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19/06/2008 | FRANCE | N°06/02727

France | France, Cour d'appel de Reims, 19 juin 2008, 06/02727


R. G : 06 / 02727
ARRET No
du : 19 juin 2008

MJR / EN

Hubert

A...

René

A...

Gérard

A...


C /

Marguerite AQ...

née A...

Etienne

A...

Pierre

A...

Michel

A...


Formule exécutoire le :
à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-SECTION FAMILLE

ARRET DU 19 JUIN 2008



APPELANTS :

Monsieur Hubert A...


...

10130 CHESSY LES PRES
Monsieur René A...


...

10130 CH

ESSY LES PRES
Monsieur Gérard A...


...

10210 CHESLEY

COMPARANT, concluant par la S. C. P. SIX-GUILLAUME-SIX avoués à la Cour, et ayant pour conseil Maître Claude COUTURIER, Avocat au barreau de TROYES

Appelants d'une décision rend...

R. G : 06 / 02727
ARRET No
du : 19 juin 2008

MJR / EN

Hubert

A...

René

A...

Gérard

A...

C /

Marguerite AQ...

née A...

Etienne

A...

Pierre

A...

Michel

A...

Formule exécutoire le :
à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-SECTION FAMILLE

ARRET DU 19 JUIN 2008

APPELANTS :

Monsieur Hubert A...

...

10130 CHESSY LES PRES
Monsieur René A...

...

10130 CHESSY LES PRES
Monsieur Gérard A...

...

10210 CHESLEY

COMPARANT, concluant par la S. C. P. SIX-GUILLAUME-SIX avoués à la Cour, et ayant pour conseil Maître Claude COUTURIER, Avocat au barreau de TROYES

Appelants d'une décision rendue par le Tribunal de Grande Instance de TROYES le 30 Août 2006

INTIMES :

Madame Marguerite AQ... née A...

...

10210 VALLIERES
Monsieur Etienne A...

...

89570 BEUGNON
Monsieur Pierre A...

...

83440 MONTAUROUX

Comparant, concluant par la SCP DELVINCOURT-JACQUEMET-CAULIER-RICHARD, avoués à la Cour, et ayant pour conseil Maître Thierry CHIRON, avocat au barreau de DIJON.

Monsieur Michel A...

...

10130 CHESSY LES PRES

Comparant, concluant par la S. C. P. THOMA LE RUNIGO DELAVEAU GAUDEAUX, avoués à la Cour, et ayant pour conseil Maître François GEORGE, avocat au barreau de TROYES.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame ROUVIERE Marie-Josèphe, CONSEILLER faisant fonction de Président de Chambre en l'absence du titulaire régulièrement empêché, désignée par ordonnance du Premier Président en date du 9 Janvier 2008
Madame LEFEVRE Anne : CONSEILLER
Madame ROBERT Christine : CONSEILLER

GREFFIER D'AUDIENCE :

Madame Jacqueline BALDI, Greffier lors des débats et du prononcé.

DÉBATS :

A l'audience publique du 04 Avril 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 29 Mai 2008, prorogé au 19 Juin 2008, sans opposition de la part des conseils des parties et en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, Madame ROUVIERE a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la Cour dans son délibéré,

ARRET :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Marie-Josèphe ROUVIERE, Conseiller, et par Madame Jacqueline BALDI, Greffier, auquel la minute de la décision lui a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu l'appel formé par Messieurs Hubert, René et Gérard A... à l'encontre d'un jugement rendu le 30 août 2006 par le Tribunal de Grande Instance de TROYES qui a notamment :

- Débouté Monsieur Gérard A... de sa demande en nullité du testament partage du 17 mars 1993,

- Dit que Messieurs Hubert, René et Gérard A... sont privés de tout droit sur la quotité disponible de la succession de Madame Charlotte X... Veuve A..., laquelle quotité disponible sera partagée uniquement entre Madame Marguerite AQ... née A..., Messieurs Etienne A..., Pierre A... et Michel A...,

- Dit n'y avoir lieu d'appliquer la prescription quinquennale aux fermages restant dus par Messieurs Hubert, René, Michel et Gérard A...,

- Dit que sont dus à l'indivision successorales les sommes suivantes à titre de fermages par :

* Hubert A..., la somme de 11. 126, 95 €
* René A..., la somme de 11. 748, 94 €
* Michel A..., la somme de 27. 620, 70 €
* Gérard A..., la somme de 31. 940, 66 €,

- Dit que Monsieur Hubert A... est bénéficiaire d'une créance de salaire différé s'élevant à 3. 293, 33 fois le taux du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur au jour du partage,

- Dit que Monsieur René A... est bénéficiaire d'une créance de salaire différé s'élevant à 7. 768, 82 fois le taux du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur au jour du partage,

- Dit que Madame Marguerite A... est bénéficiaire d'une créance de salaire différé s'élevant à 8. 541, 93 fois le taux du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur au jour du partage,

- Dit que Monsieur Michel A... est bénéficiaire d'une créance de salaire différé s'élevant à 6. 893, 76 fois le taux du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur au jour du partage,

- Dit que Monsieur Gérard A... est bénéficiaire d'une créance de salaire différé s'élevant à 3. 031, 04 fois le taux du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur au jour du partage,

- Débouté Messieurs Hubert et René A... de leur demande en paiement de soultes à la charge de la succession,

- Débouté Messieurs Hubert, René et Gérard A... de leur demande aux fins de rapport à la succession de meubles et bijoux,

- Débouté Messieurs Hubert, René et Gérard A... de leur demande aux fins d'évaluation des immeubles, objets de la donation-partage du 8 septembre 1978,

- Débouté Messieurs Hubert, René et Gérard A... de leur demande aux fins d'évaluation des disponibilités et titres indivis,

- Ordonné un complément d'expertise confié à Maître Pierre MEUNIER, demeurant à BAR-SUR-AUBE (10200), 33 rue d'Aube, lequel a pour mission de procéder à une actualisation de l'évaluation des immeubles indivis, à savoir :

* une maison sise à AUXON (AUBE), 124 rue Montpogat,
* une maison sise à AUXON (AUBE), 136 rue Montpogat,
* une grange sise à AUXON (AUBE), cadastrée B 1273,
* une maison sise à CHESSY-LES-PRES (AUBE), route de Chaource,
* une maison sise à BERNON (AUBE), 2 route de Vanlay,
* un appartement sis à TROYES (AUBE), 18 rue Lachat,
* une propriété de bois et étangs à SAINT-PHAL, au lieudit " L'étang du Perchois ", cadastrée E 206, 207, 208, 209, 233, 235, 236, 237, 242, 250, 262 et 263,

- Dit que Messieurs Hubert, René et Gérard A... doivent payer in solidum, sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile :

* à Madame Marguerite AQ... née A..., la somme de 1. 000 €,
* à Monsieur Etienne A..., la somme de 1. 000 €,
* à Monsieur Pierre A..., la somme de 1. 000 €,
* à Monsieur Michel A..., la somme de 1. 500 €,

- Débouté Messieurs Hubert, René et Gérard A... de leurs demandes fondées sur l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur Marcel A... et Madame Charlotte X..., son épouse, sont décédés respectivement les 20 janvier 1989 et 31 décembre 1995, laissant pour leur succéder leurs sept enfants :

- Hubert, René, Marguerite, Etienne, Pierre, Michel et Gérard.

Les époux A... ont effectué une donation à titre de partage anticipé de la nue-propriété de divers immeubles, selon acte authentique reçu par Maître BATAILLE, Notaire, le 8 septembre 1978.

Le 27 septembre 1991, Madame Charlotte X... Veuve A... a consenti une donation de biens mobiliers à son fils Michel.

Le 17 mars 1993, elle a dicté à son Notaire, Maître FRESNAIS, un testament opérant partage des biens entre ses sept enfants avec la mention suivante :

" Je déclare expressément privés de la quotité disponible de ma succession celui ou ceux de mes enfants qui viendraient à attaquer le présent testament ou faire effectuer la vente forcée des biens immobiliers ".

Cet acte prévoyait l'attribution de différents immeubles à chacun des héritiers, outre l'acquittement de l'intégralité des fermages restant dus à la défunte et ce, avant tout partage.

Selon exploits des 22 et 27 avril 1998, Madame Marguerite AQ... née A..., ainsi que Messieurs Etienne, Pierre et Michel A... ont assigné leurs trois frères, Hubert, René et Gérard devant le Tribunal de Grande Instance de TROYES en ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des successions confondues de leurs parents, avec désignation à cette fin de Maître FRESNAIS, conformément au souhait de la défunte.

Ils demandaient également à ce que le partage des immeubles intervienne au vu du testament du 17 mars 1993, tout opposant devant être privé de la quotité disponible.

Ils réclamaient enfin la désignation d'un expert avec pour mission de déterminer la valeur des immeubles composant l'actif de succession, de dresser le compte des fermages et intérêts restant dus par les héritiers pour qu'une réintégration puisse être opérée, et d'établir sept lots de mobilier d'égale valeur à partir de l'inventaire chiffré du 2 avril 1996 de Maître BOISSEAU, Commissaire Priseur, en vue de leur tirage au sort.

Messieurs Hubert, René et Gérard A... s'associaient à la demande d'ouverture des opérations successorales, ainsi qu'à l'organisation d'une expertise, tout en précisant que celle-ci devait aussi porter sur le calcul des soultes dues pour assurer l'égalité entre les héritiers et que les modalités du partage ne pourraient être mises en oeuvre que lorsque la mesure d'investigation aurait été réalisée.

Ils ajoutaient que la demande de privation de la quotité disponible apparaissait sans objet, dans la mesure où il n'existait pas en l'état de contestant, et que s'agissant des fermages, il y avait lieu de tenir compte des prescriptions quinquennales.

Par jugement rendu le 6 octobre 1999, le Tribunal de Grande Instance de TROYES a ordonné l'ouverture des opérations de partage en les confiant à Maître FRESNAIS, Notaire à ERVY-LE-CHATEL (AUBE) et désigné Monsieur Pierre MEUNIER en qualité d'expert, avec pour mission d'évaluer les immeubles à partager, de calculer les soultes pour réaliser l'égalité, d'établir le montant des créances de fermage et intérêts dus par les héritiers aux fins de les réintégrer dans l'actif de succession et d'établir sept lots de mobilier d'égale valeur à partir de l'inventaire de Maître BOISSEAU du 2 avril 1996.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 28 octobre 2002 se bornant à l'évaluation des immeubles et à l'établissement des créances de fermage, aucun accord n'ayant pu être trouvé sur la validité du testament-partage du 17 mars 1993 entre les parties.

Madame Marguerite A... et Messieurs Etienne et Pierre A... ont conclu à l'homologation du rapport d'expertise concernant l'évaluation des immeubles et le décompte des fermages, sous réserve d'une actualisation.

Ils ont demandé que le partage soit effectué conformément au testament-partage du 17 mars 1993 et que Messieurs Hubert, René et Gérard A... soient privés de la quotité disponible.

Madame Marguerite A... a réclamé un salaire différé pour la période du 3 août 1954 au 30 septembre 1960, soit une créance de 67. 663, 79 € et elle a justifié du paiement de la soulte à sa charge, en exécution de la donation-partage du 8 septembre 1978.

Ils se sont opposés à une reprise des opérations d'expertise, le notaire liquidateur pouvant actualiser les évaluations immobilières et se procurer les informations nécessaires auprès des organismes bancaires.

Ils ont demandé un renvoi devant le notaire liquidateur, Maître FRESNAIS et la désignation de Maître DE VREESE, Notaire, pour le seconder ainsi que la condamnation solidaire de Messieurs Hubert, René et Gérard A... à leur payer 2. 000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Monsieur Michel A... a demandé que le partage soit établi conformément au testament partage du 17 mars 1993 et de lotir Messieurs Hubert, René et Gérard A... dans la limite de leur réserve.

Monsieur Michel A... a réclamé comme ses frères et soeur un salaire différé de 54. 961, 40 € pour la période du 1er avril au 1er novembre 1965, date de son incorporation au Service National et du 1er mars 1967 au 20 juillet 1971, créance à compenser avec les fermages dus par Monsieur Michel A... à la succession.

Il a également précisé que si la prescription quinquennale n'était pas incompatible avec l'acte du 17 mars 1993 et uniquement dans ce cas, de l'appliquer à sa dette de fermage.

Il s'est opposé à un complément d'expertise et a réclamé 1. 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Monsieur Gérard A... a conclu à la nullité du testament-partage avec toutes conséquences de droit tandis que Messieurs Hubert et René A... s'en sont rapportés à prudence de justice sur la validité de cet acte.

Messieurs Gérard, Hubert et René A... ont conclu à la prescription quinquennale des fermages dus par les différents héritiers à la succession et ils ont demandé le retour des parties devant l'expert judiciaire pour qu'il finisse sa mission initiale.

Ils ne se sont pas opposés aux prétentions des demandeurs au titre des créances de salaire différé et ils ont réclamé à leur tour un salaire différé :

- Monsieur Hubert A... : 25. 056, 23 €
- Monsieur René A... : 59. 062, 84 €
- Monsieur Gérard A... : 23. 008, 36 €.

Ils ont également demandé le rapport à la succession des bijoux et des meubles et une indemnité de 2. 500 € en compensation de leurs frais irrépétibles.

C'est dans ces circonstances qu'a été rendu le jugement dont Messieurs Hubert, René et Gérard A... ont relevé appel principal et Madame Marguerite AQ... née A... et Messieurs Etienne et Pierre A... appel incident.

Vu les conclusions récapitulatives de Messieurs Hubert, René et Gérard A... du 18 mars 2008 et les conclusions de :

* Madame Marguerite AQ... née A... et de Messieurs Etienne et Pierre A... du 29 mai 2007,

* Monsieur Michel A... du 30 octobre 2007 ;

Vu l'ordonnance de clôture du 4 avril 2008 ;

SUR CE

Attendu que les appelants principaux ont adressé le 15 avril 2008 une note en délibéré que les appelants incidents ont demandé d'écarter des débats en application de l'article 445 du Code de Procédure Civile ;

Attendu qu'en application de cet article et des articles 442 et 444 du Code de Procédure Civile il y a lieu d'écarter cette note, non demandée, des débats ;

Sur la validité du testament-partage

Attendu que seul Monsieur Gérard A... a conclu expressément à la nullité de ce testament, Messieurs René et Hubert A... s'en étant rapportés sur sa validité ou non ;

Attendu que tous 3 avaient le même avocat devant le Tribunal et ont le même avoué devant la Cour ce qui implique qu'ils n'ont pas d'intérêt contraire ;

Attendu que tel est le cas puisque le fait pour une partie de s'en rapporter à justice sur le mérite d'une demande implique non un acquiescement à cette demande mais la contestation de celle-ci ;

Attendu que Monsieur Gérard A... prétend que le testament-partage établi le 17 mars 1993 par sa mère serait nul en ce qu'il porterait sur des biens communs, dont elle n'avait, par conséquent, pas la libre disposition ;

Attendu que le Tribunal a fait une exacte application du droit aux faits de la cause et que c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte qu'il a jugé que :

- Monsieur Marcel A... étant déjà décédé à l'époque du testament-partage, la communauté qui avait existé du vivant des époux A...- X... s'était trouvée dissoute par son décès et, son partage n'ayant pas encore été effectué, les biens autrefois communs étaient alors indivis entre Madame Veuve A... et ses enfants,

- Il s'ensuit que l'article 1423 du Code Civil, qui ne concerne que les legs faits par un époux et portant sur des biens communs, est étranger à la question de la validité du testament-partage,

- Cependant, force est de constater qu'en disposant de biens indivis immobiliers, puisque dépendant de l'indivision post-communautaire, Madame Veuve A... a étendu l'assiette du partage auquel elle prétendait procéder à des biens dont elle n'avait pas personnellement la toute propriété et la libre disposition, puisque celles-ci étaient partagées entre elle et ses enfants. Mais ce faisant, elle ne disposait pas de la chose d'autrui, au sens de l'article 1021 du Code Civil, puisqu'il s'agissait de biens indivis entre elle et ses enfants, au bénéfice desquels elle prenait ces dispositions testamentaires, et il lui était loisible d'imposer à ses enfants, pour éviter d'éventuels désaccords entre eux sur le partage en nature des immeubles ou la possibilité que, par suite de leur vente par licitation, ces biens ne restent pas dans la famille, une répartition à la fois équitable et conforme à ce qu'elle pouvait penser être le souhait de chacun,

- Il s'ensuit que le testament-partage du 17 mars 1993, loin d'être entaché de nullité, est tout à fait valable et doit être exécuté conformément à la volonté de la testatrice ;

Sur la prescription quinquennale des fermages

Attendu que le testament-partage du 17 mars 1993 comporte la disposition suivante :
" les fermages restant dus depuis l'origine par mes fils Hubert-François, René, Michel, Gérard A... et par ma fille Marguerite AQ... née A... devront être intégralement réglés avant tout partage de mes biens afin de permettre une répartition juste et égale entre tous mes enfants " ;

Attendu que Messieurs Hubert, René et Gérard A... ont conclu devant le Tribunal à la nullité de cette disposition, en ce qu'elle a fait échec à la prescription quinquennale de l'article 2277 du Code Civil applicable aux loyers et fermages et que l'article 2220 interdit de renoncer d'avance à la prescription ;

Attendu que devant la Cour, seul Monsieur Gérard A... soulève la prescription sans que pour autant Messieurs Hubert et René A... concluent à la confirmation du jugement sur les dispositions de ce chef ;

Attendu qu'en application de l'article 2220 du Code Civil, on ne peut renoncer d'avance à une prescription ;

Attendu que la renonciation interdite par l'article 2220 du Code Civil est celle du débiteur à la prescription qui lui est favorable ;

Attendu qu'en l'espèce c'est le créancier qui précise qu'il n'entend pas laisser jouer la prescription, donc qu'il n'abandonne pas ses droits ce qui s'analyse comme la signification d'une volonté d'interrompre la prescription ;

Attendu que c'est donc à bon droit que le Tribunal a jugé que l'article 2220 du Code Civil n'interdit pas au créancier de fermages de prévoir, par une disposition de testament-partage, que les fermages, dont ne s'est pas acquitté son fils ou sa fille en temps voulu, soient imputés sur sa part héréditaire, disposition animée expressément d'une volonté d'égalité entre les enfants, qui n'est affectée d'aucune cause de nullité et doit être exécutée conformément à la volonté de la testatrice ;

Sur la clause pénale

Attendu qu'il est constant que Monsieur Gérard A... a contesté et conteste le testament-partage du 17 mars 1993 ;

Attendu que pour les motifs précédemment exposés à titre liminaire sur une éventuelle contrariété d'intérêts entre lui et Messieurs René et Hubert A..., ces derniers contestent également le testament-partage et ce d'autant qu'ils ont conclu en outre en 1ère instance à la prescription des fermages et n'ont pas demandé en appel la confirmation du jugement sur les dispositions de ce chef ;

Attendu enfin que tous trois contestent donc la validité de la clause pénale insérée au testament-partage au motif essentiel de la nullité de ce testament ;

Attendu que le testament-partage étant jugé valide la clause pénale qui en fait partie l'est également ;

Attendu que la tentative maladroite de Messieurs René et Hubert A... de se démarquer en appel de Monsieur Gérard A... sur la prescription quinquennale des fermages sans aller au bout du raisonnement, ne donne que plus de force et de pertinence au motif du Tribunal que la Cour adopte selon lequel ils n'adoptent qu'une démarcation de façade, destinée uniquement à profiter d'une annulation qu'ils souhaitent en réalité tout en tentant d'éviter la sanction encourue du fait de l'application de la clause pénale, ce qui démontre une entente entre eux trois pour réduire les risques d'une application de cette clause ;

Attendu en conséquence que c'est à bon droit que le Tribunal a jugé que tous trois doivent être privés de la quotité disponible conformément à la volonté de leur mère ;

Sur le règlement des soultes

Attendu que Messieurs René et Hubert A... reprennent leurs demandes de paiement des soultes mises à la charge de Monsieur Michel A... et de Madame Marguerite AQ... née A..., en exécution de la donation partage du 8 septembre 1978 ;

Attendu qu'il est clairement stipulé à l'acte du 8 septembre 1978, relativement auxdites soultes (page 63) :
" Lesquelles soultes ont été payées comptant, savoir :
Par Madame AQ..., en dehors de la comptabilité du notaire soussigné, à Monsieur René A... qui le reconnaît et lui en consent quittance,
Par Monsieur Michel A..., en dehors de la comptabilité du notaire soussigné, à Messieurs Etienne et Hubert A... qui le reconnaissent et lui en consentent quittance. " ;

Attendu que le Tribunal a fait une exacte application du droit en jugeant que ces soultes ayant été quittancées dans l'acte authentique lui-même, il convient de rejeter les demandes formées pour leur paiement ;

Attendu en effet que cet acte précise que les soultes ont bien été versées à Monsieur René A... et à Monsieur Hubert A..., outre à Monsieur Etienne A... qui lui ne le conteste pas ;

Sur les évaluations et le rapport des meubles et bijoux

Attendu qu'il n'y a pas de contestation sur l'actualisation des évaluations immobilières ;

Attendu que conformément à ce qu'a jugé le Tribunal, l'évaluation des actifs successoraux, disponibilités et titres en banques ne nécessite pas le recours à une expertise mais relève de la mission du notaire liquidateur ;

Attendu s'agissant de la donation-partage de 1978 que le Tribunal a fait une exacte application du droit en jugeant que :

- Aux termes de l'article 1078 du Code Civil, applicable aux donations-partages, " nonobstant les règles applicables aux donations entre vifs, les biens donnés seront, sauf convention contraire, évalués au jour de la donation-partage pour l'imputation et le calcul de la réserve, à condition que tous les enfants vivants ou représentés au décès de l'ascendant aient reçu un lot dans le partage anticipé et l'aient expressément accepté, et qu'il n'ait pas été prévu de réserve d'usufruit portant sur une somme d'argent " ;

- La donation-partage du 8 septembre 1978 qui gratifie tous les enfants des donateurs, ne comprend une réserve d'usufruit que sur les immeubles donnés et non sur une somme d'argent, et ne comporte aucune stipulation écartant l'application de l'article 1078 ;

- Il en résulte que, pour l'évaluation de la quotité disponible, les biens objets de cette donation-partage doivent être évalués selon les valeurs retenues dans l'acte, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de recourir à une expertise pour une nouvelle évaluation, ainsi que le demandent Messieurs Hubert, René et Gérard A... ;

Attendu s'agissant de la demande de Messieurs Hubert, René et Gérard A... de rapport à la succession de meubles et bijoux, que pas plus devant la Cour, que devant le Tribunal, ils ne précisent contre qui cette demande est formulée, ni même exactement de quels meubles il s'agit, étant observé que selon les autres parties, les bijoux sont chez Maître FRESNAIS, notaire et que les meubles qui ont fait l'objet d'une évaluation par commissaire-priseur, sont entreposés chez Monsieur Michel A... ;

Attendu que le jugement sera donc confirmé sur le rejet de la demande de rapport à succession ;

Sur la désignation du notaire-liquidateur

Attendu que Madame Marguerite AQ... née A..., Messieurs Etienne et Pierre A... reprennent leur demande de remplacement de Maître FRESNAIS, notaire désigné par jugement du 6 octobre 1999 pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage, subsidiairement d'adjonction de Maître J. M. DE VREESE, notaire à ESSOYES ;

Attendu que du fait de l'expertise confiée à Maître MEUNIER, puis de la procédure, la mission de Maître FRESNAIS n'avait pu effectivement commencer ;

Attendu toutefois que le jugement dont appel était assorti de l'exécution provisoire qu'il résulte certes de la pièce 33 produite par les appelants incidents que faute de consignation, la désignation de Maître MEUNIER en qualité d'expert est devenue caduque au 17 novembre 2006, qu'il n'en demeure pas moins que Maître FRESNAIS n'apparaît pas avoir répondu aux différents courriers que lui a adressés le Juge commissaire au Tribunal de Grande Instance de TROYES : 5 depuis le jugement dont appel (pièces 37 à 41) ;

Attendu que cette absence de réponse justifie de désigner Maître DE VREESE pour procéder avec Maître FRESNAIS, notaire désigné par la mère des parties aux opérations de compte liquidation et partage ;

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Attendu que les appelants principaux qui succombent sur leur appel supporteront les dépens d'appel, qu'ils ne peuvent donc prétendre à une indemnité pour frais irrépétibles ;

Attendu qu'il serait particulièrement inéquitable de laisser supporter aux intimés leurs frais irrépétibles, qu'il sera fait droit à leurs demandes fondées sur l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Attendu qu'aucune critique n'est formulée sur les dispositions du jugement concernant les salaires différés ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement ;

Déclare les appels, principal et incident, recevables ;

Rejette des débats la note en délibéré du 15 avril 2008 ;

Infirme dans la mesure utile le jugement rendu le 30 août 2006 par le Tribunal de Grande Instance de TROYES ;

Statuant à nouveau ;

Désigne Maître Jean-Michel DE VREESE, Notaire à ESSOYES, pour procéder aux côtés de Maître FRESNAIS aux opérations de compte liquidation et partage ;

Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions, compris sur les dépens ;

y ajoutant,

Condamne Messieurs Hubert, René et Gérard A... à payer en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile :

-1. 500 € (MILLE CINQ CENTS EUROS) à Madame Marguerite AQ... née A..., Messieurs Etienne et Pierre A...,

-1. 500 € (MILLE CINQ CENTS EUROS) à Monsieur Michel A... ;

Les déboute de leur demande fondée sur ce même article ;

Les condamne en outre aux dépens d'appel avec possibilité de recouvrement direct au profit des S. C. P. DELVINCOURT-JACQUEMET-CAULIER-RICHARD et THOMA LE RUNIGO DELAVEAU GAUDEAUX conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER, LE CONSEILLER,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Numéro d'arrêt : 06/02727
Date de la décision : 19/06/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Troyes


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-06-19;06.02727 ?
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