

Le tribunal a retenu que la SCI D2JM ne rapportait pas la preuve que les désordres affectant les installations électriques constituaient des vices dont elle n'aurait pas eu connaissance au jour de la vente, que le défaut d'étanchéité de la terrasse n'était pas un vice rédhibitoire et était apparent, que la SCI D2JM ne rapportait pas la preuve d'un vice caché affectant le carrelage des allées du jardin dont les décollements étaient apparents, qu'elle ne rapportait pas non plus la preuve d'un vice caché concernant le mauvais état du colombage, que la panne de la pompe de relevage ne relevait pas d'un vice caché, que la défectuosité de la pompe à chaleur était imputable à la SCI D2JM, que le défaut de ventilation dans l'appartement était visible lors de la visite des lieux, qu'en revanche, le système d'alimentation en eau n'était pas conforme. D'une façon plus générale, le tribunal a jugé que la SCI D2MJ ne rapportait pas la preuve que la chose vendue était impropre à sa destination, ni donc que les vices allégués remplissaient les conditions de l'article 1641 du code civil; qu'en outre, il appartenait à la SCI D2JM de démontrer que M. et Mme X... connaissaient l'existence des défauts allégués pour écarter l'application de la clause de non garantie contenue dans l'acte de vente; que toutefois s'agissant des dysfonctionnements liés à l'alimentation en eau, les époux X... ont manqué à leur obligation d'exécuter le contrat de bonne foi. Enfin, le tribunal a estimé que la SCI D2JM ne rapportait aucune faute de nature à engager la responsabilité de la Sarl Sébastien Immobilier sur le fondement de l'article 1382 du code civil.

La SCI D2JM a relevé appel de ce jugement le 11 décembre 2013.

Elle a sollicité l'infirmation du jugement, la nullité du rapport d'expertise judiciaire, contredit par le rapport de M. I..., expert en matière de construction, la résolution de la vente, la condamnation in solidum des époux X... et de l'agence immobilière à lui restituer le prix de vente et les frais annexes.

Les époux X... et la Sarl Sébastien Immobilier ont conclu à la confirmation du jugement.

La BPALC, anciennement dénommée BPLC, a demandé à la cour de lui donner acte qu'elle s'en rapportait sur la demande de résolution de la vente. Dans l'hypothèse de l'absence de résolution de vente, elle a sollicité la condamnation de la SCI D2JM à lui payer le montant de sa créance. Dans l'hypothèse où la cour ferait droit à la demande de résolution, elle a demandé la condamnation in solidum des époux X... et de la SCI D2JM à lui payer la somme de 650.000 euros, et la condamnation de la SCI D2JM au paiement du surplus de sa créance, soit 51.340,72 euros.

Par arrêt du 1er décembre 2015, la cour d'appel de Reims a:
- débouté la SCI D2JM de sa demande de nullité de l'expertise judiciaire,
- avant dire droit, ordonné une nouvelle expertise judiciaire confiée à M. J..., aux frais avancés de la SCI D2JM,
- sursis à statuer sur l'ensemble des demandes des parties.

La cour s'est estimée suffisamment informée sur la nature des désordres car les rapports de M. H... et de M. I... ont révélé des constatations antagonistes.

L'expert, M. J..., a déposé son rapport à la cour le 14 novembre 2017.

Par conclusions après expertise no2 du 30 avril 2018, la SCI D2JM demande à la cour d'appel de:
Au visa des articles 1641 et suivants du code civil,
- infirmer le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
- dire et juger que le rapport de M. J... met en évidence l'existence de graves désordres affectant l'immeuble vendu par les époux X... selon acte notarié en date du 30 mars 2007, constituant des vices cachés de nature à rendre l'immeuble impropre à sa destination au sens des articles 1641 et suivants du code civil,
- dire et juger que l'existence de vices cachés est par ailleurs corroborée par les autres documents contractuels et pièces justificatives qu'elle produit, de même que par le rapport établi le 31 août 2012 par M. K..., expert immobilier, sachant de la BPALC,
- dire et juger qu'elle n'aurait pas fait l'acquisition du bien immobilier dont s'agit si elle avait eu connaissance des vices cachés,
- dire et juger que tant M. et Mme X... que la Sarl Sébastien avaient connaissance des vices affectant l'immeuble au moment de la vente,
- dire et juger que l'immeuble litigieux n'est pas un immeuble de rapport contrairement à ce qui est indiqué dans l'acte authentique de vente,
- dire et juger que la responsabilité contractuelle des époux X... vendeurs de l'immeuble litigieux est incontestablement engagée par application des dispositions de l'article 1641 du code civil,
- dire et juger également que l'agence immobilière, la Sarl Sébastien Immobilier, a engagé sa responsabilité quasi délictuelle à son égard, en application des dispositions de l'article 1382 du code civil, dans la mesure où elle n'a pas respecté l'obligation d'information et de conseil lui incombant, l'immeuble ayant de surcroît fait l'objet d'une surestimation, compte tenu de la gravité des désordres constatés et du coût des travaux de remise en état nécessaires, tels que démontrés dans le rapport établi par M. K..., expert immobilier,
- en conséquence, prononcer la résolution de la vente régularisée entre elle et les époux X... selon acte notarié en date du 30 mars 2007, avec restitution du bien immobilier,
- condamner dès lors les époux X... et la Sarl Sébastien Immobilier in solidum au paiement des sommes suivantes:
o 650.000 euros représentant le montant de la restitution du prix de vente, outre tous les frais annexes directement liés aux formalités d'acquisition, à laquelle s'ajoutera le montant des taxes foncières s'élevant à ce jour à 35.300,51 euros,
o 37.630,60 euros au titre des pertes locatives depuis l'entrée en possession des lieux,
o 2.158,73 euros au titre des travaux confortatifs d'urgence qu'elle a entrepris pour remédier aux dangers avérés,
o 16.109,95 euros (2.409,19 + 933,10 + 11.362,35 + 163,24 + 98,23 + 627,84 + 290,40 + 225,60) au titre des travaux d'entretien actualisés auxquels elle a procédé,
o 37.249,43 euros en remboursement des travaux d'aménagement auxquels elle avait été invitée à procéder afin de rentabiliser son acquisition qualifiée d'immeuble de rapport tel qu'il résulte du mail qui lui a été adressé par l'agence immobilière Sébastien Immobilier le 28 octobre 2006,
o 160.000 euros au titre de la perte locative afférente au loyer commercial (2.000 euros par mois x 80 mois),
o 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et du trouble de jouissance,
o 8.571,98 euros au titre des frais de procédure engagée sur la seule année 2017,
- dire et juger que toutes ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'arrêt,
- condamner également in solidum les époux X... et la Sarl Sébastien Immobilier à payer à la SCI D2JM une somme de 30.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, incluant les honoraires de ses conseils successifs, en ce compris celui ayant été chargé d'obtenir des délais de grâce relativement au prêt bancaire, de même que les honoraires versés aux sachant et expert amiable diligentés par elle, et tous frais annexes liés aux démarches nécessaires pour faire valoir ses droits,
- débouter les époux X... ainsi que la Sarl Sébastien Immobilier de toutes leurs demandes contraires et autres demandes de dommages et intérêts et indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile comme étant totalement injustifiées,
Sur l'intervention volontaire aux débats de la BPALC,
- débouter purement et simplement la BPALC des fins de son appel incident en ce qu'il est dirigé à son encontre, comme étant infondé,
- débouter dès lors, la BPALC de ses demandes tendant à la voir condamner, en cas d'absence de résolution de la vente, au paiement d'une somme totale de 701.340,72 euros, et en cas de résolution de la vente, au paiement du solde de sa créance, soit la somme de 51.340,72 euros, le règlement de ladite somme devant incomber uniquement aux époux X...,
- débouter également la BPALC de sa demande infondée tendant à la voir condamner in solidum avec M. et Mme X... à payer, en cas de résolution de la vente, la somme de 650.000 euros,
- dire et juger que la BPALC ne saurait prétendre percevoir deux fois la même somme au titre du surplus de sa créance à hauteur de la somme de 51.340,72 euros, alors que dans cette hypothèse, M. et Mme X... devraient payer directement à la BPALC au titre de sa créance de prêt, la somme de 701.340,72 euros,
- subsidiairement, si la Cour fait droit aux demandes de la BPALC, condamner à tout le moins in solidum les époux X... et la Sarl Sébastien Immobilier à payer à la SCI D2JM la somme de 164.628,88 euros d'ores et déjà réglée dans le cadre du remboursement du prêt, somme à laquelle il y a lieu d'ajouter les frais annexes directement liés aux formalités d'acquisition tels que les frais et honoraires du notaire et les droits perçus par l'administration fiscale à hauteur de la somme de 38.758,72 euros, les frais de dossier de la banque pour 800 euros ainsi que les taxes foncières pour 31.266,51 euros,
- débouter les époux X... et la Sarl Sébastien Immobilier, et la BPALC de toutes leurs demandes fins, prétentions, plus amples ou contraires,
- condamner in solidum les époux X... et la Sarl Sébastien Immobilier aux entiers dépens lesquels comprendront, outre les frais d'expertise judiciaire, les frais de constats d'huissier établis par la SCP Goret les 7 juin 2007, 18 septembre 2007, 13 mars 2008, 29 avril 2008, 13 octobre 2008 et 23 avril 2010, ainsi que le 22 juin 2017,
- à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la Cour estimait devoir faire droit à la demande de la BPALC en paiement de la somme de 701.340,72 euros, dire qu'il appartiendra aux époux X... et à la Sarl Sébastien Immobilier de garantir la SCI D2JM de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, en raison de leur responsabilité contractuelle pour les époux X... et délictuelle pour la Sarl Sébastien Immobilier suite à la vente d'un bien affecté d'un vice caché.

Sur l'existence des vices cachés et la responsabilité de M. et Mme X... sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil, la SCI D2JM détaille les désordres constatés. S'agissant des désordres électriques, elle se fonde sur le rapport de M. I... du 12 juin 2011 et le document établi par le Consuel qui font état de graves anomalies constituant des vices cachés, sur une attestation d'un électricien et sur le rapport du nouvel expert judiciaire, M. J..., qui a relevé, outre une impossibilité de calculer la répartition des charges, des non conformités à la norme NFC 15.100 pouvant rendre l'immeuble dangereux et impropre à sa destination, et a rappelé qu'un diagnostiqueur même en électricité n'est pas un ingénieur ni un technicien. Elle précise que M. G... n'a obtenu ses certifications en diagnostic technique immobilier notamment en électricité qu'après la vente, mais qu'au moment de la vente, il ne disposait pas des compétences nécessaires pour déceler les non conformités. Elle ajoute que selon l'expert, le vendeur avait une parfaite connaissance de toutes les transformations électriques réalisées et aurait dû en informer l'acheteur, et qu'ainsi M. et Mme X... ne sont pas vendeurs de bonne foi.

Sur le défaut d'étanchéité de la terrasse, elle se fonde sur les deux rapports de M. I... qui a mis en évidence d'importants défauts d'étanchéité nécessitant des travaux de remise en état conséquents et affectant à la fois le sous-sol et une partie du rez-de-chaussée et de la structure même de l'immeuble, et qui a constaté que les travaux d'étanchéité n'étaient pas conformes aux règles de l'art, s'agissant plutôt de bricolage, de sorte que le vendeur avait nécessairement connaissance des vices affectant ces travaux. Elle ajoute que M. J... a relevé que la terrasse était tout simplement inutilisable et rendait les lieux impropres à leur destination, que le vendeur connaissait les désordres affectant la terrasse puisqu'il avait refait l'étanchéité et le carrelage, et qu'il était impossible pour M. G... de constater lui-même ces défauts puisque la terrasse était recouverte de carrelage.

Sur le carrelage extérieur et les allées du jardin, elle fait valoir qu'il ressortait déjà du rapport de M. I... que M. X... avait également exécuté lui-même les travaux d'aménagement en circulation de l'espace jardin comprenant une dalle en béton et un revêtement de carrelage et que ces travaux avaient été effectués au mépris des règles de l'art. Elle précise qu'au moment de la vente, il existait seulement quelques décollements de carrelage, mais que les désordres se sont généralisés de plus en plus au fil du temps, que le fait pour les époux X... d'avoir laissé des carreaux de carrelage sur place ne signifie pas que la SCI D2JM pouvait prévoir l'ampleur des désordres, qu'en revanche, selon l'expert M. J..., le vendeur avait une parfaite connaissance des désordres affectant le carrelage. Elle estime que ces désordres rendent le bien impropre à sa destination.

Sur l'absence d'entretien du colombage, elle indique que là encore il existe des contradictions entre les rapports de M. I... et celui de M. H..., et que M. J... a dès la première visite constaté le pourrissement du pan de bois extérieur et l'absence d'entretien de la façade. Elle souligne que le rapport d'expertise de M. J... met en évidence un système et une conception du mur totalement proscrite à l'époque, car non conforme aux règles de l'art et au DTU de l'époque, ainsi que la situation de danger du fait de la faiblesse de la structure dans les éléments porteurs, ce qui rend l'immeuble impropre à sa destination. Elle ajoute que selon l'expert, l'acquéreur ne pouvait se rendre compte du système constructif de la façade pour déceler que le pan de bois fait office d'habillage de murs porteurs non conformes, mais que le vendeur ne pouvait ignorer ce point de construction.

Elle conclut que si M. G... avait été informé au moment de la vente par les vendeurs des désordres affectant l'immeuble, il n'aurait pas contracté ou du moins pas à un tel prix, de sorte que la qualification de vice caché ne fait aucun doute.

Sur le dysfonctionnement de l'alimentation en eau, elle s'étonne que les premiers juges aient condamné les époux X... sur ce point sans retenir la garantie des vices cachés et estime qu'il y a bien là aussi un vice caché, comme cela ressort du rapport de M. I... qui a mis en évidence que le réseau d'alimentation et de distribution de l'eau était particulièrement dangereux en raison d'un risque de pollution bactériologique, ce qui est confirmé par un rapport d'essai du laboratoire départemental de contrôle des eaux du 10 juillet 2007, un courrier du directeur de la DDASS de l'Aube et un courrier de l'ARS Champagne Ardenne. Elle précise qu'elle n'entend pas demander la réformation du jugement sur ce point mais demande que soient requalifiés en vices cachés les désordres affectant l'alimentation en eau.

Elle conclut que la responsabilité de M. et Mme X... se trouve engagée sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil, puisqu'il leur appartenait d'attirer l'attention de la SCI D2JM sur les travaux qu'ils avaient eux-mêmes exécutés sans respecter les normes en vigueur, sans pouvoir se contenter de répondre qu'à l'époque de la vente le diagnostic technique n'était pas obligatoire. Elle précise que les locaux ne correspondent pas aux critères d'habitabilité définis par les codes de la consommation, de l'habitation et de la santé publique. Elle souligne que contrairement à ce qui est prétendu, M. G... n'était pas un professionnel averti de la construction et qu'au moment de la vente, bien que gérant de la société Analys'home, il n'était pas un professionnel du diagnostic immobilier. Elle ajoute que M. et Mme X... ne peuvent se prévaloir de la clause d'exonération de responsabilité incluse dans l'acte de vente.

Sur la responsabilité de l'agence immobilière, elle rappelle à titre préalable que le gérant de la Sarl Sébastien Immobilier est M. Sébastien X..., fils des vendeurs, de sorte qu'il avait une parfaite connaissance des lieux. Elle fait valoir que la Sarl Sébastien Immobilier, qui avait l'exclusivité de la vente et a perçu une commission de 50.000 euros, est un professionnel de l'immobilier tenu à un devoir d'information et de conseil; qu'elle s'est abstenue de toute information et a fait une présentation particulièrement flatteuse du bien; que M. Sébastien X... a reconnu pendant les opérations d'expertise de M. H... avoir repeint le plafond du sous-sol, ce qui montre qu'il a dissimulé lui-même des traces d'humidité résultant du pourrissement des pans de bois; qu'il avait indiqué lors de la vente que l'étanchéité et les carrelages avaient été refaits, tout en sachant les problèmes; que la Sarl Sébastien Immobilier était donc parfaitement informée de l'existence de vices cachés qu'elle a dissimulés par des affirmations mensongères et erronées; que l'expert, M. J..., conclut d'ailleurs à un partage de responsabilité entre les vendeurs et l'agence immobilière, notamment s'agissant des sous-compteurs EDF; que sa responsabilité est donc engagée sur le fondement de l'article 1382 du code civil.

Sur l'intervention de la BPALC, elle souligne que cette intervention volontaire a permis la communication d'un rapport d'expertise que la banque a fait établir par M. K..., expert immobilier, le 31 août 2012, dont les conclusions rejoignent celles de M. I..., et qui a évalué l'immeuble à 230.400 euros, alors qu'il a été acquis au prix de 545.000 euros, ce qui confirme le bien fondé de ses demandes. Elle explique que si elle n'a pas pu faire face au remboursement du prêt c'est en raison de la faute commise par les époux X..., de sorte qu'elle s'oppose au paiement des intérêts de retard et pénalités contractuelles, ainsi que du surplus de la créance en cas de résolution de la vente, et de la somme de 650.000 euros.

Par conclusions après expertise no2 en date du 23 avril 2018, M. et Mme X... demandent à la cour d'appel de:
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Troyes le 31 octobre 2013,
- dire et juger n'y avoir lieu à homologation du rapport d'expertise,
- dire et juger que la SCI D2JM n'apporte pas la preuve des vices cachés qu'elle invoque,
- dire et juger en conséquence n'y avoir lieu à prononcer la résiliation de la vente intervenue le 30 mars 2007,
- débouter la SCI D2JM de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Y ajoutant,
- condamner la SCI D2JM à leur verser une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi par le fait d'une procédure abusive et injustifiée ne reposant sur aucun élément sérieux,
A titre subsidiaire,
- ordonner une contre-expertise,
A titre infiniment subsidiaire,
Vu les dispositions de l'article 549 du code civil,
- condamner la SCI D2JM à leur payer, en cas de résolution de la vente, la somme de 738.100,44 euros en ordonnant en tant que de besoin la compensation entre les parties,
- condamner la SCI D2JM au paiement d'une indemnité de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, avec pour ceux d'appel faculté de recouvrement au profit de Me Pascal GUILLAUME, avocat, et ce conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Ils reprennent point par point les vices cachés allégués. S'agissant des désordres électriques, ils font valoir que lors de la vente, le diagnostic électrique n'était pas encore entré en vigueur et qu'aucun texte n'obligeait le vendeur à mettre les installations en conformité; que le rapport du bureau d'études AGS Ingenierie indiquait qu'il n'existait aucun vice caché; que M. G..., professionnel du diagnostic immobilier et fort d'une expérience depuis 2003, ne pouvait ignorer qu'il serait amené à remettre l'installation électrique aux normes, et ce d'autant plus qu'il a su avant la vente qu'il n'y avait pas de sous-compteurs et qu'il avait visité le bien avec un électricien.

S'agissant du défaut prétendu d'étanchéité de la terrasse, ils soutiennent qu'il ne s'agit pas d'un vice caché; que M. X... a réalisé les travaux d'étanchéité en 2004, et ce de façon traditionnelle selon les règles de l'art d'après l'expert; que ce premier expert avait indiqué que la fuite trouvait son origine dans un joint d'étanchéité et était donc due à un manque d'entretien de M. G...; que d'ailleurs, lors d'un constat d'huissier postérieur au dépôt du rapport de M. J..., M. G... a indiqué à l'huissier qu'il n'y avait plus de fuite depuis 2012, date à laquelle il a refait le joint, de sorte qu'il a volontairement travesti la réalité des faits lors des opérations d'expertise de M. J...; que la transformation du sous-sol en bureaux sans réaliser d'isolation thermique a accentué le phénomène de condensation, ce qui peut s'apparenter à des fuites au plafond, alors qu'il n'existe aucune fuite ni défaut d'étanchéité.

Sur le carrelage extérieur et les allées de l'espace jardin, ils font valoir que l'expert a rappelé qu'au moment de la vente, la construction n'était plus sous garantie décennale et M. G... avait une parfaite connaissance des défauts du carrelage extérieur puisqu'ils lui avaient laissé des carreaux à poser pour remédier au désordre et remplacer les carreaux décollés, de sorte qu'il ne saurait y avoir de vices cachés.

Sur le prétendu défaut d'entretien du colombage, ils soulignent que l'expert a constaté que certaines pièces de bois étaient endommagées mais que ces désordres ne relevaient d'aucune garantie; qu'il ne s'agit que d'un doublage d'un mur de maçonnerie assurant la solidité de l'ouvrage, de sorte que la stabilité de l'immeuble ne saurait être mise en péril puisque le bois n'est utilisé qu'à des fins esthétiques; qu'au moment de la vente, le pan de bois était dans un état d'entretien correct, et que seul le défaut total d'entretien de M. G... est à l'origine du pourrissement du bois et de l'aggravation des travaux à entreprendre; qu'il n'y a donc pas de vice caché; que par ailleurs, M. L..., architecte qui les a assistés pendant l'expertise de M. J..., a proposé une solution plus économique que celle retenue par l'expert; qu'enfin, la connaissance du problème par M. G..., qui était menuisier, l'avait conduit à exiger une réduction de 78.000 euros du prix de vente, ce qu'ils avaient accepté.

Sur le prétendu dysfonctionnement de l'alimentation en eau, ils soutiennent que M. G... a fait procéder à des travaux sur ce système par une entreprise de plomberie qualifiée d'incompétente par l'expert puisqu'elle a provoqué une pollution de l'eau; que cela ne relève pas de leur responsabilité; que les travaux de mise en conformité du réseau ont été évalués 1.000 euros HT, de sorte qu'il ne s'agit pas d'un vice caché rédhibitoire; que les deux experts ont retenu la seule responsabilité de M. G... qui a modifié la plomberie.

Sur leur absence de responsabilité, ils soutiennent que l'argumentation de la SCI D2JM ne repose sur aucun élément sérieux; que la preuve des vices cachés incombe à l'acquéreur; qu'il n'est pas démontré que l'immeuble vendu était impropre à sa destination; qu'au contraire, les compétences professionnelles de M. G... lui permettaient d'apprécier l'état du bien, d'autant venait régulièrement visiter le bien accompagné de professionnels, de sorte que la SCI D2JM ne peut prétendre avoir été trompée; que contrairement à ce qui est soutenu, ils ont toujours fait preuve d'une grande transparence.

Subsidiairement, en cas de résolution judiciaire, ils rappellent que la SCI D2JM devra restituer le bien et les fruits, à savoir les loyers tirés de la location des appartements, soit la somme de 738.100,44 euros.

Par conclusions après expertise no3 en date du 10 mai 2018, la Sarl Sébastien Immobilier demande à la cour d'appel de:
- dire et juger mal fondé l'appel relevé par la SCI D2JM dirigé contre elle, et l'en débouter,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions concernant la Sarl Sébastien Immobilier,
- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de la SCI D2JM formées contre elle,
- condamner la SCI D2JM à lui verser une indemnité de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- subsidiairement, pour le cas où par impossible une quelconque faute serait retenue à son encontre, cantonner sa responsabilité aux conséquences liées aux défauts affectant l'eau et l'électricité, c'est-à-dire à hauteur de 22.623,50 euros H.T,
- en toute hypothèse, déterminer la proportion de chacun des coobligés à la dette dans leurs rapports entre eux, étant précisé que la sienne ne peut être que minime et en tout cas inférieure à celle des époux X...,
- condamner toute autre partie qu'elle aux entiers dépens, lesquels comprendront l'ensemble des frais d'expertise judiciaire, et dire qu'ils pourront être recouvrés dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile.

Elle indique qu'elle s'en rapporte à prudence de justice sur la demande de résolution de la vente, précisant qu'elle ne saurait en aucun cas être tenue de rembourser le prix de vente de 650.000 euros qu'elle n'a pas perçu, n'étant pas partie à l'acte, ni au remboursement des échéances du prêt.

Elle conteste les autres demandes de la SCI D2JM en se fondant sur le rapport d'expertise de M. J.... Elle fait valoir que l'expert a mis en évidence deux types de désordres: ceux susceptibles d'être imputés au vendeur (façade, terrasse) et ceux susceptibles d'être imputés à la fois au vendeur et à l'agence immobilière (eau, électricité), de sorte qu'elle ne peut être tenue responsable des désordres structurels. Elle estime qu'il ne peut être reproché à son gérant d'avoir tenté de dissimuler des informations erronées et mensongères, et approuve le tribunal d'avoir exigé la triple preuve de la faute, du préjudice et du lien de causalité entre les deux. Elle souligne qu'il n'est même pas allégué que la description du bien donnée par l'agence immobilière était erronée par rapport à la réalité. Elle rappelle que d'après l'expert, sa part de responsabilité est relative au poste eau/électricité dont les travaux ont été estimés à 22.623,50 euros HT, et fait valoir que sa responsabilité ne peut être engagée s'agissant de ces vices puisque d'une part l'acheteur connaissait au moins partiellement la situation étant devenu diagnostiqueur en électricité, et d'autre part le manquement de l'agent immobilier à son devoir de conseil implique qu'il connaisse les vices, ce qui n'est pas établi. Elle critique par ailleurs l'expert de lui imputer la non conformité de l'installation électrique, notamment sur le comptage, sans dire en quoi cela relève de l'agence immobilière, et soutient que l'acheteur aurait pu découvrir, par ses compétences personnelles et des vérifications élémentaires, que les logements n'étaient pas équipés de sous compteurs EDF, rappelant que la SCI a déclaré au notaire avoir visité le bien et le connaître parfaitement. Elle conteste par ailleurs sa responsabilité s'agissant du réseau d'eau de l'immeuble, dont la non conformité ne peut être imputée qu'au vendeur. Elle estime par ailleurs que dès lors que le vendeur et l'acheteur sont d'accord sur le prix, il ne peut être reproché à l'agence immobilière d'avoir fixé un prix excessif, alors même qu'en l'espèce, la SCI l'avait négocié. Elle conclut que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu que la SCI ne rapportait pas la preuve de la faute de nature à engager la responsabilité de l'agent immobilier sur le fondement de l'article 1382 du code civil. Elle conteste en outre tout lien de causalité entre le manquement allégué et le préjudice invoqué, soulignant que le préjudice de jouissance ne se rattache pas au poste eau/électricité. Elle ajoute que le remboursement du prêt immobilier ne constitue pas un préjudice indemnisable ouvrant droit à réparation.

Par conclusions d'appel incident no5 en date du 11 mai 2018, la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne (BPALC), anciennement dénommée Banque Populaire Lorraine Champagne, demande à la cour d'appel de:
- la dire bien fondée en son intervention volontaire,
- lui donner acte qu'elle s'en rapporte à justice sur le mérite de l'appel et de la demande de résolution de la vente,
- dire et juger que la SCI D2JM lui est redevable, au titre du prêt du 30 mars 2007, d'une créance exigible de 701.340,72 euros selon décompte du 15 octobre 2012 correspondant aux échéances impayées depuis octobre 2010, au capital restant dû à compter de janvier 2012, date de déchéance du terme, aux intérêts et accessoires,
a) dans l'hypothèse d'absence de résolution de vente:
- condamner la SCI D2JM à lui payer la somme de 701.340,72 euros avec intérêts au taux de 3,95% l'an à compter du 16 octobre 2012 jusqu'à parfait paiement,
b) dans l'hypothèse où la cour ferait droit à la demande de résolution de vente où corrélativement M. et Mme X... devraient rembourser le prix de vente,
- débouter la SCI D2JM de ses prétentions visant à obtenir des époux X... le remboursement du prix de vente,
- dire et juger que les époux X... devront s'acquitter du prix de vente consécutivement à la résolution directement auprès de la BPALC au titre de son hypothèque et de son privilège de prêteur de deniers et de sa créance de prêt, et lui payer la somme de 701.340,72 euros avec intérêts au taux de 3,95% l'an à compter du 16 octobre 2012 selon décompte du 15 octobre 2012,
- dire que la SCI D2JM en qualité d'emprunteur est tenue au titre de la résolution du contrat de prêt de lui rembourser les sommes prêtées,
- en conséquence, condamner in solidum M. X..., Mme X... et la SCI D2JM à lui payer la somme de 701.340,72 euros avec intérêts au taux de 3,95% l'an à compter du 16 octobre 2012,
- condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel, avec distraction.

En cas d'absence de résolution de la vente, elle indique que la SCI D2JM est défaillante dans le remboursement du prêt puisque sont restées impayées les échéances d'octobre 2010 à février 2011 pour un montant de 19.608,85 euros, de sorte qu'elle est bien fondée à prononcer la déchéance du terme comme prévu à l'article 9 des conditions générales. Elle précise que le tribunal a omis de statuer sur sa demande en paiement de la somme de 701.340,72 euros. Elle conteste l'argument de la SCI D2JM selon laquelle elle ne serait pas tenue au paiement des intérêts de retard et indemnités contractuelles en raison de la faute des époux X..., faisant valoir que la SCI D2JM reste tenue de ses obligations contractuelles envers la banque en dépit de l'éventuelle faute des vendeurs.

Dans l'hypothèse d'une résolution de la vente, elle estime qu'il y aurait lieu de prononcer la résolution de plein droit du contrat de prêt qui est accessoire à la vente. Elle s'oppose à la demande de restitution du prix de vente formulée par la SCI D2JM contre les vendeurs, faisant valoir que le prix n'a pas été payé avec les deniers personnels de l'acquéreur mais a été financé par elle de sorte que c'est la banque qui a payé le prix aux vendeurs et qui doit donc en obtenir restitution du chef de son hypothèque et de son droit de suite. Elle explique sa demande de condamnation solidaire par le fait que l'emprunteur est également tenu contractuellement de rembourser le prêt. Ici encore, elle estime que la SCI D2JM ne peut non plus s'exonérer de ses obligations contractuelles envers la banque, s'agissant notamment des intérêts de retard, en raison de la faute des vendeurs.

MOTIFS DE LA DECISION

I. Sur la demande de résolution de la vente au titre de la garantie des vices cachés

Il résulte de l'article 1641 du code civil que le vendeur est tenu de garantir l'acheteur des défauts cachés du bien vendu qui le rendent impropre à son usage ou qui en diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquis ou à un moindre prix s'il en avait eu connaissance.

En application de l'article 1644 du même code, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par experts.

Selon l'article 1642, le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même. L'acquéreur professionnel est présumé connaître les vices.

L'article 1643 dispose que le vendeur est tenu des vices cachés, quand bien même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

Ainsi, lorsque l'acte de vente ou le compromis de vente contient une clause de non garantie des vices cachés, l'acquéreur qui entend bénéficier de cette garantie doit démontrer que son vendeur avait connaissance des vices. Le vendeur professionnel est présumé connaître les vices. Le vendeur profane peut être assimilé au vendeur professionnel s'il s'est comporté en qualité de maître d'oeuvre en concevant lui-même le bâtiment ou s'il a participé à la construction, quelles que soient ses compétences techniques.

En l'espèce, M. et Mme X... sont des vendeurs non professionnels, mais il résulte des rapports d'expertise judiciaire qu'ils ont réalisé eux-mêmes des travaux dans l'immeuble qu'ils ont vendu, de sorte qu'ils sont présumés connaître les vices se rapportant à ces travaux. La clause de non garantie des vices cachés ne peut donc être appliquée s'agissant des défauts en lien avec ces travaux.

Par ailleurs, la SCI D2JM produit les certifications de son gérant, M. G..., dont il ressort qu'au moment de la vente, ce dernier avait les certificats suivants: «diagnostic de mesure de l'accessibilité au plomb», «mesurage des logements – loi Carrez», «repérage et diagnostic de l'état de conservation des matériaux et produits contenant de l'amiante».

Il convient d'étudier chaque désordre afin de déterminer si l'immeuble était atteint d'un vice caché au sens de l'article 1641 du code civil, étant précisé d'emblée qu'une non conformité ne constitue pas en soi un vice caché et qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'impose au vendeur de vendre un bien immobilier conforme aux normes en vigueur, mais que certains logements de l'immeuble vendu étaient occupés par des locataires.

1) Sur les désordres de nature électrique

Il ressort du rapport du sapiteur, 3C Ingénierie, que l'installation électrique comporte de nombreuses anomalies et qu'elle ne permet pas la réalisation d'un calcul de charges honnête et précis de consommation d'énergie électrique des parties communes, ni un décompte d'énergie électrique de chaque logement, et ne permet pas une utilisation de l'électricité en toute sécurité. L'expert, M. J..., rappelle à juste titre qu'au moment de la vente, le diagnostic électricité n'était pas obligatoire et qu'aucun texte n'imposait au vendeur de mettre les installations en conformité. Il explique qu'une séparation de l'étage a été réalisée en 1992 et que les parties habitables au sous-sol (studio et F2) ont été réalisées en 2000 par M. X..., sans prendre en compte les problématiques que ces modifications au fil du temps induisent pour les répartitions de charges. Il a chiffré les travaux d'électricité à 20.974 euros HT.

Au moment de la vente, M. G... n'avait pas encore obtenu sa certification en diagnostic technique immobilier «Electricité». Il ressort en outre d'un courriel de l'agence Sébastien Immobilier en date du 28 octobre 2006 qu'il lui a été indiqué, à tort, que les logements avaient des sous-compteurs EDF.

Pour autant, la SCI D2JM pouvait raisonnablement s'attendre à devoir réaliser des travaux de remise aux normes en matière d'électricité, s'agissant d'un immeuble relativement ancien qu'elle achetait afin d'y réaliser des travaux d'aménagement en bureaux, et s'agissant de logements donnés en location. D'ailleurs, M. et Mme X... démontrent que lors de la vente, M. G... était déjà informé de l'absence de sous-compteurs et de la nécessité de réaliser des travaux d'électricité. En effet, il ressort de l'attestation de M. M..., électricien, en date du 2 janvier 2008 (produite par la SCI) que le chantier d'électricité a démarré le 2 avril 2007 (soit trois jours après la vente) et qu'il avait fait une visite préalable du bien pour l'établissement du devis. Ainsi, il apparaît que M. G... avait effectué au moins une visite du bien immobilier assisté de son électricien avant la vente. En outre, les époux X... produisent une attestation de M. N... en date du 4 août 2007, conforme aux dispositions de l'article 202 du Code de procédure civile, qui indique avoir assisté à une visite inopinée de M. G... chez M. et Mme X... et à leur discussion sur l'emplacement des deux compteurs électriques dont un concerne le studio et le F2 du bas.

En tout état de cause, la présence de deux compteurs d'électricité pour tout l'immeuble au lieu d'un par logement ne saurait constituer un vice caché, un compteur étant nécessairement apparent.

Le seul fait que l'installation électrique était non conforme, voire dangereuse, n'est pas à lui seul de nature à caractériser un vice caché au sens de l'article 1641 du code civil pour un acquéreur désireux de transformer l'immeuble acquis et assisté d'un professionnel de l'électricité.

2) Sur l'étanchéité de la terrasse et le carrelage extérieur

L'expert, M. J..., a constaté des tâches sur les dalles de faux plafond sous l'habitation et sous la terrasse extérieure, ainsi que des fuites sur cette terrasse de l'escalier d'accès à l'étage. Il a également signalé l'apparition d'une corrosion des fers des poutrelles en béton en partie haute du sous-sol.

Il a relevé plusieurs types de désordres sur la terrasse: absence de relevé suffisant en périphérie, absence d'arrêt d'eau sur le relevé, absence de drainage sous la chape, insuffisance de dilatation, pose collée sur l'ancien carrelage, pente insuffisante. Il préconise la réfection totale de la terrasse et de l'étanchéité pour un montant total de 46.047,37 euros HT. Il estime que la terrasse est inutilisable et rend les lieux impropres à leur destination. Il précise que le système d'étanchéité mis en place n'est pas conforme pour assurer une vraie étanchéité.

Il ressortait de la première expertise (de M. H...) que M. X... avait lui-même refait l'étanchéité puis posé du carrelage sur celle-ci en 2004, et que certains carreaux avaient commencé à se décoller à partir de début 2007, le phénomène s'étant accéléré depuis.

Si M. H... indiquait que le carrelage ne contribuait pas à l'étanchéité de la terrasse, il n'en reste pas moins que la terrasse présente à la fois un problème d'étanchéité et de décollement de carrelage.

M. J... indique cependant que l'acquéreur ne pouvait pas ignorer que la terrasse n'était pas en parfait état car la corrosion des poutrelles en sous-face existait déjà au regard des désordres constatés qui sont anciens et antérieurs à l'achat en 2007. De même, les décollements de carrelage, même s'ils étaient moindres, étaient apparents. Il n'est d'ailleurs pas contesté que les vendeurs avaient laissé sur place des carreaux de carrelage afin de permettre à l'acquéreur de remplacer les carreaux décollés.

3) Sur le colombage

L'expert, M. J..., a constaté le pourrissement du bois extérieur. Il explique que le système de montage des pans de bois ne peut en aucun cas assurer une pérennité dans les assemblages car les ouvertures verticales ne peuvent que conduire à des infiltrations d'eau et du pourrissement dans les zones de ces assemblages; que le système réalisé pour composer le mur pignon n'était pas conforme au DTU de l'époque (1985); que la méthodologie utilisée dans la conception est particulièrement non conforme aux règles de l'art et ne peut qu'engendrer de la pourriture après plusieurs décennies; que s'agissant de la véranda, le système est hétéroclite composé d'un porteur bois sur lequel repose un mur en parpaing, ce qui est proscrit par les règles de construction; que ce système bois est soumis à la contrainte de charge et ne peut rester stable dans le temps; que cette conception était totalement proscrite à l'époque. Il a estimé les travaux de charpente à 33.280 euros HT. Il ajoute que le pourrissement du bois depuis plus de dix ans conduit la structure à des faiblesses dans les éléments porteurs.

L'expert indique qu'une partie était visible au moment de la vente, mais que l'acheteur ne pouvait pas se rendre compte du système constructif de la façade pour déceler que le pan de bois faisait office d'habillage avec des murs porteurs non conformes. Il ressort d'un courriel de M. G... en date du 14 janvier 2007 qu'il a remarqué des travaux d'embellissement à faire côté façade (boiseries notamment). L'acquéreur a donc largement sous-estimé l'étendue du problème.

Les époux X... ne sauraient invoquer le défaut d'entretien du mur depuis la vente puisque l'expert estime que les désordres étaient inévitables avec le temps.

En revanche, M. J... indique également que M. et Mme X... ont confié cette construction à un maçon et un charpentier, de sorte que n'ayant pas participé eux-mêmes à la construction et en l'absence de preuve qu'ils aient conçu eux-mêmes l'ouvrage, ils ne peuvent être considérés comme ayant eu connaissance des vices.

4) Sur le système d'eau

Il résultait du rapport de M. H... que M. X... avait installé un puits avec pompe immergée alimentant certaines cuvettes de WC, installation non conforme à la réglementation sanitaire départementale; et qu'à la suite de mauvaises manœuvres sur les réseaux, M. G... a involontairement provoqué une pollution bactériologique du réseau d'eau potable. L'expert avait évalué les travaux de mise en conformité à 1.000 euros.

M. J... a rappelé la nécessité absolue de séparer l'eau potable et la nappe phréatique avec une séparation des alimentations pour la pompe à chaleur. Il a estimé les travaux à 1.649,50 euros HT pour la pose d'un réseau séparatif et la pose d'un compteur.

Compte tenu du faible montant des travaux, ce vice n'est pas rédhibitoire au sens de l'article 1641 du code civil.

En conclusion, il résulte de l'ensemble de ces éléments que le bien immobilier vendu était, au moment de vente, affecté d'un vice caché, portant sur le système de montage des pans de bois, et rendant l'immeuble impropre à sa destination car le pourrissement du bois qui en résulte conduit la structure à des faiblesses dans les éléments porteurs. Toutefois, les vendeurs ne peuvent être considérés comme ayant eu connaissance de ce vice car ils ne sont pas des professionnels de la vente, et ils n'ont pas réalisé eux-mêmes ces travaux et ni conçu ce système eux-mêmes puisqu'ils ont fait appel à des professionnels (maçon et charpentier). Dès lors, la clause de non garantie des vices cachés doit s'appliquer et fait obstacle à l'action de l'acquéreur. Les autres désordres invoqués par la SCI D2JM étaient soit connus d'elle ou apparents (compteurs électriques, carrelage extérieur et terrasse), soit non rédhibitoires (électricité et eau), de sorte que l'action en garantie des vices cachés ne peut prospérer.

Par conséquent, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande, qualifiée de nullité de la vente, de la SCI D2JM, et de rejeter sa demande requalifiée en résolution de la vente. Dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes indemnitaires de la SCI dirigées contre les vendeurs qui sont dénuées de fondement.

II. Sur la responsabilité de l'agent immobilier

La SCI D2JM recherche la responsabilité de la Sarl Sébastien Immobilier sur le fondement de l'article 1240 du code civil (anciennement 1382) qui suppose de rapporter la preuve de la faute de l'agent immobilier et du préjudice subi en lien avec cette faute. Elle estime que l'agence est tenue d'un devoir d'information et de conseil en sa qualité de professionnel de l'immobilier et qu'elle devait dès lors s'assurer de la qualité du bien vendu.

L'agent immobilier a l'obligation d'informer l'acquéreur des désordres apparents affectant l'immeuble vendu par son entreprise et qu'en sa qualité de professionnel il ne peut ignorer. En revanche, il ne commet un manquement à son devoir de conseil s'agissant des vices cachés que si l'acquéreur établit que l'agent immobilier en avait connaissance.

Il ressort des courriels échangés que M. Sébastien X..., gérant de la Sarl Sébastien Immobilier, n'a jamais caché à la SCI D2JM être le fils des vendeurs. Cette circonstance ne saurait suffire à établir que l'agence immobilière avait connaissance de vices cachés affectant l'immeuble vendu.

Il ne saurait être reproché à la Sarl Sébastien Immobilier d'avoir simplement fait une présentation flatteuse du bien car elle était mandatée par les vendeur pour rechercher un acquéreur. Ainsi le fait de présenter le bien en mettant en valeur son potentiel n'est pas fautif en soi.

La SCI D2JM prétend en vain que M. Sébastien X... aurait déclaré à M. H..., expert, avoir lui-même repeint le plafond du sous-sol en blanc, pour en déduire qu'il a camouflé les traces d'humidité, alors qu'il n'est pas précisé à quelle date ces travaux auraient été réalisés.

Il n'en reste pas moins qu'il résulte de l'expertise de M. J... que la corrosion des poutrelles en sous-face existait au moment de la vente, de même que les décollements de carrelage. Dès lors, la Sarl Sébastien Immobilier étaient tenue d'attirer l'attention de la SCI D2JM sur ces vices apparents.

Par ailleurs, en sa qualité de professionnel, la Sarl Sébastien Immobilier devait, afin d'exercer son devoir de conseil et d'information envers l'acquéreur, se renseigner auprès des vendeurs sur le système d'alimentation en eau de la maison et s'interroger sur la dangerosité ou non de l'installation électrique qu'elle savait ancienne, s'agissant d'un immeuble comportant des logements loués. L'information de l'acquéreur sur le système d'alimentation en eau en l'espèce aurait ainsi permis à celui-ci de savoir que quelques travaux étaient nécessaires afin d'éviter une pollution bactériologique. S'agissant de l'électricité, l'échange de courriels dans lequel la SCI D2JM fait état des travaux à réaliser pour négocier le prix montre qu'elle a sous-estimé cet aspect et qu'aucune information ni conseil n'a été donné par l'agence immobilière sur la non conformité de l'installation électrique, dont l'expert relève qu'elle est dangereuse. Il ressort même du courriel du 28 octobre 2006 que la Sarl Sébastien Immobilier avait d'abord indiqué à la SCI D2JM que les logements avaient des sous compteurs EDF, ce qui est assurément inexact. Même si cette information a été corrigée par la suite (puisque la SCI D2JM a su avant la vente qu'il y avait un compteur pour deux logements), le manquement de l'agence immobilière à son devoir de conseil est établi.

En dehors de l'information erronée sur les sous compteurs, la SCI D2JM n'explique pas en quoi la description du bien ne correspondrait pas au bien vendu.

Ainsi, la responsabilité de la Sarl Sébastien Immobilier doit être retenue pour manquements à son obligation de conseil et d'information s'agissant de l'eau, de l'électricité, de l'étanchéité de la terrasse et des décollements de carrelage, et ce sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

L'indemnisation qui sera accordée à la SCI D2JM sera strictement limitée aux préjudices résultant directement de ces manquements, à savoir:
- 46.047,37 euros au titre de la réfection de la terrasse,
- 1.649,50 euros au titre du système d'alimentation en eau,
- 20.974 euros au titre de l'électricité,
soit un total de 68.670,87 euros tel qu'évalué par l'expert,
outre la somme de 37.630,60 euros dont la SCI justifie au titre de la perte de loyers, ainsi que la somme de 3.000 euros au titre du trouble de jouissance (terrasse inutilisable), les autres préjudices invoqués par l'appelante n'étant pas en lien avec la faute de l'agence immobilière.

Il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de la SCI D2JM au titre de la responsabilité civile de la Sarl Sébastien Immobilier, et de condamner cette dernière à payer ces sommes à titre de dommages-intérêts à la SCI D2JM.

III. Sur l'intervention de la BPALC

Le tribunal a déclaré recevable l'intervention volontaire de la banque mais a omis de statuer sur ses demandes.

A l'appui de sa demande en paiement, la BPALC produit notamment les pièces suivantes:
- l'acte de prêt immobilier,
- le tableau d'amortissement,
- une première mise en demeure du 10 mars 2011 avertissant la SCI D2JM de la déchéance de terme à défaut de régulariser les échéances impayées,
- la lettre de mise en demeure du 26 janvier 2012 avertissant la débitrice de la déchéance du terme à défaut de régularisation des impayés dans les huit jours,
- le décompte de créance au 15 octobre 2012 dont il ressort que la SCI D2JM est redevable de la somme de 701.340,72 euros, se décomposant comme suit:
• 62.748,32 euros au titre des échéances impayées du 10 octobre 2010 au 10 janvier 2012
• 3.448,34 euros au titre des intérêts sur impayés du 10 octobre 2010 au 15 octobre 2012
• 561.978,33 euros au titre du capital restant dû au 10 janvier 2012
• 16.967,90 euros au titre des intérêts sur le capital du 10 janvier 2012 au 15 octobre 2012
• 56.197,83 euros au titre de l'indemnité contractuelle de 10%.

Ces sommes sont conformes aux stipulations contractuelles et au tableau d'amortissement.

La SCI D2JM ne saurait invoquer la faute des époux X... et de la Sarl Sébastien Immobilier pour refuser de payer les intérêts de retard et l'indemnité contractuelle, dont elle seule est tenue envers la BPALC à raison du contrat de prêt.

Il convient dès lors de faire droit à la demande de la BPALC et de condamner la SCI D2JM à lui payer la somme de 701.340,72 euros, avec intérêts au taux contractuel de 3,95% l'an à compter du 16 octobre 2012.

Rien ne justifie de condamner M. et Mme X..., ni même la Sarl Sébastien Immobilier dont la responsabilité a été reconnue, à garantir la SCI D2JM de cette condamnation qui n'est que la conséquence de ses engagements contractuels. Le lien entre la faute de l'agent immobilier et les graves difficultés financières de la SCI n'est pas établi. La demande de la SCI D2JM sera donc rejetée.

IV. Sur la demande de dommages-intérêts de M. et Mme X... pour procédure abusive

Le droit d'agir en justice ne dégénère en abus que s'il est fautif, en cas de mauvaise foi, d'erreur grossière équipollente au dol ou de légèreté blâmable. L'appréciation erronée qu'une partie fait de ses droits n'est pas en soi constitutive d'une faute.

En l'espèce, compte tenu des désordres réels affectant la maison vendue, l'action engagée par la SCI D2JM contre les vendeurs ne saurait être considérée comme abusive, et ce d'autant plus que la responsabilité de l'agence immobilière a été reconnue.

Il convient donc de rejeter la demande de dommages-intérêts des époux X... pour procédure abusive.

V. Sur les demandes accessoires

Compte tenu de la présente décision, il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamner la SCI D2JM aux dépens, et de condamner la Sarl Sébastien Immobilier aux dépens de première instance et d'appel, comprenant tous les frais d'expertise judiciaire, à l'exception des dépens afférents à l'intervention volontaire de la BPALC qui seront mis à la SCI D2JM, avec distraction au profit de l'avocat de la BPALC conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Les frais de constat d'huissier n'ont pas à être inclus dans les dépens et constituent des frais irrépétibles.

L'équité justifie en l'espèce de condamner la Sarl Sébastien Immobilier à payer à la SCI D2JM la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En revanche, il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des autres parties leurs frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement rendu le 31 octobre 2013 par le tribunal de grande instance de Troyes en ce qu'il a rejeté la demande de la SCI D2JM au titre de la responsabilité civile de la Sarl Sébastien Immobilier et condamné la SCI D2JM aux dépens,

Statuant à nouveau sur ces seuls chefs,

CONDAMNE la Sarl Sébastien Immobilier à payer à la SCI D2JM les sommes suivantes, à titre de dommages-intérêts:
- 68.670,87 euros au titre des travaux,
- 37.630,60 euros au titre de la perte de loyers,
- 3.000 euros au titre du trouble de jouissance,

REJETTE le surplus des demandes indemnitaires de la SCI D2JM dirigées contre la Sarl Sébastien Immobilier,

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus,

Y ajoutant,

REJETTE la demande de résolution de la vente formulée par la SCI D2JM,

REJETTE les demandes indemnitaires de la SCI D2JM dirigées contre M. Daniel X... et Mme Chantal C... épouse X...,

CONDAMNE la SCI D2JM à payer à la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne la somme de 701.340,72 euros, avec intérêts au taux contractuel de 3,95% l'an à compter du 16 octobre 2012,

REJETTE la demande de garantie de la SCI D2JM dirigée à l'encontre de M. Daniel X... et Mme Chantal C... épouse X... et de la Sarl Sébastien Immobilier,

REJETTE la demande de dommages-intérêts de M. Daniel X... et Mme Chantal C... épouse X... dirigée contre la SCI D2JM pour procédure abusive,

CONDAMNE la Sarl Sébastien Immobilier à payer à la SCI D2JM la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE les demandes respectives de M. et Mme X... et de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Sarl Sébastien Immobilier aux dépens de première instance et d'appel relatifs à l'action engagée par la SCI D2JM, comprenant tous les frais d'expertise judiciaire,

CONDAMNE la SCI D2JM aux dépens de première instance et d'appel relatifs à l'intervention volontaire de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne,

AUTORISE Me Xavier COLOMES , avocat membre de la SCP COLOMES MATHIEU ZANCHI , à recouvrer directement les dépens dont il aurait fait l'avance, conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Numéro d'arrêt : 13/03155
Date de la décision : 03/07/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-03;13.03155 ?
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